Rôle de l’observatoire REVELA13 dans l’épidémiologie des tumeurs de vessie des femmes dans les Bouches-du-Rhône

Rôle de l’observatoire REVELA13 dans l’épidémiologie des tumeurs de vessie des femmes dans les Bouches-du-Rhône

Modele + ARTICLE IN PRESS PUROL-1880; No. of Pages 7 Progrès en urologie (2018) xxx, xxx—xxx Disponible en ligne sur ScienceDirect www.sciencedire...

NAN Sizes 2 Downloads 34 Views

Modele +

ARTICLE IN PRESS

PUROL-1880; No. of Pages 7 Progrès en urologie (2018) xxx, xxx—xxx

Disponible en ligne sur

ScienceDirect www.sciencedirect.com

ARTICLE ORIGINAL

Rôle de l’observatoire REVELA13 dans l’épidémiologie des tumeurs de vessie des femmes dans les Bouches-du-Rhône The REVELA13 observatory to study new cases of bladder tumor among women living in Bouches-du-Rhône county T. Martin a,∗,b, K. Mantey c, R. Boissier a,p, P. Albert d, V. Grisoni e, E. Lechevallier a,p, D. Barriol f, G. Gravis g, G. Pignot h, D. Rossi i, J. Lorca j, C. Rattier k, C. Eghazarian l, N. Daou m, J.L. Davin n,1, C. Clément n, A. Akiki a,b, L. Pascal o, G. Karsenty a,p a

Service d’urologie et de transplantation rénale, hôpital de la Conception, 147, boulevard Baille, 13005 Marseille, France b Service d’urologie, hôpital Edmond Garcin, 13400 Aubagne, France c Observatoire régional d’épidémiologie pour la région PACA, 13005 Marseille, France d Service d’urologie, hôpital Saint Joseph, 13008 Marseille, France e Service d’urologie, hôpital Européen, 13003 Marseille, France f Service de chirurgie urologique, polyclinique du Parc Rambot, 13100 Aix-en-Provence, France g Département d’oncologie médicale, institut Paoli-Calmettes, 13009 Marseille, France h Service d’urologie, institut Paoli-Calmettes, 13009 Marseille, France i Service de chirurgie urologique, hôpital Nord, 13015 Marseille, France j Service d’urologie, clinique générale de Marignane, 13700 Marignane, France k Service d’urologie, clinique Vignoli, 13300 Salon-de-Provence, France l Service de Chirurgie urologique, centre hospitalier intercommunal Aix-Pertuis, 13100 Aix-en-Provence, France m Service d’urologie, clinique Axium, 13100 Aix-en-Provence, France n Service d’urologie, clinique Rhône Durance, 84000 Avignon, France o Santé Publique France, Cire Paca-Corse, 94410 Saint-Maurice, France p Aix Marseille université, 13005 France Rec ¸u le 23 mars 2018 ; accepté le 7 septembre 2018

∗ 1

Auteur correspondant. Adresse e-mail : [email protected] (T. Martin). Auteur décédé.

https://doi.org/10.1016/j.purol.2018.09.004 1166-7087/© 2018 Elsevier Masson SAS. Tous droits r´ eserv´ es.

Pour citer cet article : Martin T, et al. Rôle de l’observatoire REVELA13 dans l’épidémiologie des tumeurs de vessie des femmes dans les Bouches-du-Rhône. Prog Urol (2018), https://doi.org/10.1016/j.purol.2018.09.004

