Radiothérapie conformationnelle à 76 Gy des cancers localisés de la prostate. Modalités thérapeutiques et résultats préliminaires

Radiothérapie conformationnelle à 76 Gy des cancers localisés de la prostate. Modalités thérapeutiques et résultats préliminaires

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Cancer/Radiothérapie 12 (2008) 78–87

Article original

Radiothérapie conformationnelle à 76 Gy des cancers localisés de la prostate. Modalités thérapeutiques et résultats préliminaires Conformal radiotherapy to 76 Gy in localized prostate cancer. Therapeutic modalities and preliminary results D. Pontvert a,∗ , G. Gaboriaud d , T. Flam b , N. Jourdan-Da Silva e , N. Thiounn c , H. Mammar a , P. Beuzeboc f , B. Debré b b

a Département d’oncologie radiothérapique, institut Curie, 26, rue d’Ulm, 75248 Paris cedex 5, France Service d’urologie, hôpital Cochin–Saint-Vincent-de-Paul, 27, rue du Faubourg-Saint-Jacques, 75679 Paris cedex 14, France c Service d’urologie, hôpital Necker–Enfants-Malades, 149, rue de Sèvres, 75743 Paris cedex 15, France d Service de physique médicale, institut Curie, 26, rue d’Ulm, 75248 Paris cedex 5, France e Service de biostatistique et d’évaluation clinique, institut Curie, 26, rue d’Ulm, 75248 Paris cedex 5, France f Département d’oncologie médicale, institut Curie, 26, rue d’Ulm, 75248 Paris cedex 5, France

Rec¸u le 18 juin 2007 ; rec¸u sous la forme révisée le 17 octobre 2007 ; accepté le 20 novembre 2007 Disponible sur Internet le 8 janvier 2008

Résumé Objectif de l’étude. – Décrire les modalités thérapeutiques pour les cancers localisés de la prostate traités par irradiation conformationnelle de 76 Gy avec ou sans hormonothérapie. Évaluer les résultats préliminaires en termes de survie, de contrôle biochimique et de toxicité. Patients et méthode. – Entre janvier 1998 et juin 2001, 321 patients atteints d’un cancer localisé de la prostate ont été irradiés à l’institut Curie. Pour cette étude, les tumeurs ont été stratifiées selon les trois groupes pronostiques du Memorial Sloan-Kettering Cancer Center (1998) : favorable (23 %), intermédiaire (36,5 %), défavorable (40,5 %). Une privation androgénique, principalement néoadjuvante, inférieure ou égale à un an a été prescrite à 93,8 % des patients (72,6 % inférieure ou égale à six mois). Les doses d’irradiation prescrites dans les volumes cibles prévisionnels étaient les suivantes : prostate : 76 Gy ; vésicules séminales : 56 à 76 Gy ; ganglions pelviens : 44 Gy pour 16,8 % des patients. Résultats. – La probabilité de survie actuarielle globale à cinq ans était de 94 % (intervalle de confiance à 95 % : 90–97 %). La durée médiane du suivi post-thérapeutique était de 36 mois (neuf à 66 mois). Les probabilités de survie actuarielle sans échec biochimique à 48 mois étaient statistiquement différentes entre les trois groupes pronostiques, que ce soit selon la définition de l’échec biologique proposée par le consensus de l’American Society for Therapeutic Radiology and Oncology (ASTRO) de 1997 ou celle du Fox Chase Cancer Center (FCCC) de 2000, respectivement 87 et 94 %, 78 et 84 %, 54 et 58 % dans les groupes favorable, intermédiaire et défavorable (p < 10−6 et p < 10−8 ). Au moment de notre étude, des saignements rectaux et vésicaux post-radiques tardifs ont été respectivement observés dans 17,4 et 13,6 % des cas. Selon une échelle de 1 à 4 adaptée des critères du M.D. Anderson Cancer Center, les rectorragies étaient de grade 1 (9,6 %), grade 2 (6,2 %) et grade 3 (1,6 %) ; les hématuries étaient de grade 2 (13 %) et grade 3 (0,6 %). L’analyse des facteurs de risque de rectorragie a mis en évidence une corrélation significative avec l’irradiation des ganglions pelviens pour les grades 2 et 3 (p = 0,02), et pour tous les grades, une corrélation avec une paroi rectale de petit volume (p = 0,03) et les pourcentages élevés de paroi rectale irradiée à doses élevées : 65, 70, 72 et 75 Gy (respectivement, p = 0,02, p = 0,01, p = 0,0007 et p = 0,003). Conclusions. – Ces résultats sont comparables à ceux des séries publiées précédemment pour un suivi équivalent. L’impact de l’escalade de dose associée à une courte privation androgénique sur le contrôle local, la survie et les complications nécessitent un suivi de longue durée et une analyse approfondie. © 2007 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. Abstract Purpose. – To describe therapeutic modalities for localized prostate cancer treated by conformal radiation to 76 Gy with or without androgen ablation. To evaluate the preliminary results in terms of survival, biological control and toxicity. ∗

Auteur correspondant. Adresse e-mail : [email protected] (D. Pontvert).

