Quelques repères pour une éthique de la communication et de l'information en pédiatrie

Quelques repères pour une éthique de la communication et de l'information en pédiatrie

Arch P&$atr 2000 ; 7 Suppl 2 : 153-S 0 2000 Editions sclentifiques et mkdicales Elsevier SAS. Tous droits r&en& L’information mbdicale : du droit de...

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Arch P&$atr 2000 ; 7 Suppl 2 : 153-S 0 2000 Editions sclentifiques et mkdicales Elsevier SAS. Tous droits r&en&

L’information

mbdicale : du droit de savoir de l’enfant au savoir-dire du pkdiatre et des soignants

Quelques rep&-es pour une bthique de la communication et de l’information en pkdiatrie E. Hirsch

LES ENJEUX DU RESPECT c L’article 4 de la Charte de l’enfant hospitalise (UNESCO, Organisation mondiale de la Sante [OMS] Europe, 1989) considbe que s’il convient d’ajuster les modalitts de communication de l’information destinee a l’enfant, elle constitue toutefois un droit qui engage les soignants. La specificit des situations relevant du soin d’un enfant implique Cgalement ses parents ou ses tuteurs qui doivent exercer, si necessaire, leurs responsabilites dans la prise de decision. On pourrait distinguer theoriquement la position de l’enfant soigne de celle de l’adulte, du point de vue de l’expression de son autonomie et de sa faculte de deliberer justement afin d’envisager dans des conditions conformes a ses inthets les choix qui le concernent. De telle sorte qu’il semble s’imposer trop souvent un principe de substitution assume par d’autres personnes estimees plus aptes ou competentes a comprendre et a preserver ses intCrCts propres, voire X<21se mettre 2 sa place pour son plus grand bien >>.Au nom d’un <
compris du point de vue des parents. Ne convient-il pas de chercher 2 mieux comprendre ou se situent les limites de l’interventionnisme parfois excessif ou abusif, mais aussi comment concilier avec les contraintes pratiques le respect inconditionnel d’une volonte parfois imparfaitement formulee qu’il convient justement de solliciter, d’ecouter et d’estimer dans ses significations. Observons qu’a l’exterieur de l’hopital les approches pedagogiques de l’enfant visent a le rendre actif et responsable en mettant h sa disposition des informations qui stimulent sa sensibilite au monde environnant et contribuent a sa prise de conscience. Son education m&me contribue a son discernement et lui permet progressivement de se situer, de trouver les rep&t-eset les assurances a la fois indispensables a l’elaboration de sa personnalite et a l’acquisition de savoirs dans des conditions propices. Confront6 a l’experience de la maladie, l’enfant n’estil pas davantage que d’autres en q&e d’un cadre lui permettant d’assumer au mieux ce qu’il vit ? ConsidCrC, certainement a tort, hors du temps et de la normalite, l’espace du soin pourrait-il se soustraire aux evolutions ainsi validees dans les pratiques quotidiennes et desormais consacrees par les textes internationaux qui consid&rent que ccdans toutes les decisions qui le concernent, (. .) l’intCr&t superieur de l’enfant doit Ctre une consideration primordiale B (article 3 de la Convention de New York relative aux droits de l’enfant, ONU, 1991) ? Comment comprendre la notion <
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E. Hmch

d’exprimer librement son opinion sur toute question I’intCressant, les opinions de l’cnfant ktant dfiment prises en considkation eu kgard 5 son 9ge et B son degrC de maturitk. )> De telle sorte qu’il importe d’affirmer que l’h8pital ne saurait &tre consid& comme un lieu de non droit, tout particuli?rement B I’Cgard des personnes les plus fragiliskes par 1’Ctat de maladie pour lesquelles tout doit &tre mis en czuvre afin de prkserver leur identitk et leurs droits. L’exigence de relation et de communication doit situer l’information au niveau le plus ClevC du soin. I1 n’est pas acceptable de dkcider saris associer d’unc man&e ou d’une autre la personne directement concernCe, c’est-h-dire saris dkfinir les modalit& d’une communication qui la respecte et l’implique. UNE RELATION

DE CONFIANCE

<.Le 14 septembre 1998, le ComitC consultatif national d’Cthique pour les sciences de la vie et de la santC affirmait ainsi son attachement 2 la valeur que constitue le consentement, y consacrant un rapport et des recommandations (n” 58) : tf Consentement CclairC et information des personnes qui se pr&tent 21des actes de soin et de recherche >>.II n’est pas de decision Cthiquement acceptable qui ne reconnaisse la personne dans ses valeurs et dans ses droits, notamment du point de vue de la mise B disposition des informations qui lui permettent d’assumer librement ses responsabilitks afin de consentir dans la clarte, lorsque cela s’impose. D&s lors, peut-on contester SIl’enfant malade son statut de personne et accentuer son sentiment de vuln&abilitC par la nkgation de ce qu’il est ? Tenter, comme on y prktend, de lui Cpargner une trop forte confrontation avec la maladie et ses repksentations, c’est privilkgier une option parmi d’autres qui nkessiterait pour le moins d’ctre justifike. D’autant plus que l’on conatate B quel point, dans certaines circonstances douloureuses, l’infantilisation de la relation de soin, y compris avec la personne malade adulte, relkve d’arguments identiques visant Cgalement B la prkmunir des rCalitCs qui risqueraient de l’affecter. A l’analyse, les Cquipes qui ont investi des efforts dans la definition et la cohkrence d’un projet de soin adaptk, privilkgient la responsabilisation, l’khange, le partage de la dkision, en d’autres termes, le partenariat, et rkfutent les approches compatissantes ou surprotectrices qui peuvent constituer un prktexte avantageux au dessein d’kviter la moindre confrontation. On le dit, le paternalisme medical await fait son temps. Ce mode de rapport trop souvent mar@ par un autoritarisme saris mesure, souvent exercC au mCpris du respect