Modele + PUROL-1880; No. of Pages 7

ARTICLE IN PRESS

2

T. Martin et al.

MOTS CLÉS Cancer ; Vessie ; Femme ; Épidémiologie

KEYWORDS Bladder cancer; Female; Epidemiology

Résumé Introduction. — L’observatoire REVELA13 est un outil épidémiologique unique recensant les nouveaux cas de tumeur du rein, de vessie et de leucémies aiguës dans le département des Bouches-du-Rhône. L’objectif de ce travail était d’analyser pour la première fois les données de cet observatoire pour les nouveaux cas de tumeurs de vessie de la femme ≥T1 dans les Bouches-du-Rhône de 2012 à 2014. Matériel. — Il s’agissait d’une étude épidémiologique descriptive observationnelle. Quinze variables non nominatives de la base de données de REVELA13 ont été analysées pour décrire les caractéristiques cliniques et anatomopathologiques des cas incidents ainsi que leur répartition spatio-temporelle. Les taux d’incidence exprimés en nouveaux cas par an pour 100 000 habitants ont été standardisés sur l’âge mondial, calculés avec leurs intervalles de confiance à 95 % et comparés aux estimations nationales pour la même période. Résultats. — Au total, 291 nouveaux diagnostics de tumeurs vésicales ont été enregistrés soit une incidence standardisée sur l’âge mondial de 3,85 [3,32—4,37] nouveaux cas par an pour 100 000 habitants, supérieure de 54 % aux estimations nationales de 2012 et 2015. Le sexratio était de 19,41 % (F/H) et l’âge médian de survenue de 75,9 ans. Les tumeurs étaient majoritairement sans infiltration du muscle (52 %), de haut grade (69 %) et sans carcinome in situ (Cis) associé (49 %). Les 2 territoires les plus touchés étaient ceux de Marseille et d’Aubagne-La Ciotat. Conclusion. — L’observatoire REVELA13 a permis d’améliorer nos connaissances épidémiologiques sur les tumeurs de vessie féminines dans les Bouches-du-Rhône et de mettre en évidence une sur-incidence locale. Niveau de preuve.— 3. © 2018 Elsevier Masson SAS. Tous droits r´ eserv´ es.

Summary Introduction. — The REVELA13 observatory is a unique epidemiological tool listing the new cases of kidney tumors, bladder tumors and acute leukaemias in the Bouches-du-Rhône county (France). Aim was to exploit for the first time data from this observatory regarding new cases of bladder tumors ≥T1 in women from 2012 to 2014. Materials. — This epidemiological study was observational and descriptive. Fifteen nonnominative variables from the REVELA13 database were analyzed in order to describe the clinical and pathological characteristics of the incident cases as well as their spatial and temporal distribution. The incidence rates expressed in new cases per year per 100 000 inhabitants were standardized on the world age, calculated with 95 % confidence intervals and compared to national estimates for the same period. Results. — Incident bladder tumor cases were recorded in 291 women, corresponding to a standardized incidence on the world age of 3.85 [3.32—4.37] new cases per year per 100,000 population, 54 % higher than the national estimates of 2012 and 2015. Median age of diagnostic was 75.9 years. Sex ratio was 19.41 % (W/M). Tumors were predominantly nonmuscle-invasive (52 %), high grade (69 %) and without associated carcinoma in situ (Cis) (49 %). The two most affected territories were Marseille and Aubagne-La Ciotat. Conclusion. — The REVELA13 observatory has improved our epidemiological knowledge on female bladder tumors in Bouches-du-Rhône county and highlighted a local over incidence. Level of evidence. — 3. © 2018 Elsevier Masson SAS. All rights reserved.

Introduction Le cancer de vessie est un enjeu de santé publique à l’échelle mondiale. En 2012, 430 000 nouveaux cas et 165 000 décès le plac ¸aient au 9e rang des cancers les plus e fréquents et au 13 cancer des plus meurtriers [1]. En France

la même année, avec 11 965 nouveaux cas et 4772 décès, c’était le 5e cancer le plus fréquent et le 7e le plus meurtrier [2]. Le cancer de vessie est également un enjeu économique puisque lorsqu’on prend en compte son traitement et son suivi, on estime son coût à 200 000 $ par patient, soit deux fois plus que le cancer du poumon par exemple [3].