1278-3218/$ – see front matter © 2007 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. doi:10.1016/j.canrad.2007.11.002

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Patients and method. – Between January 1998 and June 2001, 321 patients with localized prostate cancer were irradiated at institut Curie. Tumors were stratified into the three Memorial Sloan-Kettering Cancer Center prognostic groups (1998) for analysis: favorable risk group (FG) 23%, intermediate risk group (IG) 36.5%, unfavorable risk group (UG) 40.5%. Androgen deprivation, mainly neoadjuvant, less or equal to one year was prescribed to 93.8% of patients (72.6% less or equal to six months). Planning target volume prescription doses were: prostate: 76 Gy, seminal vesicles: 56 to 76 Gy, and pelvic lymph nodes: 44 Gy to 16.8% of patients. Results. – The five-year actuarial overall survival was 94% (95% IC: 90–97%). The median post-therapeutic follow-up was 36 months (nine to 60 months). The 48-month actuarial rates of biochemical control for the three prognostic groups were statistically different according to both the American Society for Therapeutic Radiology and Oncology consensus (ASTRO 1997) and the Fox Chase Cancer Center definitions of biochemical failure (FCCC 2000) with respectively 87 and 94% for FG, 78 and 84% for IG, 54 and 58% for UG (P < 10−6 and P < 10−8 ). At time of our analysis, late post-treatment rectal and bladder bleedings were 17,4 and 13,6%, respectively. According to a 1–4 scale adapted from M.D. Anderson Cancer Center criteria: rectal bleedings were grade 1 (9.6%), grade 2 (6.2%) and grade 3 (1.6%). Bladder bleedings were grade 2 (13%) and grade 3 (0.6%). Analysis of rectal bleeding risk factors showed significant correlations with pelvic lymph nodes irradiation for grade 2 and 3, (P = 0.02), and for all grades, a correlation with smaller rectal wall volumes (P = 0.03), and greater percentages of rectal wall irradiated to higher doses: 65, 70, 72 and 75 Gy (P = 0.02, P = 0.01, P = 0.0007 and P = 0.003, respectively). Conclusions. – These results are comparable to those previously reported with the same follow-up. Impact of dose escalation with short androgen deprivation on local control, survival and complications needs longer follow-up and further analysis. © 2007 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. Mots clés : Cancer de la prostate ; Radiothérapie conformationnelle ; Survie sans récidive ; Toxicité Keywords: Prostatic neoplasm; Conformal radiotherapy; Disease-free survival; Toxicity

1. Introduction En janvier 1998, suite aux résultats préliminaires des études d’escalade de doses publiées aux États-Unis [11,24,31] et aux travaux menés, depuis 1996, par un groupe coopératif franc¸ais sur cette même thématique [2], la dose prostatique a été portée de 68,4 à 76 Gy, en augmentant la dose par séance de 1,8 à 2 Gy. À cette date, l’association de radiothérapie et d’hormonothérapie était entrée dans la pratique clinique avec les résultats favorables des études européenne et américaine [4,19,22]. L’objectif de cette étude, réalisée en mai 2004, était d’analyser, à partir d’une série homogène dans ses conditions de recrutement et ses modalités d’irradiation, les résultats préliminaires d’une radiothérapie conformationnelle à 76 Gy, en termes de survie, de contrôle biologique et de toxicité. 2. Patient et méthodes 2.1. Description de la population étudiée De janvier 1998 à juin 2001, 321 patients atteints d’un cancer localisé de la prostate, prouvé histologiquement, ont été irradiés à l’institut Curie ; 89,0 % des patients étaient adressés par le service d’urologie de Cochin. Tous les patients avaient un toucher rectal, un taux sérique prébiopsique de prostate specific antigen (PSA), un score de Gleason et un bilan d’extension comportant une scanographie abdominopelvienne et une scintigraphie osseuse. Un curage ganglionnaire, à visée diagnostique, n’avait été pratiqué que chez six patients. Les patients étaient répartis suivant une classification modifiée de l’Union internationale contre le cancer (1997), certains cancers ayant été classés T3 sur les seuls critères biopsique ou les données de l’imagerie par résonance magnétique, lorsque celle-ci avait été réalisée.

