Endocardites à Neisseria mucosa. À propos d’un cas

Endocardites à Neisseria mucosa. À propos d’un cas

Lettres a la rl!daction Endocardites it Neisseria mucosa. A propos d'un cas M.e. Bezian I, A.M. Gavinet I, P. Dabadie 2, H. Bennudes 3, e. Quen...

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Lettres

a la rl!daction

Endocardites it Neisseria mucosa. A propos d'un cas M.e. Bezian

I,

A.M. Gavinet

I,

P. Dabadie 2,

H. Bennudes 3, e. Quentin 3

lLAboratoire de bacttriologie. 2 service de medecine interne et thirapeutique. hOpital Saint-Andre. 33075 Bordeaux cedex : 3 laboratoire de microbiologie. UFR des sciences phannaceutiques. 33076 Bordeaux cedex. France (Re~u

Ie 28 seplembre 1998 ; acceple Ie 23 mars 1999)

Neisseria mucosa est rarement responsable d'infections chez I'homme. Nous rapportons un cas d'endocardite it N. mucosa d'evolution fatale chez un sujetjeune sans antecMent cardiaque. Monsieur B., 48 ans, alcoolotabagique, a ete hospitalise en 1996 dans Ie service de medecine interne de I'hopital SaintAndre, pour hyperthermie a 40 °C accompagnee de sueurs nocturnes profuses et d'une alteration de I'etat general d'apparition brutale avec anorexie, amaigrissement et asthenie. L'examen c1inique montrait un amaigrissement de 10 kg, une hyperthermie a 39 °C, une pression arterielle a 100/80 mmHg et un pouls regulier a 90/min. L'examen cardiovasculaire revelait un souffle diastolique maximal au foyer aortique d'intensite 3/6. Le reste de I'examen mettait en evidence quelques rliles bronchiques des deux champs, une legere hepatomegalie et un mauvais etat buccodentaire avec plusieurs caries. Le reste de I'examen c1inique etait normal. Le bilan biologique faisait apparaitre une hyperleucocytose neutrophiles, a 146oo/m m3 avec 77,3 % de polynucleaires 3 une anemie normocytaire a 3 180 OOO/mm (hemoglobine: 10,1 g/loo mL), une vitesse de sMimentation a 61 mm it la premiere heure, une C-reactive protein (CRP) elevee a 127 mg/mL et un fibrinogene a4,63 gIL. Le diagnostic d'endocardite a alors ete evoque : trois hemocultures ont ete realisees et une antibiotherapie par cefotaxime (3 g/j) a ete alors mise en route. Les trois hemocultures, positives en 48 heures, revelaient des cocci Gram negatif : les subcultures realisees sur gelose au sang et gelose chocolat (10 % CO 2) etaient positives 24 heures apres et mettaient en evidence des cocci Gram negatif, oxydase +, evoquant des Neisseria: I'identification faite sur galerie Api NH (bioMer ieux-Fra nce) a permis de porter Ie diagnostic de N. mucosa sur les caracteres suivants : glucose +, fructose +, maltose +, p-galactosidase -, proline arylamidase +, Y-glutamyl transferase-. Ce diagnostic a ete confirme par Ie Centre national de reference des meningocoques et Neisseria apparentees de I'institut Pasteur de Paris. L'antibiogramme de la souche de N. mucosa montrait une sensibilite diminuee aux j3-lactamines: penicilline G 14 mm, amoxicilline 22 mm, ainsi qu'aux macrolides : erythromycine 14 mm, spiramycine 13 mm. La recherche de j3-lactamase a ete negative (cefina<;e: bioMerieux-France). Ces donnees ont ete confirmees par I'etude des concentrations minimales inhibitrices: penicilline G 2 mgIL, amoxicilline 2 mgIL, cefuroxime 16 mgIL, cefotaxime 0,5 mgIL, ceftriaxone 0,1 mgIL, cefepime

