Une intoxication rare au Datura stramonium

Une intoxication rare au Datura stramonium

b" FA|T CLiNiQUE l e e l leee e e e e e ~ e l e e e e e = e e • ee=e =eee= ==el • • eeeee e e e e e e e • • ee i = l e e I l l l l e =...

691KB Sizes 0 Downloads 781 Views

b" FA|T CLiNiQUE l e e l

leee

e e e e e ~ e

l e e e e e = e e



ee=e

=eee=

==el





eeeee

e e e e e e e





ee

i = l e e

I l l l l e =

l e e e e e e e

e e e e e e o e



l e e e e e

e = e e e o o e e e

= e e e e e o e

eee

e o e l o l

i l e e e e q

A. DESACHY, B. FRAN(~OIS, P. VIGNON, J. ROUSTAN, R. GAY

Une intoxication rare au Datura stramonium A propos de deuo cas Intr0ductian Lc Datura stramonium est nne plante utilis6e pour ses vertus hallucinog5nes, souvent dans un but toxicomaniaque. Dans la majorit6 des cas, l ' i n t o x i c a t i o n c o n c e r n e de jeunes adultes de sexe masculin [1]. Elle est rare et r6alise un syndrome anticholinergique li6 ~ la pr6sence de diff6rents alcaloYdes [2]. En r~gle gdn6rale, elle 6volue favorablement aprbs traitement symptomatique. Les auteurs rapportent deux intoxications simultan6es touchant des j e u n e s adultes de sexe masculin, confirm6es par les dosages quantitatifs sanguins et urinaires des diff6rents alcaloides.

Cas dinique n ° 1

Correspondance :

Arnaud Desachy, Service de Reanimation Polyvalente, CHU Dupuytren, 2, avenue Martin-Luther-King, 87042 Limoges cedex. Re~u en mars 1996, accept~ en juillet 1996.

Un homme de 19 ans, sans antdc6dents connus, est admis aux Urgences de l'h6pital pour un 6tat d'agitation en rapport avec l'absorption de graines de Datura stramonium et d'alcool. L'examen clinique objective une excitation psychomotrice, des propos incoh6rents, une tension art6rielle ?a 120/80 mmHg, une tachycardie 110 battements/min, une temp6rature 37,6 °C, une mydriase bilat6rale ar6active et un globe v6sical. Le bilan b i o l o g i q u e standard est normal. L'6thanoldmie est ~t0,74 g.1-1.Au plan toxicologique, la recherche dans le liquide gastrique d' antiddpresseurs tri-

51

cycliques, de barbituriques, de benzodiaz6pines, de carbamates et de cannabino'fdes est n6gative. Le traitement comprend un lavage gastrique qui rambne des graines de Datura. Le dosage d'atropine effectu6 par chromatographie en phase gazeuse coupl6e ~ la spectrom6trie de masse donne des concentrations plasmatiques de 32 ~tg/1 ~t la 6 ° heure aprbs l ' i n t o x i c a t i o n et de 25 ~g/1 h la 18 e heure. Les concentrations urinaires sont de 2 392 pg/1 et de 225 ~tg/1 ~t la 6 ~ et ~ la 18 ° heure. Les concentrations plasmatiques de scopolamine sont de 16 ~tg/1 ~t la 6 ° heure et inf6rieures ~t 5 ~tg/1 ~ la 18 ° heure. Les c o n c e n t r a t i o n s urinaires sont de 499 ~tg/1et de 137 ~tg/1respectivement ~t la 6 e et~ la 18 ° heure. L'6volution est favorable. Les propos redeviennent rapidement coh6rents, avec normalisation de la fr6quence cardiaque en huit heures. La temp6rature et la pression art6rielle restent normales. Le patient quitte l'h6pital 18 heures apr~s son admission. I1 ne persiste qu'une mydriase bilat6rale r6active.

