Trichobézoard : à propos de 5 observations

Trichobézoard : à propos de 5 observations

Archives de pédiatrie 12 (2005) 1608–1612 http://france.elsevier.com/direct/ARCPED/ Fait clinique Trichobézoard : à propos de 5 observations Five ca...

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Archives de pédiatrie 12 (2005) 1608–1612 http://france.elsevier.com/direct/ARCPED/

Fait clinique

Trichobézoard : à propos de 5 observations Five cases of trichobezoars in children C. Roche a, E. Guye b, E. Coinde c, C. Galambrun d, C. Glastre e, M. Halabi f, O. Mory a, J.-L. Stéphan a,* a

Service de pédiatrie, hôpital Nord, CHU Saint-Étienne, 42055 de Saint-Étienne cedex 02, France b Service de chirurgie pédiatrique, hôpital Nord, CHU Saint-Étienne, France c Service de gastroentérologie pédiatrique, hôpital Edouard Herriot, CHU de Lyon, France d Service d’hématologie, hôpital Débrousse, CHU de Lyon, France e Service de pédiatrie, centre hospitalier d’Annecy, France f Service de Pédiatrie, centre hospitalier Montbrison, France Reçu le 24 juin 2004 ; accepté le 13 juillet 2005 Disponible sur internet le 27 septembre 2005

Résumé Le trichobézoard est constitué de concrétions de cheveux et de débris alimentaires. Ce diagnostic doit être évoqué sur une histoire de syndrome occlusif traînant dans un contexte de trichotillomanie, mais sa découverte peut être fortuite dans le cadre du bilan d’une anémie ou d’un reflux gastro-œsophagien par la palpation d’une masse abdominale épigastrique. La première observation de cette courte série illustre le syndrome de Rapunzel, exceptionnel, avec de nombreuses perforations et une nécrose digestive. Les quatre autres sont des bézoards classiques, intragastriques stricts, identifiés rapidement par l’échographie. Le traitement des trichobézoards est exclusivement chirurgical, la digestion par la papaïne ou l’extraction endoscopique étant impossible. Il faut insister sur le caractère particulièrement dangereux de cette déviance. La prise en charge psychologique des troubles psychiques parfois associés devra compléter à l’évidence le geste chirurgical. © 2005 Publié par Elsevier SAS. Abstract Trichobezoars are made up of concretions of ingested hair and food. A history of occlusive syndrome in a context of trichotillomania and psychological problems must lead to this diagnosis. Bezoars can be fortuitously recognised by palpation of an epigastric abdominal mass while investigating anemia or esophageal reflux. This deviance is particularly dangerous. The first case of this series illustrates the Rapunzel syndrome with many perforations and necrosis of the small bowel. The 4 others are strict intragastric bezoars, quickly identified by echography. Treatment is exclusively surgical, digestion by papain or endoscopic extraction being impossible. Psychological assistance is mandatory. © 2005 Publié par Elsevier SAS. Mots clés : Trichobézoard ; Syndrome de Rapunzel Keywords: Trichobezoars; Child

Le trichobézoard est un agglomérat de cheveux et/ou de textile associé à des débris alimentaires, retrouvé dans le tube digestif et surtout dans l’estomac. Cette pathologie concerne * Auteur correspondant. Adresse e-mail : [email protected] (J.-L. Stéphan). 0929-693X/$ - see front matter © 2005 Publié par Elsevier SAS. doi:10.1016/j.arcped.2005.07.013

habituellement l’enfant, parfois des jeunes adolescentes présentant des troubles psychiques [1]. Il existe une forme particulière, tout à fait exceptionnelle, de trichobézoard avec une extension dans l’intestin grêle, et souvent source de complications redoutables [2–5] : le syndrome de Rapunzel, qui fait référence au conte des frères Grimm. En rapportant cinq

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observations récentes en Rhône-Alpes (année 2003) dont une caractéristique de cette dernière forme anatomique, nous voulons attirer l’attention sur les difficultés diagnostiques parfois rencontrées, les modes de révélation et surtout la gravité potentielle de cette déviance.

