Reinsertion par ancres des ruptures du biceps distal : résultats cliniques et évaluation radiologique de la cicatrisation tendineuse

Reinsertion par ancres des ruptures du biceps distal : résultats cliniques et évaluation radiologique de la cicatrisation tendineuse

Revue de chirurgie orthopédique et traumatologique (2011) 97, 244—252 MÉMOIRE ORIGINAL Reinsertion par ancres des ruptures du biceps distal : résult...

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Revue de chirurgie orthopédique et traumatologique (2011) 97, 244—252

MÉMOIRE ORIGINAL

Reinsertion par ancres des ruptures du biceps distal : résultats cliniques et évaluation radiologique de la cicatrisation tendineuse夽 Suture anchor reinsertion of distal biceps rupture: Clinical results and radiological assessment of tendon healing D. Gallinet a,∗, E. Dietsch b, B. Barbier-Brion b, J.-M. Lerais b, L. Obert c a

Clinique Saint-Vincent, 40, chemin des Tilleroyes, 25000 Besanc¸on, France Service de radiologie C, CHU Jean-Minjoz, boulevard Fleming, 25030 Besanc¸on cedex, France c Service d’orthopédie, de traumatologie, de chirurgie plastique reconstructrice et d’assistance main CHU Jean-Minjoz, boulevard Fleming, 25030 Besanc¸on cedex, France b

Acceptation définitive le : 30 novembre 2010

MOTS CLÉS Rupture distale du biceps ; Ancres ; Ossifications ; Cicatrisation tendineuse ; IRM

Résumé Introduction. — Le but de ce travail était de revoir cliniquement les patients opérés d’une rupture distale du tendon du muscle biceps brachial par réinsertion par ancres sur la tubérosité radiale. L’apposition du tendon sur de l’os cortical est la moins résistante des techniques de réinsertion d’après les études biomécaniques. Une étude radiologique (radio, IRM) a donc été menée en parallèle afin d’étudier la qualité exacte de cicatrisation du tendon et ainsi corréler les résultats cliniques aux résultats radiologiques en fonction de la qualité de cicatrisation tendineuse. Matériel et méthode. — Vingt-huit patients ont été revus rétrospectivement au recul moyen de 22 mois (minimum six mois) et ont bénéficié d’un examen clinique (mobilité, force, satisfaction, douleur résiduelle, reprise de travail). Tous les patients ont bénéficié d’une étude radiologique par radiographie standard pour rechercher des ossifications hétérotopiques et par IRM pour étudier la qualité de cicatrisation du tendon apposé sur de l’os cortical. Résultats. — Nous avons retrouvé 40 % de complications essentiellement neurologiques résolues sous traitement médical sans séquelles. Les mobilités étaient normales sauf chez huit patients qui présentaient une perte de supination comprise entre moins 5 et moins 20◦ . La force en flexion supination a été mesurée à 91 % du côté controlatéral. Radiologiquement,

DOI de l’article original : 10.1016/j.otsr.2010.11.010. Ne pas utiliser, pour citation, la référence franc ¸aise de cet article, mais celle de l’article original paru dans Orthopaedics & Traumatology: Surgery & Research, en utilisant le DOI ci-dessus. ∗ Auteur correspondant. Adresse e-mail : [email protected] (D. Gallinet). 夽

1877-0517/$ – see front matter © 2011 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. doi:10.1016/j.rcot.2011.02.017