Cas clinique n ° 2 Un homme de 21 ans, sans ant6c6dents connus, est hospitalis6 pour un 6tat d'agitation 4 h 30 environ aprbs l'ingestion de graines de Datura et d'alcool. L'excitation psychomotrice

R6an Urg 1997; 6 (1): 51-53

FAIT CLINIQUE ) •

• •

ooo





eeo

ee

oo





oe

oo





• •

soe







• •

• •



eo



• •

avec hallucinations et propos incoh6rents est major6e h la moindre stimulation. I1 existe une mydriase bilat6rale ar6active, une hypertension artdrielle ?~ 170/70 mmHg et une tachycardie ~t 150 battements/min. La temp6rature est ~ 37,5 °C. Le bilan biologique standard est normal. L'6thanotdmie est ~ 0,52 g/1. Au plan toxicologique, la recherche dans les urines d' amph6tamines, d'opiac6s, de cannabino'ides et de cocaine est n6gative. Le traitement se r6duit ~t un lavage gastrique. Les concentrations urinaires d'atrop i n e s o n t de 2 3 0 6 pg/1 et de 3 051 ~g/l ~ la 6 ° et ~ la 18° heure et le dosage de scopolamine est de 415 ~tg/1 et de 2 042 gg/1 aux mames heures. La recherche dans le sang d'atropine et de scopolamine n'a pas 6t6 effectu6e. L'6volution est favorable avec normalisation de la tension art6rielle ~t la 2 eheure, de la fr6quence cardiaque h la 9 °heure et du comportement 36 heures apr~s l'intoxication. La temp6rature reste normale. Monsieur M. quitte l'h6pital 40 heures apr~s son admission. I1 persiste une mydriase bilatdrale r6active.

Discussion Le Datura est une plante herbac6e annuelle de la famille des solanac6es, r6pandu dans les zones temp6r6es et chaudes du globe. I1 est utilis6 comme plante ornementale dans les jardins publics ou botaniques [3]. Le Datura stramonium, connu aussi sous le nom de Jimson Weed, ~ herbe ~ sorcier >~ ou ~ pomme 6pineuse >>, est l'esp~ce la plus fr6quemment en cause au cours des intoxications. Longtemps utilis6 ?~ des fins th6rapeutiques, notamment anti-asthmatiques en Europe ou pour ses propri6t6s magiques en Afrique et en Asie, le Datura stramonium est actuellement utilis6 par les toxicomanes pour ses vertus hallucinog6nes bien

R#anUrg 1997; 6 (1): 51-53

oo

• ~o



• e~

eo



• •



• •





• •

~o

eo





• •

• •





• •











e~

connues [1]. L'intoxication touche l'adolescent ou l'adulte jeune avec une nette pr6dominance masculine [1]. I1 s'agit le plus souvent de conduite d'expdrimentation (parfois collective) ou d ' u n e toxicomanie de substitution. L'intoxication simultan6e par le haschich, les drogues hallucinogbnes ou l'alcool est frdquente [2]. Les intoxications dans un but d'autolyse et les intoxications d'origine iatrogbne, fr6quentes autrefois, sont rares. Les intoxications accidentelles concernent les enfants [4]. L'intoxication par le Datura reste inhabituelle, mais probablement sousestim6e du fait de l'absence de demande d'hospitalisation des toxicomanes [5]. L'absence de d6pendance et d'accoutumance, l'amn6sie des faits et les fr6quents ~ mauvais voyages ~>rendent l'intoxication souvent unique [6]. La toxicit6 du Datura stramonium est li6e ~ la pr6sence d'alcalo'/des, principalement l'hyosciamine, mais aussi l'hyoscine ou scopolamine, et l'atropine qui r6alisent un syndrome anticholinergique [7]. La concentration en alcalo~des varie au cours de l'ann6e au sein des diff6rents constituants de la plante. Cependant, elle est 61ev6e (0,4 p. 100 dans les graines) et rend compte de la forte toxicit6 du Datura stramonium (une mydriase peut 6tre provoqu6e par simple contact). L'atropine et son isom6re 16vogyre, l'hyosciamine, sont des antagonistes comp6titifs p6riph6riques et centraux de l'ac6tylcholine. L ' h y o s c i a m i n e est plus active et plus toxique que l'atropine. L'absorption per os est rapide et compl&e. Les effets sont maximaux en environ deux heures. Le mdtabolisme est h6patique, l'61imination urinaire. A la quatribme heure, 50 p. 100 de la dose est 61imin6e et 90 p. 100 en 24 heures. La scopolamine est un antagoniste comp6titif agissant au niveau des r6cepteurs parasympathiques, postganglionnaires, bloquant l'action de l'ac6tylcholine. Elle est faiblement ab-

