Traitement du thrombus dans les syndromes coronaires aigus en salle de cardiologie interventionnelle

Traitement du thrombus dans les syndromes coronaires aigus en salle de cardiologie interventionnelle

Annales de Cardiologie et d’Angéiologie 56 (2007) 250–256 http://france.elsevier.com/direct/ANCAAN/ Mise au point Traitement du thrombus dans les sy...

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Annales de Cardiologie et d’Angéiologie 56 (2007) 250–256 http://france.elsevier.com/direct/ANCAAN/

Mise au point

Traitement du thrombus dans les syndromes coronaires aigus en salle de cardiologie interventionnelle Treatment of intracoronary thrombus in the catheterisation laboratory in acute coronary syndrome patients J.-P. Collet*, F. Beygui, O. Barthélemy, B. Livarek, G. Montalescot Institut de cardiologie, centre hospitalier universitaire de la Pitié-Salpêtrière, APHP, 47, boulevard de l’Hôpital, 75013 Paris, France Disponible sur internet le 04 octobre 2007

Résumé Le traitement du thrombus intracoronaire en salle de cathétérisme interventionnel est assez bien codifié. Il faut différencier trois situations particulières. Premièrement, celle de l’angioplastie primaire qui est la situation la plus commune. L’utilisation d’inhibiteur de la glycoprotéine IIb/IIIa et plus particulièrement de l’abciximab reste le traitement de référence qui a démontré un effet sur la mortalité. La thrombectomie est très utile pour l’angioplasticien même si les preuves cliniques irréfutables manquent. La situation de l’angioplastie de sauvetage postthrombolyse est plus rare et beaucoup plus complexe en raison du risque hémorragique majoré. Deuxièmement, l’angioplastie élective au cours de laquelle apparaît un thrombus intracoronaire. Il s’agit d’une situation plus rare souvent liée à une mauvaise appréciation du risque, au mauvais choix du matériel et à la mauvaise préparation du patient. L’identification des erreurs commises est ici l’élément essentiel de la prise en charge thérapeutique. Enfin troisièmement, la thrombose itérative postangioplastie. Il s’agit sans aucun doute de la situation la plus rare, mais aussi celle dont la prise en charge est la plus difficile. © 2007 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. Abstract Treatment of intracoronary thrombus is well documented. Three situations should be differentiated Primary percutaneous coronary intervention for early STEMI presenters is the most frequent one. Glycoprotein IIb/IIIa inhibitors are the gold standard antithrombotic treatment with a clear mortality benefit with abciximab. Thrombectomy with simple to use devices is another attractive option for interventionalists, although there is no clear established clinical benefit. Rescue PCI following failed thrombolysis is a more complicated situation given the underlying bleeding risk that is difficult to evaluate. The second situation is when a thrombus appears during an elective PCI. Although much less frequent than primary PCI, it is more often related to a lack of identification of the risk, to an inappropriate choice of the materials or to a non-optimal upstream antithrombotic treatment. A careful identification of all potential relevant causes is the key point of the management strategy. Post-PCI rethrombosis is the third situation and probably the less frequent. However, it is the most difficult to deal with. © 2007 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. Mots clés : Thrombus intracoronaire ; Syndrome coronaire aigu ; Thrombectomie ; Anti-GP IIb/IIIa Keywords: Intracoronary thrombus; Acute coronary syndrome; Thrombectomy; Glycoprotein IIb/IIIa inhibitors

* Auteur

correspondant. Adresse e-mail : [email protected] (J.-P. Collet).