Reinsertion par ancres des ruptures du biceps distal

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seulement 46 % des patients ne présentaient pas d’ossifications. En IRM, 19 patients (70 %) présentaient une réinsertion jugée anatomique, six une réinsertion jugée moyenne, deux une réinsertion mauvaise et une rupture itérative. L’analyse statistique des résultats a permis de déterminer que la force était meilleure plus le nombre de fils faufilant le tendon était important, quand le délai préopératoire était inférieur à 15 jours et chez les patients où la réinsertion a été jugée satisfaisante sur l’IRM. Discussion. — De nombreuses techniques de réinsertion ont été décrites avec des résultats cliniques comparables entre elles, ainsi qu’à nos résultats. En revanche le taux de complication varie en fonction en la technique et de la voie d’abord. Radiologiquement 70 % des réinsertions ont été jugées satisfaisantes : la cicatrisation tendon apposé sur l’os cortical est donc une technique fiable. Les ossifications hétérotopiques sont de réputation bénigne dans la littérature. Notre étude radiologique a permis de préciser cette notion en mettant en évidence trois types d’ossifications : intratendineuses pures asymptomatiques, tubérositaires pures asymptomatiques n’empêchant pas le tendon de cicatriser sur la tubérosité radiale et tubérositaires associées à une métaplasie osseuse de la portion terminale du tendon réinséré empêchant une cicatrisation tendineuse correcte, à l’origine de résultats cliniques moins satisfaisants. Afin d’obtenir une cicatrisation anatomique du tendon distal du biceps, nous recommandons un délai préopératoire inférieur à 15 jours et un minimum de trois fils faufilant le tendon afin de l’appliquer correctement sur la tubérosité radiale. Niveau de preuve. — étude type IV. © 2011 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.

Introduction Les ruptures distales du tendon du biceps brachial sont rares, estimées à 1,2 ruptures pour 100000 patients par an, dans une population masculine entre 40 et 50 ans [1]. Le mécanisme est la plupart du temps post-traumatique par contraction excentrique du biceps et aboutit à sa désinsertion de la tubérosité radiale [2]. Parfois le traumatisme peut être mineur du fait des modifications histologiques tendineuses observées après 35 ans qui fragilisent les insertions tendineuses [3] et de la présence d’une zone hypovascularisée dans la partie terminale du tendon du biceps brachial [4]. L’absence de réinsertion chirurgicale du tendon distal du muscle biceps brachial conduit à un résultat clinique peu satisfaisant avec perte de force en flexion et supination de l’avant bras et douleurs résiduelles parfois invalidantes [5—7]. La réinsertion chirurgicale du tendon sur la tubérosité radiale est une technique donnant entière satisfaction la plupart du temps, mais n’est pas dénuée de complications [8]. Mais jamais la qualité de cicatrisation du tendon bicipital sur l’os cortical de la tubérosité radiale n’a été étudiée, quel que soit la technique chirurgicale utilisée pour la réinsertion (transosseux, ancre, endo boutton, endoscopie). Le but de ce travail était d’analyser le résultat clinique des réinsertions par ancres des ruptures distales du tendon du muscle biceps brachial. Une étude radiographique par IRM a été menée parallèlement afin d’étudier la qualité de cicatrisation du tendon sur la tubérosité radiale.

Matériel et méthode Entre 2003 et 2008, 31 patients ont présenté une rupture traumatique du tendon distal du muscle biceps brachial, réinséré par ancrage dans la tubérosité radiale selon la même technique opératoire. Le patient est installé en décu-

bitus dorsal, le membre supérieur reposant sur une table à bras. Le garrot pneumatique est mis en place le plus haut possible autour du bras pour ne pas brider la réinsertion future du biceps. La voie d’abord était antérieure unique avec incision cutanée en baïonnette débutant dans la gouttière bicipitale médiale puis décrochée latéralement dans le pli de flexion du coude. La branche distale de l’incision descend le long du bord médial du muscle brachioradial. Les veines superficielles étaient réclinées et le nerf cutané antebrachial latéral était repéré. Le tendon bicipital était récupéré et libéré. Le trajet jusqu’à la tubérosité radiale était retrouvé par dissection progressive au dissecteur mousse entre le bord médial du muscle brachioradial et le bord latéral du muscle rond pronateur. L’avant-bras était alors mis en supination forcée faisant apparaître la tubérosité radiale. Le coude était alors placé à 60◦ de flexion, des écarteurs de Langenbeck exposant la tubérosité radiale (les écarteurs contre coudés de part et d’autre du col radial n’étaient pas conseillés) permettant ainsi (Fig. 1) : • de détendre la branche motrice du nerf radial ; • d’assurer une réinsertion moins contrainte et d’augmenter ainsi la zone de contact tendon bicipital/tubérosité radiale.