1. Observations 1.1. Observation no 1 Ce jeune garçon de cinq ans d’origine Cambodgienne présentait des douleurs abdominales et des vomissements évoluant depuis quatre jours avec un arrêt des matières. L’interrogatoire était difficile pour des raisons linguistiques. L’examen clinique retrouvait un abdomen ballonné et sensible chez un enfant apyrétique mais avec une asthénie extrême. Le bilan biologique montrait une CRP un peu augmentée à 27,6 mg/L, une hyperleucocytose à prédominance neutrophile (12 200 par mm3), une discrète anémie microcytaire (Hb 11,7 g/dl, VGM à 66,5 fl). Le diagnostic n’a pas été porté sur le cliché d’abdomen de face sans préparation mais a posteriori, on distinguait nettement une masse intragastrique moulée par l’air dans l’estomac (Fig. 1). L’échographie abdominale objectivait un épanchement intrapéritonéal diffus et une stase liquidienne et le diagnostic a été manqué. La persistance de la symptomatologie douloureuse et du syndrome subocclusif a conduit à une cœlioscopie qui a mis en évidence une dilatation de l’estomac avec à la palpation une impression très particulière de masse intragastrique volumineuse « prenant le godet ». Deux invaginations intestinales iléo-iléales ont été libérées sans difficulté. La gastroscopie au cours du même temps peropératoire a mis également en évidence un volumineux trichobézoard intragastrique. Après échec d’une tentative de dissolution du bézoard à l’aide de

Fig. 2. Vue peropératoire : extraction d’une corde de trichobézoard de l’intestin grêle par l’une de ses perforations.

papaïne, une laparotomie a été réalisée au septième jour. L’exploration de la cavité abdominale a retrouvé un grêle inflammatoire très distendu avec de multiples zones de rétraction le long du bord mésentérique. La libération de ces zones a mis en évidence des petites perforations bouchées de 1 cm de diamètre à 5 × 2 cm. On en dénombrait une vingtaine étendue sur un mètre d’intestin grêle. La queue du bézoard faisait effet de « corde » à l’origine de différentes zones de nécrose (Fig. 2). Le reste de l’exploration abdominale était normal. La quasi-totalité de l’estomac était occupée par le trichobézoard. Le traitement chirurgical a comporté la résection de 90 cm de grêle contenant une quinzaine de perforations, les premières étant toutes suturées. L’ablation du plus gros bézoard intestinal a été réalisée par l’une de ces perforations, la gastrotomie permettant de libérer le trichobézoard gastrique d’une masse de 886 g. La masse gastrique était faite d’un matériel exogène d’aspect polymorphe contenant des tiges pilaires et de débris ayant tantôt des aspects de cristaux, tantôt des aspects de végétaux. Le prolongement dans l’intestin grêle par une corde de 20 à 25 cm de long était caractéristique du syndrome de Rapunzel. (Fig. 3) Malgré ces difficultés diagnostiques et thérapeutiques, les suites postopératoires ont été très simples. Six mois après l’intervention et la prise en charge par un pédopsychiatre, ce petit garçon est en très bon état général, plus bavard, et d’après l’entourage, transformé sur le plan de la sociabilité. 1.2. Observation no 2

Fig. 1. ASP : masse intragastrique silhouettée par l’air.

Cette jeune fille de 15 ans et demi, d’origine algérienne, sans antécédent particulier, a été vue en consultation d’hématologie pour un bilan d’anémie ferriprive sévère (hémoglobine à 6 g/dl, VGM à 55 fl, réticulocytes à 98 000/mm3. L’examen clinique fût considéré comme « normal » et un traitement martial, instauré. Trois semaines après, elle a été revue par le médecin qui remarquait cette fois-ci à l’examen clinique une masse épigastrique ferme sans hépatosplénomégalie. Une échographie et un transit œsogastroduodénal furent réalisés en urgence qui confirmaient l’existence d’une masse intragastrique d’échostructure hétérogène, mobile et bien limitée

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Fig. 3. Pièce opératoire : trichobézoard avec un prolongement dans l’intestin grêle caractéristique du syndrome de Rapunzel. Les trichobézoards sont de couleur noire, quelle que soit la couleur des cheveux. La modification de couleur est liée à l’action chimique de l’acidité gastrique.

