Traitements anti-inflammatoires et autres traitements dans la sarcoïdose

Traitements anti-inflammatoires et autres traitements dans la sarcoïdose

Revue des Maladies Respiratoires Actualités (2016) 8, 156-158 ISSN 1877-1203 Revue des Maladies Respiratoires Organe Officiel de la Société de Pneu...

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Revue des Maladies Respiratoires Actualités (2016) 8, 156-158 ISSN 1877-1203

Revue des

Maladies

Respiratoires Organe Officiel de la Société de Pneumologie de Langue Française

Disponible en ligne sur

Actualités

Mission CPLF 2016 Congrès de Pneumologie de Langue Française Lille, 29 – 31 janvier 2016 Numéro coordonné par O. Sanchez

www.sciencedirect.com 85625

Numéro réalisé avec le soutien institutionnel du laboratoire

www.splf.org

Juin Vol. 8 2016



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Traitements anti-inflammatoires et autres traitements dans la sarcoïdose Anti inflammatory treatments and other treatments in sarcoidosis Article rédigé par O. Badarani*, d’après la communication de H. Nunes1 1Service

MOTS CLÉS

Sarcoidose ; Corticoides ; Methotrexate ; Azathioprine ; Infliximab

kEywORDS

Sarcoidosis; Corticosteroids; Azathioprine; infliximab

de Pneumologie, Hôpital Avicenne, Bobigny, France

Résumé Le pronostic de la sarcoïdose est très hétérogène et seulement la moitié des patients nécessite la mise en route d’un traitement. La corticothérapie systémique reste le traitement de référence et de première intention. En cas de corticorésistance, ou à visée d’épargne cortisonique des traitements complémentaires peuvent être associés (hydroxychloroquine, méthotrexate, azathioprine, leflunomide). L’infliximab est réservé aux formes multi-viscérales chroniques et réfractaires. La prise en charge est globale et multidisciplinaire, en lien avec les spécialistes d’organes affectés par la maladie. L’éducation du patient et le respect des règles hygiéno-diététiques est primordiale. © 2016 SPLF. Publié par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. Abstract The prognosis of sarcoidosis is very heterogeneous and only half of patients needs to be treated. Systemic corticosteroid is the first treatment to initiate. In case of steroid resistance, when high doses are required or in multi visceral, chronic and refractory sarcoidosis, additional treatments can be offered (azathioprin, methotrexate, hydroxychloroquine, infliximab). The support is multidisciplinary, according to wich organ is affected. Patient education and compliance with lifestyle rules is paramount. © 2016 SPLF. Published by Elsevier Masson SAS. All rights reserved.

*Auteur correspondant. Adresse e-mail : [email protected] (O. Badarani). © 2016 SPLF. Publié par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.

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Introduction Le traitement de la sarcoïdose est suspensif et non curatif ce qui explique parfois la survenue de rechutes observées en cas d’interruption prématurée du traitement. Il existe le plus souvent une dose seuil, qui contrôle la formation des granulomes. Le délai d’efficacité de chaque traitement est à prendre en compte selon le degré d’urgence thérapeutique, l’efficacité et la tolérance. L’efficacité d’un même traitement est variable en fonction de la localisation de la maladie. L’évaluation des traitements de la sarcoïdose reste un défi. Il n’y a en effet depuis 1967 que 26 essais contrôlés contre placebo, ayant inclus 1426 patients. Cette difficulté à appréhender la maladie provient, entre autres, du fait que les populations à étudier sont extrêmement hétérogènes, qu’il n’existe pas de scores et de critères de jugement validés.

Traitements immunosuppresseurs Quand faut-il et quand ne faut-il pas débuter un traitement ? Dans les sarcoïdoses de stade I asymptomatique, le syndrome de Löfgren, et les patients asymptomatiques avec EFR normales ou subnormales, la meilleure attitude thérapeutique est l’abstention. Il s’agit alors de surveiller les patients à 3 mois, puis tous les 3 à 12 mois jusqu’à guérison. Dans 20 à 70  % des cas, un traitement sera alors nécessaire soit initialement soit en cours de suivi [1]. Dans l’atteinte respiratoire, le traitement est recommandé dans les stades II-III symptomatiques et/ou avec EFR anormales (CVF<65  % et DLCO<65  % de la théorique) et/ou dans une

Indication extra-respiratoire

Oui

Non

Traiter Faible dose > 2 ans AZT > MTX si altération EFR sévère

Signes d’activité francs (Aide du TEP TDM) + Altération EFR

Oui

Non

Traitement test ? Ré-évaluation EFR + TDM à 3 mois

Ne pas traiter

H. Nunes, CPLF 2016

Figure 1. Algorithme de traitement dans les sarcoïdose de stade IV. Préférer l’azathioprine (AZT) au méthotrexate (pneumopathies au MTX).

