Journal de Radiologie Diagnostique et Interventionnelle (2017) 98, 121—130
FORMATION MÉDICALE CONTINUE : LE POINT SUR. . .
Pathologie mammaire : Importance des corrélations radio-histologiques A. Jalaguier-Coudray a,∗, M. Barthellemy-Muis a, B. Delarbre a, R. Villard-Mahjoub a, J. Thomassin-Piana b a b
MOTS CLÉS Sein ; Biopsie ; Histologie ; Concordance ; Discordance
∗
Service d’imagerie de la femme, institut Paoli-Calmettes, 13009 Marseille, France Service d’anatomopathologie, institut Paoli-Calmettes, 13009 Marseille, France
Résumé En pathologie mammaire, le binôme radiologue—anatomopathologiste a un rôle essentiel. À la réception des résultats histologiques, le radiologue doit se prononcer sur la concordance entre les anomalies prélevées et les résultats anatomopathologiques. Le rôle essentiel des corrélations est de rechercher des discordances. En présence d’un résultat histologique bénin, le rôle majeur du radiologue est de statuer : si le résultat histologique semble concordant, aucune chirurgie ou biopsie complémentaire n’est nécessaire ; en revanche, si le résultat histologique semble discordant, il est impératif de réaliser de nouveaux prélèvements ou une exérèse chirurgicale complémentaire. Le radiologue doit connaître les lésions dites « à risque » qui nécessitent une exérèse chirurgicale complémentaire. L’objectif de ce travail est de donner des outils au radiologue pour qu’il réalise systématiquement ces corrélations lors de la réception des résultats histologiques. ´ditions franc © 2017 E ¸aises de radiologie. Publi´ e par Elsevier Masson SAS. Tous droits r´ eserv´ es.
DOI de l’article original : http://dx.doi.org/10.1016/j.diii.2015.06.023. Auteur correspondant. 233, boulevard Sainte-Marguerite, 13009 Marseille, France. Adresse e-mail :
[email protected] (A. Jalaguier-Coudray).
http://dx.doi.org/10.1016/j.jradio.2017.04.001 ´ditions franc 2211-5706/© 2017 E ¸aises de radiologie. Publi´ e par Elsevier Masson SAS. Tous droits r´ eserv´ es.
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A. Jalaguier-Coudray et al.
Classification européenne des biopsies mammaires Une des classifications anatomopathologiques utilisée dans l’évaluation des prélèvements mammaires pour les microbiopsies ou les macrobiopsies est la classification européenne [1]. Les recommandations européennes ont établi de classer les lésions mammaires en « B » sur un mode superposable à celui de la classification ACR. Comme pour le BI-RADS de l’ACR, cette classification permet un langage commun et une meilleure compréhension interdisciplinaire des résultats. Cinq catégories existent.
B1. Normal ou ininterprétable Ce résultat indique soit que la biopsie est ininterprétable à cause d’artéfacts, soit qu’elle est composée uniquement de tissu mammaire normal ou de stroma sans aucune anomalie pathologique sous-jacente.
B2. Bénin Ce résultat indique que la biopsie est en rapport avec une anomalie bénigne. Les principales lésions histologiques classées B2 sont : le fibroadénome, la métaplasie cylindrocublique ou apocrine, l’hyperplasie canalaire simple, la galactophorite, la cytostéatonécrose.
Figure 1.
B3. Bénin mais de potentiel incertain Cette catégorie regroupe des lésions à risque d’être associées à un cancer de bordure ou de développer un cancer du sein ultérieurement. Les lésions histologiques classées B3 sont : l’hyperplasie canalaire atypique, la métaplasie cylindrocubique atypique, l’hyperplasie lobulaire atypique, la cicatrice radiaire, le papillome, la tumeur phyllode.
B4. Suspect Les aspects observés sont fortement évocateurs d’une lésion in situ ou invasive, mais les aspects sont soit en petite quantité soit altérés.
B5. Malin Ce résultat indique la présence d’un processus malin in situ ou invasif.
Corrélations radiohistologiques pour les microcalcifications Les microcalcifications classées ACR4 ou ACR5 doivent être biopsiées (Fig. 1). Il n’y a généralement pas d’indication à biopsier les microcalcifications ACR3 sauf contexte particulier : lors d’un bilan d’extension d’un cancer du sein
Corrélations radiohistologiques pour les microcalcifications.
