Transduction du signal par les immunorécepteurs

Transduction du signal par les immunorécepteurs

TRANSDUCTION DU SIGNAL PAR LES IMMUNORI CEPTEURS Renaud Lesourne a.,, Marc DaCron a Resume Summary Les immunorecepteurs reconnaissent, directement ...

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TRANSDUCTION DU SIGNAL PAR LES IMMUNORI CEPTEURS Renaud Lesourne a.,, Marc DaCron a

Resume

Summary

Les immunorecepteurs reconnaissent, directement ou indirectement, les antigenes sous leurs differentes formes. IIs comprennent les recepteurs pour I'antigene exprimes par les lymphocytes B (BCR), les recepteurs pour le complexe CMH-peptide exprimes par les lymphocytes T (TCR) et les recepteurs pour les complexes antigene-anticorps (RFc) exprimes par de nombreuses cellules lymphoides et myeldldes. Lorsqu'ils sont agreges & la surface des cellules qui les expriment, les immunorecepteurs delivrent des signaux qui conduisent a I'activation cellulaire. Bien qu'ils aient des structures differentes, des ligands differents, des distributions cellulaires differentes, et bien qu'ils induisent des reponses biologiques differentes, les immunorecepteurs utilisent des mecanismes comparabies pour stimuler les cellules. Les proprietes activatrices des immunorecepteurs dependent en effet de la presence, dans leurs domaines intracytoplasmiques, d'un ou plusieurs motifs moleculaires appeles immunoreceptor tyrosine-based activation motifs (ITAM). L'agregation des immunorecepteurs induit la phosphorylation des tyrosines des ITAM. Ceux-oi fonctionnent alors comme des sites de liaison permettant le recrutement de molecules possedant des modules d'interaction moi¢culaire. Ceiies-ci comprennent des enzymes et des molecules adaptatrices. Ainsi s'organisent, a u t o u r des domaines intracytoplasmiques des immunorecepteurs agreges, des complexes moleculaires oQ peuvent interagir les molecules effectrices et leurs substrats, et a partir desquels sont lancees des cascades de reactions qui propagent les signaux intracellulaires aboutissant & une augmentation de la concentration intracellulaire de Ca2+ eta I'activation de facteurs de transcription. Ces voies metaboliques sont regulees, positivement par d'autres molecules cytoplasmiques recrutees par des corecepteurs, et negativement par des molecules antagonistes, recrutees par los immunorecepteurs eux-m~mes ou par d'autres corecepteurs.

lmmunoreceptors recogmz-e, directly or indirectly, antigens under their different forms. They comprise B cell antigen receptors (BCR), T ceil receptors for MHC-peptide complexes (TCR) and receptors for antigen-antibody complexes (FcR) expressed by many lymphoid and myeloid cells. When aggregated at the cell surface, immunoreceptors trigger signals that lead to ceil activation. Although they have different structures, different ligands, different tissue distributions, and although they induce different biological responses, immunoreceptors use similar mechanisms to stimulate cells. The ability of immunoreceptors to tn~yger cell activation indeed depends on the presence of one or several immunoreceptor tyrosine-based activation motifs (ITAMs) in their intracytoplasmic domains. The aggregation of immunoreceptors induces the tyrosyl-phosphorylation of ITAMs. These then behave as docking sites that enable molecular interaction module-containing molecules to be recruited. Among these molecules are enzymes and adapter proteins. Molecular complexes are thus built up around the intracytoplasmic domains of aggregated immunoreceptors, where effector molecules can meet their substrates. Cascades of reactions that propagate activation signals intracellularly originate from these complexes, leading to an increased intracellular Ca2+ concentration and to the activation of transcription factors. These metabolic pathways are regulated, positively by other cytoplasmic molecules recruited by coreceptors, and negatively by antagonistic molecules, recruited by immunoreceptors themselves or by other coreceptors.

Immunorecepteurs - transduction - kinases - phospha-

Immunoreceptors - transduction - kinases - phosphatases • coreceptors,

1. Introduction

t a s e s - cor6cepteurs.

es antigenes stimulent le systeme immunitaire parce ce qu'ils se fixent sur des recepteurs specifiques exprirnes a la surface des lymphocytes et des cellules myeld~des. Ces recepteurs, qui partagent un ensemble de proprietes structurales et fonctionnelles communes, sont appeles immunorecepteurs.

L

~Laboratoire d'immunologie cel!ulaire et clinique INSERM U. 255 Institut Curie 26, rue d'UIm 75005 Paris * Correspondance. [email protected] article requ le 1 9 septembre, accepte le 5 octobre 2000.

c: Elsevier, Paris. Revue Franoaise des Laboratoires. novembre 2000. N° 327

II existe trois types d'immunorecepteurs. Les recepteurs du premier type sont exprimes exclusivement a la surface des lymphocytes B, d'ou ]eur nom B ceil receptor (BCR). IIs permettent la liaison des antigenes natifs, tels qu'ils se presentent Iorsqu'ils penetrent dans I'organisme. Les recepteurs du deuxieme type sont exprimes exclusivement a la surface des lymphocytes T. Ce sont les T ceil receptor (TCR). IIs se lient des peptides resultant de la degradation intracellulaire des antigenes internalises dans des cellules presentatrices d'antigene, et associes 29

