© Masson, Paris, 2006.
Gastroenterol Clin Biol 2006;30:337-339
ANALYSE COMMENTÉE
Résultat de la coloscopie virtuelle : intérêt et limites des méta-analyses en vue d’une amélioration de la pratique clinique avec, dans un nombre limité de cas, mise en évidence de lésions à l’occasion d’un examen préalable comme une recto-sigmoïdoscopie. Dans sept études, les coupes tomodensitométriques étaient effectuées après injection de produit de contraste et dans quatre études, après ingestion orale de produit de contraste [2, 3, 6, 7].
Meta-analysis: computed tomographic colonography MULHALL BP, VEERAPPAN GR, JACKSON JL Ann Intern Med 2005;142:635-50.
Les auteurs rapportent une sensibilité globale de la CV, pour le diagnostic de polype, exprimée par malade de 70 %, toutes tailles confondues, variant de 21 à 96 % selon les études avec, notamment dans une étude multicentrique [18], des résultats particulièrement étonnants. Pour les polypes de taille inférieure à 6 mm (8 études), cette sensibilité par malade varie de 14 à 86 % avec une valeur moyenne de 48 %. Pour les polypes de taille comprise entre 6 et 9 mm (12 études), la sensibilité moyenne par malade est de 70 % (extrêmes de 30 à 95 %). Pour les polypes mesurant plus de 9 mm (19 études), cette valeur atteint 85 % (extrêmes de 48 à 100%). La spécificité de la CV par malade était globalement de 86 % et variait pour les trois tailles de polypes de 91 % pour ceux de taille inférieure à 6 mm à 97 % pour les polypes de taille supérieure ou égale à 9 mm.
D
éveloppée depuis 1994, la coloscopie virtuelle (CV) fait l’objet de progrès techniques qui en améliorent les performances. Depuis l’évaluation de l’ANAES en 2000, de nombreuses améliorations techniques permettent la détection de lésions coliques de plus petite taille : meilleure résolution des images, logiciels d’interprétation multifonctions, modalités de préparation allégées, utilisation d’un marquage des selles. Ces améliorations soulèvent la question de la place de ce nouvel outil dans la stratégie de diagnostic et de dépistage du cancer colo-rectal (CCR). L’hétérogénéité des résultats apportés par différentes études au cours des dix dernières années rend importante la méta-analyse proposée par Mulhall et al. [1]. Elle a pour objectif d’apporter des éléments de réponse sur les performances de cet examen et donc sur sa place potentielle.
Les sensibilités des études avec TDM monodétecteurs (9 études) et TDM multidétecteurs (7 études), ont également été analysées. Il en est de même pour la comparaison entre les techniques d’imagerie 2D suivies de 3D en cas de lésion versus 2D et 3D de façon concomitante, les résultats étant meilleurs pour ce dernier mode d’imagerie. La sensibilité globale par malade rapportée pour les multidétecteurs était 95 % mais celle-ci présentait comme biais l’intégration dans ce calcul, faute d’autres données disponibles, de valeurs de sensibilité pour la détection des polypes de plus de 6 ou de 9 mm et non pour la détection des polypes de toute taille [1, 2, 4, 13, 15]. Pour les scanners monodétecteurs la sensibilité globale par malade était 82 %, avec les mêmes limites que précédemment [3, 6, 16].