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0,5 mgIL, cefpirome 2 mgIL, imipeneme 0,5 mgIL, gentamicine 0,5 mgIL, erythromycine 4 mgIL, tetracycline 2 mgIL, chloramphenicol 2 mgIL, sulfamethoxazole 2 mgIL, ofloxacine 2 mgIL. Le cinquieme jour, I'echocardiographie revelait des valves aortiques epaissies sans image evidente de vegetati ons: c'est I'echographie par voie transcesophagienne qui mettait en evidence des vegetations aortiques importantes de 8 a 10 mm. Par aiJIeurs, I'orthopantomogramme montrait une parodontolyse horizontale diffuse avec un granulome au niveau de la dent 43. Ces donnees ont amene a renforcer Ie traitement par ofloxacine par voie intraveineuse : 400 mg/24 h. L'evolution c1inique a ete favorable au debut avec apyrexie obtec nue it la n heure apres Ie debut de I'antibiotherapie. etla disparition de I'asthenie. Le patient aggrave brutalement au 12 c jour avec crise comitiale generalisee, suivie d'un coma profond (Glasgow: 3): Ie scanner cerebral et la ponction lombaire etaient normaux. l'electroencephalogramme montre une soutTrance cereC brale diffuse, et Monsieur n. decooe Ie 13 jour dans Ie service de reanimation. Le deces a ete attribue It une embolie cerebrale ma~sive apartir du foyer aortique. La nccropsie a etc refusee. L'endocardite infectieuse se developpc it la suite de J'implantation de microorganismes (bacteries ou champignons) sur I'endocarde, Ie plus souvent valvulaire. Cette greffe infectieuse entraine la destruction valvulaire. I'obstruction de I'orifice valvulaire, la migration des vegetations et la constitution d'anevrismes. Les lesions extravaIvulaires sont essentieIJement des pericardites, des lesions coronariennes, vasculaires ou renales. La porte d'enrree est stomatologique, digestive. plus rarement cutanee, mais Ie plus souvent cette porte d'enrree n'est pas retrouvee. Les bacteries responsables sont Ie plus souvent des streptocoques (58 %), des staphyJocoques (31 %), d'autres bacteries rares pcuvent etre en cause dans les endocardites : Cardiobacterium hominis, Haemophi/us para inj1uen:fJe, Neisseria sapmphyte, Eikenel/a, etc. rJ). Les complications neurologiques concernenl plus de 10 % des endocardites infectieuses : dans la majorite des cas, il s'agit d'une embolie cerebrale d'un fragment de vegetation, mais il peut se produire une hemorragie cerebrale par rupture d'un anevrisme mycotique. Dans les deux cas, la survenue de ces complications est de tres mauvais pronostic, Ja mortaJite avoisinant 50 %. Les examens biologiques monlrenl anemie, thrombopenie, hyperleucocytose 11 polynucJcaires, hypergammaglobulinemie et augmentation de la CRP. La pathogenicite des certaines Neisseria (N. meningitidis. N. gonorrhoeae) est bien connue, en revanche, les NeiJseria commensales comme N. mucosa ne sont qu'exceplionnellement responsables d'infections qui atteignent alors les meninges et Ie cceur. Nous n' avons denombre que 18 cas d'endocardites a N. mucosa dans la litterature. En opposition aux endocardites a germes «c1assiques », les N. mucosa touchent voJontiers des sujets jeunes (48 ans pour notre cas) et sans antecedents cardiaques connus. Ces endocardites infectieuses sont souvent compliquees d'accide nts neurologiques et emboliques qui constitueraient une des caracteristiques evolutives principales des endocardites a N. mucosa 12). En ce qui concerne la sensibilite aux antibiotiques, les Neisseria commensales sont c1assiquement considerees comme

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Lettres tI la redaction

des bacteries sensibles aux antibiotiques : p-Iactamines, macroIides, aminosides, f1uoroquinolones, etc. Cependant, la diminution de la sensibilite, voire la resistance aux ~.Iactamines de ces Neisseria, et en particulier de N. mucosa, ont ete rapportees dans plusieurs observations [3,4) : un tiers des souches sont de sensibilite diminuee it la penicilline G et deux a I'ampicilline. Notre observation est la premiere decrivant une souche de N. mucosa responsable d'endocardite qui est de sensibilite diminuee a la fois a la penicilline G et a I'ampicilline. En I'absence de ~Iactarnase, Ie mecanisme de resistance repose sur une modification des PBP (penicillin binding proteins) ; cette modification des cibles constitue Ie principal mecanisme de resistance de N. meningitidis et concerne toutes les eSpCces de Neisseria (Neisseria commensales et une minorite de souches resistantes de N. gonorrlweae). Cette resistance est d'origine chromosomique et resulterait d'echanges de genes ou de fragments de genes entre eSpCces resistantes et eSpCces sensibles : genes mosai'ques [3). Cette hypothese demanderait a etre definitivement confinnee pour la souche isolee dans cette observation. Neisseria mucosa est une bacterie habituellement commensale de la sphere ORL. Elle est neanmoins exceptionnellement responsable d'endocardites. Le cas c1inique que nous rapportons est Ie I ()C cas decrit dans les litteratures anglosaxonne et franjfaise. II iIIustre bien certaines caracteristiques de ces endocardites touchant des sujets jeunes, volontiers sur valves saines, avec de frequentes complications emboliques, responsables de la gravite de I'infection. De plus, la mise en evidence de sensibilite diminuee vis-a-vis des ~Iactamines est de nature a faire remettre en question Ie traitement antibiotique probabiliste c1assiquement propose devant cette pathologie. I Roche Bezian MC, Blanchot P. Leng B. Endocardites it germes rares. Sem Hop Paris 1986 ; 32 : 2548-57. 2 Epelbaum S, Lauent C, Morin G, Laurans G, Puissan C. Endocardite tI Neisseria mucosa compliquee d'anevrismes intracerebraux. Arch Fr Pediatr 1993 ; 50 : 231-3. 3 Spratt BG. Resistance to antibiotics mediated by target alterations. Science 1994 ; 264 : 388-93. 4 Ingram RJH, Comere B, Ellis-Pegler RB. Endocarditis due to Neisseria mucosa: two cases reports and review. Clin Infect Dis 1992 ; 15 : 321-4. Med Mal Infecl 1999 ; 29 : 489-90