0003-3928/$ - see front matter © 2007 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. doi:10.1016/j.ancard.2007.10.003

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Il s’agit d’une situation dramatique pour deux raisons. Premièrement, elle met en jeu le pronostic vital du patient en raison de la maladie coronaire instable sous-jacente. Ainsi, le risque évolutif vers une situation rapidement explosive avec thrombose extensive aboutissant au choc cardiogénique et au décès sur table est toujours possible. Deuxièmement, la prise en charge d’une telle situation est difficile en raison du risque hémorragique que l’on fait courir au patient par l’initiation de traitements antithrombotiques puissants. Il faut bien distinguer trois situations particulières qui résument parfaitement ce contexte général. 1. Le thrombus apparaît au cours d’une angioplastie élective dans le contexte d’un syndrome coronaire aigu sans sus-décalage du segment ST L’apparition d’un thrombus intracoronaire survient dans 2 % des angioplasties dites électives (Registre RIVIERA) [1]. Les trois questions qu’il convient de se poser sont les suivantes : mon patient est-il bien préparé ? Ai-je bien posé l’indication ? Ai-je fait une erreur technique ? Ces trois questions sont très pertinentes dans la mesure où le plus souvent, ces complications thrombotiques aiguës sont liées à une succession de petites erreurs qui s’accumulent. C’est leur identification qui va permettre la prise en charge optimale. 1.1. La préparation par les antithrombotiques est capitale Chacun des traitements a sa contribution spécifique qui est très bien établie. Aucun ne doit être négligé. Il s’agit évidem-

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ment de mesures préventives, mais qui pour certaines d’entre elles peuvent toujours être initiées en salle de cathétérisme. ● L’intérêt de recharger les patients traités chroniquement par aspirine par une dose de charge allant de 250 à 500 mg par voie intraveineuse ne fait plus aucun doute. L’absence d’aspirine est un facteur prédictif indépendant de mortalité dans l’angioplastie élective. Il vaut donc mieux l’utiliser par excès en cas de doute ! N’oublions pas que l’allergie est exceptionnelle et que la désensibilisation est possible avec un taux de succès de 80 %. ● La préparation par le clopidogrel est également incontournable. Il faut s’assurer que la dose de charge a été faite par au moins 300 mg 12 heures avant ou 600 mg dans les six heures précédant le geste. N’oublions pas que les répondeurs lents sont fréquents et constituent plus de la moitié des patients. L’une des façons de s’affranchir de cette limite est d’augmenter les doses de charges en clopidogrel [2,3]. Il faut rappeler le bénéfice clinique maintenant établi des fortes doses de charges en clopidogrel par rapport aux doses de l’AMM de 300 mg (Fig. 1). ● Enfin, l’anticoagulation doit être soigneusement préparée. Cela passe par une organisation commune entre les salles d’angioplastie et les unités de soins intensifs dans la mesure où ces patients vont passer de l’une à l’autre. Ils seront donc prétraités en amont de la salle de cathétérisme. La leçon la plus importante des récentes publications est d’éviter d’utiliser plusieurs anticoagulants chez le même patient afin de prévenir le risque hémorragique (sur anticoagulation) et le risque ischémique par défaut d’anticoagulation. Le choix

Fig. 1. Intérêt des fortes doses de charge en clopidogrel par rapport aux faibles doses de charges (Meta-analysis appraising high clopidogrel loading in patients undergoing percutaneous coronary intervention American heart journal 2007 In Press).

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entre cinq régimes d’anticoagulation différents dans le contexte de la maladie coronaire instable ne simplifie pas la tâche ! Les récentes recommandations européennes sont là pour nous le rappeler. Elles ont le mérite en plus de considérer tous les patients les plus fragiles. Il faut simplement rappeler que l’HNF reste l’anticoagulant le plus facilement utilisable dans toutes les indications, même si elle est clairement moins efficace et moins bien tolérée que tous les nouveaux anticoagulants actuellement sur le marché. Nous avons résumé dans la Fig. 2 un algorithme de choix qui nous paraît raisonnable, car il intègre tous les éléments des recommandations de la Société européenne de cardiologie [3]. L’intérêt de faire un ACT reste débattu en cas d’utilisation de l’HNF dans la mesure où ce test ne prédit rien. ● L’utilisation des inhibiteurs de la glycoprotéine IIb/IIIa est une option à discuter avant de débuter le geste d’angioplastie. Rappelons, que la décision de leur utilisation et leur bénéfice ne reposent avant tout sur des données cliniques et non angiographiques [4]. En résumé, c’est la troponine élevée et l’absence de traitement par clopidogrel en amont de l’angioplastie qui doit motiver leur utilisation au moment du geste d’angioplastie. Rappelons que la troponine est un excellent marqueur de thrombus intracoronaire. L’utilisation des inhibiteurs de la GPIIb/IIIa en sauvetage est évidemment beaucoup moins efficace, mais démontré. ● En pratique : lors de l’apparition d’un thrombus au cours de l’angioplastie, il ne faut pas hésiter à recharger en aspirine et à initier un traitement par inhibiteur de la glycoprotéine IIb/IIIa. 1.2. Ai-je fait une erreur ? C’est le deuxième élément majeur de la réflexion qui recouvre de très nombreux aspects.

