Purpura thrombopénique à parvovirus B19 compliqué d'hémorragie cérébroméningée

Purpura thrombopénique à parvovirus B19 compliqué d'hémorragie cérébroméningée

Archives de pédiatrie 12 (2005) 281–283 http://france.elsevier.com/direct/ARCPED/ Fait clinique Purpura thrombopénique à parvovirus B19 compliqué d’...

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Archives de pédiatrie 12 (2005) 281–283 http://france.elsevier.com/direct/ARCPED/

Fait clinique

Purpura thrombopénique à parvovirus B19 compliqué d’hémorragie cérébroméningée Parvovirus B19 thrombocytopenic purpura complicated with a cerebral hemorrhage P. Tourneux a,*, P. Jouvencel b, M. Micheau c, A.C. Jouvencel d, J.F. Chateil e, G. Barba b, B. Letavernier b, B. Llanas b a

Service de médecine néonatale et réanimation pédiatrique polyvalente, CHU d’Amiens, hôpital Nord, 1, place Victor-Pauchet, 80054 Amiens cedex 1, France b Département de pédiatrie, CHU de Bordeaux, hôpital Pellegrin, place Amélie-Raba-Léon, 33076 Bordeaux cedex, France c Laboratoire d’hématologie, CHU de Bordeaux, hôpital Pellegrin, place Amélie-Raba-Léon, 33076 Bordeaux cedex, France d Laboratoire de virologie, CHU de Bordeaux, hôpital Pellegrin, place Amélie-Raba-Léon, 33076 Bordeaux cedex, France e Service de radiologie pédiatrique, CHU de Bordeaux, hôpital Pellegrin, place Amélie-Raba-Léon, 33076 Bordeaux cedex, France Reçu le 14 novembre 2003 ; accepté le 12 novembre 2004 Disponible sur internet le 18 janvier 2005

Résumé Les complications hémorragiques sévères du purpura thrombopénique idiopathique étant rares, cette affection est considérée le plus souvent comme bénigne. Observation. – Nous rapportons le cas clinique d’un enfant de quatre ans ayant présenté un purpura thrombopénique à parvovirus B19. Malgré l’utilisation précoce et répétée d’immunoglobulines polyvalentes, l’évolution a été caractérisée par l’apparition secondaire d’une hémorragie cérébrale, responsable du décès de l’enfant sept jours après le diagnostic initial. Commentaires. – Il semble justifié de rechercher systématiquement le parvovirus B19 par PCR dans le diagnostic étiologique d’un purpura thrombopénique idiopathique. L’aspect imprévisible des complications hémorragiques graves, en particulier cérébrales, rend compte de la gravité potentielle de cette maladie. © 2005 Elsevier SAS. Tous droits réservés. Abstract Severe hemorrhage complications are rare in idiopathic thrombocytopenic purpura. This pathology is often considered as benign. Case report. – We report the case of a four-year-old boy presenting a parvovirus B19 idiopathic thrombocytopenic purpura. Despite early and repeated use of intravenous immunoglobulin, the evolution was characterized by the secondary apparition of a cerebral hemorrhage. It was lethal seven days after the initial diagnosis. Conclusion. – Parvovirus B19 should be investigated as an etiologic agent of idiopathic thrombocytopenic purpura, using PCR. The unpredictive aspect of severe hemorrhage complications, especially cerebral hemorrhages, explains the potential severity of this disease. © 2005 Elsevier SAS. Tous droits réservés. Mots clés : Purpura thrombopénique ; Hémorragie cérébrale ; Parvovirus B19 ; Immunoglobulines Keywords: Thrombocytopenic purpura; Cerebral hemorrhage; Parvovirus B19; Child; Immunoglobulins, intravenous

* Auteur correspondant. Adresse e-mail : [email protected] (P. Tourneux). 0929-693X/$ - see front matter © 2005 Elsevier SAS. Tous droits réservés. doi:10.1016/j.arcped.2004.11.017

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Le purpura thrombopénique idiopathique (PTI) est souvent considéré comme une maladie bénigne chez l’enfant, 80 % guérissant spontanément au cours des six premiers mois d’évolution [1]. Deux tiers des enfants ont un antécédent d’infection dans les jours ou semaines précédant l’apparition des signes de thrombopénie [2]. Le parvovirus B19 a été décrit comme un des agents étiologiques possibles de cette affection [3–5]. Des hémorragies sévères sont observées dans 17 % des cas des PTI [6]. Les hémorragies cérébrales sont très rares, nous en rapportons un cas.