Les auteurs ont procédé à une sélection d’études à partir de données fournies par les banques habituelles (PubMed, EMBASE, MEDLINE et Cochrane) sur une période de trente ans, de 1975 à 2005. Les caractéristiques de ces études, toutes prospectives et réalisées en simple aveugle (interprétation de l’imagerie sans connaissance des résultats de la technique de référence) ont été recueillies par deux auteurs de façon indépendante. Ont été renseignés : les caractéristiques démographiques de la population étudiée, le risque de CCR (inclusion de sujets symptomatiques ou à risque élevé de CCR notamment), l’étude des biais méthodologiques et des facteurs confondants. Sur le plan technique, les auteurs ont intégré les données suivantes : imagerie 2 dimensions (2D) et 3 dimensions (3D) de façon concomitante ou 2D suivie d’analyse 3D en cas d’anomalie repérée; collimation; type de scanner (mono ou multidétecteur); utilisation de produit de contraste intra-veineux ou d’un marquage des selles par voie orale; nature du logiciel d’interprétation utilisé. Les résultats analysés étaient la sensibilité et la spécificité, exprimées par malade et par polype avec analyses complémentaires selon la taille des polypes, en fonction des résultats de l’examen de référence (chirurgie ou coloscopie, avec second examen éventuel en cas de résultat discordant avec la coloscopie virtuelle). Lorsque pour une étude donnée, deux résultats étaient exprimés du fait d’une double interprétation, une moyenne était effectuée. Dans quelques études, la détection des adénomes, et non des polypes, faisait spécifiquement l’objet de l’étude [2, 8, 11]. Par ailleurs, dans 7 études, l’analyse se limite à la détection des polypes de taille supérieure à 6 mm [2-4, 13-16].
L’intérêt de cette méta-analyse réside dans la large inclusion mais faible sélection des études, permettant des comparaisons entre les différents modes et techniques de CV, exprimées également en fonction de la taille des polypes. Cependant, la très grande proportion d’études portant sur des sujets symptomatiques ou à risque élevé de cancer est regrettable car peu transposable lorsque l’on se place dans un objectif de dépistage du CCR. En outre, il existe des biais d’inclusion en particulier la co-existence d’analyses ayant pour objet la détection d’adénomes et d’autres s’intéressant à celle de polypes sans préjuger de leur nature, l’intégration des études avec injection intra-veineuse d’iode, et la prise en compte pour l’analyse toute taille, d’études n’intégrant que les polypes de taille supérieure à 6 mm [2-4, 13-16]. Nous avons également, mais plus tardivement réalisé une analyse portant sur la coloscopie virtuelle sur la période 1997-2005 sélectionnant 39 études informatives. Considérés individuellement, les chiffres issus de notre recueil montrent une concordance avec les résultats extraits dans la méta-analyse précédente [1] pour la plupart des études. Les différences mises en évidence sont liées à la sélection de quelques études supplémentaires et au choix effectué pour l’expression des résultats.
Trente-trois études ont été retenues selon les critères définis précédemment, incluant un total de 6 393 malades avec des extrêmes par étude de 20 [1] à 1 233 [2]. Vingt-neuf études portaient sur des sujets symptomatiques ou à risque élevé de CCR
Vingt-cinq études portant sur un total de 1 661 sujets ont permis le calcul d’une sensibilité globale par malade de 66,1 %.
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Nous n’avons pas retenu pour ce calcul de sensibilité « toutes tailles » l’étude de Pickhardt [2] qui malheureusement ne fournit des renseignements que sur la détection des adénomes de plus de 5 mm uniquement. Il en est de même pour les études de Fletcher [3] et Rockey [4] dont les résultats concernent des polypes de taille supérieure à 5 mm. Notre méta-analyse retrouve une spécificité globale, toutes tailles et toutes études prises en compte, de 79,3 %.
ressant qu’aux malades avec des lésions supérieures à 5 mm ou ayant recours à une injection intra-veineuse d’iode. Ce résultat et la bonne sensibilité exprimée pour les malades porteurs de lésions supérieures à 6 mm (89 à 90 %) après marquage des selles plaident pour une plus grande attention aux protocoles de marquage des selles et des résidus liquides lors des préparations orales, et de la disponibilité de ces produits adaptés en France.
Nous avons procédé à une analyse de la sensibilité par malade selon la taille des polypes : 35,1 % en cas de taille inférieure à 5 mm, 75,4 % pour une taille supérieure ou égale à 6 mm, 80 % pour les polypes de plus de 9 mm. Ces sensibilités exprimées par polype étaient égales à 30,6 % pour les polypes inférieurs à 5 mm, 67,5 % pour les polypes de taille supérieure à 6 mm, 60,5 % en cas de taille comprise entre 6 et 9 mm et 77 % pour les polypes de 10 mm et plus.