Pour citer cet article : Martin T, et al. Rôle de l’observatoire REVELA13 dans l’épidémiologie des tumeurs de vessie des femmes dans les Bouches-du-Rhône. Prog Urol (2018), https://doi.org/10.1016/j.purol.2018.09.004

Modele + PUROL-1880; No. of Pages 7

ARTICLE IN PRESS

L’observatoire REVELA13 dans l’épidémiologie des tumeurs de vessie des femmes

Figure 1.

3

Carte des registres de surveillance des cancers en France en 2017.

Bien que 3 à 5 fois moins touchées que les hommes par le cancer de vessie, les femmes présentent une maladie plus avancée au diagnostic ainsi qu’un plus fort taux de récidive et de mortalité après cystectomie [3]. La tendance évolutive de l’incidence du cancer de vessie chez la femme est à la hausse contrairement à celle de l’homme [1,2]. Plusieurs hypothèses sont avancées pour expliquer ces différences hommes/femmes : exposition moindre aux carcinogènes professionnels, statut génétique, rôle hormonal protecteur et troubles mictionnels révélateurs improprement attribués à des infections ou au vieillissement vésical responsables d’un retard au diagnostic [3—6]. Le système de surveillance du cancer en France repose actuellement sur le réseau FRANCIM (FRANce Cancer Incidence et Mortalité) dont la vocation est d’estimer les taux d’incidence et de mortalité de tous les cancers au niveau national. Il est composé de 14 registres généraux répartis sur 19 départements couvrant 24 % de la population. Il n’existe pas de registre dans le département des Bouchesdu-Rhône (BdR) ni en région Provence-Alpes-Côte-d’Azur (PACA) (Fig. 1). Suite à l’interpellation des autorités sanitaires par des associations de riverains, de médecins et d’élus locaux, l’observatoire REVELA13 est né en 2011 afin de répondre objectivement à la perception par la population résidant à proximité de « points noirs environnementaux » dans le département des Bouches-du-Rhône d’un nombre élevé de cancers. Il recueille depuis le 2 avril 2012 les nouveaux cas de cancers du rein, de vessie et de leucémie aiguë chez les adultes résidant dans ce département. En l’absence de données locales concernant les cancers de vessie dans les Bouches-du-Rhône, et plus

particulièrement sur les spécificités féminines défavorables nous avons entrepris d’exploiter pour la première fois les données de l’observatoire REVELA13 concernant les nouveaux cas de cancers de vessie féminins. L’objectif de ce travail était de décrire à partir des données de l’observatoire REVELA13, l’incidence, les caractéristiques épidémiologiques et la distribution géographique des nouveaux cas de tumeurs de vessie infiltrant au moins le chorion (≥T1) survenus entre le 2 avril 2012 et le 31 décembre 2014 chez les femmes adultes résidant dans les Bouchesdu-Rhône.

Matériel et méthodes Il s’agissait d’une étude descriptive analytique. Les cas étaient définis par des femmes adultes résidant dans les Bouches-du-Rhône au moment du diagnostic et présentant un premier diagnostic de tumeur de vessie infiltrant au moins le chorion (≥T1) entre le 2 avril 2012 et le 31 décembre 2014. Les tumeurs de stades Ta et Cis n’ont pas été prises en compte afin de pouvoir comparer nos taux d’incidence avec les valeurs nationales. En effet, les taux d’incidence à l’échelle nationale sont calculés sur les stades égaux ou supérieurs au stade T1 conformément aux règles d’enregistrement et de validation issues des recommandations internationales du Centre International de Recherche sur le Cancer (CIRC), du réseau européen des registres des cancers et du réseau des registres des cancers franc ¸ais FRANCIM. Le grade tumoral etait défini selon la classification OMS 2004. Quinze variables non nominatives issues de la base de données de REVELA13 ont été analysées permettant

Pour citer cet article : Martin T, et al. Rôle de l’observatoire REVELA13 dans l’épidémiologie des tumeurs de vessie des femmes dans les Bouches-du-Rhône. Prog Urol (2018), https://doi.org/10.1016/j.purol.2018.09.004

Modele + PUROL-1880; No. of Pages 7

ARTICLE IN PRESS

4

T. Martin et al. Tableau 1

15 variables non nominatives issues de la base de données de l’observatoire REVELA13.

