Prise en charge des malformations vasculaires de la région parotidienne

Prise en charge des malformations vasculaires de la région parotidienne

Annales françaises d’oto-rhino-laryngologie et de pathologie cervico-faciale (2013) 130, 60—65 Disponible en ligne sur www.sciencedirect.com ARTICL...

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Annales françaises d’oto-rhino-laryngologie et de pathologie cervico-faciale (2013) 130, 60—65

Disponible en ligne sur

www.sciencedirect.com

ARTICLE ORIGINAL

Prise en charge des malformations vasculaires de la région parotidienne夽 M. Achache a, N. Fakhry a,∗, A. Varoquaux b, B. Coulibaly c, J. Michel a, A. Lagier a, F. Antonini a, F. Turner a, P. Dessi a, A. Giovanni a a

Service ORL et chirurgie cervico-faciale, CHU de la Timone, AP—HM, 264, rue Saint-Pierre, 13385 Marseille cedex 05, France Service d’imagerie médicale, CHU de la Timone, AP—HM, 264, rue Saint-Pierre, 13385 Marseille cedex 05, France c Service d’anatomopathologie, CHU de la Timone, AP—HM, 264, rue Saint-Pierre, 13385 Marseille cedex 05, France b

MOTS CLÉS Tumeur parotidienne ; Glandes salivaires ; Parotidectomie ; Classification de l’ISSVA

Résumé Objectifs. — Rapporter notre expérience sur une période de dix ans et réaliser une mise au point sur la prise en charge des malformations vasculaires de la région parotidienne. Patients et méthodes. — Il s’agissait d’une étude rétrospective. Parmi les 614 parotidectomies réalisées entre 1998 et 2008 dans notre institution, dix cas (1,6 %) de malformations vasculaires ont été identifiés. Les caractéristiques cliniques et la prise en charge de ces patients ont été analysées. Résultats. — La présentation clinique était habituellement apparentée à celle d’une tumeur bénigne, d’évolution lente et asymptomatique. Il existait une nette prédominance féminine (90 %). Dans aucun cas, le diagnostic de malformation vasculaire n’a pu être obtenu de fac ¸on certaine en préopératoire. Le traitement chirurgical a été réalisé le plus souvent à visée diagnostique. Soixante pour cent des malformations vasculaires étaient situées dans le lobe superficiel de la glande parotide. Sur le plan histologique on retrouvait un aspect classique de prolifération vasculaire bénigne avec des cellules endothéliales au niveau des parois. La lumière des vaisseaux était soit le siège d’une congestion soit de thromboses soit de calcifications (phlébolithes). Conclusion. — Les malformations vasculaires de la parotide, pathologie rare, sont principalement veineuses. La terminologie se base sur des données cliniques, évolutives, histologiques et hémodynamiques selon la classification de l’International Society Of Study Of Vascular Anomaly (ISSVA). Malgré les progrès de l’imagerie et notamment de l’IRM elles restent de diagnostic difficile. Le traitement de référence est la chirurgie. © 2012 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.

DOI de l’article original : http://dx.doi.org/10.1016/j.anorl.2011.11.004. Ne pas utiliser pour citation la référence franc ¸aise de cet article mais celle de l’article original paru dans European Annals of Otorhinolaryngology Head and Neck Diseases en utilisant le DOI ci-dessus. ∗ Auteur correspondant. Adresse e-mail : [email protected] (N. Fakhry). 夽

1879-7261/$ – see front matter © 2012 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. http://dx.doi.org/10.1016/j.aforl.2012.11.003