Les ancres étaient mises en place dans la tubérosité radiale sans avivement préalable. Le tendon du biceps brachial était alors faufilé en aller et retour par un seul brin de l’ancre. Cette technique permettait d’augmenter la solidité du montage tout en permettant de faire coulisser le fil par l’intermédiaire du brin libre (Fig. 2). Une réinsertion mécaniquement solide, avec un contact tendon/os optimum, était ainsi obtenue.

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D. Gallinet et al. 90◦ de flexion et en supination complète. La force en supination pure n’a pu être mesurée par absence d’appareil de mesure dans le service. Les résultats ont été exprimés en pourcentage par rapport au côté controlatéral puis séparés en fonction du côté dominant ou non dominant opéré. Nous avons recueilli le résultat subjectif, la présence de douleurs résiduelles, le ressenti du patient et la reprise du travail.

Évaluation radiologique Tous les patients ont bénéficié : Figure 1

Abord de la tubérosité radiale.

Après lavage abondant pour éliminer les poussières d’os rejetées lors de la préparation des orifices d’insertion des ancres, l’incision était refermée par un surjet au fil résorbable en sous-cutané, puis un surjet intradermique au fil résorbable. Le protocole de soin postopératoire consistait en une immobilisation dans une orthèse amovible en Néofrakt, entre 60 et 90◦ de flexion du coude en fonction des constatations peropératoires et pronosupination neutre. La rééducation était passive par flexion du coude dans le secteur protégé par l’orthèse. Puis le travail actif et la récupération de l’extension du coude étaient débutés à l’ablation de l’attelle (entre j30 et j45 postopératoire). Quatre patients n’ont pu être revus (trois perdus de vue et un patient a refusé de revenir en consultation jugeant que tout allait bien). Au final, 27 patients, soit 28 réinsertions, ont été revus rétrospectivement au recul moyen de 22 mois (6—55) et minimal de six mois, par un évaluateur également opérateur pour 25 % des patients de la série. Tous les patients étaient des hommes, d’âge moyen 49 ans (36—60). Vingt-six étaient en activité au moment du traumatisme dont 70 % avaient un travail manuel de force. Il s’agissait d’un accident de travail dans 54 % des cas. Le côté dominant a été opéré dans 57 % des cas. Le délai préopératoire moyen était de neuf jours (1—50). Hormis le patient opéré en rupture chronique (50 mois), tous les autres étaient des formes aigües (< à 21 jours).

Évaluation clinique La mobilité a été mesurée en flexion/extension et pronosupination. La force en flexion du coude a été mesurée à

• d’une radiographie du coude de face et profil à la recherche d’ossifications hétérotopiques et d’une éventuelle synostose radioulnaire ; • d’une IRM permettant d’étudier la qualité de cicatrisation tendon/os cortical. L’ensemble des examens a été réalisé à l’aide d’une IRM 3 Tesla HDx Signa Excite (General Electric Medical Systems, Milwaukee, WI, USA) et une antenne émettrice et réceptrice, en quadrature HR dédiée. L’acquisition s’est faite selon deux pondérations : T1 (TR entre 800 et 1000 ms, TE entre 15 et 25 ms) et densité de proton avec saturation de graisse (TR entre 2600 et 3500 ms, TE entre 30 et 60 ms). Les plans de coupe utilisés étaient axial strict et sagittal oblique dans le plan du tendon, avec des coupes épaisses de 3 mm de matrice 512 × 512. L’objectif de durée d’examen était fixé à moins de 15 minutes, car la position du patient est très inconfortable, et qu’un examen trop long peut donc être la source d’artefacts de mouvement : le patient était en procubitus, bras en antéversion complète et avant-bras en supination. L’analyse des IRM a été réalisée en collaboration entre un radiologue entraîné à l’imagerie ostéo-articulaire et le chirurgien ayant effectué la révision. La qualité de cicatrisation a été qualifiée de satisfaisante, moyenne ou mauvaise en fonction du contact entre le tendon bicipital et la tubérosité radiale, de fac ¸on arbitraire puisqu’aucune étude ne s’est auparavant intéressée à ce paramètre.

Analyse statistique La liaison entre deux variables qualitatives a été étudiée à l’aide du test du Chi2 de maximum de vraisemblance ou du test exact de Fisher selon la distribution des données. Les variables quantitatives ont été étudiées à l’aide d’une analyse de variance : le test de Duncan a été utilisé dans le cas de comparaisons multiples (plus de deux moyennes) et le test non paramétrique de Spearman pour étudier la corrélation entre deux variables quantitatives. Le seuil de significativité des tests statistiques est de 5 %.