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maladie progressive. Il est également recommandé en cas de trouble ventilatoire obstructif lié à une atteinte bronchique granulomateuse ou à une compression extrinsèque par des adénopathies [2] ou à des sténoses endobronchiques [3]. Dans les stades IV, l’algorithme suivant peut être proposé (Fig. 1). La situation reste débattue dans les stades II-III persistant pendant 6 mois ou plus chez le patient asymptomatique et avec EFR normales ou subnormales. Dans les atteintes extra-respiratoires, l’indication est formelle en cas d’atteinte oculaire (après échec du traitement local), cardiaque, du système nerveux central et pituitaire, rénale, laryngée, et métabolique (hypercalcémie > 3mM).

Quelle est la dose optimale et la durée du traitement par corticoïdes ? Il n’y a pas de protocole clairement validé. Habituellement la dose initiale est de 1/3 à 1mg/kg/j selon la sévérité de l’atteinte. Les bolus de methylprednisolone sont réalisés lorsqu’il existe une urgence thérapeutique et que l’atteinte est grave (névrite optique rétrobulbaire, atteinte laryngée ou du système nerveux central (SNC)) ou lorsqu’il existe une situation d’impasse thérapeutique. Les patients doivent être systématiquement réévalués 1 ou 3 mois après le début du traitement. En cas de réponse positive, la décroissance progressive sera initiée, jusqu’à la dose minimale efficace habituellement comprise entre 5-15mg par jour de prednisone (dose seuil). Dans la plupart des cas, lorsque le traitement est initié, il est maintenu pendant au minimum 12 mois ou plus, mais la durée du traitement est à adapter au cas par cas. À l’arrêt du traitement, une rechute survient dans 13 % à 38 % des cas. Elle survient dans la moitié des cas, dans les 6 mois suivant l’arrêt du traitement et dans 20 % dans l’année. Les rechutes surviennent principalement dans les formes extra-respiratoires et les formes chroniques. En général, l’expression clinique à la rechute est concordante avec les manifestations initiales. Il faudra alors reprendre le traitement à la dose du précèdent palier. On parlera de guérison après 3 ans de rémission complète stable sans traitement.

Quand faut-il proposer un traitement alternatif aux corticoïdes et quel agent choisir ? Les traitements alternatifs se discutent en fonction de l’organe cible à traiter, lorsqu’il existe une cortico-résistance, une contre-indication ou des effets indésirables des corticoïdes, ou lors d’une stratégie d’épargne cortisonique. Les antipaludéens de synthèse (hydroxychloroquine) peuvent être privilégiés en première intention en cas d’atteinte cutanée. L’épargne cortisonique sera proposée en cas de sarcoïdose chronique avec une dose seuil supérieure à 10 mg/j et/ou en cas d’effets indésirables. Le traitement peut être associé d’emblée quand une évolution chronique est prévisible (atteinte cardiaque, SNC). La cortico-résistance est rare (<5% des cas) et se définit par l’absence de réponse à 3 mois de traitement. Il faut alors

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éliminer une autre cause d’échec (observance/compliance, posologie inadéquate, lésions de fibrose irréversible, diagnostic différentiel  : bérylliose, comorbidité notamment infectieuse ou tumorale).

Traitements de deuxième ligne Le méthotrexate et l’azathioprine sont les 2 principaux traitements de 2ème ligne, et le choix dépendra de la sévérité de l’altération des EFR, de l’existence d’une atteinte hépatique, du désir de paternité/maternité, de la présence d’un déficit en thiopurine méthyltransférase, ou d’une insuffisance rénale sous-jacente. L’efficacité est retardée et est maximale à 6 mois. Bien que le méthotrexate ait longtemps été préféré, ces 2 traitements ont probablement la même efficacité dans la sarcoïdose [4]. Le leflunomide a été proposé seul ou en association au méthotrexate avec un taux de réponse respectivement de 79 % et 89 % [5] incluant les réponses pulmonaire et extra pulmonaires.