Pathologie mammaire : Importance des corrélations radio-histologiques homo- ou controlatéral ou chez une patiente porteuse d’une mutation BRCA1/BRCA2 ou à haut risque de cancer du sein sans mutation identifiée. Dans la littérature, 10 à 20 % de microcalcifications classées ACR3 sont biopsiées [2,3]. Depuis 2005, les standards options et recommandations (SOR) recommandent de réaliser des macrobiopsies pour prélever des foyers de calcifications pour limiter le risque de sous-estimation [4]. Dans la littérature, le taux de faux négatifs (FN) est compris entre 3,3 et 4,8 % pour une microbiopsie avec un calibre d’aiguille de 14 G et passe à moins de 2 % pour la macrobiopsie par aspiration avec un calibre d’aiguille de 11 G [5,6]. Ce taux est à comparer à celui de la chirurgie diagnostique telle qu’elle était antérieurement pratiquée et qui était estimée à 2,5 % [7,8]. Le taux de FN est considéré actuellement comme un critère de qualité : idéalement, les équipes doivent tendre à se rapprocher d’un taux de 0,45 % [5,6,9,10]. Comme le montre le travail de Liberman et al. [5], les FN ne sont pas liés à des problèmes d’insuffisance échantillonnage mais plutôt à des problèmes balistiques : présence de plusieurs foyers de microcalcifications dans la même fenêtre, lésion visible sur une seule incidence. Les macrobiopsies sont réalisées à l’aide d’une sonde de calibre 7 à 12 Gauge, assistée par le vide. Le nombre de prélèvements varie en fonction du calibre de l’aiguille : il est nécessaire de réaliser un minimum de 12 prélèvements pour un calibre > 10 G et un minimum de 6 prélèvements pour un calibre < 10 G [11]. Un clip intramammaire doit être laissé au décours du geste si l’exérèse de la lésion a été totale ou subtotale pour faciliter un éventuel repérage préopératoire [12], mais également s’il existe plusieurs foyers de calcifications dans le sein afin de vérifier que le bon foyer a été ciblé lors de la biopsie. En cas de biopsies multiples, des clips de forme différente peuvent être largués, ce qui peut être utile lors du repérage préopératoire. Une radiographie des prélèvements doit être systématiquement réalisée afin de confirmer leur bon échantillonnage [13]. Sur les radiographies, les calcifications doivent être bien visibles, de fac ¸on représentative et avoir la même morphologie que les calcifications visibles initialement sur la mammographie [14]. En fin de procédure de biopsie, avant de terminer le geste et de larguer un éventuel clip, les clichés de contrôle doivent objectiver moins de 50 % de calcifications résiduelles. S’il persiste des calcifications encore nombreuses, la procédure de biopsie doit être poursuivie. Il est important de confirmer le bon positionnement du clip et l’exérèse en nombre suffisant des microcalcifications en réalisant une mammographie de contrôle de face et de profil idéalement une semaine après (pour limiter le risque de déplacement de clip). Lors de la mammographie de contrôle, la comparaison avec les clichés avant la biopsie permet de vérifier le bon positionnement du clip, le pourcentage de calcifications prélevées et la présence ou non de calcifications résiduelles. Si plus de 50 % de microcalcifications ont été prélevées, l’échantillon pourra être considéré comme significatif [13,15]. À la réception des résultats histologiques, le radiologue se doit de réaliser une synthèse des résultats en étudiant la concordance et la conduite à tenir qui seront consignées par écrit dans un compte rendu (Recommandations SFR 2013). Il est primordial de savoir identifier les discordances afin de proposer un nouveau prélèvement. Plusieurs cas de figures peuvent être rencontrés.
