Annales Me´dico-Psychologiques 170 (2012) 692
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Ouverture de la se´ance
Se´ance du lundi 21 mai 2012 – La loi du 5 juillet 2011 Pre´sidence : Professeur Jean-Franc¸ois Allilaire, pre´sident. Le Professeur Jean-Franc¸ois Allilaire, pre´sident, ouvre la se´ance a` 9 h 30. Communication du pre´sident, le Pr Jean-Franc¸ois Allilaire Mesdames, Messieurs, Mes chers colle`gues, Je vous souhaite a` tous la bienvenue, et en particulier a` tous nos colle`gues et amis qui vont nous entretenir de leurs re´flexions a` propos de la loi du 5 juillet 2011. Notre secre´taire ge´ne´ral sera absent aujourd’hui et vous demande de l’en excuser, ainsi que MM. Bie´der, Barrois, Lafont, qui n’ont pu se libe´rer pour participer a` cette se´ance. Vous avez rec¸u le nume´ro 3 des Annales, avec la se´ance de septembre 2011. Avez-vous quelque remarque a` formuler a` ce propos ? Non, je conside`re que son proce`s-verbal est accepte´. Je ne veux pas prendre trop de temps et je passe maintenant la parole au Professeur Jean-Louis Senon et au Docteur Carol Jonas qui vont ouvrir les travaux de cette se´ance consacre´e a` « La loi du 5 juillet 2011 ». Je vous remercie pour votre attention. Introduction des travaux La loi du 5 juillet 2011 Professeur Jean-Louis Senon1 et Docteur Carol Jonas2 La loi du 5 juillet 2011 a e´te´ applique´e dans la pre´cipitation le ˆ t 2011, date fixe´e par le Conseil constitutionnel dans les 1er aou suites d’une question prioritaire de constitutionnalite´ qui de´clarait inconstitutionnelle a` cette date l’hospitalisation a` la demande d’un tiers. Praticiens, directions hospitalie`res, JLD et pre´sidents des TGI, ˆ a` la haˆte en juillet 2011, de´partement par ARS et pre´fets, ont du de´partement, e´tablir les modalite´s de mise en place, alors meˆme que nombre de circulaires d’application n’e´taient pas sorties et que la seule re´fe´rence pouvant guider les professionnels e´tait la « foire aux questions » sur le site du ministe`re de la Sante´ ! Cette nouvelle loi, permettant d’e´tablir les conditions dans lesquelles il est possible d’administrer des soins sans le consentement de la personne malade, restera dans la me´moire pour sa pre´cipitation et l’insatisfaction du de´bat parlementaire : vote´e en proce´dure d’urgence, elle n’a meˆme pas eu a` eˆtre pre´sente´e au Conseil constitutionnel pour ve´rification de sa constitutionnalite´ ! On est bien loin de la qualite´ des de´bats de la loi du 30 juin 1838 ou` Esquirol et Falret avaient pu initier un de´bat de´mocratique sur la privation de liberte´ du malade mental ne´cessaire a` ses soins, de´bat contributif et ouvert qui est reste´ un mode`le. Les e´changes n’ont pas e´te´ non plus du niveau de la loi Evin du 27 juin 1990 qui avait 1 PUPH, faculte´ de Me´decine, Universite´ de Poitiers, SHUPPM, CH Henri-Laborit, 86021 Poitiers, France. 2 Psychiatre des hoˆpitaux, chef de service, Docteur en Droit, expert judiciaire, service de Psychiatrie A, CHU de Tours, France.
0003-4487/$ – see front matter http://dx.doi.org/10.1016/j.amp.2012.10.011
pourtant e´te´ conside´re´e par son concepteur comme devant eˆtre retravaille´e cinq ans apre`s. La re´forme de la loi de 1990 s’imposait pourtant du fait de la jurisprudence tant nationale qu’europe´enne. Trois points essentiels marquaient de longue date les critiques de la jurisprudence : l’articulation des compe´tences entre le juge judiciaire et le juge administratif est souligne´e par la jurisprudence europe´enne de fac¸on re´pe´te´e depuis l’arreˆt Baudoin C/France du 18 novembre 2010. Notre pays, dans la loi de 1990, ne donnait pas de garanties suffisantes dans les voies de recours de la personne malade ; l’obligation d’informer et de recueillir l’avis de la personne malade sur les soins propose´s est souligne´e par la jurisprudence nationale ; le « bref de´lai » dans le traitement des demandes de sortie de la personne malade est un point essentiel, la Cour europe´enne ayant a` plusieurs reprises rappele´ que le « bref de´lai » ne saurait eˆtre supe´rieur a` quinze jours. Cette loi e´tait aussi propose´e apre`s les tensions importantes entre professionnels et politiques quand une tentative de re´forme avait e´te´ propose´e dans le cadre d’une loi de se´curite´ inte´rieure, la loi de pre´vention de la de´linquance du 5 mars 2007, qui, dans ses articles 18 a` 24, voulait re´former la loi sanitaire du 27 juin 1990. Le retrait de ces articles n’a e´te´ acquis que quelques instants avant le vote a` l’Assemble´e nationale ! Une loi sanitaire et non pas une loi de se´curite´ inte´rieure, une loi porte´e par le ministe`re de la Sante´ et non pas celui de l’Inte´rieur, dans une de´mocratie ces symboles ont une valeur. La loi du 5 juillet 2011 est donc ne´e avec sur ses fonds baptismaux la durete´ des temps marque´e par les tentations se´curitaires face aux peurs socie´tales. La nouvelle loi est construite autour de plusieurs points novateurs que cette journe´e va travailler : le controˆle re´alise´ par le juge des liberte´s et de la de´tention (JLD) au quinzie`me jour (j15) et au sixie`me mois (M6) est le point essentiel. La cre´ation de soins ambulatoires sous contrainte est elle aussi une mesure nouvelle, de meˆme que la possibilite´ de soins en pe´ril imminent sans tiers. La loi traite aussi des dispositions en cas de de´saccord entre le psychiatre traitant et le pre´fet, situation qui pre´occupait les professionnels. Cette loi impose une collaboration entre de nouveaux acteurs : le JLD est au centre, Mme Rome nous en parlera. L’ARS a dans la loi un roˆle nouveau : M. Duvaux le soulignera. Les directeurs d’hoˆpitaux ont une responsabilite´ renforce´e, comme l’abordera M. Marescaux. L’avocat est dans une situation nouvelle : de´fendre un « client » qui a besoin de soins. Jean Danet en traitera. Carol Jonas insistera sur la difficulte´ de la certification et E´ric Pe´chillon fera une analyse argumente´e de la loi. Une e´quipe d’internes proposera enfin une re´flexion sur la fac¸on dont les malades peuvent vivre l’audience aupre`s du JLD. Tre`s bonne journe´e a` vous tous.