Traitements de troisième ligne Il s’agit principalement des anti-tumor-necrosis-factor-alpha (anti-TNF-α) (infliximab). Le cylclophosphamide est rarement utilisé, il peut être proposé en cas d’atteinte réfractaire cardiaque ou du système nerveux central. L’infliximab est principalement utilisé en cas d’atteinte chronique, réfractaire et multiviscérale (cutanée, incluant lupus pernio, SNC, pulmonaire chronique sévère ou oculaire) [6]. Ses effets indésirables sont potentiellement graves (néoplasies, infection graves, granulomatoses induites), et il ne peut pas être utilisé en cas d’insuffisance cardiaque. La dose est de 5mg/kg par semaine à S0, S2, S6 puis toutes les 4 semaines [7] et il faut l’associer avec une faible dose de corticoïdes et/ou d’immunosuppresseur pour prévenir le développement d’anticorps anti-infliximab. Parmi les autres anti-TNF-α, l’etanercept est inefficace et l’expérience est moindre avec l’adalimumab qu’avec l’infliximab.

Autres traitements La prise en charge passe par l’éducation du patient, et la délivrance de règles hygiéno-diététiques, ainsi que par le traitement et la prévention des complications liées aux atteintes d’organes. Il faut donc prescrire un régime pauvre en calcium et prévenir l’exposition solaire en cas d’hypercalcémie, rechercher et prévenir l’ostéoporose cortico-induite, et, en concertation avec le rhumatologue, prescrire les biphosphonate (il faut éviter la vitamine D du fait du risque de voir apparaitre une hypercalcémie dans la sarcoïdose due à la sécrétion inappropriée du calcitriol par les macrophages du granulome).

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O. Badarani

Dans le syndrome de Löfgren, les anti-inflammatoires non stéroïdiens ou la colchicine peuvent être proposés pour les douleurs articulaires. Dans l’atteinte cardiaque, il peut être parfois indiqué de mettre en place un dispositif implantable associé à la prescription de drogues à visée cardiaque. Dans l’atteinte du système nerveux une substitution hormonale pour l’atteinte hypothalamo-hypophysaire et les agents antiépileptiques peuvent être indiqués. Dans l’atteinte respiratoire avec sténoses obstructives, la pose de prothèses endobronchiques peut s’avérer nécessaire. Enfin, la transplantation est un traitement rarement mis en œuvre, après avoir épuise toutes les ressources thérapeutiques chez des patients dont la maladie n’est plus active. La sarcoïdose représente 2.8 % des transplantations pulmonaires, avec de bons résultats sur la survie, le risque étant essentiellement celui de rechute fréquente sur le greffon [8].

Liens d’intérêts O. Badarani déclare n’avoir aucun lien d’intérêt pour cet article. H. Nunes : non transmis.

Références [1] Valeyre D, Prasse A, Nunes H, Uzunhan Y, Brillet PY, Müller-Quernheim J : Sarcoidosis. Lancet. 2014 Mar 29;383(9923):1155-67. [2] Naccache JM, Lavolé A, Nunes H, Lamberto C, Letoumelin P, Brauner M, Valeyre D, Brillet PY : High-resolution computed tomographic imaging of airways in sarcoidosis patients with airflow obstruction. J Comput Assist Tomogr. 2008 NovDec;32(6):905-12. [3] Chambellan A1, Turbie P, Nunes H, Brauner M, Battesti JP, Valeyre D : Endoluminal stenosis of proximal bronchi in sarcoidosis: bronchoscopy, function, and evolutio Chest 2005 Feb;127(2):472-81. [4] Vorselaars AD, Wuyts WA, Vorselaars VM, Zanen P, Deneer VH, Veltkamp M, Thomeer M, van Moorsel CH, Grutters JC : Methotrexate vs azathioprine in second-line therapy of sarcoidosis. Chest. 2013 Sep;144(3):805-12. [5] Sahoo DH, Bandyopadhyay D, Xu M, Pearson K, Parambil JG, Lazar CA, Chapman JT, Culver DA. Effectiveness and safety of leflunomide for pulmonary and extrapulmonary sarcoidosis. Eur Respir J. 2011 Nov;38(5):1145-50. [6] Baughman RP, Drent M, Kavuru M, Judson MA, Costabel U, du Bois R, Albera C, Brutsche M, Davis G, Donohue JF, MüllerQuernheim J, Schlenker-Herceg R, Flavin S, Lo KH, Oemar B, Barnathan ES; Infliximab therapy in patients with chronic sarcoidosis and pulmonary involvement. Am J Respir Crit Care Med. 2006 Oct 1;174(7):795-802. [7] Drent M1, Cremers JP, Jansen TL, Baughman RP. Practical eminence and experience-based recommendations for use of TNF-α inhibitors in sarcoidosis. Sarcoidosis Vasc Diffuse Lung Dis. 2014 Jul 8;31(2):91-107. [8] Shorr AF, Davies DB, Nathan SD. Outcomes for patients with sarcoidosis awaiting lung transplantation. Chest. 2002 Jul;122(1):233-8.

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