Prise en charge des malformations vasculaires de la région parotidienne

Introduction Les anomalies vasculaires (défauts localisés de l’angiogénèse) constituent probablement une des entités cliniques les moins bien connues de ce début du xxie siècle. La raison en est simple : aucun modèle animal n’est disponible pour étudier leur pathogénie et développer des modèles thérapeutiques. De plus l’utilisation d’une terminologie confuse a généré des diagnostics inadéquats, des traitements inadaptés et des recherches mal orientées. L’angiome est encore utilisé comme terme générique et non discriminatoire pour décrire les tumeurs et les malformations vasculaires. Il faut se référer à la classification de l’International Society Of Study Of Vascular Anomaly (ISSVA), dixième Workshop, Rome 1996. Cette classification est basée sur des données cliniques, évolutives, histologiques et hémodynamiques [1]. On distingue deux grands groupes de tumeurs et malformations vasculaires, d’une part, les tumeurs comme les hémangiomes du nourrisson dits « immatures », qui vont après une période de croissance régresser spontanément et, d’autre part, les malformations vasculaires dites « matures » car elles ne régressent pas et vont évoluer tout au long de la vie. Ces malformations vasculaires sont classées selon le type de vaisseau concerné : on distingue ainsi les malformations capillaires, veineuses, lymphatiques et artério-veineuses. Toutefois il peut exister des formes combinées, comme par exemple les malformations veinolymphatique ou artérioveinolymphatique. Ce sont les malformations vasculaires qui nous intéressent ici. Les malformations vasculaires de la parotide sont très rares et représentent une entité spécifique dans la pathologie parotidienne de par leur diagnostic et prise en charge. Une cinquantaine de cas (principalement veineux) a été décrite dans la littérature [2] et la plupart des observations sont rapportées sous forme de cas cliniques. Le but de cet article est de rapporter notre expérience sur une période de dix ans afin de clarifier le diagnostic et la prise en charge de ces malformations vasculaires.

Patients et méthodes Les dossiers médicaux de tous les patients adultes ayant été opérés d’une parotidectomie dans notre institution (attention le texte doit rester anonyme) entre 1998 et 2008 ont été étudiés. Ainsi, sur les 614 parotidectomies réalisées durant cette période de dix ans, dix cas de malformations vasculaires ont été identifiés. Parmi ces dix cas, une malformation artério-veineuse et neuf malformations veineuses ont été identifiées. L’âge, le sexe, les signes fonctionnels et cliniques, la procédure diagnostique, les caractéristiques histologiques et le devenir des patients ont été analysés. Des analyses statistiques descriptives ont ainsi été réalisées.

Résultats Sur les 614 patients, 462 (75 %) avaient des tumeurs bénignes et 152 (25 %) avaient des tumeurs malignes. Les malformations vasculaires représentaient donc 1,6 % de l’ensemble

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des tumeurs parotidiennes et 2,1 % des tumeurs bénignes dans notre série.

Âge et sexe Notre cohorte était constituée de dix patients présentant un âge médian de 42 ans (19—54 ans). La prédominance féminine est effective avec un ratio de 9:1. Aucune prédisposition particulière (génétique, hormonale. . .) n’a été retrouvée chez ces patients. Ces prédispositions n’avaient cependant pas été systématiquement recherchées à l’interrogatoire. Par ailleurs, aucune autre malformation vasculaire extra parotidienne n’était associée.

Localisation tumorale Il n’existait pas de latéralité élective (six cas localisés à droite et quatre à gauche), ni d’atteinte bilatérale dans notre série. En revanche, 60 % des malformations vasculaires (six cas sur dix) étaient situées dans le lobe superficiel de la glande parotide, 20 % (deux cas) dans le lobe profond avec une extension parapharyngée et 20 % (deux cas) dans le muscle massétérien.

Présentation clinique et approche diagnostique Dans notre série les circonstances de découverte sont étaient diverses ; 50 % (cinq cas) étaient de découverte fortuite par l’autopalpation (asymptomatique) dont un cas lors du suivi après chirurgie d’un cholestéatome controlatéral, 50 % se sont manifestés par l’apparition de signes fonctionnels (deux cas avec des douleurs, un cas de dyspnée, un cas de fistulisation à la peau et un cas de dysphagie avec un bombement de l’hémivoile). La présentation clinique était habituellement apparentée à celle d’une tumeur bénigne : croissance lente, non indurée, mobile, sans paralysie faciale préopératoire, sans infiltration de la peau, et sans adénopathies cervicales à la palpation. Cependant, l’un des patients (10 %) présentait une tumeur indurée avec infiltration de la peau, des tissus mous et fistulisation. Tous les patients ont bénéficié d’une IRM en préopératoire. Mais le diagnostic initial de tumeur parotidienne a été porté par une échographie chez deux patients et par un TDM avec injection chez trois autres patients. Aucune technique d’imagerie en préopératoire n’a permis de retenir avec certitude le diagnostic de malformation vasculaire. En effet, les données de l’imagerie ont évoqué le diagnostic de tumeur mixte dans 30 % des cas, de cystadénolymphome dans 20 % des cas, de tumeur de nature indéterminée dans 40 % des cas et de sarcome ou de neurinome dans 10 % des cas. En ce qui concerne l’aspect à l’IRM, il existait dans 100 % des cas une prise de contraste au gadolinium et un hypersignal T2. Les contours sont étaient irréguliers en T2 chez 30 % des patients. Un hypersignal T2 corrélé avec un hypersignal T1 est était retrouvé dans 40 % des cas de notre série. Les 60 % restants étaient en hyposignal T1 et hypersignal T2 (Fig. 1). Une cytoponction a été réalisée chez trois patients et elle s’est révélée non contributive dans l’ensemble des cas.