52



• o~







• •

• •



~o

• • •









• •

oo



eo



• •

m~o

~o











sorb6e (moins de 10 p. 100) et m6tabolis6e par le foie. La demi-vie de la scopolamine est d' environ huit heures. L'61imination est urinaire et biliaire. L'intoxication par le Datura stramonium est st6r6otypde. Elle r6alise un syndrome anticholinergique associant des signes p6riph6riques par atteinte du syst6me nerveux autonome et des signes centraux par atteinte du syst6me nerveux central. L'atteinte du syst~me nerveux central est dose-d6pendante [6]. Elle se caract6rise, ~ dose mod6rde, par une action d6pressive et s6dative. A fortes doses, les signes les plus fr6quents semblent ~tre des hallucinations visuelles et auditives. L'intoxicadon se caract6rise par une excitation psychomotrice, des actes auto- et h6tdro-agressifs, une agitation extrame avec angoisse, confusion, d6sorientation temporospatiale et agressivit6. Frdquemment, on note une amn6sie de ces faits, li6e ~ l'intoxication. En cas d'intoxication grave, il existe une ataxie, des vertiges, des troubles du langage, des convulsions, un coma avec paralysie m6dullaire et syndrome pyramidal [1] caract6risant la folie atropinique. L'atteinte du syst~me nerveux autonome est, elle aussi, dose-d6pendante. A faible dose, on note une diminution des s6cr6tions salivaires, sudorales, lacrymales et bronchiques. Puis apparaissent une tachycardie sinusale, une tachypn6e, un 6ryth~me cutan6 et une hypertension art6rielle mod6r6e avec 616vation des r6sistances art6rielles syst6miques, une r6tention d'urines, un ralentissement du p6ristaltisme intestinal, une xdrostomie et une hyperthermie. A fortes doses, appara~t une d6tresse respiratoire et circulatoire. I1 existe de mani~re constante une mydriase bilat6rale ar6active parfois associ6e ~t une photophobie, une diplopie ou une cyclopl6gie [1]. Comme dans les deux cas rapport6s ici, le bilan biologique standard est normal.

Intoxication rare au Datura stramonium

Les dosages sanguins et urinaires de 1' atropine et de la scopolamine sont trbs rarement rapport6s dans la litt6rature. Les dosages ont 6t6 effectu6s par chromatographie en phase gazeuse sur colonne capillaire coupl6e h la spectrom6trie de masse. Cette technique de r6f6rence est simple, rapide et peu ondreuse [8]. Ils permettent de rattacher l'intoxication une symptomatologie qui peut faire errer le diagnostic et d' estimer la gravit6 de l'intoxication et la dur6e probable de l'6volution. Les r6sultats des dosages sont en accord avec les donn6es cliniques. Le malade n ° 2 cliniquement plus grave pr6sentait des concentrations d'alcalo'ides plus 61ev6es. La cin6dque des diff6rents dosages montrait une augmentation des concentrations h la 12° heure concordant avec l'6voludon plus lente observ6e. L'6volution est le plus souvent favorable en 24 h 48 heures. Cependant, la mydriase, dernier signe ~ se normaliser, peut persister quelques jours [6]. L'intoxication est rarement mortelle, les ddc~s 6tant li6s ~ des troubles du comportement induits par les alcaloYdes plus qu'~t un surdosage avec toxicit6 directe de l'atropine, de l'hyosciamine ou de la scopolamine [9]. L'6volution peut cependant atre marqu6e par la d6compensation d'un 6tat psychologique ant6rieurement pathologique avec apparition d'une psychose d61irante ou d'un 6tat dissociatif, l'intoxication ne jouant que le r61e de facteur d6clenchant. A long terme, le risque de survenue d'un 6tat d6pressif est possible. Le traitement repose sur le lavage gastrique qui peut atre efficace, mame effectu6 tardivement, du fait du ralentissement du p6ristaltisme intestinal [4]. Le traitement symptomatique est souvent suffisant. L'antidote sp6cifique des intoxications par des produits anticholinergiques est la physostigmine [4]. Elle agit ~ la fois au niveau central et p6ri-