Sabrina LAYEC (1), Bernard BRANGER (2), Charlotte JUHEL (3), Pierre-Nicolas D’HALLUIN (1), Damien OLIVIÉ (3), Jean-François BRETAGNE (1), Yves GANDON (3), Denis HERESBACH (1) (1) Service des Maladies de l’Appareil Digestif, (2) Département de santé publique et CCLIN, (3) Département d’Imagerie Médicale, CHU Pontchaillou, 35 033 Rennes.
Ces résultats de notre méta-analyse, moins bons que ceux rapportés par Mulhall et al. [1], nous conduisent à exposer des analyses complémentaires. Lorsque l’on s’intéresse à l’utilisation ou non de produit de contraste, il n’est pas mis en évidence de différence significative : sensibilité par malade de 66,1 % pour les études avec et sans injection, 66,4 % lorsque seules sont prises en compte les études sans injection. Pour ces études sans injection de produit de contraste (plus adaptées à l’objectif de dépistage), aucune différence significative entre les séries incluant des sujets à risque élevé ou symptomatiques et celles portant sur uniquement sur des sujets à risque moyen n’est mise en évidence : 66,4 % pour les séries incluant des malades « tous risques confondus » ; 66 % pour les séries n’incluant que des sujets à risque élevé de CCR (sensibilité exprimée par malade, toutes tailles confondues). Par contre, l’analyse des études avec TDM mono [3, 5-12] versus multidétecteurs [4, 13, 15-25], pour les études ne procédant à aucune injection de produit de contraste, met en évidence une supériorité des études utilisant des scanners monodétecteurs sans qu’aucune explication ne puisse être retenue si ce n’est l’exclusion des études ne retenant que les polypes supérieurs à 5 mm : sensibilité par malade toutes tailles confondues des études avec scanners monodétecteurs de 75,2 % contre 61 % pour les scanners multidétecteurs. Exprimées par polype, toujours pour les séries sans injection et quelle que soit la taille des polypes, ces sensibilités sont de 58,8 % pour les études avec monodétecteurs versus 34,9 % pour les séries multidétecteurs. Cependant, toutes études prises en compte (avec ou sans injection intra-veineuse, risque moyen ou élevé de CCR), la comparaison multi versus mono détecteur nous permet, de façon semblable à celle décrite par Mulhall et al. [1], de dégager une supériorité en faveur de l’utilisation de scanners multidétecteurs : 79 % pour TDM multi, 68,7 % pour TDM monodétecteurs (la série de Cotton [18] qui utilise les 2 et dont les résultats sont faibles n’est pas prise en compte).
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Nous nous sommes par ailleurs intéressés à l’apport d’un marquage des selles par voie orale et avons ainsi sélectionné 6 études [2, 3, 6-9] dont 4 [2, 22, 23, 26] avec scanners multidétecteurs: la sensibilité globale par malade est 75,2 % (spécificité de 81,2 %), et atteint 88,6 % lorsque la taille dépasse 6 mm et 90 % lorsqu’elle atteint 10 mm. Exprimées par polype, ces sensibilités sont respectivement égales à 43,8 %, 83,1 % et 90,4 %.
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Au total, la méta-analyse de Mulhall et al. et la nôtre montrent une sensibilité de la CV par malade (indicateur pour différencier les indications de la coloscopie diagnostique et thérapeutique) de 70 et 66 % (spécificité de 86 et 79 %) et de 85 et 80 % pour les polypes de plus de 9 mm. À notre avis, ces données ne sont pas exclusivement liées au recours au scanner mutidétecteur, comparées à celles avec monodétecteur car cette apparente meilleure sensibilité globale par malade (95 vs 82 % ou 75 vs 61 %) disparaît lorsque l’on exclut les études ne s’inté-
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