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M. Achache et al.

Figure 1 IRM en pondération T2 (A), T1 axiales (B), T1 axiales gadolinium (C), T1 Fat Sat coronales gadolinium (D), scanner sans injection en fenêtre parenchymateuse (E) et fenêtre osseuse (F). Présence d’une lésion tissulaire (A, B, C, D, E, F, flèches), de l’espace parapharyngé préstylien, située dans le prolongement parotidien, refoulant en avant le muscle ptérygoïdien latéral, refoulant en arrière le rideau stylien. Cette formation est en hypersignal T2 (A), hyposignal T1 (B), rehaussée progressivement en motte (C, D). Cette formation est finement calcifiée au scanner (E, F).

Traitement Le diagnostic de malformation vasculaire n’a jamais pu être confirmé en préopératoire par l’imagerie ni la cytoponction dans la série des dix patients même si il faisait partie des hypothèses diagnostiques. Le délai entre la prise en charge chirurgicale et le premier symptôme était en moyenne de 38,4 mois (un à 84 mois). La décision de traitement chirurgical a été prise en fonction de la présentation clinique (un cas de dyspnée, deux avec douleurs, un avec fistulisation et un cas de dysphagie) ou de l’évaluation diagnostique préopératoire qui ne tranchait pas en faveur d’une malformation vasculaire. Dans notre série, la technique chirurgicale a consisté dans 50 % des cas en une parotidectomie exofaciale (n = 5), dans 40 % des cas en une parotidectomie totale (n = 4) et dans 10 % des cas (n = 1) en une énucléation. La découverte et la dissection antérograde du nerf facial a été faite dans tous les cas. Le nerf facial a été préservé à chaque fois. La résection complète de la tumeur a été possible dans 90 % (n = 9). Un patient n’a bénéficié que d’une résection partielle en raison d’un risque trop important de lésion du nerf facial ; une embolisation en radiologie interventionnelle à distance de la chirurgie a permis de compléter le traitement avec succès. En dehors de ce patient, aucune difficulté technique (saignement abondant, dissection difficile du nerf facial. . .) n’a été spécifiée dans les différents comptes rendus opératoires.

La durée moyenne d’hospitalisation était de cinq jours (trois à 17 jours) et la durée moyenne de suivi de trois ans (neuf mois à dix ans). Des complications transitoires postopératoires sont survenues chez deux des dix patients (20 %). Un patient a présenté une parésie de la branche frontale ainsi qu’un syndrome de Frey avec une disparition complète des symptômes au bout de six mois. Un autre patient a présenté une parésie faciale (rameau mandibulaire) résolutive à trois mois ; il s’agissait d’une reprise de chirurgie effectuée 20 ans auparavant (dans un autre centre). Enfin, un des patients a présenté une récidive (10 %) ; cela concernait une tumeur du lobe profond de la parotide avec prolongement parapharyngé et fistulisation ayant récidivée dans un délai de trois ans et ayant nécessitée une embolisation préopératoire suivie d’une reprise chirurgicale avec sacrifice du nerf facial et reconstruction par un lambeau pédiculé de grand dorsal. Il s’agissait d’une tumeur très volumineuse avec de même une récidive très volumineuse.