Date de signalement Type de signalement Date de diagnostic Âge au diagnostic Lieu du domicile

Établissement déclarant Statut établissement Base diagnostique RCP déclarante Cabinet d’anatomopathologie

Stade Grade Taille Cis associé Uni ou multi focal

RCP : réunion de concertation pluridisciplinaire ; Cis : carcinome in situ.

de décrire les caractéristiques cliniques et anatomopathologiques des cas incidents ainsi que leur répartition géographique après accord et engagement de confidentialité auprès de santé publique France (Tableau 1). Avant son déploiement, l’observatoire REVELA13 a rec ¸u l’avis favorable du comité consultatif sur le traitement de l’information en matière de recherche dans le domaine de la santé (avis favorable no 11569 du CCTIRS du 21 octobre 2011), les autorisations de la commission national de l’informatique et des libertés (autorisations CNIL no 911545 du 21 mars 2012 et DR-2014-442 du 8 octobre 2014) ainsi que l’accord des médecins partenaires. Le recueil de données de l’observatoire s’appuie sur le signalement direct (Matériel complémentaire, no 1) par tout médecin, adhérant au réseau de l’observatoire REVELA13, à l’origine d’un nouveau diagnostic de cancer et par le signalement indirect de cas au travers d’extractions trimestrielles des bases de données centralisant les fiches de réunions de concertation pluridisciplinaire (RCP). En 2015, ces données ont été consolidées par une étude d’exhaustivité menée auprès des départements d’information médicale (DIM) et des laboratoires d’anatomopathologie pour cette période. Les données des cas validés sont complétés, avec l’accord du médecin signalant, à partir des dossiers médicaux des patients et saisies sur une base de données informatisée dédiée. Les analyses statistiques ont été réalisées en collaboration avec l’observatoire REVELA13 en suivant les règles de statistiques épidémiologiques utilisées par les registres du réseau FRANCIM et le service de biostatistiques des hospices civils de Lyon. Les taux d’incidence exprimés en nouveaux cas par an pour 100 000 habitants ont été standardisés sur l’âge mondial (Matériel complémentaire, no 2), calculés avec leurs intervalles de confiance à 95 % et comparés aux estimations nationales pour la même période. Les populations étudiées sont issues des données nationales de l’institut national de la statistique et des études économiques (INSEE) recensant chaque année la population franc ¸aise par sexe et par âge pour toutes les communes et arrondissements.

Résultats Entre le 2 avril 2012 et le 31 décembre 2014, 291 cas de nouveaux cancers de vessie chez la femme (67 en 2012, 107 en 2013 et 117 en 2014) ont été recueillis dans les Bouches-du-Rhône, contre 1208 chez l’homme, soit un sexratio femmes/hommes de 19,41 %. Le taux standardisé sur l’âge mondial (TSM) était de 3,85 [3,32—4,37] nouveaux cas

Tableau 2 Répartition des cas incidents par établissement déclarant et statut associé. Établissement déclarant

Dpt

Statut

Cas

CHU Conception CHU Nord CH Martigues CH Aix CH Arles CH Salon CH La Ciotat

13 13 13 13 13 13 13

Public Public Public Public Public Public Public

25 14 4 8 4 1 1

Hôpital St Joseph Hôpital Européen Polyclinique du Parc Rambot Hôpital Beauregard Hôpital Casamance Clinique Chanteclerc Clinique Bouchard Clinique Marignane Clinique Vignoli Clinique Vert Coteau Clinique Axium Clinique La Ciotat Clinique Résidence du Parc Clinique Jeanne d’Arc Clinique Rhône Durance Clinique Bonneveine Hôpital Istres Cliniques privées Nîmes