Résultats Les données de l’intervention

Figure 2 Technique de réinsertion par ancre et faufilage en aller et retour du tendon distal du biceps.

Vingt-cinq fois, deux ancres ont été mises en place dans la tubérosité radiale. Dans un cas une seule ancre a été mise en place et dans deux cas trois ancres ont été insérées. Le nombre de fils faufilant le tendon du biceps brachial a été de

Reinsertion par ancres des ruptures du biceps distal Tableau 1

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Description des ancres utilisées.

Type d’ancre ®

Panalok 3,5 mm (Depuy Mitek ) GII Quickanchor 2,4 mm (Depuy Mitek® ) Super Quickanchor 2,9 mm (Depuy Mitek® ) Bio-suture Tack 3 mm (Arthrex® ) Bio-corkscrew 5 mm (Arthrex® )

Résorbable

Nombre de fils

Type de fil

Oui Non Non Oui Oui

2 1 2 1 2

Résorption lente Non résorbable, haute Non résorbable, haute Non résorbable, haute Non résorbable, haute

résistance résistance résistance résistance

mécanique mécanique mécanique mécanique

deux dans huit cas, trois dans cinq cas, quatre dans 15 cas. Les ancres utilisées et leurs caractéristiques sont résumées dans le Tableau 1.

Évaluation radiologique

Évaluation clinique

• 13 patients (46 %) n’avaient pas d’ossifications ; • dix patients (35 %) présentaient une ossification de la tubérosité radiale en regard du point d’entrée des ancres ; • sept patients (19 %) présentaient une ossification intratendineuse sans contact avec la tubérosité radiale (ou son ossification).

Quarante pour cent de complications ont été recensées : • cinq paresthésies dans le territoire du nerf cutané antebrachial latéral et trois paresthésies dans le territoire sensitif radial, toutes résolues spontanément ; • deux syndromes algoneurodystrophiques, résolus après six mois de traitement médical ; • une paralysie radiale motrice complètement résolue à un an postopératoire. Les mobilités mesurées sont résumées dans le Tableau 2. Les mesures de force : • au total, la force en flexion supination était en moyenne à 91 % (121—66) du côté controlatéral ; • quand le côté dominant était opéré, la force était en moyenne à 92 % (121—66) du côté controlatéral ; • quand le côté non dominant était opéré, la force était en moyenne à 87 % (105—66) du côté controlatéral. D’un point de vue subjectif, 96 % des patients étaient très satisfait de l’intervention et désirait se faire opérer selon le même protocole en cas de lésion controlatérale. Aucun patient ne présentait de douleurs résiduelles. En revanche, 75 % des patients ont déclaré ressentir une appréhension lors du port de charges lourdes, en souvenir du traumatisme initial. La reprise de travail s’est effectuée en moyenne à quatre mois postopératoire (0—8) et tous les patients ont repris au même poste de travail qu’avant le traumatisme.

Tableau 2

Flexion Extension Pronation Supination

En radiologie standard (Fig. 3) :

En IRM (Fig. 4) : • 19 (68 %) patients présentaient une réinsertion tendineuse jugée anatomique. Ces résultats ont été considérés comme satisfaisant ; • six (21 %) patients présentaient un fin contact entre le tendon réinséré et la tubérosité radiale mais le tendon était élargi, largement remanié par une ossification tubérositaire envahissant la partie distale du tendon bicipital. Ces résultats ont été considérés comme moyen ; • deux patients présentaient une insertion très fine sur la tubérosité radiale sans ossification tubérositaire et un patient avait une rupture itérative (le patient dont le délai préopératoire était le plus important). Ces résultats ont été considérés comme mauvais (11 %).

Analyse des résultats En fonction du nombre de fils faufilant le tendon du biceps : • deux fils : force côté opérée à 88 % du côté controlatéral ; • trois ou quatre fils : force côté opérée à 94 % du côté controlatéral (p = 0,05).