Caractéristiques histologiques La longueur moyenne des tumeurs était de 40 mm (5—90 mm) et la largeur moyenne était de 20 mm (7—50 mm). Un examen extemporané a été effectué dans l’ensemble des dix cas et était en faveur d’une malformation vasculaire dans six cas. Dans les quatre autres cas, le diagnostic a été fait à l’examen définitif de la pièce opératoire.

Prise en charge des malformations vasculaires de la région parotidienne

Figure 2 Présence d’une prolifération vasculaire à paroi muscularisée et dont la lumière est thrombosée (*), coloration Hématoxyline Phloxine Safran, × 20.

Figure 3 Présence d’une malformation artério-veineuse. La paroi artérielle est épaisse et comporte une limitante élastique (*) et les structures veineuses sont de petite taille (flèche), coloration Hématoxyline Phloxine Safran, × 10.

L’analyse histologique retrouvait une prolifération vasculaire bénigne constituée de vaisseaux de taille variable, à paroi plus ou moins épaisse, dystrophique, bordés de cellules endothéliales régulières et dépourvues d’atypie cellulaire. La lumière des vaisseaux est tantôt congestive, tantôt thrombosée (Fig. 2) ou comporte parfois des calcifications. L’histologie de la lésion fistulisée à la peau portait sur une lésion vasculaire mal limitée constituée de vaisseaux de taille variable, à paroi souvent épaisse. Ces structures vasculaires étaient parfois anastomosées entre elle. Le diagnostic retenu est était celui d’une malformation artério-veineuse intraparotidienne (Fig. 3).

Discussion La classification des « angiomes », tumeurs et malformations vasculaires, a longtemps été confuse. La Société interna-

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tionale pour l’étude des anomalies vasculaires (ISSVA) a récemment adopté un schéma de classification qui distingue les tumeurs vasculaires (lésions comportant une prolifération cellulaire manifeste) des malformations vasculaires, dues à une perturbation innée de la morphogenèse vasculaire. Ces malformations vasculaires sont classées selon le type de vaisseau concerné : on distingue ainsi les malformations capillaires, veineuses, lymphatiques et artério-veineuses. Chez le petit enfant l’hémangiome (tumeur vasculaire) est la première cause de tuméfaction de la parotide [3,4]. En revanche les malformations vasculaires de la parotide et de la région parotidienne de l’adulte sont rares. En effet dans notre série elles représentaient 1,6 % de l’ensemble des tumeurs parotidiennes colligées entre 1998 et 2008 (soit dix patients sur 614). Dans la littérature, leur fréquence est de 0,5 % des tumeurs sur une série de 760 tumeurs parotidiennes pour Bears et al. [5] et de 0,6 % sur une série de 460 tumeurs parotidiennes pour Byars et al. [6]. La distribution était en faveur d’une nette prédominance féminine (neuf pour un) sans latéralité prédominante et avec un âge de découverte autour de la quatrième décennie. Par ailleurs, la totalité des patients présentait une lésion unique sans aucun facteur prédisposant associé. L’absence de modèle animal rend difficile les études sur les anomalies vasculaires. La génétique moléculaire a récemment permis d’isoler les gènes responsables du développement de malformations vasculaires et des tumeurs vasculaires (hémangiomes principalement) [7]. Ils n’ont pas été recherchés chez nos patients. Toutes les parties de la glande parotide peuvent être atteintes mais dans notre série 60 % des lésions étaient situées dans le lobe superficiel, 20 % dans le lobe profond et 20 % étaient intramassétérine. Ces deux derniers cas ont été inclus dans l’étude car même si un seul un des cas a été diagnostiqué en préopératoire, ils ont été pris en charge comme des tumeurs de l’aire parotidienne. Dans la littérature, les malformations vasculaires du masséter sont la première localisation de malformations vasculaires intramusculaires de la face, représentant 4,9 % [8] de toutes les malformations vasculaires intramusculaires. Cliniquement, les malformations vasculaires se présentent comme une masse non indurée, mobile, avec une croissance lente, sans paralysie faciale, sans adénopathies ni infiltration de la peau en regard. Dans la majorité des cas la tumeur était peu ou pas symptomatique. Un seul des patients présentait une tumeur indurée avec infiltration de la peau, des tissus mous et fistulisation. Il s’agissait dans ce cas d’une malformation artério-veineuse mal limitée et non encapsulée. La gravité de cette dernières est principalement due à son retentissement local par détournement du flux sanguin avec des manifestations de nécrose cutanée (fistulisation comme décrit dans notre observation). La symptomatologie clinique, lorsqu’elle était présente, était due soit à une évolution traînante (dyspnée ou dysphagie avec bombement de l’hémivoile) soit à des phénomènes de micro thromboses (phlébolithes entraînant des douleurs). Ces phlébolithes reflètent la stase veineuse et ne sont en aucun cas responsable de l’aspect clinique de la tuméfaction [9]. Dempsey et al. ont décrit en 1970 un signe clinique spécifique (retrouvé uniquement dans 50 % des cas de leur série [10]) : le « turkey wattle sign ». La tuméfaction augmente de volume lors de la manœuvre de Valsalva ou lorsque la tête