Une privation androgénique avait été prescrite par l’urologue, avant que le patient ne soit référé à l’institut Curie dans 93,8 % des cas. L’hormonothérapie était le plus souvent complète (analogue de la LHRH et/ou anti-androgène) et sa durée toujours inférieure ou égale à un an (72,6 % inférieure ou égale à six mois). Principalement néoadjuvante et concomitante, sa composante adjuvante, pour les privations androgéniques les plus longues, n’avait jamais dépassé six mois. L’indication et la durée de la privation androgénique, partie prenante de l’escalade thérapeutique, avaient été motivées par les critères pronostiques du cancer, mais également par le délai entre la première consultation à l’institut Curie et le début de l’irradiation (de quatre à six mois). Les caractéristiques des patients sont présentées dans le Tableau 1. 2.2. Technique d’irradiation La préparation et la réalisation de l’irradiation à l’institut Curie ont suivi une procédure écrite. La préparation a utilisé un simulateur Ximatron® (Varian), un scanographe diagnostique (Elcint) puis un scanographe dédié à la radiothérapie (General ElectricTM ) à partir de 2000. Le logiciel de dosimétrie était Isis 3D® (Technologie DiffusionTM ). L’irradiation a été réalisée par un des deux accélérateurs linéaires, Clinac 2300 CD® , et Clinac 2300 EX® (VarianTM ) à partir de novembre 1999, délivrant des photons de 20 MV et équipés, respectivement, de collimateurs de 80 et de 120 lames. L’acquisition des données anatomiques était réalisée durant le mois précédant le début de l’irradiation, au moyen d’une scanographie pelvienne (coupes de 5 mm), en décubitus dorsal, avec injection intraveineuse et opacification rectales par voie basse. Le patient était immobilisé grâce à un système de contention personnalisé thermoformé qui maintenait les chevilles fixées à la table de traitement. Cette contention visait à faciliter l’alignement d’un référentiel tatoué à mi-épaisseur, à la hauteur du pubis, lors d’une séance de repérage sur le simulateur.

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Tableau 1 Caractéristiques des 321 patients Table 1 Characteristics for 321 patients

T (UICC) 1997 T1 T2 T3 N (UICC) Nx N– N+ Score de Gleason <6 6 7 >7 PSA (ng/ml) ≤ 10 10 – ≤ 20 > 20 – ≤ 50 > 50 Groupe pronostique Favorable Intermédiaire Défavorable Privation androgènique (mois) 0 3 6 9 12 Prostate/VS/pelvis (Gy) 76–56–0 76–56–44 76–(68–76)–0 76–(68–76)–44

n

(%)

81 157 83

(25) (49) (26)

316 4 2

(98) (1) (1)

74 105 89 53

(23) (33) (28) (16)

127 114 65 15

(40) (35) (20) (5)

74 117 130

(23) (36) (41)

20 75 158 39 29

(6) (24) (49) (12) (9)

248 41 19 13

(77) (13) (6) (4)

Âge (année) Médiane (bornes) : 69 (48–81).

Les structures délinéées sur la scanographie au moyen du logiciel de dosimétrie ont été les suivantes : prostate, prostate plus vésicules séminales, paroi externe du rectum incluant l’anus et remontant jusqu’à la boucle sigmoïdienne, paroi externe de la vessie, têtes fémorales jusqu’à la coupe passant par le bord inférieur des tubérosités ischiatiques et, à partir de janvier 1999, les aires ganglionnaires iliaques externes et internes bilatérales. Les volumes cibles prévisionnels prostate et prostate plus vésicules séminales ont été obtenus par une expansion automatique de 10 mm dans toutes les directions, réduite manuellement à 5 mm en regard du rectum. Les organes critiques, paroi rectale et paroi vésicale ont été obtenus par expansion négative de 5 mm de leur contour externe. L’irradiation des volumes cibles prévisionnels prostate et prostate plus vésicules séminales a été réalisée par cinq faisceaux : postérieur, latéral droit, oblique antérieur droit (310◦ ), oblique antérieur gauche (50◦ ), latéral gauche. La forme et les dimensions des faisceaux étaient finalisées lors de la conformation du collimateur multilame au contour des volumes cibles prévisionnels. Les marges des faisceaux étaient de l’ordre de