Il peut s’agir tout d’abord d’une erreur d’indication reposant soit sur une mauvaise appréciation des critères anatomiques, soit sur une mauvaise appréciation du risque thrombotique. La situation classique est le grand syndrome inflammatoire caractérisé par une forte élévation de la concentration en fibrinogène au-delà de 6 g/l. Il s’agit probablement de la situation la plus thrombogène. Il peut s’agir d’une erreur dans le choix du matériel. Une situation classique est le diamètre insuffisant de la lumière du cathéter guide ou l’utilisation de deux guides qui se croisent. Enfin, il faut rappeler l’insuffisance du niveau d’anticoagulation dans le liquide de rinçage. Tous ces facteurs favorisent la formation de thrombi au contact des biomatériaux, alors source de thrombose intracoronaire. Le choix du produit de contraste peut avoir un impact. Ainsi, il a été décrit et rapporté que les produits de contraste ionique tel l’ioxaglate (Hexabrix®) ont un effet prothrombogène et proagrégant plaquettaire nettement inférieur à celui des produits de contraste non ionique, tel l’iodixanol (Visipaque®) [5]. Ce choix doit être fait en amont de l’angioplastie. Il peut d’agir d’une erreur dans le geste technique avec comme cause la plus fréquente la dissection coronaire non couverte. Il convient de l’identifier en faisant systématiquement un contrôle sans guide en utilisant deux incidences orthogonales. En pratique, la meilleure prise en charge de ces complications est préventive. Il faut en effet toujours être capable d’expliquer et d’identifier les facteurs ayant favorisé la survenue de la thrombose intracoronaire durant le geste d’angioplastie. L’identification d’un facteur lié au matériel ou à la technique permettra une correction immédiate de la cause. En revanche, l’identification d’une cause liée à l’indication du geste ou à l’état du patient ne peut être corrigée que par une optimisation du traitement antithrombotique et éventuellement des outils de thrombectomie (cf. infra). 2. Le thrombus est préexistant dans un contexte de phase aiguë : quelles sont les options pratiques ? Qu’est-ce qui va guider mon choix ? La visualisation angiographique d’un thrombus à la phase aiguë d’un infarctus du myocarde (IDM) est très fréquente. L’embolisation distale de thrombi au moment de l’angioplastie primaire est un facteur de mauvais pronostic. Le traitement d’un thrombus visible à la phase aiguë d’un IDM fait appel à un traitement antithrombotique optimal et des moyens mécaniques. 2.1. Le traitement antithrombotique optimal en présence d’une image de thrombus

Fig. 2. Algorithme de choix des traitements anticoagulants dans la maladie coronaire instable. Le risque ischémique est défini par les recommandations de l’ESC et le risque hémorragique lorsqu’il existe au moins deux des quatre critères suivants : clearance–créatinine inférieure à 30 ml/min, antécédent hémorragique, sexe féminin, âge supérieur à 75 et accès fémoral versus accès radial pour le cathétérisme.