64 est penchée en avant. Ce signe n’a pas été recherché chez nos patients. Sur le plan du bilan paraclinique l’IRM associée à la cytoponction sont actuellement les examens les plus performants dans la prédiction de malignité. Le TDM avec injection et l’échographie ne sont que des examens de première intention réalisés pour un bilan de « débrouillage ». L’aspect spécifique des malformations veineuses est la présence de phlébolithes avec hypersignal T2 et rehaussement marqué pouvant faire discuter un adénome pléomorphe mais avec des contours mal limités. L’hypersignal T1 peut orienter à tort vers un cystadénolymphome [11]. La présence de phlébolithes, plus difficiles à visualiser en IRM (hyposignal) qu’avec un TDM, est un bon argument en faveur du diagnostic de malformation veineuse. Dans notre série, tous les patients présentaient un hypersignal T2 avec prise de contraste. Seul le signal en T1 était plus difficile à évaluer avec un hyposignal dans 60 % des cas et un hypersignal chez les 40 % restants. L’artériographie n’a sa place que dans certains cas très précis nécessitant une embolisation préopératoire en raison de la taille de la tumeur ou en postopératoire si l’exérèse de la lésion a été incomplète. L’échographie est intéressante principalement pour les malformations artério-veineuses car elle met en évidence la présence d’un peloton vasculaire sans masse tissulaire. On retrouve aussi un lit artériel dilaté avec une vélocité élevé au Doppler, et des microfistules artério-veineuses. De même le diagnostic et la cartographie précise des malformations vasculaires artério-veineuses reposent principalement sur l’artériographie qui doit préciser les différents troncs artériels. Ce premier temps diagnostique sera complété, s’il échoit après discussion médicoradiochirurgicale, par un temps thérapeutique avec une embolisation endovasculaire préparatoire à une intervention d’exérèse chirurgicale [12]). La cytoponction a été réalisée chez 30 % des patients et elle fut non contributive à chaque fois. Dans la littérature, la cytoponction des malformations vasculaires de la parotide n’a jamais apporté un intérêt mais elle reste le « gold standard » dans l’exploration des tumeurs parotidiennes (associée à l’IRM). De plus, elle est évidemment contre indiquée en cas de tumeur très vascularisée en raison du risque de saignement [13]. Dans notre série, le diagnostic de malformation vasculaire n’a jamais pu être affirmé en préopératoire avec certitude même si il a été cliniquement suspecté. Cela peut s’expliquer, d’une part, par la rareté de ces lésions et, d’autre part, par le fait que le diagnostic de malformation vasculaire est un diagnostic d’élimination. En effet, la cytoponction n’est pas toujours contributive et l’IRM ne permet pas d’exclure formellement un autre type histologique. La question qui se pose ensuite est celle de la prise en charge chirurgicale. Est-il nécessaire d’opérer toutes les malformations vasculaires, dans la mesure où théoriquement il s’agit de lésions bénignes sans risque de dégénérescence carcinomateuse et présentant une évolution lente ? Dans notre série tous les patients ont subi une intervention chirurgicale car le diagnostic n’avait pu être posé de fac ¸on formelle en préopératoire sur les données de l’imagerie, de la cytoponction et une preuve histologique était nécessaire même pour les patients asymptomatiques (50 % des cas). Les 50 % restants ont été opérés à cause des douleurs provoquées par les micros thromboses, de