ph6rique. En raison du risque de crise convulsive et d'hypotension art6rielle, elle est ~ r6server aux intoxications graves avec hallucinations persistant plus de 48 heures, aux comas profonds, aux convulsions ne r6pondant pas au diaz6parn et aux manifestations cardiovasculaires (hypertension artdrielle et tachycardie supraventriculaire) n6cessitant un traitement [4]. Les doses de physostigmine sont de 1 2 pg par voie intraveineuse lente, h renouveler si ndcessaire toutes les 20 minutes chez l'adulte [4], et de 40 pg/kg chez l'enfant sans d6passer 2 pg [10]. De nombreuses situations pathologiques peuvent simuler une intoxication par le Datura stramonium [6]. Devant un tableau d'hallucinations, il faut 61iminer une intoxication par d'autres substances hallucinogbnes et en pardculier le LSD (di6thylamide de l'acide lysergique). Des actes agressifs se rencontrent lors d'intoxications par les amph6tamines. Les tableaux psychiatriques aigus (schizophr6nie ou psychose hallucinatoire aigufi) pr6sentent des signes cliniques centraux comparables ?tce type d'intoxication. Un problbme particulier est pos6 par des intoxications 6thyliques aigu6s. Les ivresses pathologiques hallucinatoires peuvent simuler l'intoxication par des substances ~teffets atropiniques, et ce, d'autant qu'elles sont parfois associ6es h une intoxication par le Datura s tr a m o ni u m . L'existence d'une mydriase bilat6rale et de signes p6riph6riques anticholinergiques doit cependant faire suspecter la possibilit6 d'une intoxication mixte.

Conclusions Les rares intoxications par le Datura ne doivent pas ~tre n6glig6es. Bien qu'il s'agisse d'une intoxication le plus souvent b6nigne, ne n6cessitant qu'un traitement symptomatique, le diagnostic pr6coce permet cependant

53

de limiter les examens comp16mentaires et de prendre en charge ces malades qui ont fr6quemment une conduite toxicomaniaque. La grande fr6quence des intoxications simultan6es par le D a t u r a et l'alcool ou le haschich doit la faire rechercher syst6matiquement en pr& sence de signes anticholinergiques. Le dosage par chromatographie en phase gazeuse coupl6e ~ la spectrom6trie de masse est un moyen rapide de confirmerle diagnostic. ~EFERENCE~ 1 Larcan L. Conduites toxicomaniaques utilisant des cigarettes antiasthmatiques ~, base de Datura. Bull Acad Nat M6d 1984; 168: 455-461. 20'Grady TC, Brown J, Jacamo J. Outbreak of Jimson Weed abuse among marine corps personnel at camp Pendelton. Milit Med 1983; 148: 732-734. 3 Strobel M, Chevalier J, De La Varelle B. Coma f~brile avec polynucleose d~ & une intoxication par Datura stramonium. Presse Med 1991; 20: 2214. 4 Klein-Schwartz W, Oderda GM. Jimson Weed intoxication in adolescents and young adults. Am J Dis Child 1984; 138: 737-739. 5 Lan LSH, Baccino E, Caubet A, Bressollette L, Verger C. Intoxication volontaire aux produits atropiniques. Dix-sept observations. Presse M6d 1990; 19: 84. 6 Gowdy JM. Stramonium intoxication. Review of symptomatology in 212 cases. JAMA 1972; 221: 585-587. 7 Hayman J. Datura poisoning - The angel's trumpet. Pathology 1985; 17: 465-466. 8 Saady JJ, Poklis A. Determination of atropine in blood by gas chromatography/mass spectrometry. J Analytic Toxicol 1989; 13: 296-299. 9 Urich RW, Bowerman DL, Levisky JA, Pflug JL. Datura stramonium: a fatal poisoning. J Forensic Sci 1982; 27: 948-954. 10 Alliet R, Verbeke J, Nollet G, Boghaert A. Anti-cholinergic intoxications. A case report. Acta Clin Belg 1990; 13: 86-87.

R6an Urg 1997; 6 (1): 51-53