Dossier sc entif que Immunologie

aux molecules d'histocompatibilite exprimees & la surface de ces cellules. C'est I'ensemble peptide/molecule d'histocompatibilite que reconnait le TCR. Les recepteurs du troisieme type ont une expression plus ubiquitaire. IIs ne se lient ni & I'antigene natif ni & ses produits de degradation, mais aux portions Fc d'anticorps complexes a I'antigene par leurs portions Fab. Uantigene interagit doric avec ces recepteurs de Fc (RFc) par I'intermediaire des anticorps, sous forme de complexes immuns. La liaison des antig4~nes aux immunorecepteurs induit une perturbation generale de I'etat de la cellule. Tout d'abord, les recepteurs se reorganisent sur la membrane. En adoptant cette nouvelle organisation, its peuvent engendrer une vague de signaux intracellulaires qui conduisent & la mise en activite de la cellule. C'est ce qu'on appelle I'activation cellulaire. La cellule pergoit le signal extracellulaire delivre par la fixation de I'antigene parce qu'il peut etre transmis & I'interieur de la cellule. L& il induit des molecules & entrer en contact et & reagir successivement les unes avec les autres. Ces reactions en chaines stimulent des voles metaboliques en attente qui conduisent & la realisation de programmes cellulaires specifiques comme la transcription de genes ou la secretion de molecules solubles. Selon le type cellulaire, I'activation se traduit par des activites biologiques differentes. Lorsqu'ils sont actives par les antigenes, les lymphocytes B ou les lymphocytes T proliferent et se differencient. Les lymphocytes B actives peuvent se differencier en plasmocytes capables de synthetiser des anticorps ou en lymphocytes B & memoire. Les lymphocytes T peuvent se differencier en cellules cytotoxiques, capable d'eliminer des cellules infectees par des virus ou des cellules cancereuses, ou en cellules auxiliaires capables de cooperer avec d'autres types cellulaires. Lorsqu'ils sont actives par les antigenes, les mastocytes, les macrophages, les monocytes, les polynucleaires ou les cellules natural k i l l e r (NK) secre-

tent des cytokines, des chimiokines ou des molecules cytotoxiques qui declenchent I'inflammation et la lyse de cellules cibles. L'antigene peut donc activer des processus qui, comme la proliferation et la differenciation, peuvent durer plusieurs jours, ou des processus qui, comme les reponses secretoires, ne durent que quelques heures, voire quelques minutes. Un meme immunorecepteur peut declencher des reponses biologiques differentes selon qu'il est exprime a la surface d'un type cellulaire ou d'un autre. Les RFc~IIA exprimes a la surface d'un macrophage ou d'une cellule N K peuvent activer des reponses bactericides ou cytotoxiques Iorsqu'ils fixent la portion Fc des IgG complexes a un antigene. A I'inverse, des immunorecepteurs differents peuvent declencher des reponses bioIogiques identiques s'ils sont exprimes a la surface d'un meme type cellulaire. Dans les mastocytes de souris, les RFc~.I, qui fixent les IgE, et les RFc'~411A declenchent les m~mes types de reponses biologiques. C'est donc essentiellement le type cellulaire qui determine le type de reponse biologique plus que la nature de I'immunorecepteur. Pourtant, si les reponses ne sont pas les memes, les mecanismes intracellulaires qui conduisent a I'activation de differentes cellules sont tres semblables. Les molecules intracellulaires impliquees sont les memes ou appartiennent aux memes families moleculaires, les interactions entre ces molecules sont similaires, les etapes essentielles de I'activation se succedent darts le meme ordre, et les voies metaboliques mises en route regroupent les memes ensembles de molecules. Les immunorecepteurs utilisent donc les m~mes mecanismes intracellulaires de signalisation pour activer les celiules. La presente revue a pour objectif de souligner les similitudes structurales et fonctionnelles entre les trois types d'immunorecepteurs et de proposer un schema general des principaux mecanismes utilises par les immunorecepteurs pour activer les cellules.

2. Structure des i m m u n o r e c e p t e u r s /~, une exception pres, les immunorecepteurs sont des recepteurs multicatenaires. IIs sont constitues de plusieurs sous-unites qui remplissent deux fonctions principales : une sous-unite de reconnaissance qui fixe les ligands extracellulaires et une sous-unite de signalisation qui declenche les voles d'activation intracytoplasmiques. L'exception est constituee par des RFc humains pour les IgG, les RFc~41A/C, dont l'unique cha;ne remplit ces deux fonctions. 2.1. Les s o u s - u n i t e s de r e c o n n a i s s a n c e

Ig~ Iga

~5 IT.~I Irrt¢~ IT^~I IITAM

BCR RFc¢I

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RFc Les immunor#cepteurs sont constitu~s d'une sous-unit6 de reconnaissance et d'une ou plusieurs sous-unit~s de sl~?nalisation. La sous-unit~ de reconnaissance fixe Fantig~ne. Les sous-unites de signalisation d#clenchent les premiers signaux intracellulaires grace aux motifs ITAM situes clans leur domame intracytoplasmique.

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I

Les sous-unites de reconnaissance des immunorecepteurs sont formees d'un grand domaine extracellulaire et d'un petit domaine intracellulaire. ,/k elles seules, elles peuvent fixer I'antigene, directement ou indirectement, mais elles ne permettent pas de delivrer de signaux intracellulaires. Elles sont constituees par un hombre variable de domaines possedant la structure caracteristique des domaines d'immunoglobulines. Les immunorecepteurs appartiennent & la superfamille des immunoglobulines (figure 1). La sous-unite de reconnaissance du BCR est une immunoglobuline ancree dans la membrane plasmique. Uextremite C-terminale est en effet prolongee par un domaine transmembranaire hydrophobe suivi d'un tres court segment intracytoplasmique. La sous-unite de reconnaissance du TCR est formee par un heterodimere (od~ ou y/8) dont chaque chaine possede un domaine N-terminal variable et un domaine C-terminal constant, suivi d'un domaine transmembranaire et d'un court segment intracytoplasmique. La sous-unite de reconnaissance des RFc est formee par une seule chaine polypeptidique transmembranaire, appelee 0c II existe des RFc differents pour chaque classe d'immunoglobulines. Les RFcy fixent les IgG, les RFc~ fixent les IgE, les RFco~ fixent les IgA, les RFcl.t fixent les IgM et les RFc8 fixent }es IgD. On distingue deux grands groupes Revue Fran£aise des Laboratoires, novembre 2000, N° 327