13 13 13 13 13 13 13 13 13 13 13 13 13 13 84 13 13 13

Privé Privé Privé Privé Privé Privé Privé Privé Privé Privé Privé Privé Privé Privé Privé Privé Privé Privé

36 35 23 19 15 13 10 10 11 8 6 6 5 5 5 4 3 2

Institut Paoli Calmettes (IPC) Institut Ste Catherine

13 84

CLCC CLCC

17 1

Dpt : département ; CLCC : centre de lutte contre le cancer.

par an pour 100 000 habitants. L’âge moyen au diagnostic était de 74,12 ans, l’âge médian de 75,9 ans, l’âge minimum de 40,7 ans et l’âge maximum de 97,9 ans. Les signalements se sont étalés entre le 9 mai 2012 et le 15 avril 2017. Cent dix-neuf cas (41 %) sont issus de signalements directs, 125 cas (43 %) sont issus de signalements indirects et 47 nouveaux cas (16 %) ont été ajoutés à la base de données après réalisation d’une enquête interne d’exhaustivité. Deux cent-seize cas (74 %) ont été diagnostiqués dans des établissements privés, 57 cas (20 %) ont été diagnostiqués dans des établissements publics et 18 cas (6 %) ont été diagnostiqués dans des centres de lutte contre le cancer (Tableau 2).

Pour citer cet article : Martin T, et al. Rôle de l’observatoire REVELA13 dans l’épidémiologie des tumeurs de vessie des femmes dans les Bouches-du-Rhône. Prog Urol (2018), https://doi.org/10.1016/j.purol.2018.09.004

Modele + PUROL-1880; No. of Pages 7

ARTICLE IN PRESS

L’observatoire REVELA13 dans l’épidémiologie des tumeurs de vessie des femmes Tableau 3

5

Caractéristiques générales des 291 cas recensés.

Sex-ratio F/H Âge médian [min—max] Signalement Statut établissement Stade Grade Uni/multifocal Association Cis

19,41 % 75,9 [40,7—97,9] 41 % directs, 43 % indirects et 16 % après enquête d’exhaustivité 74 % privés, 20 % publics et 6 % CLCC 52 % TVNIM et 46 % TVIM (2 % nr) 5 % de FPM, 19 % de bas grade et 69 % de haut grade (7 % nr) 39 % unifocales et 34 % multifocales (27 % nr) 11 % avec Cis et 49 % sans Cis (40 % nr)

F : femme ; H : homme ; CLCC : centre de lutte contre le cancer ; TVNIM : tumeur de vessie n’infiltrant pas le muscle ; TVIM : tumeur de vessie infiltrant le muscle ; Cis : carcinome in situ ; nr : non renseignés ; FPM : faible potentiel de malignité.

Sur les 291 cas détectés, bien qu’enregistrés dans les bases RCP, 44 cas (15 %) n’avaient pas pu être détectés sur les extractions des RCP du fait d’un manque de sensibilité mais l’avaient été à partir des données des DIM et des laboratoires d’anatomopathologie. Les tumeurs étaient majoritairement sans infiltration du muscle (52 %), de haut grade (69 %) et sans Cis associé (49 %). Sur les 147 cas n’infiltrant pas le muscle, 16 cas (11 %) étaient des tumeurs de faible potentiel de malignité, 49 de bas grade (33 %) et 82 de haut grade (56 %). Sur les 123 cas infiltrant le muscle, seuls 5 cas étaient de bas grade (4 %), le reste étant de haut grade (96 %) (Tableau 3). La répartition géographique départementale était hétérogène avec des TSM s’étalant de 2,2 à 5,8 nouveaux cas par an pour 100 000 femmes. Les 2 territoires les plus touchés étaient ceux de Marseille-Ouest et d’Aubagne-La Ciotat (Fig. 2).