10 mm (limite inférieure), 5 mm (limites latérales) et de 10 à 5 mm (limite supérieure) selon les volumes cibles prévisionnels irradiés. L’irradiation débutait par le volume cible prévisionnel prostate plus vésicules séminales, réduit au volume cible prévisionnel prostate à la dose de 56 Gy, en l’absence d’atteinte des vésicules séminales. La pondération était dans l’ordre des faisceaux précités : 20, 25, 15, 15 et 25 %. La dose prostatique prescrite était de 76 Gy [14,15]. L’optimisation dosimétrique visait à inclure le volume cible prévisionnel prostate dans l’isodose 72 Gy (95 % de la dose prescrite). Après une étude préliminaire, fixant les paramètres de la technique d’irradiation, Il n’avait pas été défini de contrainte de dose stricte au niveau des organes critiques : rectum, vessie, têtes fémorales. En cas d’atteinte des vésicules séminales, la dose délivrée aux vésicules séminales, pouvait être modulée entre 68 et 76 Gy afin de limiter l’irradiation de la paroi rectale. La dose par séance était de 2 Gy. Il n’était pas tenu compte de l’hétérogénéité des densités électroniques des tissus irradiés (unités Hounsfield données par scanographe) lors du calcul des doses. L’irradiation ganglionnaire pelvienne, le cas échéant (16,8 % des patients), a été réalisée par une technique à quatre faisceaux : antérieur, postérieur et deux latéraux droit et gauche, dont les limites étaient définies de manière mixte, classique et conformationnelle, fondée sur les repères osseux pelviens (limite supérieure des champs d’irradiation au-dessus des articulations sacro-iliaques), puis sur les structures ganglionnaires droite et gauche délinées à partir de 1999. La dose ganglionnaire prescrite était de 44 Gy, également pondérée entre les quatre faisceaux. 2.3. Contrôle de qualité de l’irradiation Les cinq champs d’irradiation (quatre en cas d’irradiation ganglionnaire) étaient vérifiés la veille du traitement (j0) puis à chaque modification en cours de traitement. Le positionnement de l’isocentre des faisceaux par rapport aux repères osseux pelviens, étaient vérifiés à j1, j2, j3, puis une fois par semaine, en comparant les images acquises sur films EC-L® (Kodak) avec les accélérateurs linéaires à des images de référence reconstruites à partir du scanner par le logiciel de dosimétrie, à la recherche d’erreurs systématiques ou aléatoires, conduisant aux mesures correctives recommandées par la procédure. 2.4. Suivi des patients Pour la majorité des patients, le suivi post-thérapeutique a débuté par une première consultation à quatre mois à l’institut Curie, puis alterné, tous les six mois, entre l’urologue et le radiothérapeute. Le PSA sérique a été dosé à partir du quatrième mois après la fin du traitement, puis en moyenne deux fois par an, voire davantage en cas de progression. Lors de ces consultations, la décision de reprise thérapeutique (hormonothérapie) et la prise en charge de la toxicité post-thérapeutique revenaient à l’un ou l’autre des intervenants. Aucun patient n’était perdu de vue au moment de l’analyse.

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2.5. Toxicité tardive

3. Résultats

La toxicité tardive, sa date de survenue et son traitement ont été rapportés dans le dossier clinique de l’institut Curie. Une attention particulière a été portée à la prise en charge des saignements rectaux, le plus souvent en collaboration avec le service de gastroentérologie de l’hôpital Cochin. Les rectorragies et les hématuries ont été cotées selon une échelle de 1 à 4 adaptée des critères du M.D. Anderson Cancer Center pour la toxicité tardive [33].

3.1. Survie globale

2.6. Enregistrements des données

3.2. Échec biochimique et reprise thérapeutique

Crée en 1998 pour évaluer l’escalade de dose à 76 Gy, une base de données rétrospectives puis prospectives a enregistré les différents paramètres cliniques, thérapeutiques, dosimétriques et évolutifs des patients suivis en France, irradiés à l’institut Curie, selon le protocole en cours à visée curative, pour un cancer localisé de la prostate et une concentration sérique de PSA inférieure à 100 ng/ml, soumis ou non à une privation androgénique si elle était inférieure ou égale à un an.