de RFc selon leur affinite pour les immunoglobulines : les RFc de forte affinite, qui peuvent fixer les immunoglobulines sous forme monomerique, et les RFc de faible affinite qui ne peuvent fixer les immunoglobulines qu'agregees ou complexees a un antigene multivalent. Par convention, les RFc de forte affinite sont designes par le nombre I, et les RFc de faible affinite par le nombre II ou III en chiffres romains [6]. 2.2. Les s o u s - u n i t 6 s de s i g n a l i s a t i o n Les sous-unites de signalisation sont formees d'un petit domaine extracellulaire et d'un grand domaine intracellulaire (figure 1). Elles peuvent delivrer des signaux a I'interieur de la cellule, mais ne peuvent pas reconnaTtre I'antigene. Elles sont constituees par une ou deux chafnes polypeptidiques transmembranaires reliees par des ponts disulfures. Elles s'associent aux sous-unites de reconnaissance gr&ce a des acides amines charges situes darts les regions transmembranaires. Uimmunoglobuline de surface du BCR est associee a un heterodimere compose d'une chafne Igc~ et d'une chatne IgJ}. Les chafnes s/j] ou y/8 du TCR sont associees a un homodimere de chaTnes ~ eta deux heterodimeres, C D 3 d y et CD3s/8. Dans la plupart des cas, la chatne c( des RFc est associee a un homodimere de cha~nes y. Darts les mastocytes, les RFc£1 et les RFcTIIIA sont aussi associes a une chaine tetraspan J]. La comprehension que le BCR, le TCR et les RFc appartiennent a la meme famille des immunorecepteurs a pour origine I'identification, dans le domaine intracytoplasmique de leurs sous-unites de signalisation, d'un motif d'activation. Ce motif est forme d'une double sequence YxxL (ou Yxxl), encadrant 6 a 8 acides amines variables (dans laquelle Y est une tyrosine, L une leucine, I une isoleucine et x un acide amine quelconque) [20]. Des experiences de mutation dirigee ont montre I'importance de ce motif consensus dans la capacite des RFc, du TCR et du BCR a activer les cellules qui les expriment et, particulierement, des deux tyrosines. Pour cette raison, ce motif a ete appele immunoreceptor tyrosine-based activation motif ou ITAM.

3. Signaux delivres par les immunorecepteurs Les sous-unites de signalisation sont des elements moleculaires charnieres capables d'interagir avec les sous-unites de reconnaissance des ligands extracellulaires et avec les molecules en amont des cascades d'activation intracellulaire. En effet, un recepteur ne fixe pas seulement des ligands comme le ferait un site de liaison, il transmet des signaux de I'exterieur vers I'interieur de la cellule, dans un langage que la cellule peut ,,comprendre ,,. On appelle transduction I'ensemble des mecanismes de transmission et de traduction du signal extracellulaire. La transduction d'un signal necessite deux conditions : 1) I'antigene, quelle qu'en soit la forme, dolt se fixer aux immunorecepteurs ; 2) la liaison de I'antigene dolt permettre I'agregation des immunorecepteurs dans le plan de la membrane. Seuls des antigenes multivalents sont en effet capables de delivrer un signal. Selon I'affinite des recepteurs, selon la nature et la conformation des ligands, selon le mode de fonctionnement des recepteurs, les modalites de I'agregation sont variables reals, d'une faoon generale, pour delivrer un signal, les recepteurs s'agregent, au minimum, ils se dimerisent. Cette regle s'applique aux immunorecepteurs comme a un grand nombre d'autres recepteurs [1 3]. Les sous-unites de reconnaissance etant associees aux sous-unites de signalisation, I'agregation des domaines extracellulaires des premieres entraine I'agregation des domaines intracellulaires des secondes, et permet la transmission du signal a. I'interieur de la cellule. Parmi les nombreux processus qui contr61ent I'activite cellulaire, la phosphorylation des proteines joue un r61e essentiel. Cette phosphorylation depend des activites antagonistes de kinases, qui fixent Revue Franoaise des Laboratoires, novembre 2000, N° 327

les groupements phosphates, et de phosphatases, qui les hydrolysent. La fixation d'un groupement phosphate cree un site de recrutement pour d'autres proteines. De nombreuses molecules possedent en effet des domaines capables de reconnaftre des sites phosphoryles sur d'autres molecules. La phosphorylation peut ainsi modifier la capacite des proteines & interagir les unes avec les autres et modifier leur Iocalisation a I'interieur de la cellule. C'est en transformant un signal mecanique, I'agregation de molecules membranaires, en un signal chimique, la phosphorylation de molecules cytoplasmiques, que les immunorecepteurs transduisent des signaux d'activation. La transduction des signaux par les immunorecepteurs procede en trois temps. Dans un premier temps, les tyrosines des ITAMs portes par les sous-unites de signalisation agregees sont phosphorylees par des kinases. Ces kinases appartiennent & la famille des kinases src. Dans un deuxieme temps, les tyrosines phosphorylees des ITAMs offrent des sites de recrutement & d'autres kinases. Ces kinases appartiennent & la famille des kinases syk. Ainsi recrutees par les ITAMs, les kinases syk s'autophosphorylent et/ou sont phosphorylees par des kinases src, puis phosphorylent & leur tour des molecules depourvues d'activite catalytique qu'on appelle molecules adaptatrices. Dans un troisieme temps, ces molecules adaptatrices recrutent d'autres molecules qui sont phosphorylees par une kinase syk. Ces molecules sont a I'origine de voles metaboliques qui propagent les signaux dans les cellules et conduisent & I'activation cellulaire. 3.1. P h o s p h o r y l a t i o n d e s I T A M s 3.1.1. La famille des k i n a s e s

s r c

La famille des kinases src (du nom du premier oncogene viral decrit v-src, responsable du sarcome de Roux, et dont le proto-oncogene code pour la kinase src) rassemble une dizaine de molecules qui possedent des caracteres propres et partagent des caracteres communs [5]. Ce sont des proteines tyrosine kinases (PTK), c'est-a.-dire qu'elles phosphorylent des proteines sur un residu tyrosine. Elles possedent une meme organisation generale. - Les kinases de la famille src sont ancrees darts la membrane. Elles sont liees de maniere covalente par leur extremite N-terminale & un acide myristique qui s'enfonce dans le feuillet interne de la membrane plasmique. Cet acide gras a une affinite pour des structures particulieres de la membrane, d'une centaine de nanometres, riches en cholesterol et en glycosphingolipides, qu'on appelle microdomaines [3]. ,/k leur extremite N-terminale les kinases src ont un ,,domaine unique ,, (dont la sequence est propre & chaque kinase). Ce domaine permet I'association, directe ou indirecte, de certaines kinases src avec les immunorecepteurs non agreges.