Résultats en mobilité. Normale

Déficitaire

26 27 28 20

2 (−10◦ ) 1 (−5◦ ) 0 8 (−10◦ 7 cas, −20◦ 1 cas)

En fonction du délai opératoire : • supérieur à 15 jours : force côté opérée à 84 % du côté controlatéral ; • inférieur à 15 jours : force côté opérée à 93 % du côté controlatéral (p = 0,05).

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D. Gallinet et al.

Figure 3

Ossifications radiologiques.

En fonction de la qualité de la réinsertion à l’IRM : • pour les réinsertions jugées satisfaisantes : force côté opéré à 92 % du côté controlatéral ; • pour les réinsertions jugées moyennes ou mauvaises : force côté opérée à 77 % du côté controlatéral (p < 0,05) ; • pour les réinsertions jugées satisfaisantes ou moyennes : le délai préopératoire était de six jours ;

Figure 4

• pour les réinsertions jugées mauvaises : le délai préopératoire était de 34 jours (p < 0,05) ; • le nombre de fils faufilés dans le tendon était en moyenne identique quel que soit la qualité de la réinsertion. En fonction de la présence de calcifications : • présence d’une calcification : force côté opéré à 92 % du côté controlatéral ;

Exemples d’aspect IRM après réinsertion.

Reinsertion par ancres des ruptures du biceps distal • absence de calcification : force côté opéré à 87 % du côté controlatéral (p > 0,05).

Discussion Les critiques de la méthode Il s’agit d’une étude rétrospective, portant sur un faible échantillon, ne permettant donc qu’une analyse statistique de faible puissance. Pour autant peu d’études ont un nombre plus important de patients [9—12]. Pour les mesures de force nous n’avons pu mesurer la force uniquement en supination, du fait de l’absence d’appareil de mesure dans notre service.

Les types de réinsertion Au vu de notre étude, la qualité des résultats cliniques confirme la nécessité de réinsérer les ruptures distales du biceps par rapport au traitement conservateur [5—7]. La fixation chirurgicale du tendon distal du biceps brachial peut s’effectuer de fac ¸on non anatomique par ténodèse sur le tendon du muscle brachial [13] ou alors de fac ¸on anatomique sur la tubérosité radiale. Mais actuellement il est clairement admis que la réinsertion anatomique donne de meilleurs résultats. La ténodèse au muscle brachial ne rétablit pas le rôle supinateur du muscle biceps brachial et laisse persister une diminution importante de la force de flexion [14,15]. En revanche le taux de complications est faible [16]. Actuellement cette technique est donc réservée plutôt aux ruptures vues tardivement ou aux patients plus âgés [9]. La réinsertion transosseuse fut la première technique de réinsertion anatomique [17]. Elle s’effectue par une double voie d’abord antérieure et postérieure. D’après les études biomécaniques, ce type de fixation semble donner la meilleure résistance [18]. En revanche, elle n’est pas dénuée de complications (ossifications avec risque de synostose radioulnaire proximale, neurologiques, perte de mobilité en pronosupination) [8,11,19—21]. Kelly et al. [11] retrouvent 31 % de complications avec cette technique, pour Davison et al. [22] sur huit patients, trois restent douloureux et un a développé une synostose radioulnaire nécessitant une reprise chirurgicale et pour Bisson et al. [23], sur 45 patients, 27 % présentaient des complications. Mais dans cette dernière série, le taux de complications augmentait quand la réparation était effectuée plus de 15 jours après la rupture. Certaines équipes ont modifié la technique en miniinvasif [12], ce qui semble réduire le taux de complications, notamment le risque de synostose radioulnaire proximale. Concernant la récupération de la force, cette technique semble donner de très bons résultats, avec pour Cil et al. [24] 12 % de mieux en flexion que le côté controlatéral et une perte de supination de 11 % et pour Catonné et al. [9], la perte de force en flexion était en moyenne de 5 % et de 15 % en supination. Avec le développement des ancres, celles-ci ont été utilisées dans la réinsertion du tendon distal du biceps brachial depuis le début des années 90 [25,26]. La cicatrisation tendon os ne s’effectue plus en transosseux mais par