M. Achache et al. l’augmentation de volume (dyspnée ou bombement parapharyngé) ou le caractère agressif de la lésion. Le traitement est principalement chirurgical car il permet d’acquérir une certitude diagnostique grâce à l’examen histologique. Les traitements complémentaires comme la radiothérapie n’ont jamais prouvé leur efficacité. En revanche, l’injection d’éthanol est une bonne alternative à la chirurgie des malformations veineuses [14]. Pour les lésions très volumineuses (nécessitant une chirurgie délabrante) elle reste une alternative intéressante à la chirurgie voire en association avec cette dernière [15]. Dans notre série, 90 % des patients ont bénéficié au moins d’un parotidectomie exofaciale (une seule énucléation). Pour les deux tumeurs massétérines la voie d’abord a nécessité une parotidectomie exofaciale afin de mettre en évidence les branches du nerf facial pour mieux disséquer la lésion. Des complications postopératoires (parésie, syndrome de Frey) avec récupération complète au bout de quelques mois ont été notées chez 20 % des patients. Un seul patient a présenté une récidive malgré une exérèse complète lors de la première intervention. Mais le tableau clinique initial était en faveur d’une tumeur agressive (fistulisation à la peau, dystrophie des vaisseaux, malformation vasculaire mixte). L’examen anatomopathologique concluait à une malformation artério-veineuse mal limitée, infiltrant les tissus adjacents mais ne présentant pas de critères de malignité. La dissection des malformations vasculaires et leur exérèse ne présentent donc pas de difficultés techniques particulières par rapport aux autres tumeurs parotidiennes. Cependant, lorsqu’elles sont très évoluées ou présentent un caractère clinique agressif (ce qui est rare) la dissection du nerf facial et surtout l’exérèse en totalité (afin d’éviter le risque de récidive) peuvent s’avérer techniquement difficile et nécessitent une prise en charge par un chirurgien expérimenté. Dans la littérature seuls deux cas de récidives ont été décrit en raison d’une exérèse incomplète pour saignement non maîtrisé [9,16]. Sur le plan histologique on retrouvait un aspect classique de prolifération vasculaire bénigne avec des cellules endothéliales au niveau des parois. La lumière des vaisseaux était soit le siège d’une congestion soit de thromboses soit de calcifications (phlébolithes). les malformations vasculaires veineuses se présentent avec un aspect régulier, encapsulée et bordées de cellules endothéliales de taille constante. En revanche, les malformations artério-veineuses sont mal limitées avec des parois fines et des vaisseaux de tailles variés. Des communications directes entre des vaisseaux d’architecture artérielle et des veines sont observées [17]. L’aspect était régulier avec une capsule dans 90 % des cas (toutes étaient des malformations vasculaires veineuses). Une seule des malformations vasculaires était non encapsulée avec des contours irréguliers, il s’agissait de la seule de malformation mixte (artério-veineuse).

Conclusion Les malformations vasculaires de la parotide, pathologie rare, sont principalement veineuses. Elles s’opposent par leur présentation et leur évolution clinique aux tumeurs

Prise en charge des malformations vasculaires de la région parotidienne vasculaires comme l’hémangiome présent chez l’enfant. La terminologie se base sur des données cliniques, évolutives, histologiques et hémodynamiques selon la classification de l’ISSVA. L’aspect clinique, la cytoponction et l’IRM sont les outils indispensables au diagnostic. Elles sont de diagnostic difficile comme le montre notre série. Actuellement les progrès de l’imagerie et notamment de l’IRM tendent vers un meilleur dépistage préopératoire. Le traitement de référence reste évidemment la chirurgie car une certitude histologique est nécessaire. Il existe d’autres options thérapeutiques pouvant être associées à la chirurgie ou non thérapeutiques comme la surveillance (si la clinique et l’imagerie concordent).

Déclaration d’intérêts Les auteurs déclarent ne pas avoir de conflits d’intérêts en relation avec cet article.

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