-

- Elles possedent deux domaines conserves par tousles membres de la famille, d'oQ leur denomination SH pour Sre homology domain : un domaine SH2 et un domaine SH3. Les domaines SH2 et SH3 fonctionnent comme des domaines de reconnaissance [4]. Les domaines SH2 se fixent a des sequences caracteristiques contenant un residu tyrosine phosphoryl& Les domaines SH3 se fixent a des sequences contenant le motif xPxxP, ou Pest une proline et x un acide amine quelconque. Contrairement ace que leur nom indique, ces domaines ne sont pas propres & la famille src, Beaucoup de molecules impliquees dans la signalisation intracellulaire possedent ce type de domaines. Leur r61e est fondamental car ils permettent de cibler des molecules vers d'autres molecules: des proteines cytoplasmiques vers des proteines membranaires ou des substrats vers des enzymes. Cet adressage moleculaire est relativement specifique, car il ne suffit pas qu'il y ait une tyrosine phosphoB4ee ou des prolines separees par deux acides amines pour que les domaines SH2 et SH3 se fixent. Selon les proteines sur lesquelles ils sont situes, chaque domaine SH2 ou SH3 possede une specificite plus restreinte qui depend respectivement des trois acides amines en aval de la tyrosine ou des acides amines qui entourent les prolines. 31

Dossier scientifique Immunologie

- Juxtapose a ces domaines de reconnaissance, un domaine catalytique contient les sequences responsables de I'activite enzymatique de la kinase.

I ~ | B I m | l l l l l ~ l l lII I-o.,.,.I

ilII

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sous-unit~s de

~IF-- Microdomaine --I~

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signalisation

Iit111111111111111111111111111111111

,D

IIIIIIII111111

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IIII

- Un domaine r6gulateur C-terminal contr61e I'activit6 de la kinase. Certaines PTK de la famille src sont exprimees dans de nombreux types ceUulaires ; d'autres ont au contraire une distribution cellulaire plus ou moins restreinte. Les lymphocytes T expriment principalement fyn et Ick, les lymphocytes [] lyn et blk et les cellules myeldi'des lyn, src, fgr et hek. Ce sont les kinases src qui declenchent les premiers evenements de la cascade de signalisation en phosphorylant les ITAMs des immunorecepteurs. 3.1.2. M ~ c a n i s m e de phosphorylation des ITAMs Les RFc~I, qui representent le modele le plus simple et le mieux connu, peuvent servir de modele general [28]. En absence de stimulation, les RFcEI ne sont pas agr6ges et leurs ITAMs ne sont pas phosphoryles (figure 2A). Lorsqu'un antigene multivalent se fixe & des IgE, fixees elles-m¢mes aux sous-unites de reconnaissance, les RFc~I sont agreges. IIs sont phosphoryles par lyn sur les tyrosines de teurs ITAMs. Pour phosphoryler les ITAMs lyn dolt 6tre suffisamment proche des sous-unites de signalisation ~ et ~' des RFc~I. Une fraction des kinases lyn intracellulaires est associee constitutivement & la sous-unit~ ]3 des RFc~:I. C'est I'agregation des RFcsl qui rapproche lyn, associee & un recepteur, des ITAMs des sous-unites J} et 7 du recepteur adjacent [18]. En meme temps, les recepteurs agreges entrent dans les microdomaines ou sont concentrees les molecules impliqu6es dans les etapes initiales de la signalisation. Les microdomaines sont particulierement riches en kinase src. Les RFc~I et les kinases lyn sont ainsi concentres dans les memes regions de la membrane plasmique et deviennent alors suffisamment proches pour interagir [11] (figure 2B). Les 6venements initiaux sont, a peu de choses pres, les memes au cours de I'activation des cellules B par le BCR et de I'activation des cellules T par le TCR. Dans les lymphocytes B, les kinases lyn et blk sont preassociees avec la sous-unite Igc~ du . B C R . Uagregation des recepteurs rapproche les kinases src des tyrosines des ITAMs des sous-unites Igc~ et Ig~ de BCR adjacents. Dans les lymphocytes T, la kinase Ick n'est pas associee aux sous-unites de signalisation mais aux corecepteurs CD4 qui sont concentres dans les microdomaines. C'est I'entree des TCR agreges dans les microdomaines qui permet le rapprochement des sous-unites de signalisation et de Ick [32]. Mais il ne suffit pas que les kinases src soient proches de leurs substrats, elles doivent aussi 6tre activees pour pouvoir les phosphoryler. Vetat fonctionnel des kinases src depend, entre autres choses, d'une tyrosine situee dans le domaine regulateur C-terminal. )k I'etat inactif, cette tyrosine est phosphorylee et se fixe au domaine SH2 de la kinase, ce qui rend inaccessible le domaine catalytique. I 'agregation des immunorecepteurs permet la mise en jeu d'une phosphatase membranaire appelee CD45 qui, en dephosphorylant la tyrosine du domaine regulateur, rend accessible le domaine catalytique [2?]. Les kinases src peuvent alors phosphoryier teurs substrats. Ceux-ci sent, dans un premier temps, les tyrosines des ITAMs (figure 2B) et, dans un second temps, les kinases de la famille syk (figure 2C). 3.2. R e c r u t e m e n t des k i n a s e s s y k 3.2. I. Les k i n a s e s de la famille

