Le diagnostic prénatal, ses incertitudes et perspectives

Le diagnostic prénatal, ses incertitudes et perspectives

É D I T O R I A L © 2004, Masson, Paris Le diagnostic prénatal, ses incertitudes et perspectives Presse Med 2004; 33: 512-13 Jacques Milliez P ...

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D I T O R I A L

© 2004, Masson, Paris

Le diagnostic prénatal, ses incertitudes et perspectives

Presse Med 2004; 33: 512-13

Jacques Milliez

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© BSIP/So. Illinois Univ.

our les femmes enceintes, naturellement inquiètes des risques qui menacent leur enfant, le mérite essentiel du diagnostic prénatal est de pouvoir les rassurer, du moins presque toutes. Elles ne doivent pas oublier toutefois que l’objectif avoué de ces multiples contrôles est de diagnostiquer les maladies du fœtus et de dépister les grossesses qui justifieraient d’être interrompues. Il n’est donc pas éthiquement acceptable de proposer le diagnostic anténatal, du moins les plus sophistiquées des techniques qu’il utilise, aux couples qui n’en auraient pas compris la finalité ni accepté la sanction éventuelle, l’interruption de la grossesse. L’annonce qu’une anomalie vient d’être identifiée chez leur enfant constitue toujours pour les parents un choc d’une extrême brutalité.La malformation s’applique à un être encore virtuel, jusque là imaginé comme parfait sur l’écran de l’échographe. Les parents restent totalement désemparés et,faute de la lucidité dont les prive leur désarroi,ils ont besoin d’être aidés. Quand l’anomalie est majeure, une anencéphalie par exemple, la proposition d’interruption de grossesse est adoptée rapidement, sauf par respect d’un principe religieux. À l’inverse, son refus va de soi pour une malformation mineure.Mais entre le blanc et le noir,une large zone d’incertitude grippe parfois la décision. S’il manque au fœtus un doigt, non bien sûr, deux doigts, non plus, mais trois, quatre, la main entière, ou un bout de l’avant-bras, l’interruption de la grossesse est-elle alors acceptée et à partir de quand? Ou encore si l’amniocentèse, pratiquée pour dépister un mongolisme,exhume une anomalie chromosomique inattendue,un syndrome de Turner 44 X0 ou un syndrome de Klinefelter 44 XXY, la confusion devient considérable. Rien n’empêcherait ces enfants de vivre quasi normalement, rien non plus ne permettra de certifier qu’ils sont normaux, certainement stériles, affectés peut-être par des dysmorphies et des écarts de taille, des malformations cardiaques ou rénales,ou des retards d’éveil intellectuel.Ces handicaps,même modérés, pourraient-ils être imposés à des parents qui ne les souhaiteraient pas? Dans bien d’autres cas,la décision ne s’arrête que pour des probabilités.En présence d’une agénésie du corps calleux par exemple,on peut retenir le risque de 20 % de déficit mental ou bien la chance au contraire de 80 % que l’enfant soit normal. Qui peut se substituer aux parents? La loi française de juillet 1994 permet qu’une grossesse soit interrompue jusqu’au terme, si l’enfant est atteint d’une maladie d’une particulière gravité. Heureusement, elle n’en fixe aucune liste normative. Pour ces choix hautement douloureux en effet, la notion de gravité de la maladie fœtale tient moins à la nature intrinsèque du handicap qu’à ce que les parents accepteraient d’en supporter plus tard. Chaque couple en décide selon ses capacités. L’interruption médicale de la grossesse n’est acceptable, penserait-on, que parce qu’elle est issue du colloque singulier entre un couple et les médecins. Or elle pro-

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24 avril 2004 • tome 33 • n°8

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cède aussi de politiques concertées d’éradication de tares génétiques dont les limites sont parfois difficiles à cerner. La trisomie 21 fait l’objet d’un dépistage sérologique du deuxième trimestre de la grossesse, le test dit HT21, systématiquement expliqué aux femmes enceintes, qui l’acceptent pour plus de 80 % d’entre elles. Au-delà d’un seuil de risque, fixé en France à 1/250, une amniocentèse est proposée. L’amniocentèse est pratiquée systématiquement chez les mères de plus de 38 ans, et quand sont découvertes des malformations du fœtus sur l’une des échographies. Le taux d’amniocentèse atteint maintenant 11 % et même plus de 15 % dans certaines régions. Or cet examen engendre un risque de faussecouche, involontaire et irréductible, de 0,5 à 1 %. Pour chaque fœtus tri-

