Syndrome hémolytique et urémique en pédiatrie

Syndrome hémolytique et urémique en pédiatrie

Table ronde Urgences en néphrologie pédiatrique (GFRUP, SNP) Syndrome hémolytique et urémique en pédiatrie S. Cloarec*, L. Prat, E. Merieau, S. Beno...

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Table ronde

Urgences en néphrologie pédiatrique (GFRUP, SNP)

Syndrome hémolytique et urémique en pédiatrie S. Cloarec*, L. Prat, E. Merieau, S. Benoit, J.-M. Halimi Centre de compétence maladies rénales rares, Service de Néphrologie Pédiatrique, ChRU Clocheville, 49 Bd Béranger, 37000 Tours, France

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e syndrome hémolytique et urémique (SHU) est une microangiopathie thrombotique (MAT). C’est la première cause d’insuffisance rénale aiguë chez l’enfant, et plus particulièrement le nourrisson. Il se définit par l’association d’une anémie hémolytique avec schizocytose, d’une thrombopénie et d’une atteinte rénale nécessitant le recours à une épuration extrarénale dans la moitié des cas. Dans sa forme typique postdiarrhéique, il survient quelques jours après une diarrhée, glairosanglante dans la moitié des cas, et se révèle par une pâleur, une asthénie, une oligo-anurie révélant l’insuffisance rénale aiguë avec ou sans hypertension artérielle. Il peut se compliquer d’atteintes extrarénales : neurologiques, digestives (perforations et nécroses coliques), hépatiques, pancréatiques (diabète insulinodépendant généralement transitoire) voire cardiaques et pulmonaires. Le traitement jusqu’à ces dernières années était uniquement symptomatique. Cette maladie fait l’objet en France d’une surveillance par l’Institut National de Veille Sanitaire depuis 1996 [1], dont le but est de caractériser les données épidémiologiques et de détecter rapidement les cas groupés et une éventuelle source de contamination. L’incidence annuelle est en moyenne de 0,8/105 enfants de moins de 15 ans, variant selon les années entre 0,6 et 1,3 (1,2 en 2013, dont 59 % de moins 3 ans). Le pronostic vital est mis en jeu en cas d’atteinte multiviscérale et le risque de décès varie de 3 à 5 % (1 % en France). Si la durée d’oligo-anurie est un facteur pronostique à long terme, plus d’un tiers des malades gardent des séquelles (protéinurie, diminution de la filtration glomérulaire, hypertension artérielle) même en l’absence d’épuration extrarénale initiale, rendant indispensable le suivi néphrologique à vie de ces patients [2]. Depuis les années 1980-1990, l’association est faite entre SHU typique et infection à Escherichia coli entérohémorragiques (EHEC), ou producteurs de Shiga-toxines stx2 ou stx1 (STEC) avec une identification plus précise des sérotypes incriminés (sérogroupe O157 dans 43 % des cas). L’épidémie à E. coli O104:H4 en Allemagne en 2011 se caractérisait par une plus grande proportion d’adultes atteints (90 enfants sur 860 cas) [3]. Cette épidémie et l’arrivée de nouveaux traitements ont laissé entrevoir de nouvelles perspectives thérapeutiques dans le SHU typique. L’utilisation d’antibiotiques bactéricides augmente le risque de SHU par relargage des toxines ; à l’inverse une antibiothérapie bactériostatique (Azithromycine)

*Correspondance : [email protected].

32 © 2015 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. Archives de Pédiatrie 2015;22(HS2):32-33

réduirait la production et la libération de toxines à la phase précoce [4]. Une étude française versus placebo devrait débuter dans les mois à venir. Le SHU, peut parfois être secondaire à une infection à Shigella, à pneumocoque, à un déficit en cobalamine C ou post-médicamenteux. Le mode de révélation permet de rechercher ces causes. Le SHU atypique plus rare (5 % des SHU), doit être évoqué selon l’âge de diagnostic, en cas de récidive, d’antécédent familial de SHU ou en l’absence de diarrhée prodromique. Cependant, une infection bactérienne ou virale, notamment une diarrhée constituent des triggers pouvant déclencher une première poussée de SHU atypique [5]. Ces dernières années ont été marquées autant par la meilleure compréhension de cette pathologie que par l’utilisation de nouvelles thérapeutiques qui en ont transformé le pronostic. En effet, l’implication de la voie alterne du complément, évoquée depuis les années 1990, a été bien confortée par la suite permettant de comprendre la physiopathologie du SHU atypique. L’origine génétique a été et continue d’être identifiée avec la découverte de nouveaux gènes des protéines régulatrices de la voie alterne du complément  [5] ou l’origine immunitaire avec la détection d’anticorps anti-facteur H [6]. L’âge de révélation, le risque de rechutes et le pronostic rénal diffèrent tant sur rein natif que transplanté en fonction des mutations décrites. L’utilisation d’un anticorps monoclonal anti-C5 (éculizumab/Soliris®) a profondément modifié la prise en charge et le pronostic du SHU atypique. La dysrégulation de la voie alterne du complément ainsi que l’existence de facteurs génétiques de prédisposition dans le SHU typique ne sont pas clairement établies. Quoiqu’il en soit, certaines publications laissent entrevoir la possibilité d’un intérêt de l’éculizumab en particulier dans les formes neurologiques de SHU typique [7], même si l’amélioration des paramètres hématologiques et la réduction du taux de complications ne sont pas démontrées [8]. Des études à venir devraient pouvoir répondre à ces questions.

Références [1] King L, Mariani-Kurkdjian P, Gouali M, et al. Surveillance du syndrome hémolytique et urémique post-diarrhéique chez les enfants de moins de 15  ans en France en 2013. Saint-Maurice : Institut de veille sanitaire; 2014 : 4 p.

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[2] Oakes RS, Kirkham JK, Nelson RD, et al. Duration of oliguria and anuria as predictors of chronic renal-related sequelae in post-diarrheal hemolytic uremic syndrome. Pediatr Nephrol 2008;23:1303-8. [3] Loos S, Ahlenstiel T, Kranz B, et al. An outbreak of Shiga toxinproducing Escherichia coli O104:H4 hemolytic uremic syndrome in Germany: presentation and short-term outcome in children. Clin Infect Dis 2012;55:753-9. [4] Loirat C, Mariani-Kurkdjian P, Fremeaux-Bacchi V. Le syndrome hémolytique et urémique en 2013. Arch Pédiatr 2013;20:827-30. [5] Fremeaux-Bacchi V, Fakhouri F, Garnier A, et al. Genetics and outcome of atypical hemolytic uremic syndrome: a nationwide

French series comparing children and adults. Clin J Am Soc Nephrol 2013;8:554-62. [6] Loirat C, Fremeaux-Bacchi V. Anti-factor H autoantibody-associated hemolytic uremic syndrome: the earlier diagnosed and treated, the better. Kidney Int 2014;85:1019-22. [7] Lapeyraque AL, Malina M, Fremeaux-Bacchi V, et al. Eculizumab in severe Shiga-toxin-associated HUS. N Engl J Med 2011;364: 2561-3. [8] Menne J, Nitschke M, Stingele R, et al. Validation of treatment strategies for enterohaemorrhagic Escherichia coli O104:H4 induced haemolytic uraemic syndrome: case-control study. BMJ 2012;345:e4565.

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