249 apposition du tendon sur la corticale osseuse. D’un point de vue biomécanique, il s’agit du moyen de fixation le moins solide [18,27]. Une fois le tendon cicatrisé, la résistance mécanique est semblable aux autres types de fixation [28]. Le principal avantage de cette technique est de supprimer la voie d’abord postérieure responsable des synostoses radioulnaires proximales en respectant la membrane interosseuse. Dans notre étude aucune synostose n’est à déplorer, comme dans la littérature [25,26,29—31], mais le principal problème rencontré est le risque de lésions nerveuses [32,33]. Pour diminuer ce risque, certaines équipes ont développé des techniques mini-invasives [34] et depuis peu des réinsertions arthroscopiques [35,36]. Mais d’une fac ¸on générale il semble qu’une seule voie d’abord antérieure limite le nombre de complications par rapport à une double voie [21]. Concernant la restauration de la force celle-ci semble relativement satisfaisante. Balabaud et al. [29] retrouvent un déficit de 6 % en flexion et aucun déficit en supination. Pour Sotereanos et al. la force en flexion est déficitaire de 10 % et en supination de 5 %. Dans notre série, la mesure de la flexion est déficitaire de 9 % par rapport au côté controlatéral. Notre étude retrouve une différence de force en fonction du nombre de fils faufilant le tendon. Fogg et al. [37] ont montré que l’anatomie du tendon distal du biceps est constituée d’une série de bandes distinctes, de nombre variable, connectées entre elles par d’autres bandes obliques. Les auteurs suggèrent qu’une réinsertion avec une seule suture ne rend pas l’anatomie originale du biceps distal en ne répartissant pas correctement les différentes bandes autour de la tubérosité radiale. Notre étude semble confirmer ces conclusions, puisque plus de fils est équivalent à plus d’ancres et donc une meilleure réinsertion des différentes bandes tendineuses sur la tubérosité radiale. Même si son interprétation doit rester prudente, nous recommandons la mise en place de deux ancres avec un minimum de trois fils faufilant le tendon. Mixe entre la réinsertion transosseuse et la réinsertion par ancre, la réinsertion par endoboutton permet d’allier les avantages de chaque technique (fixation transosseuse par une seule voie d’abord) tout en diminuant les risques de synostose radio-ulnaire [38—40]. D’un point de vue biomécanique, l’endoboutton semble également donner la meilleure résistance [27] par rapport aux sutures transosseuse et ancres. Pour Greenberg et al. [39], les résultats cliniques sont excellents avec une force en flexion à 97 % et en supination à 82 %. Trente pour cent des patients présentent des ossifications hétérotopiques et 20 % des paresthésies dans le territoire du nerf cutané latéral antebrachial, spontanément résolutives. Pour Peeters et al. [40], la force de flexion est de 80 % et de supination 91 %. En revanche, l’endoboutton a du être ôté dans un cas (désengagement de celui-ci).

Le délai préopératoire Au travers de cette étude, on s’aperc ¸oit que le délai préopératoire a une influence négative sur le résultat clinique : au-delà de 15 jours, les patients risquent une perte de force

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Figure 5 tomique.

D. Gallinet et al.

Cicatrisation tendineuse satisfaisante malgré l’ossification tubérositaire, avec contact tendon/tubérosité radiale ana-

plus importante. De plus, l’étude IRM nous montre des résultats moins bons dans la cicatrisation tendon os en cas de réinsertion chirurgicale tardive, la seule rupture itérative de la série étant d’ailleurs survenue chez le patient dont le tendon a été réinséré trois mois après le traumatisme. On peut raisonnablement admettre qu’il s’agissait dans ce cas d’une erreur d’indication, une greffe tendineuse aurait probablement été nécessaire [11,15,41]. Dans la littérature, la qualité du résultat clinique n’est pas étudiée par rapport au délai opératoire. En revanche, on retrouve un risque accru de complications, notamment neurologiques, du fait d’une dissection plus difficile dans un tissu cicatriciel [9,11]. Pour notre part nous n’avons pas retrouvé cette notion, les complications étant équivalentes en fonction du délai préopératoire.