Il est à noter qu’aucun nouveau cas de tumeur de vessie féminin n’a été reconnu en maladie professionnelle dans notre département ni dans la région PACA-Corse sur la période 2013—2015 (données de l’institut national de recherche et de Sécurité (INRS), la caisse d’assurance retraite et de la santé au travail région Sud-Est (CARSAT SudEst), et la caisse centrale de la mutualité sociale agricole (CCMSA)).

Discussion Cette étude est la première exploitant des données de l’observatoire REVELA13 et plus spécifiquement celles des cancers de vessie féminins. Elle a permis de décrire les caractéristiques cliniques et anatomopathologiques des 291 cas incidents recensés sur la période 2012—2014. Le taux

Figure 2. Répartition départementale des taux standardisés sur l’âge mondial des tumeurs de vessie féminines des BdR sur la période 2012—2014. BdR : Bouches-du-Rhône ; MRS : Marseille.

Pour citer cet article : Martin T, et al. Rôle de l’observatoire REVELA13 dans l’épidémiologie des tumeurs de vessie des femmes dans les Bouches-du-Rhône. Prog Urol (2018), https://doi.org/10.1016/j.purol.2018.09.004

Modele + PUROL-1880; No. of Pages 7

ARTICLE IN PRESS

6

T. Martin et al. Tableau 4 Comparaison des TSM des tumeurs de vessie chez la femme dans les BdR au niveau national. TSM BdR

TSM France

Période 2012—2014 3,85 [3,32—4,37]

Estimation 2012 2,50

Projection 2015 2,50

TSM : taux standardisé sur l’âge mondial ; BdR : Bouches-duRhône.

standardisé sur l’âge mondial correspondant était de 3,85 [3,32—4,37] nouveaux cas par an pour 100 000 habitants. Au niveau national, le TSM des tumeurs de vessie chez la femme est estimé à 2,5 en 2012 et 2015. Nos résultats sont donc en faveur d’une sur-incidence locale de 54 % par rapport au niveau national (Tableau 4) [3]. Notre population d’étude départementale s’inscrit dans les estimations nationales de 2012 avec un sex-ratio femmes/hommes de l’ordre de 20 % (19,41 % dans les BdR contre 20,19 % au niveau national) et une population un peu plus jeune qu’à l’échelle nationale (âges moyen et médian au diagnostic respectivement de 74,12 et 75,9 ans dans les BdR contre 77 et 79 ans au niveau national) [3]. La sur-incidence locale observée de tumeurs de vessie féminines est confortée par la fiabilité du recueil des données réalisé par l’enquête interne d’exhaustivité sur cette période qui a permis de croiser les données issues de REVELA13 à celles issues des laboratoires d’anatomie pathologique du département et des DIM. De plus, l’observation d’une sur-incidence locale également pour les cas de cancers masculins de vessie contrairement à celles sur des cancers du rein et des leucémies aiguës dans l’observatoire était un argument de confirmation de la réalité de cette sur-incidence. Plusieurs facteurs de risque de survenue de cancer de vessie sont aujourd’hui reconnus avec des risques relatifs variant de 1,4 à 4. Le principal facteur de risque modifiable reste le tabagisme actif responsable de 50 % des nouveaux cas. Sont également reconnus l’exposition professionnelle à des carcinogènes, le sexe masculin, les antécédents de radiothérapie pelvienne, d’infections urinaires chroniques, la prise au long cours de cyclophosphamide (agent alkylant utilisé dans le traitement des lymphomes et des leucémies) ou de pioglitazone (antidiabétique oral n’ayant plus l’AMM en France depuis le 9 juin 2011), les antécédents de bilharziose urinaire dans les zones endémiques et l’exposition à l’arsenic dans l’eau potable. D’autres facteurs de risque de survenue de cancer de vessie, bien que suspectés, ne sont actuellement pas reconnus par manque de preuve scientifique. Il s’agit du tabagisme passif, des facteurs génétiques et des facteurs diététiques. Les expositions environnementales aux carcinogènes font débat [5]. La sur-incidence locale observée dans les Bouches-duRhône peut être expliquée en partie par une sur-incidence du tabagisme actif chez les femmes dans les Bouches-duRhône. En effet, il existe 30 % de fumeuses quotidiennes chez les 15—75 ans en région PACA en 2010 contre 26 % en France métropolitaine. Le tabagisme actif est responsable d’environ 20 à 30 % des nouveaux cas féminins [5,6]. Un fumeur est considéré comme 4 fois plus à risque qu’un