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Cas des résultats histologiques B1 : aucune calcification n’est retrouvée en histologie Le résultat histologique est classé B1 en raison de l’absence de calcifications retrouvées en histologie. Premièrement, il est important de vérifier que des calcifications étaient bien présentes sur les radiographies des prélèvements. Si elles sont absentes sur les radiographies, le prélèvement est considéré comme non contributif. La mammographie de contrôle retrouve le foyer de calcifications et un nouveau prélèvement ou une éventuelle exérèse chirurgicale (en cas de difficultés techniques) doivent être réalisés (Fig. 2). Si les calcifications sont bien présentes sur les radiographies des prélèvements et non visibles sur les lames histologiques, l’anatomopathologiste doit utiliser la lumière polarisée à la recherche de calcifications appelées « weddelites » (encore appelées calcifications rhomboédriques ou calcifications d’oxalate de calcium). En effet, ces « weddelites » ne prennent pas les colorations standards et ne sont donc pas visibles sur les lames au miscroscopie standard. La lumière polarisée leur confère un caractère biréfringent caractéristique. Si aucune calcification n’est visible en lumière polarisée, l’anatomopathologiste devra réaliser des nouvelles recoupes du bloc de paraffine. Il est impératif que le nombre de calcifications vues en histologie soient superposable au nombre de calcifications vues sur les radiographies des prélèvements. Des radiographies des blocs de paraffine peuvent être réalisées sur le mammographe afin de mieux cibler les recoupes histologiques.
Cas des résultats histologiques B2 Le résultat apparaît concordant lorsque le résultat histologique est bénin et que la classification ACR était peu suspecte (ACR 3, 4a). Cependant, il est impératif de vérifier que le nombre de microcalcifications sur lames est représentatif du nombre de microcalcifications sur les radiographies des prélèvements (Fig. 3). Dans le cas où les calcifications semblent moins nombreuses en histologie que sur les radiographies des prélèvements, de nouvelles recoupes du bloc sont réalisées jusqu’à obtenir une bonne représentativité des calcifications en histologie [16]. Il n’y a pas actuellement de recommandation nationale sur le nombre de nouvelles recoupes à réaliser sur le bloc. Si le résultat bénin concordant est validé, les attitudes varient selon les centres : certains centres proposent une mammographie de contrôle à 1 an, d’autres la reprise de la surveillance habituelle. Aucune recommandation nationale ou internationale n’est définie pour le moment [17—20]. Le résultat histologique est bénin alors que l’imagerie était suspecte (ACR4c/ACR5). Il est important de savoir s’il s’agit d’un résultat discordant ou concordant [21]. La valeur prédictive positive de l’ACR5 est de plus de 95 % ; dans 5 % des cas, une anomalie classée ACR5 peut être bénigne. Il est donc possible que des calcifications classées ACR5 soient au final bénignes en histologie (Fig. 4). Cependant, avant de valider un résultat ACR5-bénin en histologie, il est indispensable de s’assurer des trois points suivants : • les calcifications ont été prélevées en nombre suffisants : les clichés mammographiques de contrôle clip ont ainsi une grande importance. En effet, si les clichés de contrôle
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Figure 2. Patiente de 65 ans adressée pour contrôle clip après macrobiopsie d’un foyer de calcifications du sein gauche. Les résultats histologiques sont classés B1, devant l’absence de calcifications malgré les recoupes ; a, b : les clichés de contrôle clip montrent la persistance du foyer de calcifications (cerclage). Le clip et l’hématome de biopsie sont localisés à distance (flèche) ; c : les radiographies des prélèvements objectivaient de rares calcifications. La biopsie est considérée comme non contributive et une nouvelle macrobiopsie est demandée ; d : les clichés des prélèvements de la nouvelle biopsie attestent bien de la présence de calcifications (flèche) ; e, f : les clichés de contrôle clip montrent l’absence de calcifications résiduelles avec clip en place comparativement aux précédents clichés de contrôle clip. L’histologie est en rapport avec des calcifications au sein de lésions de métaplasie cylindrocubique.