2.1.1. Cas d’une angioplastie primaire 2.1.1.1. Anticoagulant IV en bolus. Un anticoagulant i.v. en bolus, sans relais à dose efficace est suffisant si le succès de l’angioplastie est total. On maintient, en revanche, une anti-

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coagulation efficace pendant au moins 48 heures, s’il persiste des images de thrombus intrastent. L’énoxaparine (0,5 à 0,75 mg/kg), associée à une anticoagulation plus stable et à moins d’événement hémorragique, en comparaison à l’héparine non fractionné, est l’anticoagulant de choix [6]. Cependant, il faut préciser l’absence de données randomisées dans cette indication particulière. 2.1.1.2. « Cocktail » antiagrégant. Aspirine 250 à 500 mg en i.v. le plus tôt possible. Le clopidogrel doit être administré à l’aide d’une forte dose de charge le plus tôt possible (600– 900 mg). Ces fortes doses permettent d’avoir une efficacité biologique, plus importante et surtout beaucoup plus rapide. L’abciximab est le seul inhibiteur de la GP IIb/IIIa ayant démontré une réduction de mortalité à la phase aiguë de l’IDM dans le contexte de l’angioplastie primaire [7]. Le débat reste toujours ouvert sur l’utilisation pré- ou perprocédure de l’abciximab. En effet, l’étude FINESSE n’a pas réussi à démontrer la supériorité du prétraitement. Néanmoins, l’abciximab en prétraitement est associé à une amélioration du flux coronaire et peut-être à une meilleure disparition du susdécalage de ST. En pratique, soit ces traitements sont initiés avant l’arrivée en salle de cathétérisme, soit ils sont débutés voir optimisés dès l’arrivée en salle. 2.1.2. Cas d’une angioplastie de sauvetage après échec de thrombolyse C’est à l’évidence la situation la plus délicate. Ces patients sont à haut risque hémorragique et à haut risque de thrombose aiguë de stent et de réinfarctus. La thrombolyse doit être actuellement associée à : ● un anticoagulant débuté à la phase aiguë et poursuivi pendant 48 heures au moins. Énoxaparine 30 mg en IVD chez le sujet de moins de 75 ans, puis 1 mg/kg en sous-cutanée toutes les 12 heures ; seulement en sous-cutanée, 0,75 mg/kg toutes les 12 heures chez le sujet de plus de 75 ans est associé à un taux de réinfarctus plus faible que l’héparine non fractionnée, dans ce contexte [8]. Héparine non fractionnée (60 UI/kg) est associée à plus de réinfarctus dans ce contexte, mais peut être utilisée chez les sujets âgés ou insuffisants rénaux ; ● un « cocktail » antiagrégant. Aspirine 250 à 500 mg en i.v. le plus tôt possible. Le clopidogrel doit également être administré sous la forme d’une dose de charge standard au moment de la thrombolyse, chez le sujet de moins de 75 ans (300 mg). Si ces traitements n’ont pas été utilisés de façon optimale au moment de la thrombolyse — notamment durant la phase préhospitalière —, il faudra y palier dès l’arrivée en salle de cathétérisme, notamment en ce qui concerne la dose de charge de clopidogrel, qui est alors étendue à tous les patients, quel que soit l’âge. L’association d’un anti-GP IIb/IIIa à la thrombolyse est à l’origine d’un surrisque hémorragique [9]. Ce traitement est indiqué uniquement en cas de faible