A) Les kinases src sont ancr~es dans les microdomaines ou sont associees aux sousunit~s de signalisation des immunor&cepteurs. Les immunor~cepteurs non agr~g~s sont situ~s en dehors des microdomaines. B) L'agr~gation des immunor~cepteurs leur permet d'entrer dans les microdomaines ob leurs ITAMs sont phosphoryl~s par les kinases src. C) Les kinases syk, recrut~es par les ITAMs phosphoryl~s, sont phosphoryl~es et activ~es, etphosphorylent laprot~ine adaptatrice LAT. D) LATrecrute Grb2, SLP-76 et la PLC'~I. E) La PLC'~I est phosphoryl~e et activ~e par les kinases syk et par les kinases Btk et Itk.

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syk

Les kinases de la famille syk se limitent aujourd'hui & deux membres, syk et ZAP-?0 (z~ta associated protein of 70 kDa) [29]. Elles possedent deux domaines SH2 et un domaine tyrosine kinase. Bien qu'on ne distingue pas chez elles de veritable domaine de regulation, elles possedent de nombreuses tyrosines dont la phosphorylation contr61e leur activite. Syk est exprimee dans les lymphocytes B, les lymphocytes T et les cellules myeldi'des; ZAP-70 est exprimee dans les lymphocytes T (voir Particle de E Le Deist, dans ce numero) et les ceilules NK mais pas dans les lymphocytes B. Revue Fran?aise des Laboratoires, novembre 2000, N° 32?

Contrairement aux kinases de la famille src, les kinases de la famille syk, ne sont pas ancrees dans Ia membrane plasmique. Elles se mobilisent au cours de Factivation cellufaire pour se fixer aux tyrosines phosphorytees des ITAMs. Pour que Finteraction soit stable, il faut que les deux domaines SH2 interagissent simuttanement avec les deux tyrosines des ITAMs. 3,2.2. Recrutement et activation des kinases de la famille

syk

Lorsqu'elles sont phosphorylees, les tyrosines des ITAMs devieenent donc des sites de liaison qui permettent aux immunorecepteurs de recruter les kinases de la famille syk. Ce recrutement est necessaire pour que les kinases syk soient activees. II n'est cependant pas suffisant. Pour atteindre leur pleine activite kinase, syk et ZAP-70 sont activees par des mecanismes differents. La fixation de syk sur les tyrosines phosphorylees des ITAMs stimute son activite kinase. Cette stimulation permet & syk de s'autophosphoryler et d'atteindre ainsi un niveau d'activite suffisant pour phosphoryler des substrats. ZAP-70 possede une activite kinase intrinseque cent lois inferieure a celle de syk, ce qui la rend incapable de s'autophosphoryler pour augmenter son activite kinase. Sa mise en activite necessite le concours de kinases de la famille src. En le phosphorylant, celles-ci rendent ZAP-70 capable de phosphoryler des substrats (figure 2C).

Parmi les substrats des kinases syk, il existe des molecules depourrues d'activite catalytique. Leur r61e est d'assembler et d'organiser les complexes moleculaires qui sont a I'origine des voles d'activation intracellulaires. Un grand nombre de molecules adaptatrices ont ere identifiees [21], parmi lesquelles quatre jouent un r61e essentiel. 3.3.1. LAT

LAT (linker for activation of T cells) est une molecule adaptatrice trans~ membranaire exprimee dans les lymphocytes T, les cellules NK, les mastocytes et les plaquettes. L A T e s t localisee dans les micrcdomaines, gr&ce & deux sites de palmitoylation. Les kinases de la famitle syk, recrutees par les sous-unites de signatisation des immunorecepteurs transloques dans les microdomaines, peuvent se rapprocher de LAT et la phosphoryler sur plusieurs tyrosines [34] (figure 2C). Une fois phosphorylee, LAT recrute plusieurs molecules, parmi lesqueltes deux molecules adaptatrices appelees Grb2, qui interagit directement avec LAT, et SLP-76 (SH2 domain-containing leukocyte protein of 76 kDa), qui interagit avec LAT par l'intermediaire de Grb2 LAT recrute aussi une enzyme qui est une phospholipase C, la PLC~'I (figure 2D). 3,3.2, Grb2

Grb2 (growth receptors binding protein 2) n'est pas restreinte au systeme hematopdl~tique ; c'est une proteine ubiquitaire, Elle possede deux domaines SH3 de part et d'autre d'un domaine SH2. Elle relie des molecules contenant des tyrosines phosphorylees (comme LAT) & d'autres molecules riches en prolines qui se fixent sur ses domaines SH3 [15]. 3.3.3. S L P - 7 6

SLP-76 possede un domaine SH2 C4erminal, une region centrale riche en prolines et plusieurs tyrosines situees & I'extremite N4erminale. Les tyrosines sont phospherylees par ZAP-70 lorsque SLP-76 s'associe a. LAT (figure 2D). Elles peuvent alors servir de sites de recrutement pour Ies domaines SH2 de molecules & l'origine de voles d'activation intracellulaires. Bien que SLP-76 ne s'associe pas directement a. la PLC,~-I, sa presence est necessaire pour que la PLCy1 soit activee [33]. 3.3.4, S L P - 6 5