non-fumeur et un ancien fumeur comme 2 fois plus à risque [5]. On retrouve également en 2011 une sur-incidence de 11 % du cancer du poumon chez les femmes en région PACA par rapport à la France. Se pose également la question d’une sur-exposition professionnelle et/ou environnementale aux carcinogènes vésicaux dans notre département. L’exposition professionnelle aux hydrocarbures aromatiques polycycliques (HAP) dérivés de la houille et du charbon, à certaines amines aromatiques (AA), à une nitrosamine (N-nitrosodibutylamine) et à l’arsenic présent dans certains produits phytosanitaires de traitement des vignes et xyloprotecteurs représente le second facteur de risque le plus important, responsable d’environ 5 à 25 % des cas [5,6]. Quant aux facteurs environnementaux, on estime que 22 % des maladies dans le monde et 23 % du nombre total de décès leur sont attribuables. La région ProvenceAlpes-Côte-d’Azur possède de nombreux axes routiers de transit, des aéroports et une forte activité maritime, sources de pollution multiples. Quant au département des Bouches-du-Rhône, il est le terrain de nombreux sites industriels historiques et actuels, sites classés Seveso, ainsi que d’importantes voies maritimes et transports autoroutiers qui pourraient être à l’origine d’expositions professionnelles et environnementales. Le recueil des données au travers de cet observatoire n’a pas vocation à documenter les expositions à l’origine des tumeurs enregistrées. Cependant, la constitution d’une base de données de cancers incidents est une étape indispensable à la réalisation d’études ad-hoc qui auront pour vocation d’explorer les différentes hypothèses d’exposition. Ainsi, deux études sont actuellement en cours, d’une part, pour localiser plus précisément les territoires où l’on observe cette sur-incidence, et, d’autre part, pour documenter les expositions individuelles au sein d’une cohorte prospective de patientes. L’intérêt d’un tel observatoire est multiple : mieux connaître l’épidémiologie locale des tumeurs de vessie grâce à l’analyse de données quasi-exhaustives, et permettre ainsi une meilleure prévention et prise en charge des nouveaux cas de tumeurs de vessie notamment chez la femme, atteinte plus sévèrement que l’homme au moment du diagnostic. Le partage de ces informations via le réseau des urologues et des médecins généralistes des Bouches-du-Rhône permettra d’améliorer notamment leur reconnaissance en maladie professionnelle.

Conclusion L’observatoire REVELA13 est un outil épidémiologique unique dans les Bouches-du-Rhône ayant permis de mettre en évidence une sur-incidence locale des tumeurs de vessie chez la femme. Son existence nous permet d’améliorer nos connaissances épidémiologiques locales sur les tumeurs de vessie et donc de réaliser une meilleure prévention et une meilleure prise en charge de ces patientes. Il constitue également une source de données préalables indispensable à la conduite d’études ad-hoc permettant de dépister et caractériser les éventuelles expositions à l’origine de ces tumeurs.