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risque hémorragique (< 75 ans, aucun antécédent hémorragique, fonction rénale normale, poids normal, voie d’accès radiale) et en cas de persistance d’une masse thrombotique importante visible après l’implantation de stent. 2.2. Moyens mécaniques La visualisation d’un flux TIMI 0 sur l’artère cible, après le passage du guide d’angioplastie, pousse à passer un ballon, sans inflation — debulking —, puis un nouveau contrôle angiographique pour visualiser l’étendue du thrombus et le lit d’aval. Si le passage ne permet pas d’améliorer le flux TIMI et de voir le lit d’aval, il faut alors utiliser un très petit ballon (1,5 mm de diamètre) avec une inflation à faible pression pour éviter une embolisation massive. En présence d’un volumineux thrombus, sur une artère proximale, un dispositif de thromboaspiration simple (Export® par exemple) paraît le plus adapté. Si la masse thrombotique reste importante malgré plusieurs passages, alors un filtre de protection distale (Spider® par exemple) est une bonne solution. Il faut faire attention à la mobilisation du thrombus dans les autres branches, notamment au moment du retrait des dispositifs. Un contrôle angiographique détaillé est nécessaire après le retrait de ces dispositifs. Le stenting primaire sans prédilatation est associé à un risque plus faible d’embolisation distale et doit être considéré en première intention. Le stent utilisé doit être assez long pour couvrir la lésion et le thrombus appendu, le problème à la phase aiguë d’un IDM n’étant pas la resténose, mais la rethrombose. Bien qu’on dispose de deux études randomisées, « validant » l’utilisation des stents pharmacoactifs à la phase aiguë de l’IDM, leur utilisation dans le registre GRACE était associée à un risque de mortalité accrue et donc leur utilisation ne paraît pas fondée (Figs. 3–5).

Fig. 3. Flux TIMI 0 dans une coronaire droite cinq heures après le début de l’IDM de localisation inférieure.

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3. J’ai un patient qui revient pour thrombose itérative précoce après stenting ? Que faire ?

Fig. 4. Le passage du guide permet d’avoir un flux TIMI 1 avec visualisation d’un long thrombus serpentin.

C’est la situation de la thrombose coronaire après angioplastie facilitée par la thrombolyse. La thrombolyse ne facilite par forcément le geste d’angioplastie sauf si elle est initiée très en amont de l’angioplastie [10]. On se retrouve souvent dans une situation où il existe une artère ouverte avec un retard de flux et la présence parfois d’un thrombus volumineux (Fig. 6A) parfois thromboaspiré avec succès (Fig. 6B). La satisfaction d’un résultat angiographique initial parfait ne préjuge en rien du proche avenir dans cette situation très particulière et surtout n’encourage pas initialement à l’utilisation systématique d’inhibiteur de la glycoprotéine IIb/IIIa. Même sur une artère de gros calibre, l’absence de préparation antithrombotique adéquate, aboutit à une catastrophe thrombotique dans les heures qui suivent comme on peut le constater sur la Fig. 7A, deux heures après une thromboaspiration réussie. En effet, la dose de charge de clopidogrel rassure faussement le cathétériseur, alors que la thrombolyse favorise l’hyperagrégabilité plaquettaire. De plus, dans ce cas précis la gingivorragie avait abouti à l’arrêt de tout traitement anticoagulant. 3.1. Quel régime antithrombotique ?

Fig. 5. Thrombus rouge, serpentin retiré par thromboaspiration.

La rethrombose précoce est une catastrophe en raison de l’embolisation distale très fréquente, de la difficulté à faire disparaître le thrombus dans un stent et du risque d’extension de l’infarctus et de la constitution d’un choc cardiogénique (Fig. 7C). Une anticoagulation curative doit être instaurée pendant au moins 48 heures ou tant que persiste un état d’hypercoagulabilité que l’on peut parfaitement évaluer par la mesure de la concentration en fibrinogène. Cette attitude est bien établie. Le traitement antiagrégant plaquettaire doit être ici maximal d’emblée. En plus du bolus de 500 mg d’Aspégic i.v., il faut d’emblée proposer une dose de charge de clopidogrel de 900 mg qui permettra d’obtenir une activité biologique antia-

Fig. 6. A. Volumineux thrombus sur plaque ulcérée CD2 après métalyse pour IDM inférieur. B. Après angioplastie de sauvetage sans inhibiteur de la GP IIb/IIIa.