Les ossifications hétérotopiques Notre série a révélé un taux surprenant d’ossifications : seulement 46 % des patients n’avaient pas d’ossification. Trois types ont été retrouvés :

• des ossifications tubérositaires pures, situées uniquement sur la tubérosité radiale avec une réinsertion satisfaisante du tendon à l’IRM sur la tubérosité radiale (Fig. 5) ; • des ossifications tubérositaires envahissaient la partie terminale du tendon et celui-ci n’avait aucun contact avec la tubérosité radiale (Fig. 6) ; • des ossifications purement intratendineuses, étagées le long du tendon bicipital. Ce dernier avait un contact satisfaisant en distalité avec la tubérosité radiale à l’IRM. D’une fac ¸on globale, ces ossifications n’avaient aucun retentissement sur le résultat clinique des patients. En revanche, dans certains cas où l’ossification de la partie terminale du tendon empêchait son contact avec la tubérosité radiale (réinsertions jugées moyennes ou mauvaises à l’IRM), la force était déficitaire par rapport aux réinsertions jugées satisfaisantes. Dans la littérature, la présence d’ossifications hétérotopiques est régulièrement décrite [15,16,33,39,41]. Leur taux varie de l’absence [30] à 50 % de présence [15]. Mais d’après ces mêmes auteurs, leur présence ne semble pas affecter le résultat clinique. Quelques fois elles ont été l’explication de douleurs persistantes après la réinsertion

Figure 6 Cicatrisation tendineuse moyenne à cause d’une ossification tubérositaire, avec contact tendon/tubérosité radiale perturbé par cette ossification.

Reinsertion par ancres des ruptures du biceps distal sans que cela ne soit réellement vérifiable [16]. Dans notre étude, tous les patients porteurs d’ossifications étaient indolores à la révision.

La qualité de cicatrisation tendon/os cortical D’une fac ¸on générale, la réinsertion par ancre du tendon bicipital sur la tubérosité radiale permet de restaurer une anatomie proche de la normale, puisque 68 % des IRM ont retrouvé une réinsertion jugée satisfaisante. Seules trois IRM ont retrouvé une réinsertion jugée mauvaise : il s’agissait des trois délais préopératoires les plus longs de la série (50, 30 et 21 jours) et ces trois patients ont un résultat clinique moins bon. Pour les autres IRM dont la réinsertion a été jugée moyenne, il s’agissait des cas d’ossification tubérositaire envahissant la partie terminale du tendon bicipital. On ne peut comparer la qualité de réinsertion par ancre aux autres moyens de fixation, puisqu’aucune étude n’a évalué la qualité de cicatrisation tendineuse par IRM.

Conclusion Notre étude confirme la qualité du résultat clinique et affirme la qualité de la cicatrisation tendon/os cortical, dans les réinsertions du tendon distal du muscle biceps brachial par ancres. La restauration des mobilités est dans la grande majorité des cas complète et la restauration de la force est incomplète mais suffisante pour n’engendrer aucune séquelle dans la vie quotidienne de nos patients. La voie d’abord antérieure unique évite le risque de synostose radioulnaire proximale par respect de la membrane interosseuse, mais expose à un risque non négligeable de complications neurologiques, dans la plupart des cas bénignes (paresthésies) et spontanément résolutives. Même si la population étudiée est faible, pour optimiser le résultat clinique final nous pouvons conseiller : • le nombre de fils faufilant le tendon bicipital doit être au minimum de trois, l’utilisation d’ancres à double brin est donc préférable aux ancres à simple brin ; • le délai préopératoire ne doit pas excéder 15 jours. Dans le cas contraire une greffe tendineuse ou une ténodèse au tendon du muscle brachial doit être préférée. Les ossifications hétérotopiques sont présentes dans plus de 50 % des cas, mais ne semblent pas jouer sur le résultat clinique final sauf pour les ossifications tubérositaires envahissant la partie terminale du tendon réinséré, car le contact tendon tubérosité radiale est de mauvaise qualité, à l’origine d’une perte de force. En revanche, ces ossifications sont dans tous les cas indolores dans notre série. L’étude IRM a permis de montrer que 70 % des réinsertions cicatrisaient de fac ¸on anatomique. La qualité de cicatrisation tendon/os cortical est donc tout à fait satisfaisante.

Déclaration d’intérêts Les auteurs déclarent n’avoir aucun conflits d’intérêts en relation avec cet article.

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