clip montrent qu’il n’y a plus de calcifications résiduelles ou que plus de 50 % des calcifications ont été prélevés, le risque de sous-estimation est moindre [22] ; • le nombre de calcifications visibles sur lames histologiques est identique au nombre de calcifications vues sur les radiographies des prélèvements. Si tel n’est pas le cas et que les calcifications sont moins nombreuses sur les lames histologiques, une étude en lumière polarisée est réalisée puis des recoupes des blocs de paraffine sont effectuées à la recherche de calcifications ; • l’aspect morphologique des calcifications peut expliquer la classification ACR5 ou ACR4c. Les calcifications suspectes sont de topographie canalaire ou segmentaire et correspondent en général à des lésions de carcinome canalaire in situ (CCIS). La même distribution peut se voir dans les mastites à plasmocytes où les calcifications sont dues à des antécédents de galactophorite ; néanmoins, dans les cas de mastites, les calcifications sont régulières contrairement aux CCIS. Ces lésions touchent la femme d’âge moyen (30—40 ans), ayant allaité, l’atteinte est le plus souvent bilatérale [22]. Il est donc possible que des calcifications classées ACR5 soient au final bénignes en histologie. En l’absence des trois critères réunis, le résultat histologique est classé discordant et un nouveau prélèvement doit être proposé à la patiente.
Cas des résultats histologiques B3 Le radiologue doit connaître les lésions nécessitant une exérèse chirurgicale complémentaire et adresser la patiente dans un délai de 7 jours à un professionnel référent pour prise en charge. À noter que certaines équipes proposent une surveillance comme alternative à la chirurgie [23].
Cas des résultats malins B4 et B5 Le rôle du radiologue est d’adresser la patiente à un centre de référence pour prise en charge. L’exérèse chirurgicale est préconisée.
Corrélations radiohistologiques pour les masses, distorsions, asymétries non calcifiées On rappelle que toute masse ou asymétrie classées ACR 5 et ACR 4 est une indication à réaliser un prélèvement biopsique (Fig. 5). Une distorsion architecturale est toujours classée en ACR4 et nécessite également une preuve histologique. Une masse ACR3 peut être biopsiée dans un contexte particulier : cancer du sein homo- ou controlatéral avéré, mutation génétique ou à haut risque de mutation non
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Figure 3. Patiente de 45 ans adressée pour un carcinome canalaire infiltrant du sein gauche multifocal ; a, b : les mammographies du sein droit avec clichés agrandis de face et de profil montrent la présence d’un foyer de microcalcifications du quadrant supéro-externe stable depuis 3 ans. Une macrobiopsie sous stéréotaxie a été réalisé sur ce foyer contenant des calcifications irrégulières classée ACR4 ; c : les radiographies des prélèvements retrouvent de nombreuses calcifications ; d : les résultats histologiques retrouvent de rares calcifications au sein d’une métaplasie cylindrocublique). Étant donné que les calcifications étaient nombreuses sur les radiographies des prélèvements, en raison du cette discordance, des recoupes ont été demandées ; e : les recoupes mettent en évidence la présence de lésions de CCIS sur les recoupes × 30.
identifiée ou lors d’un risque de non compliance de la patiente à une surveillance. Selon les recommandations EUSOBI [24], les masses, distorsions ou asymétries visibles en échographie doivent être biopsiées à l’aide d’un pistolet automatique avec une aiguille de 14G et un débattement de 20 mm (moins de 3 % de prélèvement insuffisant contre 19 % avec les aiguilles de 16 et 18G) [24]. Un nombre minimum de deux prélèvements est recommandé lorsque le ciblage est correct. En microbiopsie, le taux de FN est estimé entre 0 et 3,7 % [5,25—28]. Les risques de FN sont [28] : • les erreurs d’échantillonnage : par mauvaise visibilité de la cible et de l’aiguille. Le radiologue doit constamment visualiser l’ensemble du trajet de son aiguille et doit systématiquement s’assurer du ciblage correct. Une lésion très profonde, une lésion de petite taille et des seins très fibreux peuvent donner lieu à des difficultés de ciblage ; • les erreurs de ciblage. Lorsque la masse est visible en mammographie ou en IRM, le radiologue doit s’assurer que la lésion vue en échographique corresponde bien à la masse en mammographie/IRM, surtout s’il existe plusieurs anomalies. Pour s’assurer de la bonne concordance entre l’anomalie mammographique/IRM et l’anomalie échographique, le radiologue doit déposer en fin de biopsie un clip de repérage. Les clichés mammographiques de contrôle permettent de vérifier que l’anomalie vue en
mammographie/IRM correspond bien à l’anomalie vue en échographie, grâce à la visualisation du clip. Une lésion de petite taille inférieure à 5 mm est une indication pour la mise en place d’un clip lors de la procédure. La mise en place d’un clip est impérative en cas de biopsie suite à une lésion vue en IRM, en cas de lésion difficilement visible ou profonde. Pour limiter les FN, les bonnes pratiques (recommandations SFR 2013) doivent être appliquées : des clichés iconographiques de la lésion doivent être réalisés avant biopsie dans les deux axes en précisant la taille, le rayon horaire, la distance au mamelon de la lésion, puis après tir dans l’axe de l’aiguille et à 90◦ et en fin de procédure (afin de noter un éventuel affaissement). Toutes les lésions accessibles à une microbiopsie sous échographie doivent être biopsiées par microbiopsie sous échographie, même les lésions de moins de 5 mm. Les indications de la macrobiopsie sous échographie sont les suivantes : • les discordances imagerie-anatomopathologie avec nécessité d’obtenir un échantillonnage plus large ; • l’exérèse de nodule bénin (B2) de moins de 15 mm préalablement biopsié ; • l’exérèse de lésions frontières sans atypie comme les cicatrices radiaires ou les papillomes.