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Fig. 7. A. Même patient deux heures plus tard : occlusion thrombotique intrastent. B. Persistance d’un thrombus mural en aval du stent après thromboaspiration et dilatation au ballon. C. Résultat final après implantation d’un stent en aval.

grégante plus rapide et plus importante que 300 mg. Le recours à l’abciximab doit être systématique en dehors d’une situation d’hémorragie patente ou d’un surrisque hémorragique majeur. Cette approche sera peut-être confirmée par l’étude REACT-2 en cours. 3.2. Quel traitement instrumental ? La thromboaspiration (type Export) est la technique instrumentale la plus adaptée dans cette situation particulière de volumineux thrombi intracoronaires. La prédilatation au ballon se solde souvent par des embolisations distales qui peuvent avoir un retentissement majeur sur la qualité de la reperfusion myocardique. Autant que faire se peut, le cathéter doit être positionné en amont du thrombus puis mis en aspiration. Le franchissement de première intention du thrombus par le système exposant au risque d’embolisation distale. Les systèmes de protection distale n’ont, à ce jour, prouvé aucun bénéfice en phase aiguë d’infarctus sur artère native [11]. Ils sont moins adaptés à la situation d’extrême urgence que constitue la rethrombose compte tenu de leur relative complexité d’utilisation. C’est ensuite à l’angioplastie au ballon seul que se résume la prise en charge instrumentale de la rethrombose. L’implantation d’un nouveau stent intrastent n’étant pas indiquée dans cette situation. Si la rethrombose est responsable d’un état hémodynamique précaire, outre la mesure habituelle destinée à permettre de maintenir une perfusion systémique suffisante (substance inotrope, ballon de contre-pulsion), il faut envisager la mise en place d’assistance circulatoire périphérique percutanée type ECMO qui va permettre une véritable décharge du ventricule gauche et une amélioration de la perfusion coronaire. Le pontage coronaire doit toujours être envisagé en cas de récidive itérative non contrôlée, en intégrant le taux élevé de mortalité périopératoire dans la décision médicochirurgicale. La mise en évidence d’un facteur favorisant la thrombose est encore une fois capitale. Outre la correction d’un éventuel facteur favorisant local, un facteur systémique devra toujours être recherché et en particulier une réponse inadaptée au traite-

ment antiplaquettaire oral comme cela est maintenant recommandé même si les preuves sont insuffisantes [12]. 4. Conclusion La prise en charge du thrombus intracoronaire repose sur l’optimisation du traitement antithrombotique et les techniques de désobtruction mécanique. C’est avant tout l’utilisation des inhibiteurs de la glycoprotéine IIb/IIIa qui reste le traitement de choix avec la recharge en aspirine. Il est très possible que les nouveaux anticoagulants actuellement évalués dans le contexte de l’angioplastie primaire démontrent une supériorité par rapport à l’héparine non fractionnée pour prévenir cette complication redoutable. Rappelons qu’il n’existe à ce jour aucune étude randomisée dans ce contexte particulier de l’angioplastie primaire de l’infarctus du myocarde. Elles arrivent et pourraient modifier nos pratiques. Références [1] Montalescot G, RIVIERA Investigators. Registry on intravenous anticoagulation in the elective and primary real world of angioplasty. EHJ 2006 (XXII congress of the European Society of Cardiology, Barcelona, Spain) (Abstract). [2] Montalescot G, Sideris G, Meuleman C, Bal-dit-Sollier C, Lellouche N, Steg PG, et al. A randomized comparison of high clopidogrel loading doses in patients with non-ST-segment elevation acute coronary syndromes: the ALBION (Assessment of the best loading dose of clopidogrel to blunt platelet activation, inflammation and ongoing necrosis) trial. J Am Coll Cardiol 2006;48(5):931–8. [3] Bassand JP, Hamm CW, Ardissino D, Boersma E, Budaj A, FernandezAviles F, et al. Guidelines for the diagnosis and treatment of non-ST-segment elevation acute coronary syndromes: The task force for the diagnosis and treatment of non-ST-segment elevation acute coronary syndromes of the European Society of Cardiology. Eur Heart J 2007;28(13):1598– 660. [4] Kastrati A, Mehilli J, Neumann FJ, Dotzer F, Ten Berg J, Bollwein H, et al. Abciximab in patients with acute coronary syndromes undergoing percutaneous coronary intervention after clopidogrel pretreatment: the ISAR-REACT 2 randomized Trial. JAMA 2006;295:1531–8.

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