somique identifié, deux fœtus normaux aujourd’hui ne survivent pas. Il n’est pas question de refuser aux couples qui le souhaitent le dépistage du mongolisme, mais il devient impossible de méconnaître le lourd tribut dont il faut le payer. Le salut viendra bientôt du couplage du test sérologique HT21 à l’échographie du troisième mois de la grossesse, dès qu’il sera validé et adopté réglementairement. Il est aussi beaucoup attendu des alternatives non invasives de la génétique prénatale. Le sérum maternel contient dix fois plus d’ADN fœtal libre que les érythroblastes fœtaux isolés à grand peine après qu’ils ont franchi le placenta. Le rêve d’identification du mongolisme ou de maladies monogéniques par biologie moléculaire s’apparente à la quête du Graal,mais,déjà,dès les premières

semaines, il est possible de reconnaître ainsi, à partir du sérum de la mère, le sexe de l’embryon, son groupe Rhésus et son groupe plaquettaire. Parallèlement se développent de méritoires essais de thérapie cellulaire du fœtus in utero à partir de cellules souches hématopoïétiques. Elles ont permis des succès sporadiques pour des syndromes sévères d’immunodéficience combinée. Leurs progrès démontreront que la médecine fœtale, à l’image de toute vocation médicale, sait aussi guérir. En attendant, il nous faudra vivre avec nos réalités imparfaites, accepter l’interruption médicale de la grossesse comme une épreuve encore inévitable, en entourant de notre sollicitude et de notre compassion tous ceux qui s’y résignent par raison,comme tous ceux qui s’y refusent par amour. ■

Brève

La promotion pharmaceutique, rôle majeur sur les prescriptions des nouveaux médicaments E n 2001, les médicaments remboursables de moins de 10 ans représentaient 38% du chiffre d’affaires du marché pharmaceutique et les médicaments de moins de 5 ans, 22 %. Afin de déterminer les facteurs qui influencent la prescription des médicaments innovants, le Centre de recherche, d’étude et de documentation en économie de la santé (Credes) a mené une revue de la littérature internationale et utilisé les données de l’Enquête permanente sur la prescription médicale (EPPM) réalisée par la société IMS-Health portant sur la période 1992-1998 (plus de 200 000 consultations sont analysées chaque année). Parmi les 2 580 nouvelles présentations pharmaceutiques mises sur le marché pendant cette période, 179 contenant un nouveau principe actif ont été identifiées. Les déterminants essentiels de l’adoption de l’innovation sont l’identité du médecin et son mode de pratique, son intégration dans les réseaux sociaux, les caractéristiques du médicament et les sources d’information. Ainsi, les médecins adoptant tardivement l’innovation sont plutôt des femmes ou des médecins ayant une faible activité, tandis que le fait d’être un médecin spécialiste, d’exercer une activité professionnelle en dehors de l’exercice libéral, ou d’être bien intégré à la communauté médicale, accélère l’adoption des innovations. Les effets de l’exercice en groupe sont contradictoires selon les études Les experts du Credes concluent qu’il n’existe pas un profil standard de médecin novateur, mais plusieurs profils selon la classe thérapeutique. Concernant la diffusion de l’innovation pharmaceutique en médecine libérale en France, l’analyse réalisée à partir de l’enquête de IMS-Health a porté sur les antidépresseurs thymoanaleptiques (5 nouveaux mis sur le marché entre 1992 et 98) et les macrolides (6 nouveaux). Les médecins innovateurs dans la prescription des macrolides sont les généralistes exerçant une activité à l’extérieur, avec un taux d’innovateurs variant selon la molécule de 5,8 à 26 %. En outre, plus le nombre moyen de macrolides prescrits par séance est élevé et plus la probabilité de prescrire une innovation dans cette classe est élevée. Concernant les antidépresseurs, les innovations se diffusent plus rapidement chez les psychiatres que chez les généralistes (taux d’innovateurs compris entre 2,9 et 12 % selon la molécule). Selon les experts du Credes, « ces résultats confirment le rôle majeur de la promotion pharmaceutique sur l’adoption de l’innovation, le rôle des contacts des médecins avec l’extérieur, les différences entre généralistes et spécialistes ainsi que le rôle du médicament lui-même », alors que l’industrie pharmaceutique est la source d’information principale pour le généraliste. En revanche, l’effet de l’exercice en groupe constaté dans la littérature ne semble pas confirmé par ces premiers résultats français. ■ Véronique Girault Source: Credes. Question d’économie de la santé, n° 73, novembre 2003 24 avril 2004 • tome 33 • n°8

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