SLP-65 est I'homologue de SLP-76 dans les lymphocytes B. Comme SLP-76, elle possede un domaine SH2 C-terminal et une region cenRevue Frangaise des Laboratoires, novembre 2000, N° 327

trale riche en prolines. On ignore comment SLP-65 est recrutee & la membrane plasmique (LATest absente dans les lymphocytes B), mais on salt qu'elte est phosphorylee par syk. Une lois phosphorytee, elle recrute la proteine Grb2 et une PLC7 (la PLC72) [12]. 3.4. P r o p a g a t i o n ~ntracoliulaire des s i g n a u x d ' a c t i v a t i o n Uagregation des immunorecepteurs par les antigenes declenche donc une serie d'evenements de phosphorylation qui permettent le recrutement et t'activation de proteines tyrosines kinases et de molecules adaptatrices. Ensemble, ces molecules mettent en activite des voles metaboliques qui conduisent & I'activation cetlulaire, On peut schematiquement distinguer deux grandes voles : - la vole calcique qui declenche des vagues de calcium (Ca2+) a Finterieur de la cetlule ; - ta vole ras qui aboutit 9. t'activation de kinases appelees les MAPK

(mitogen-activated protein kinases). 3.4.1, La vole calcique

Les PLC'f sont & t'origine de la reponse calcique. Une lois fixees sur SLP65 ou sur LAT, el!es sont phosphorylees par des kinases syk et par deux autres proteines tyrosine kinases: Btk (Bruton's tyrosine kinase) qui active la PLQ/2 dans les lymphocytes B (voir I'article de E Le Deist, dans ce numero) ou la PLC71 dans les mastocytes et ttk (inducible T cell kinase) qui active la PLCy1 dans les lymphocytes T [22] (figure 25). Ces kinases sont transloquees & la membrane par t'intermediaire d'un domaine appele pleckstrin homology domain (domaine PH), qui possede une affinite pour les molecules de phosphatidylinositol (3,4,5)-tri-phosphate (PIP3) presentes dans le feuitlet interne de la membrane ptasmique. Cette translocation est essentielle pour permettre aux kinases de la famille src de phosphoryler et d'activer Btk et ttk [23]. Une fois activees, elles peu~ vent phosphoryler et activer les PLCy. Les PLC71 et 2 degradent le phosphatidylinositol (4,5)-bi-phosphate (PIP2) en diacylgtycerot et en differents inositolphosphates, dont le principal est I'inositol(1,4,5)-tri-phosphate (I P3). UIP3 se fixe sur des recepteurs specifiques presents sur la face cytoplasmique du reticulum endoplasmique. La liaison de I'IP3 & ces recepteurs stimule la sortie transitoire du Ca2+ hers du reticutum. Des mecanismes complexes de regulation de la sensibilit6 des recepteurs d'lP3, qui font sortir le Ca2+, et des pompes & Ca2+, qui le font rentrer dans le reticulum, engendrent des oscillations caracteristiques dont la frequence et I'amplitude peuvent constituer des signaux [9]. La sortie du Ca2+ hors du reticulum induit, par un mecanisme mal elucide, Fouverture de canaux calciques sur la membrane cytoplasmique et, en consequence, une entree du calcium extracellulaire. Dans le cytosot, I'accroissement de la concentration de Ca2+ stimute tes activites de nombreuses proteines comme Ia calmoduline et la calcineurine. La fixation du Ca2+ sur la caF moduline permet & celle-ci de changer de conformation et de se fixer sur la calcineurine. L'activite phosphatase de la calcineurine est alors stimulee, ce qui lui permet de dephosphoryter le facteur de transcription NF-AT (nuclear factor-activated Tcells) qui peut ainsi passer la membrane nucleaire et activer la transcription des genes de cytokines [19] (figure 3 et voir l'article de A. Wynckel, J.-H. M. Cohen, inhibiteurs de la calcineurine, dans ce numero). 3.4.2. La vole

ras

Les proteines ras font partie d'une famille de petites GTP-ases intra~ cellulaires de 21 kDa, ancrees dans la membrane ptasmique par leur extremite C4erminale. Efles existent sous deux formes : une forme inactive, liee au GDP (guanosiee diphosphate), et une forme active, liee au GTP (guanosine triphosphate). Le passage d'une forme & I'autre est contr61e par des facteurs d'echange, qui remplace la molecule de GDP par une molecule de GTP, ou par des proteines GAP, qui stimulent I'activite GTPase autocatatytique des proteines ras et permettent la dephosphorylation du GTP associe en GDP [14]. 33

Dossier sc entifique Immunologie

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r(~cepteur de I'IP3

La voie calcique : la PLC~,I activ#e transforme le PIP2 en DAG et en IP3. L'IP3 se h~e sur des recepteurs sp~clfiques sltu#s ~ /a surface du r#tfculum endoplasmique, et d~clenche la liberation du calcium dans le cytoplasme. La calmoduh'ne fixe du calcium, change de conformation, et st/mule I'activit# phosphatase de la calcineurine qui dephosphoryle NFAT NF-ATpeut a/ors entrer dans le noyau et activer la transcnlotion des genes de cytokines. La voie ras : la prot~ine adaptatrice Grb2 recrute sos qui #change une molecule de GDP par une molecule de GTP sur ras. La proteine ras-GTP recrute raf et /'active. Raf phosphoryle et active la prot#ine Mek qui elle-m#me phosphoryle et active les MAPK. Ces derni~res peuvent a/ors entrer dans le noyau et act/vet la transcription de genes codant pour des facteurs de transcription imptiques dans les m~canismee de profiferation et de diff#renciation cellulaires.

Grb2 joue un rele essentiel dans I'activation de la vole ras. Une lois recrutee & la membrane, Grb2 permet le recrutement d'un facteur d'echange appele sos (son of sevenless). Sos active les proteines ras qui declenchent I'activation en cascade de kinases dent les substrats terminaux sent les MAPK. Celles-ci peuvent alors entrer dans le noyau o~ elles act/vent des facteurs de transcription qui induisent I'expression de genes de cytokines eu de molecules contrSlant la proliferation cellulaire (figure 3).

4. Regulation des signaux transmis par les immunorecepteurs Les signaux d'activation delivres par les immunorecepteurs sent modules par de nombreux mecanismes. Certains sent contrSles par les immunorecepteurs eux-m6mes, d'autres par des corecepteurs coen34

gages avec les immunorecepteurs. Ces mecanismes peuvent moduler positivement ou negativement le signal. 4.1. L'autoregulation des i m m u n o r e c e p t e u r s 4.1.1.