compatible avec un trichobézoard. Une IRM montrait une lésion suspendue dans l’estomac franchissant le pylore et se prolongeant jusqu’au deuxième duodénum (Fig. 4). Cette lésion était en hyposignal mais hétérogène comportant des stries. L’ablation du bézoard a été réalisée par gastrotomie. Les suites postopératoires ont été très simples. Une prise en charge psychologique a été rapidement mise en place pour les troubles psychologiques de la jeune fille qui avouera sa trichophagie. Elle cachait sous sa queue-de-cheval une plaque d’alopécie ! 1.3. Observation no 3 Cette adolescente de 17 ans dernière d’une fratrie de trois était scolarisée en seconde générale avec des résultats assez médiocres. Le changement d’établissement scolaire, l’obli-

Fig. 4. IRM : masse hétérogène intragastrique.

gation de rester le midi à la cantine, furent à l’origine d’un stress important avoué à l’épilogue de cette histoire. Elle consulta pour des douleurs épigastriques rétroxyphoïdiennes avec une sensation de reflux acide. Les symptômes résistaient à un traitement par antiacide depuis plus de un mois. Ces anomalies s’accompagnaient d’une anorexie progressive. Le diagnostic de reflux avec œsophagite peptique a été évoqué et un bilan préopératoire avant la réalisation d’une endoscopie montrait une anémie discrète isolée avec hypochromie, poïkilocytose (hémoglobine 8,5 g/dl ; hématocrite 28 % ; VGM 65 fl). À la gastroscopie on a découvert un trichobézoard d’extraction impossible, moulé dans l’antre, justifiant une indication chirurgicale d’emblée, le bézoard étant bloqué au niveau du cardia. Il existait une gastrite dans l’antre et les fondus. L’examen du bulbe montrait une petite lésion ulcéreuse. D1 et D2 étaient le siège d’une hyperplasie lymphoïde. La gastrotomie a permis d’extirper un trichobézoard de 8 cm de diamètre sur 15 cm de longueur. Les suites postopératoires ont été particulièrement simples. A posteriori, à l’interrogatoire de la mère, on a appris que l’adolescente s’arrachait les cheveux depuis six mois, ce qu’elle réfutait. L’examen psychologique n’a pas retrouvé d’élément dépressif, plutôt une anxiété généralisée et quelques troubles obsessionnels compulsifs avec un besoin de ranger et une tendance à ne pas sortir de chez elle. 1.4. Observation no 4 Cette fillette a été hospitalisée une première fois à l’âge de sept ans en raison de douleurs abdominales épigastriques spasmodiques persistant depuis un mois, survenant jour et nuit et s’accompagnant de vomissements glaireux le matin au réveil. La palpation abdominale percevait une masse dure dans l’épigastre et dans l’hypochondre gauche, indolore. Les examens biologiques montraient une discrète anémie (114 g/l), normocytaire (VGM : 90 fl). L’échographie et la tomodensitométrie permettaient d’identifier la présence d’un corps étranger intragastrique moulant l’estomac dans sa totalité, fortement évocateur de trichobézoard. La chevelure était parsemée de plaques d’alopécie. La trichophagie et l’onychophagie seront signalées par les parents et l’examen d’une selle avait mis en évidence à l’admission la présence de cheveux. Le trichobézoard mesurant 17 × 7 cm et pesant 460 g sera extirpé par gastrotomie. L’enfant fut hospitalisée quatre ans plus tard, en raison d’une violente douleur abdominale, apparue brutalement le matin même, localisée dans l’hypogastre et accompagnée de plusieurs vomissements. Elle était très asthénique et l’examen retrouvait une importante distension abdominale douloureuse à la palpation, une défense, un psoïtis et des douleurs vésicales. L’examen de la chevelure ne constatait pas de zone d’alopécie, mais elle avait alors de longs cheveux dont elle mangeait les bouts, ce qu’elle reconnaîtra quelques jours plus tard ! L’abdomen sans préparation a mis en évidence un pneumopéritoine. Les examens biologiques de routine étaient néga-