Pour citer cet article : Martin T, et al. Rôle de l’observatoire REVELA13 dans l’épidémiologie des tumeurs de vessie des femmes dans les Bouches-du-Rhône. Prog Urol (2018), https://doi.org/10.1016/j.purol.2018.09.004

Modele + PUROL-1880; No. of Pages 7

ARTICLE IN PRESS

L’observatoire REVELA13 dans l’épidémiologie des tumeurs de vessie des femmes

7

Remerciements

Références

Merci à l’ensemble des urologues du département des Bouches-du-Rhône et des départements limitrophes collaborant à l’observatoire REVELA13 : A. Akiki, F. Abram, P. Albert, E. Anfossi, F. Arroua, C. Avances, J.P. Baills, D. Barriol, C. Bastide, A. Beraru, S. Bertrand, T. Bodin, M. Boukaram, D. Bretheau, F. Breton, X. Breton, A. Carcenac, A. Chiapello, C. Clément, N. Daou, P.Y. Dauvergne, J.L. Davin, B. De Graeve, V. Delaporte, R. Demoux, J. Deturmeny, S. Droupy, C. Eghazarian, P.O. Fais, A. Ferré, M. Fourmarier, G. Henri, S. Gaillet, G. Gravis, V. Grisoni, G. Karsenty, J. Lacoste, S. Lavilledieu, F. Lay, E. Lechevallier, J. Lorca, W. Manoukian, L. Martin, A. Matte, C. Maurin, A. Monges, T. Negre, G. Perez, G. Pignot, E. Ragni-Ghazarossian, C. Rattier, D. Rossi, S. Rybikowski, N. Siegler, E. Taib, H. Toledano, L. Tomatis, F. Vidal, P. Volpe, L. Wagner, J. Walz, J. Wodey. Merci également à l’ensemble des médecins responsables des DIM et aux anatomopathologistes qui ont participé à l’étude d’exhaustivité.

[1] Antoni S, Ferlay J, Soerjomataram I, Znaor A, Jemal A, Bray F. ‘‘Bladder cancer incidence and mortality: a global overview and recent trends’’. Eur Urol 2016, http://dx.doi.org/10.1016/ j.eururo.2016.06.010. [2] Binder-Foucard F, Belot A, Delafosse P, Remontet L, Woronoff A-S, Bossard N. Estimation nationale de l’incidence et de la mortalité par cancer en France entre 1980 et 2012. Partie 1 — Tumeurs solides. Saint-Maurice (Fra): Institut de veille sanitaire; 2013 [122 p]. [3] Harun F, Halpern JA, Cha EK, Bahadori A, Chromecki TF, Chromecki PI, et al. ‘‘Impact of gender on bladder cancer incidence, staging, and prognosis’’. World J Urol 2011;29(4):457—63, http://dx.doi.org/10.1007/s00345-011-0709-9. [4] Jakub D, Daneshmand S, Fisch M, Lotan Y, Noon AP, Resnick MJ, et al. ‘‘Gender and bladder cancer: a collaborative review of etiology, biology, and outcomes’’. Eur Urol 2016;69(2):300—10, http://dx.doi.org/10.1016/j.eururo.2015.08.037. [5] Maximilian B, Catto JWF, Dalbagni G, Barton Grossman H, Herr H, Karakiewicz P, et al. ‘‘Epidemiology and risk factors of urothelial bladder cancer’’. Eur Urol 2013;63(2):234—41, http://dx.doi.org/10.1016/j.eururo.2012.07.033. [6] Alfred Witjes J, Lebret T, Compérat EM, Cowan NC, De Santis M, Maxim Bruins H, et al. ‘‘Updated 2016 EAU Guidelines on muscle-invasive and metastatic bladder cancer’’. Eur Urol 2016, http://dx.doi.org/10.1016/j.eururo.2016.06.020.

Déclaration de liens d’intérêts Les auteurs déclarent ne pas avoir de liens d’intérêts.

Appendix A. Matériel complémentaire Le matériel complémentaire accompagnant la version en ligne de cet article est disponible sur http://www. sciencedirect.com et https://doi.org/10.1016/j.purol. 2018.09.004.

Pour citer cet article : Martin T, et al. Rôle de l’observatoire REVELA13 dans l’épidémiologie des tumeurs de vessie des femmes dans les Bouches-du-Rhône. Prog Urol (2018), https://doi.org/10.1016/j.purol.2018.09.004