1. Observation Un enfant de quatre ans a été hospitalisé pour prise en charge d’un PTI. Dans ses antécédents, on notait une dermatite atopique et une synovite aiguë transitoire d’évolution favorable en une semaine sous AINS, un mois auparavant. Il ne présentait pas d’antécédents familiaux, en particulier pas de notion de maladie de système. Les vaccinations étaient à jour, sans injection de rappel récente. La maladie a débuté par l’apparition au niveau du cou d’un purpura pétéchial puis ecchymotique, extensif en 48 heures et motivant l’hospitalisation. L’examen clinique initial a révélé un enfant apyrétique, sans altération de l’état général. La tension artérielle était à 90/60 mmHg, la fréquence cardiaque à 85/minute. Au niveau cutanéomuqueux, on constatait de nombreuses ecchymoses de plus de 3 cm de diamètre et un purpura au niveau de la face interne des joues et du voile du palais. On n’observait pas d’épistaxis ou de saignement au niveau de l’oropharynx. Aucun signe d’hémorragie interne, en particulier digestif, n’était relevé. L’examen neurologique était normal. L’abdomen était souple, indolore, sans hépatosplénomégalie. Les aires ganglionnaires étaient libres. La numération formule sanguine (NFS) initiale révélait une thrombopénie à 6 G/L. Les leucocytes étaient à 9,30 G/L, les polynucléaires neutrophiles à 3,63 G/L, les éosinophiles à 2,14 G/L, les lymphocytes à 3,16 G/L. Les hématies étaient à 3,25 T/L, l’hémoglobine à 10,2 g/100 ml, le VGM à 72,7 fl et les réticulocytes à 85,5 G/L. Le TP, le TCA et le fibrinogène étaient normaux. Les D-dimères étaient négatifs. La protéine C-réactive était à 0,1 mg/L. Le fond d’œil était normal, la radiographie du thorax également. Le traitement initial a comporté l’administration de 1 g/kg d’immunoglobulines polyvalentes par voie intraveineuse (IGIV, Tégélines®), répétées à 24 heures. Aucun effet indésirable n’a été noté lors de la perfusion lente sur huit heures. Quatre jours après la seconde dose de Tégélines®, le bilan biologique a objectivé une chute du taux d’hémoglobine à 8,6 g/100 ml. Les plaquettes étaient à 21 G/L le même jour. Devant l’absence de réponse au traitement par IGIV, l’enfant a été transféré dans notre unité par le SMUR pédiatrique. À l’arrivée, l’enfant présentait un examen clinique inchangé, avec de nombreuses ecchymoses, sans troubles hémodynamiques ou saignement extériorisé. Un bilan complémentaire a été réalisé afin de débuter une corticothérapie. L’échogra-

Fig. 1. Examen tomodensitométrique réalisé sans injection de produit de contraste. Existence d’une lésion spontanément hyperdense pariétale gauche, correspondant à un hématome intraparenchymateux ; présence d’un œdème périlésionnel, d’un effet de masse sur les structures médianes et le ventricule latéral gauche, hémorragie méningée contingente.