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tifs, en particulier il n’y avait pas d’anémie microcytaire. À la laparotomie, on a constaté une péritonite secondaire à la perforation d’un ulcère de la face antérieure du corps de l’estomac, lui-même secondaire à un trichobézoard occupant la totalité de la cavité gastrique, mesurant 19 × 7 × 6 cm et pesant 685 g. Une prise en charge pédopsychiatrique est depuis régulièrement suivie par l’enfant et sa famille. L’examen de la chevelure ne montre pas de zone d’alopécie et la fillette ne se ronge plus les ongles... 1.5. Observation no 5 Cette jeune patiente de 12 ans fut hospitalisée pour des douleurs épigastriques paroxystiques accompagnées de vomissements alimentaires sans diarrhée évoluant depuis une semaine environ dans un contexte d’apyrexie. La palpation abdominale retrouvait une masse dans l’épigastre de consistance solide, ferme, indolore à la mobilisation. La radiographie de l’abdomen sans préparation était normale. Une première échographie abdominale avait retenu un aspect dilaté d’une anse grêle sans signe d’invagination et avait manqué le diagnostic ; une deuxième échographie abdominale fut demandée devant la persistance des douleurs épigastriques, celle-ci montrait une image fine hyperéchogène, arciforme, suivie d’un important cône d’ombre postérieur ce qui a conduit à la réalisation d’un scanner abdominal qui montrait une masse intragastrique évoquant un bézoard d’environ 10 cm de largeur, 7 cm de hauteur et 5,5 cm en antéropostérieur, d’aspect ovoïde. Une gastroscopie a montré un volumineux trichobézoard dont l’extraction par voie endoscopique était impossible. La gastrotomie a permis d’extraire un trichobézoard qui moulait tout l’estomac et qui se fragmentait au ciseau, particulièrement dense, de la taille d’un pamplemousse. L’évolution a été sans particularité. Sur le plan psychologique, cette jeune fille ne semble présenter aucun trouble, elle est scolarisée en cinquième avec de bons résultats scolaires.

2. Discussion Les bézoards correspondent à la concrétion de substances ingérées variées (phytobézoard, tricho-phytobézoard) dans le tractus gastro-intestinal. Ce terme vient de l’arabe badzehr ou du persan panzehr qui désigne les masses de fibres ou de matériel étranger trouvées dans l’estomac des animaux sacrifiés. Dans les temps anciens, ces bézoards animaux étaient supposés avoir des vertus magiques ou médicinales et étaient utilisés comme antidote pour les morsures de serpents, et pour lutter contre le vieillissement... La première grande revue fut faite dès les années 1940 par le grand chirurgien américain DeBakey [6]. Rencontrée avec une grande fréquence en médecine vétérinaire, cette pathologie pourtant classique mais mal connue des pédiatres et des radiologues comme en témoigne le retard diagnostique pour quatre des cinq observations présentées ici, concerne surtout

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la jeune fille [1] qui mâche et déglutit ses propres cheveux ou des fibres prélevées à partir de tapis, d’habits ou de peluche (trichotillomanie avec trichophagie) [7]. Le bézoard compliquerait, en fait, moins de 1 % de ces déviances [8,9]. Les phytobézoards sont plus fréquents, et constituent 40 % à peu près du nombre total de bézoards rapportés. Ils sont composés essentiellement de fibres d’origine végétale, non digérées, habituellement provenant de fruits pulpeux, d’écorces d’orange, de graines, de racines ou de feuilles. Un bézoard de coton a été rapporté récemment chez un héroïnomane qui avait avalé les balles de coton utilisées pour filtrer la méthadone pilée avant de se l’injecter par voie intraveineuse. Des bézoards coliques à base de graines de tournesol ont été décrits également chez l’enfant. Les lactobézoards sont rencontrés chez le petit enfant surtout, le prématuré, favorisés par l’utilisation d’épaississants, comme le gel de pectine. D’autres sortes de bézoards sont décrits avec des bouts de papier toilette en particulier chez les patients présentant des troubles psychiatriques sévères, des concrétions de médicaments tels que la nifédipine, le sulfacrate, le kayexalate. La formation du bézoard est liée surtout aux composants inertes du médicament c’est-à-dire la cellulose. Il a été décrit des bézoards de ciment dont le traitement est évidemment chirurgical ! Les antécédents chirurgicaux digestifs (pyloroantrectomie, œsocoloplastie) favorisent la survenue des bézoards, certainement en raison des anomalies de la motricité digestive et/ou de la vidange gastrique éventuellement associés [10]. La symptomatologie clinique n’est à vrai dire pas très spécifique : douleurs abdominales, anorexie, amaigrissement, puis nausées et vomissements, œsophagite peptique comme dans l’observation no 3, odeur insupportable de l’haleine par putréfaction alimentaire. La palpation soigneuse de l’abdomen ne doit pas manquer le diagnostic. D’autres modes de révélation sont décrits tels qu’une œsophagite peptique, un bilan d’anémie carentielle. L’ASP montre souvent une grisaille de l’hypochondre gauche [1,6] et il faut rechercher une image intragastrique silhouettée par l’air (observation no 1). Une masse intragastrique d’échostructure hétérogène ou une image en cocarde, évoquant une invagination intestinale sur corps étranger, est présente à l’échographie avec parfois une ascite [6]. Le scanner et l’IRM, dont il faut bien avouer qu’ils étaient inutiles ici, montrent une masse intragastrique sans prise de contraste. Le diagnostic repose sur l’endoscopie [6]. Le trichobézoard peut s’accompagner de complications plus ou moins bénignes, la plus fréquente étant l’anémie ferriprive (observations no 1 et 2) [11]. Une hypoprotidémie avec hypoalbuminémie responsable d’œdème des membres inférieurs a été rapportée [6]. Des complications plus sévères ont été décrites : invagination intestinale aiguë — le bézoard faisant obstacle au péristaltisme [3] — pancréatite secondaire à un œdème réactionnel de l’ampoule de Vater [12], ictère cholestatique [13], ulcères gastriques et duodénaux, plus rarement volvulus du gros intestin, perforation digestive (observation no 5). Les bézoards sont de couleur noire quelle que soit la couleur des cheveux : c’était le cas par exemple de la