Insuffisance hepatique revelatrice de la syphilis congenitale M. Bouskraoui, Z.A. Zoubidi. A. Abid Service des maladies infectieuses pldiatriques, h6pital d'enfants, Casablanca. Maroc (Re~u

metabolique. Ainsi, atravers un cas collige dans Ie service des maladies infectieuses pediatriques a I'hopital d'enfants de Casablanca, nous avons fait une revue de I'atteinte hepatique au cours de la SC.

Observations Un nourrisson age de 50 jours etail issu d'une grossesse iIIegitime non suivie et menee a tenne a domicile (poids de naissance : 3, I kg). L'allaitement etait mixte depuis la naissance. II etait hospitalise pour hemorragie digestive (rectorragies et melenas), paleur, ictere cutaneomuqueux et ballonnement abdominal dans un contexte apyretique. L'examen c1inique ne montrait ni eruption, ni hepatomegalie, ni splenomegalie, ni rhinite. Des son hospitalisation, Ie malade a ete transfuse et mis sous antibiotherapie a base d'amoxicilline a la dose de 150 mg· kg- J • J associee a la gentalline 3 mg· kg-I. l . Le bilan realise a I'admission a montre: une anemie severe a 4,24 g/1 DO mL ; une hyperleucocytose a 26 OOO/mL ; des plaquettes a 135 OOO/mL ; une cytose hepatique : SGOT I 372 Ul/mL, SGPT 328/mL ; une cholestase avec une bilirubine totale a 98 mgIL a predominance conjuguee (86 mglL) ; des phosphatases aIcalines a I 289 Ul/mL et un taux de d-glutamyl transferase a 102 Ul/mL; une insuffisance hepatocelIulaire severe avec un taux de prothrombine it 50 % et un facteur Va 25 %. Le taux de fibrinogese etait normal. Sur Ie plan bacteriologique : deux hemocultures realisees a I'admission sont revenues steriles, et la ponction lombaire montrait une meningite Iymphocytaire (90 elements) avec une glycorrachie a I'etat de traces, une a1buminorachie a 0,76 gil. La culture est sterile. Sur Ie plan radiologique, on observait un foyer alveolaire lobaire superieur droit. La radiographie de I'extremite superieure des deux genoux s'est revelee nonnale. Apres une amelioration transitoire, on constatait J'apparition d'hematomes compressifs aux points de ponction avec reprise de I'hemorragie digestive et apparition d'un scJereme etendu it tout Ie corps. Le bilan de controle montrait une aggravation de la thrombopenie et du taux de prothrombine ainsi que du facteur V qui sont passe respectivement a 10 et 18 %. Au 3" jour d'hospitalisation et malgre une transfusion de culot globulaire et de plasma frais congele, Ie patient decMe par arret cardiorespiratoire. La serologie syphilitique est revenue tres positive chez Ie hebe: TPH et VORL positifs et presence d'lgM. Sa realisation chez la mere. porteuse d'un chancre, est positive: TPHA 1/2 560 et VORL 1/132. Les autres serologies (Chlamydia trachomatis, hepatites B et C, herpes, rubCole. cytomegalovirus, toxoplasmose et VIH) sont revenues negatives.

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Ie 5 octobre J998 ; accepte Ie J3 janvier J999)

Commentaires Au Maroc en 1998, la syphilis congenita!e (SC) reste encore une cause possible de l'insuffisance hepatique du nourrisson, a cote des autres embryofcetopathies et des causes d'origine

Si les cas de SC se recrutent panni les echecs de la prevention dans les pays occidentaux, elle est loin d'etre rare au Maroc du