de la personne, ne semble plus conciliable avec l’exigence d’une relation 6quilibrCe et profondkment soucieuse de I’intMt direct de celle ou de celui qui sollicite un soin. Force est de constater nianmoins la nCcessit6 de recourir dans certaines circonstances fondles et encadrCes, & la mkdiation d’un mandataire, comme le suggkre le ComitC national consultatif d’kthique dans son rapport n” 58 : ) Dans ce cas, la substitution 21la volontk d’une personne doit relcver d’une intelligence de la situation et davantage encore d’une comprkhension, d’une connaissance de ce 2 quoi pourrait aspirer la personne. II n’est pas tvident de ) semble privilkgier certaines dkisions. Dans ce cadre, les conditions de dClib&ations justifient g elles seules une argumentation incontestable. Nous devons accepter dans certains cas, de prendre le risque d’initier des dkmarches soucieuses de I’exigence d’un rapport de v&it6 qui s’avke garant d’une relation de confiance qui Cvoluera efficacement dans la duke. Ces quelques considkrations Ctant &on&es, elles nous permettent de reprendre le difficile et mSme le pkrilleux exercice des pratiques soignantes auprks de l’enfant et de ses parents, notamment lorsque I’annonce d’une malariie peut induire des dkcisions urgentes, dans un contexte d’incertitudes, de menaces vitales qui affectent la qua] It6 de vie du fait des conskquences des options thkrapeutiques envisagkes. Qu’en est-il alors de la nCcessit6, voire du devoir d’informer ? Doit-on ou peut-on tout rtWler ? Que dire quand il n’est rien de certain 2 affirmer ? Comment concevoir dans ce domaine un suivi de I’enfant et de ses parents ? Comment gk-er les interrelations entre eux ? Comment estimer ce que les uns et les autres souhaitent connaitre ou veulent que l’autre sache ? Que signifie, j I’Cpreuve des faits, le principe de prudence, la retenue, la dkence, le respect ? Comment ne pas abolir, 2 trop en dire, les conditions nkcessaires 2 l’kmergence des ressources intimes et personnelles qui pourront contribuer B la lutte contre la maladie ‘? Convient-il 4 d’kpargner )) I’enfant de v&it& humaines qui ne seraient assumables que par un adulte ? Peut-on aborder et de quelle man&e, la souffrance, les mutilations, voire la mort prochaine de l’enfant ? Au nom de quels principes et de quelles valeurs fonder dans ces domaines une dkision recevable ? Les questions sont multiples et ne peuvent jamais se rCduire 2 des formules dDment ktablies, chaque situation &ant spkifique et kvoluant dans un contexte particulier.

Quelques rep&es pour me Cthique de la communication

FONDER UNE l?THIQUE

DU SOIN

I1 est opportun de considerer comme un principe incontestable l’importance d’une communication de qualite qui soit adaptee aux circonstances. Elle permet a chacun de parvenir au niveau d’information qu’il souhaite. D’autre part, du point de vue des regles, respecter la sphere du prive, la volonte propre de la personne, le secret et la confidentialite, c’est lui temoigner concretement un attachement profond a sa personne. Parvenir a solliciter chez l’autre une faculte de comprehension, d’expression, de revendication, c’est probablement contribuer a le renforcer face a la maladie, a lui procurer des atouts souvent insoupGonnCs. Reciproquement, sensibles a ce type de position et a ces postulats, les soignants se decouvrent en position d’assumer leurs responsabilites, selon leurs deontologie et les principes qu’ils Claborent a partir de leurs experiences quotidiennes. Les medecins ne peuvent que mieux apprecier la signification et la portee pratique de l’article 35 du Code de deontologie medicale, d&ret no 95-1000 du 6 septembre 1995 : <
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Toutefois, dans l’interet du malade et pour des raisons legitimes que le praticien apprecie en conscience, un malade peut &tre tenu dans l’ignorance d’un diagnostic ou d’un pronostic grave, sauf dans les cas oti l’affection dont il est atteint expose les tiers a un risque de contamination. Un pronostic fatal ne doit &tre rCvClCqu’avec circonspection, mais les proches doivent Ctre prevenus, sauf exception ou si le malade a prealablement interdit cette revelation ou designe les tiers auxquels elle doit &tre faite. )) Pour conclure, ce n’est pas a la transparence radicale, a l’information absolue, a la verite totale qu’aspirent la personne malade et ses proches, mais plutot aux signes d’une relation de qualite soucieuse des inter&s en cause qui concernent l’existence et son futur. Une communication envisagee dans son evolution, un Cchange respectueux, un rapport de confiance et d’estime reciproques constituent les fondement d’une Cthique du soin et les rep&es indispensables a cette visee d’une information adaptee de haute qualite. Une fois prises en compte les specificit& de l’experience d’une maladie vecue par l’enfant, je considere que nos fondements ethiques relevent des principes de la deontologie et de la morale universelle. Nous y trouvons les reperes indispensables aux engagements soignants les plus exposes a leurs limites, a leurs paradoxes mais plus encore a leurs valeurs et significations humaines.