phie abdominale était normale. La recherche d’agglutinines irrégulières était négative. Un myélogramme a révélé une moelle riche et équilibrée avec de nombreux mégacaryocytes. Une recherche de parvovirus B19 par PCR sur la moelle osseuse était positive [7]. La sérologie pour le parvovirus B19 était négative pour les IgM et positive pour les IgG. La recherche d’IgM spécifiques pour le CMV, l’EBV, le VIH, le VHB et le VHC était négative. Dans le même temps, une dernière cure d’IGIV a été réalisée à la posologie de 1 g/kg. Au décours des dix heures de cette perfusion, l’enfant a présenté sur deux heures un tableau d’hypertension intracrânienne aiguë sévère associant céphalées, agitation, troubles de la conscience, anisocorie puis coma aréactif, dans un tableau de défaillance hémodynamique. Une prise en charge réanimatoire a associé remplissage vasculaire, transfusion de culot plaquettaire, corticothérapie (méthylprednisolone 1 mg/kg), neurosédation et ventilation assistée. La NFS prélevée en urgence a révélé des plaquettes à 16 G/L et une déglobulisation (Hb : 6,4 g/100 ml). Le TP, le TCA et le fibrinogène étaient normaux. La tomodensitométrie cérébrale réalisée en urgence a objectivé une hémorragie cérébrale méningée et parenchymateuse (Fig. 1). Malgré la poursuite de la réanimation, un état de mort cérébrale a été constaté.

2. Commentaires La survenue d’un purpura thrombopénique induit par une infection à parvovirus B19 est possible, la recherche systématique d’ADN par PCR étant positive dans 13 à 49 % des PTI [3,5]. La sérologie parvovirus B19, négative pour les IgM

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dans ce cas, témoignait probablement d’une infection récente, les IgG étant rendus positifs par les IGIV. En effet, la recherche positive d’ADN par PCR peut s’accompagner d’une sérologie parvovirus B19 négative pour les IgM [5], ce qui devrait inciter le clinicien à utiliser cette méthode de biologie moléculaire de façon précoce. Les mégacaryocytes observés sur le myélogramme sont dus au caractère mixte de la thrombopénie, à la fois centrale et périphérique, dans les infections à parvovirus B19 [3–5]. La gravité du PTI est liée au risque d’hémorragies sévères, plus fréquentes lorsque le taux de plaquettes est inférieur à 20 G/L [1,6–8]. Des scores cliniques ont été proposés afin d’évaluer les enfants à risque de complications, indépendamment du taux de plaquettes [8,9]. Les signes péjoratifs sont un saignement muqueux (épistaxis, métrorragies, saignement gastro-intestinal, etc), une hémorragie interne et, de façon moins spécifique, une atteinte cutanée importante (plus de 100 pétéchies ou plus de 5 ecchymoses de plus de 3 cm de diamètre) [8,9]. Dans notre cas, seule l’atteinte cutanée était sévère, mettant en avant la nécessité d’une surveillance clinique rigoureuse. L’incidence des hémorragies cérébrales est évaluée entre 0,1 et 1 % des enfants atteints de PTI [1,6–8,10]. La notion de traumatisme crânien comme facteur déclenchant de l’hémorragie cérébrale est rapportée, mais n’a pas été retrouvée à l’anamnèse dans notre cas [1,8]. Le pronostic sévère (plus de 50 % de décès) justifie une surveillance clinique des signes neurologiques annonciateurs (céphalées, agitation...) et si besoin un traitement présomptif agressif associant immunoglobulines, corticothérapie et transfusions de plaquettes [1,8]. Les IGIV entraînent une augmentation du nombre de plaquettes dans 75 % des PTI dans un délai de deux à trois jours [11]. Au cours d’infection à parvovirus B19, elles sont plus rapidement efficaces que la corticothérapie [3]. L’association d’une corticothérapie (prednisone 1 à 2 mg/kg/j) aux IGIV peut être discutée en cas d’atteinte sévère, après réalisation d’un myélogramme. La physiopathologie du PTI limite l’intérêt de la transfusion de culot plaquettaire en dehors d’une hémorragie active car les plaquettes sont rapidement détruites. 3. Conclusion La recherche systématique par PCR du parvovirus B19 dans le bilan étiologique d’un PTI devrait être générali-

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sée lors de la réalisation d’un myélogramme. Le traitement par IGIV serait plus rapidement efficace sur la thrombopénie dans ce cas. Comme au cours de tout PTI, la persistance d’une thrombopénie sévère inférieure à 20 G/L, doit faire surveiller de façon attentive l’apparition de signes cliniques de mauvais pronostic (saignements muqueux, hémorragie interne, extension importante des ecchymoses) et discuter une corticothérapie associée aux IGIV pour prévenir une hémorragie grave.

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