R~gulation positive

Nous avons vu precedemment qu'une m~me sous-unite de reconnaissance peut etre associee & plusieurs sous-unites de signal/sat/on dent certaines possedent plusieurs ITAM. Or, tousles ITAMs ne sent pas egaux. Certaines chaTnes portant des ITAMs amplifient les signaux transduits par d'autres cha~nes & ITAM. Ainsi, la chafne I~ des RFc~I permet d'augmenter la phosphorylation et I'activite des kinases syk recrutees par I'ITAM de la chaTne y [10]. Un rele dans I'amplification du signal a aussi ere propose pour les trois ITAMs de la cha?ne ~,. Selon I'avidite de I'interaction entre les antigenes et les TCR, le nombre Revue Fran?aise des Laboratoires, novembre 2 0 0 0 , N° 327

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A) Situation avant la coagr@gafion. B) Les complexes irnmuns se fixent simuttanement sur les immunor@cepteurs et sur /es RFc~iltB. La fixation des complexes immuns coagr@ge les irnmunorecepteurs et les RFcyIIB et permet la phosphorylation de I'ITIM des RFcyIIB par une kinase src. C) Les RFc~,IIB phosphoryles recrutent SHIP qui d@phosphoryle te PIP3 en PIP2. La d@gradation du PIP3 en PIP2 bloque le recrutement de E]tk a la membrane ce qui inhibe I'acfivation de la vole calcique. D) La phosphorylation de SHIP par urge klnase src permet & SHIP de recruter la prot@ine Dok. Dok recrute et active la proteine ras-GAP qui stimule I'activit@ GTPase autocatalytique de ras-GTF~ La forme inactive de ras s'accumule ce qui bloque I'activation de la vole ras.

d'ITAMs phosphoryles sur la chafne ~ varie. Les sous-unites ~ tres phosphorylees pourraient recruter davantage de kinase s y k que les sousunites ~ peu phosphorylees. Cette modulation de I'intensit@ du signal pourrait jouer un r61e important au cours de la selection lymphocytaire dans le thymus [1 6].

4.1.2. R~gulation negative Les immunorecepteurs peuvent aussi r@guler negativement les signaux d'activation qu'ils declenchent, Certains mecanismes de regulation negative passent par le recrutement de phosphatases, comme ta proteine tyrosine phosphatase SHP-1 (SH2 domains-containing protein tyrosine p h o s phatase-1) et I'inositol phosphatase SHIP ( S H 2 d o m a i n - c o n t a i n i n g 5 ' inositolphosphatase), qui dephosphorylent des molecules impliquees dans Revue Fran?aise des LaboratoJres, novembre 2000, N° 327

les voles d'activation declenchees par les immunorecepteurs. Le r61e physiologique de SliP-1 dans la regulation negative est illustre par les anomalies observees chez des souris depourvues de cette proteine appelees m o t h e a t e n . Ces souris presentent une hyperimmunoglobulinemie, et produisent des autoanticorps. Uhyper-proliferation des lymphocytes T et B se produit in vitro Iorsqu'ils sont stimules avec des ligands capables d'agreger leurs immunorecepteurs [24]. Les mastocytes ou les lymphocytes B provenant de souris deficientes pour la phosphatase SHIP sont egalement hyper-reactifs [2]. Ces phosphatases peuvent ~tre preassociees aux immunorecepteurs avant m@me qu'ils soient agreges, ou recrutees par des corecepteurs. On connaft mar comment ces phosphatases sont recrutees par les immunorecepteurs. On conna?t mieux les mecanismes par lesquels ces phosphatases sont recrutees par les 35

Dossier scientifique Immunologie

corecepteurs et inhibent les voles d'activation declenchees par les immunorecepteurs. 4 2. L~,~s ~:or(!copt¢;urs Les signaux delivres par les immunorecepteurs sent aussi regules, positivement et negativement, par d'autres recepteurs qui sent coagreges avec les immunorecepteurs Iorsque ceux-ci reconnaissent I'antigene. Ces corecepteurs peuvent 6tre coagreges avec les immunorecepteurs parce qu'ils reconnaissent soit I'antigene (indirectement le plus souvent, par I'intermediaire de molecules fixees a I'antigene, comme des proteines du complement ou des anticorps), soit d'autres recepteurs exprimes la surface des cellules presentatrices d'antigene.

4.2.1. R~gulation positive Le corecepteur CD19 exprime & la surface des lymphocytes B est associe constitutivement avec CD21, un recepteur des fragments iC3b, C3d,g, et C3d du troisieme composant du complement (C3) [26]. Des antigenes natifs recouverts par ces fragments permettent donc la coagregation des BCR et des corecepteurs CD1 9. Cette coagregation a pour effet d'amplifier les signaux transmis par le BCR. Le rele amplificateur de CD1 9 a ete mis en evidence en analysant le phenotype de souris rendues deficientes pour cette molecule. Ces souris presentent une reduction du taux d'immunoglobulines seriques et developpent une reponse anticorps de tres faible amplitude en reponse & la stimulation par des antigenes T-dependants. Elles sent deficientes pour certaines populations de lymphocytes B e t leurs lymphocytes B peripheriques presentent des signes d'hypoproliferation Iorsque leurs BCR sent agreges in vitro. Lorsqu'il est coagrege au BCR, CD19 est phosphoryle sur des tyrosines par les kinases src. Une fois phosphoryle, CD1 9 recrute plusieurs molecules a. domaines SH2, parmi lesquelles la PI-3 kinase. Cette proteine, qui est egalement recrutee par les BCR agreges, joue un rele determinant avec la PLCy dans la reponse calcique. Son action principale est de phosphoryler le PIP2 pour former du PIP3. Le PIP3, nous I'avons vu precedemment, permet le recrutement des proteines Btk et Itk qui activent les PLCy. La coagregation du BCR et de CD19 aboutit donc& la synergie des deux systernes de transduction. De m~me, le corecepteur CD28 exprime b. la surface des lymphocytes T joue un r61e essentiel dans I'activation de ces cellules. Uagregation du TCR suffit & activer les cellules transformees, mais pas les lymphocytes T normaux. Souvent meme, elle induit une anergie cellulaire, voire une apoptose. Pour activer des cellules T normales, il faut que celles-ci regoivent un second signal. Uagregation de CD28 delivre un tel signal. CD28 a pour ligand une molecule membranaire appelee B7 exprimee & la surface des cellules presentatrices d'antigene. Le contact entre la cellule presentatrice et le lymphocyte T permet I'interaction de B7 et de CD28 et I'agregation de CD28. Une fois agrege, CD28 est phosphoryle et recrute, comme CD19, la PI-3 kinase qui agit en synergie avec les signaux transduits par le TCR. Uagregation de CD28 a egalement un effet regulateur sur la Iocalisation du TCR dans la membrane plasmique. En effet, il a ete montre recemment que I'agregation de CD28 facilite la redistribution des TCR dans les microdomaines. Ce mecanisme aurait pour consequence d'augmenter la phosphorylation des TCR et d'amplifier ainsi les signaux qu'ils transmettent [31 ].