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Figure 4. Patiente de 50 ans adressée pour un carcinome canalaire infiltrant (CCI) du sein gauche à l’union des quadrants externes ; a : masse ACR6 sein gauche avec clip en place (flèches) ; b, c : large plage de calcifications du quadrant supéro-externe du sein droit de type polymorphes branchées de distribution segmentaire classées ACR 5 sur les clichés agrandis de face et de profil à droite ; d : les résultats histologiques concluent à des lésions de galactophorite ectasiante, classées B2. Devant une classification ACR5, plusieurs critères restent suspects malgré un résultat histologique bénin ; e : présence de nombreuses calcifications résiduelles sur les clichés mammographiques de contrôle clip ; f : rares calcifications prélevées sur les radiographies des prélèvements ; g : rehaussement non masse segmentaire en IRM en rétro-aréolaire (IRM réalisée dans le cadre du bilan d’extension pour le CCI gauche). Une exérèse chirurgicale a été réalisée dans le même temps que la chirurgie pour la lésion de CCI gauche ; h : la biopsie chirurgicale à droite confirme des lésions de galactophorite ectasiante à droite.
Un clip est systématiquement mis en place après exérèse par macrobiopsie. Comme pour les microcalcifications, le radiologue se doit à la réception des résultats histologiques de réaliser
une synthèse des résultats en étudiant la concordance et la conduite à tenir qui seront consignées par écrit dans un compte rendu (Recommandations SFR 2013). Plusieurs cas de figures peuvent être rencontrés [29].
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Figure 5.
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Corrélations radiohistologiques pour les masses, distorsions, asymétries non calcifiées.
Cas de résultats histologiques B1 Le résultat histologique ne retrouve pas d’anomalie pouvant expliquer l’anomalie visualisée en imagerie. Il peut s’agir d’une biopsie de parenchyme mammaire normal sans lésion sous-jacente. Dans ce cas, le risque de sous-estimation est important car il existe probablement un problème de ciblage lors de la biopsie. Une nouvelle biopsie est à programmer.