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patiente no 4. La modification de couleur est liée à l’action chimique de l’acidité gastrique. L’observation no 1 était caractéristique d’un syndrome de Rapunzel, avec des complications intestinales sévères ayant nécessité une résection large du grêle. Pour une sombre histoire de salade (!) — raiponce : rapunzel en Allemand — la belle « Rapunzel, qui avait de longs et magnifiques cheveux, fins comme de l’or filé (...) fut enfermée à l’âge de 12 ans dans une tour par la sorcière. (...) Le fils du roi vint à passer devant et Rapunzel défit ses tresses, fit tomber ses cheveux, vingt aunes plus bas et le prince s’en servit pour monter... »(Jacob et Wilhelm Grimm, 1812). L’ablation du trichobézoard doit se faire par gastrotomie éventuellement complétée par une entérotomie. Des tentatives d’extraction endoscopique se sont toutes soldées par des échecs (c’était le cas dans l’observation no 3) [1] ou des complications sévères à type de pneumomédiastin par fissure œsophagienne [1]. Une dissolution du trichobézoard par sirop de papaïne est inefficace, celle-ci ne peut être proposée que pour les phytobézoards et cette mesure inappropriée par méconnaissance de cette affection a retardé dangereusement l’extraction chirurgicale dans la première observation. La fragmentation d’une masse inextirpable par laser YAG pourrait constituer une approche très élégante surtout chez le patient adulte en mauvais état général [14]. La trichotillomanie, proche de l’onychophagie, est plutôt rangée dans les troubles anxieux [15]. La prévalence est probablement inférieure à 1 % chez les enfants et les adolescents [16]. Des troubles psychologiques sont parfois retrouvés comme un retard psychomoteur, un isolement social comme c’était le cas pour le petit garçon [7,8]. Neuf pour cent seulement des enfants présentant un trichobézoard auraient de réels problèmes psychiatriques. La prise en charge psychologique de cette déviance est difficile et repose sur la qualité des liens entre la famille, l’enfant et le praticien, indispensables pour éviter les récidives. L’enfant a habituellement une attitude de déni ce qui ne rend guère les choses faciles. En cas de troubles psychopathologiques associés : conduites obsessionnelles, compulsion, syndrome hyperkinétique, syndrome dépressif, l’enfant doit être vu par un pédopsychiatre. L’approche doit être essentiellement fondée sur une thérapie comportementale. Il existe un site Internet à cet égard pour les familles anglo-saxonnes et très bien conçu, @ www.trich.org, qui ren-

seigne sur les stratégies pour lutter contre ce trouble compulsif. Les inhibiteurs de la recapture de la sérotonine paraissent les plus utilisés dans les formes rebelles [16] mais le pronostic est en règle favorable et... après quelques démélées avec la sorcière (il en perdra tout de même la vue), « le prince conduisit sa bien aimée dans son royaume (...) et ils vécurent tous deux heureux et contents ».

Références [1] [2] [3]

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