4.2.2. R~gulation n~gative De meme que des kinases recrutees par des corecepteurs peuvent contribuer & une regulation positive, les phosphatases SHIP et SHP-1 peuvent etre recrutees par des corecepteurs qui regulent negativement I'activation cellulaire induite par les immunorecepteurs. L'un d'entre eux est un recepteur de faible affinite pour les IgG, appele RFc~IIB. Contrairement & CD19 et CD28, son expression est ubi36

quitaire. II est exprime a la surface des lymphocytes B, des lymphocytes T actives, des macrophages, des monocytes, des mastocytes, des basophiles et des cellules de Langerhans. L'analyse de souris rendues deficientes en RFcyIIB a montre que ces recepteurs jouent un rele essentiel dans la regulation negative de la reponse anticorps et des reactions inflammatoires & mediation humorale. Chez ces souris, les reponses anticorps et anaphylactiques sent plus intenses que chez des souris sauvages, et elles sent frequemment porteuses de maladies autoimmunes [1 7, 30]. Les RFc~/tlB inhibent I'activation cellulaire induite par les BCR, les TCR et les RFc~I Iorsqu'ils sent coagreges & ces immunorecepteurs par un ligand commun [7]. Une sequence responsable de I'inhibition a ete identifiee, dans le domaine intracytoplasmique des RFc~IIB. Elle contient le motif unique YxxL, qui ressemble & un demi ITAM et qui a ete appele immunoreceptor tyrosine-based inhibition motif (ITIM). Ce motif, identifie pour la premiere fois dans les RFcTIIB, a ere retrouve par la suite dans un grand nombre de molecules transmembranaires capables de reguler negativement I'activation cellulaire induite par les immunorecepteurs [8]. Ces molecules sent exprimees principalement & la surface des cellules hematopoiteiques. La plupart n'ont pas de ligands extracellulaires connus. Plusieurs se lient aux molecules de classe I du CMH. Lorsqu'ils sent coagreges aux immunorecepteurs, les recepteurs ITIM sent phosphoryles par des kinases src. Une fois phosphoryles, tous, saul les RFcyIIB, recrutent la tyrosine phosphatase SHP-1. Cette phosphatase inhibe I'activation cellulaire car elle dephosphoryle differentes molecules (comme les sous-unites de signalisation des immunorecepteurs ou la proteine adaptatrice SLP-76) en ament des voles d'activation. Les RFcyIIB et eux seuls recrutent I'inositol phosphatase SHIR Une fois recrutee par les RFcyIIB, SHIP est phosphorylee sur une tyrosine par des kinases src. Elle inhibe alors la vole calcique et la vole ras en utilisant deux mecanismes differents. En dephosphorylant le PIP3, SHIP inhibe le recrutement de Btk et d'ltk qui sent necessaires & I'activation des PLCy [1]. En recrutant par sa tyrosine phosphorylee une proteine appelee Dok, SHIP inhibe la vole ras. Dok active les proteines GAP qui convertissent les formes actives ras-GTP en formes inactives ras-GDP, inhibant ainsi I'activation des MAPK [25] (figure 4). En inhibant la vole calcique et la vole ras les RFcyIIB bloquent la propagation intracellulaire des signaux d'activation.

5. C o n c l u s i o n M

algre leurs differences, les immunorecepteurs fonctionnent donc selon des modalites comparables. IIs delivrent aux cellules une succession de signaux dont I'enchaTnement procede en deux grandes etapes. La premiere etape est propre aux immunorecepteurs. Elle debute par la phosphorylation des ITAM et par le recrutement, sur les ITAM phosphoryles, de proteines kinases de la famille syk. Elle se poursuit par le recrutement de molecules adaptatrices qui recrutent b. leur tour des molecules qui, une fois activees par les kinases syk, permettent le declenchement de la seconde etape de la signalisation. Celle-ci commence, gr&ce A la plurispecificite des molecules adaptatrices, par la mise en route de plusieurs voles de signalisation paralleles qui aboutissent, entre autres evenements, A la transcription de genes et/ou & la liberation de mediateurs. Cette seconde etape n'est pas propre aux immunorecepteurs. En effet, un grand nombre d'autres recepteurs, comme les recepteurs de facteurs de croissance et les recepteurs de cytokines, utilisent les m¢mes voles de signalisation. Ainsi convergent et fonctionnent ensemble, cooperent ou s'antagonisent, s'integrent, les reponses aux multiples informations reoues en permanence par les cellules qui contribuent & assurer la fonction homeostatique du systeme immunitaire. Revue Frangaise des Laboratoires, novembre 2000, N° 327

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