Cas des résultats histologiques bénins B2 L’ACR de la lésion biopsiée était en faveur d’une lésion probablement bénigne (ACR3, ACR4a) (Fig. 6). Le résultat histologique le confirme. Aucun protocole de surveillance n’est recommandé par le lexique BI-RADS. Cependant, plusieurs études ont montré que le taux de FN des « bénins concordants » n’est pas négligeable (0,3—8,2 %). La surveillance proposée varie selon les auteurs, de 6 mois à 2 ans. Manjoros et al. ont montré dans leur étude qu’une surveillance de moins de 12 mois après la biopsie n’augmente pas le taux de détection des FN et entraîne un surcoût et un stress chez les patientes. Ils recommandent une surveillance à 12 mois [30]. L’ACR de la lésion biopsiée était en faveur d’une lésion probablement maligne (ACR4c, ACR5) (Fig. 7) ; cependant le résultat histologique est bénin. La valeur prédictive positive
de l’ACR5 est de plus de 95 % ; dans 5 % des cas, une anomalie classée ACR5 peut être bénigne. Il est donc possible qu’une anomalie classée ACR5 soit au final bénigne en histologie. Cependant avant de valider un résultat ACR5-bénin en histologie, il est indispensable de s’assurer des points suivants [24] : • le ciblage était correct : il convient de vérifier les clichés pris lors de la biopsie. Deux clichés post-tir sont indispensables à réaliser lors de la biopsie : aiguille en place avec sonde dans l’axe de l’aiguille et sonde à 90◦ ; • la lésion ciblée correspond à la bonne cible classée ACR4c ou ACR5. Il est nécessaire de disposer des images de la lésion biopsiée ; • l’anomalie histologique bénigne peut expliquer l’aspect suspect en imagerie [31,32]. En effet, certaines lésions bénignes peuvent se présenter en imagerie avec des contours irréguliers ou spiculés. Le radiologue doit connaître ces lésions histologiques et en discuter avec l’anatomopathologiste. La lésion la plus connue est la cicatrice radiaire qui se présente en mammographie comme une distorsion architecturale classée ACR4c ou comme une masse classée ACR5. Si le fibroadénome présente la plupart du temps des contours bien limités, il peut parfois se présenter sous forme d’une masse aux contours irréguliers, secondaire à un infarcissement, une hyalinisation ou une prolifération de sa composante
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Figure 6. Patiente de 35 ans adressée pour induration palpable du quadrant supéro-externe du sein droit ; a : l’échographie retrouve une masse ovalaire, macrolobulée, pour laquelle une microbiopsie a été réalisée ; b : les résultats histologiques concluent à un fibroadénome.
stromale [33,34]. De la même fac ¸on, l’adénose sclérosante en fonction de l’importance de la fibrose qui la constitue peut prendre un aspect de masse aux contours irréguliers. Si tous les critères ci-dessus sont réunis, le résultat peut être classé comme concordant. En revanche, si un des critères est manquant, une nouvelle biopsie. Elle peut se faire soit par microbiopsie sous échographie avec multiples prélèvements ou macrobiopsie sous échographie (pour augmenter l’échantillon), soit par exérèse chirurgicale.
Cas des résultats histologiques malins concordants B5 Le résultat histologique est validé. Le rôle du radiologue est d’indiquer une prise en charge chirurgicale ou d’adresser les patientes vers un professionnel référent dans un délai de moins de 7 jours après réception des résultats (Recommandations SFR 2013). Des lésions malignes peuvent se présenter en échographie ou mammographie avec des critères rassurants comme le carcinome canalaire infiltrant de grade III,
Figure 7. Patiente de 52 ans présentant en mammographie de dépistage ; a : masse du quadrant supéro-externe du sein gauche, aux contours spiculés classée ACR5 (flèches) ; b : l’échographie retrouve une masse aux contours mal limités. Une microbiopsie est réalisée ; c : les résultats histologiques concluent à une cicatrice radiaire : l’histologique retrouve l’aspect stellaire de la lésion vue en mammo-échographie.
le carcinome mucineux, le carcinome médullaire, les métastases ou encore les lymphomes (Fig. 8).
Cas des résultats B3 Le radiologue doit connaître les lésions nécessitant une exérèse chirurgicale complémentaire.
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Figure 8. Patiente de 55 ans adressée suite à une mammographie mettant en évidence une discrète distorsion architecturale sein gauche ; a : distorsion mieux visible sur l’angiomammographie (flèches) ; b : échographie retrouvant une masse aux contours irréguliers du quadrant supéro-externe sein gauche. Cette anomalie est classée ACR5 et une microbiopsie est indiquée. Les résultats concluent à de l’adénose sans image nodulaire mal limitée sur les lames histologique ; c : les mammographies de contrôle clip montrent que le clip est au contact de la lésion ACR5. Étant donné un risque de discordance, une macrobiopsie sous échographie a été réalisée ; d : les résultats histologiques concluent à un carcinome canalaire infiltrant de grade 1.
Conclusion La validation des résultats histologiques par le binôme radiologue—anatomopathologiste apparaît essentielle et indispensable. Cela permet de mettre en évidence les discordances et ainsi d’éviter et de limiter des cas de FN. Selon les recommandations SFR2013, le radiologue préleveur doit réaliser ces corrélations et indiquer par écrit la conduite à tenir.
Déclaration de liens d’intérêts Les auteurs déclarent ne pas avoir de liens d’intérêts.
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