Le recul médian depuis la fin du traitement était de 36 mois (six à 66 mois). Au moment de l’analyse, 73 patients (23 %) répondaient à la définition de l’ASTRO (1997) de l’échec biochimique élargie aux patients re(mis) sous privation androgénique, et 58 patients (18 %) répondaient à celle du FCCC (2000). Au moment où s’achevait cette étude, 55 patients (17 %) avaient repris une privation androgénique, dont 15 patients avant de répondre à la définition de l’ASTRO (1997) et sept avant de répondre à celle du FCCC (2000) soit moins de trois concentrations sériques de PSA enregistrées après la radiothérapie. La valeur médiane du PSA au moment de la reprise thérapeutique était de 6,3 ng/ml (1,9–42,5 ng/ml). Les probabilités de survie actuarielle sans échec biochimique étaient statistiquement différentes entre les trois groupes pronostiques : ASTRO (p < 10−6 ) et FCCC (p < 10−8 ) (Figs. 1 et 2). Selon la définition de l’ASTRO (1997), les probabilités de survie actuarielle sans échec biochimique à 48 mois étaient respectivement pour le groupe favorable 87 % (IC 95 % ; 80–95 %), pour le groupe intermédiaire 78 % (IC 95 % ; 70–86 %), pour le groupe défavorable : 54 % (IC 95 % ; 46–64 %). Selon la défi-

2.7. Analyse statistique L’analyse statistique a été réalisée par le Service de biostatistique et d’évaluation clinique de l’institut Curie avec le programme interactif de gestion et d’analyse statistique (PIGAS). La survie actuarielle globale a été établie à partir de la date du diagnostic histologique. Dans cette étude préliminaire, les patients ont été répartis en trois groupes pronostiques, d’après trois critères pronostiques selon la publication de 1998 du Memorial Sloan-Kettering Cancer Center (MSKCC) [33] : le stade (≤ T2), la concentration sérique de PSA (≤ 10 ng/ml), le score de Gleason (≤ 6). Le groupe favorable était défini par la présence des trois critères, intermédiaire (deux critères), défavorable (inférieur ou égal à un critère). Deux définitions de l’échec biochimique ont été retenues, la première résultant du consensus de l’American Society for Therapeutic Radiology and Oncology (ASTRO) de 1997, correspondant à la progression de trois concentrations consécutives de PSA après le nadir ; la date de l’échec était fixée au milieu de l’intervalle entre le nadir et la première progression du PSA [1]. La seconde définition était fondée sur celle du Fox Chase Cancer Center (FCCC), correspondant à la progression de deux concentrations consécutives de PSA après le nadir devenant supérieur à 1,5 ng/ml. La date de l’échec était fixée à celle du PSA le plus proche de 1,5 ng/ml [13]. Lorsque les patients ont été (re)mis sous privation androgénique avant de satisfaire l’une ou l’autre définition, la date de l’échec était fixée à la date de la reprise thérapeutique. Les facteurs prédictifs pour la survenue de rectorragies après l’irradiation ont été étudiés en analysant l’intervalle libre sans rectorragie. Les courbes actuarielles de survie sans échec biochimique ou d’intervalle libre sans rectorragie ont été calculées à partir de la date de fin traitement (fin de la radiothérapie et/ou fin de la privation androgénique) selon la méthode de Kaplan-Meier. Leur comparaison a été faite avec le test du log-rank.

Le recul médian depuis le diagnostic histologique était de 50 mois (12–81 mois). La probabilité de survie actuarielle globale à cinq ans était de 94 % [intervalle de confiance (IC) à 95 % ; 90–97 %]. Dix-huit patients sont décédés, trois décès sur 18 étaient liés au cancer de la prostate, cinq sur 18 liés à un autre cancer et dix sur 18 liés à une cause intercurrente.

Fig. 1. Survie actuarielle sans échec biochimique (ASTRO-1997) en fonction des groupes pronostiques. Fig. 1. Actuarial PSA relapse-free survival (ASTRO-1997) by prognostic subgroups.

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Tableau 2 Saignement tardif d’après l’échelle du M.D. Anderson Cancer Center pour la toxicité tardive [33] Table 2 Late bleeding from M.D. Anderson Cancer Center scale for delayed radiation toxicity [33] G1

G2

G3

G4

Rectorragie

Légère émission de sang

Lavements corticoïdes intermittents ou une à deux séances d’électrocoagulation par plasma d’argon

Rectorragie nécessitant la chirurgie ou mettant en jeu le pronostic vital

Hématurie

Hématurie microscopique Atrophie muqueuse modérée et quelques télangiectasies

Télangiectasies généralisées Hématuries macroscopiques intermittentes non traitées ou nécessitant une ou deux cautérisations

Transfusion ou plus de deux électrocoagulations par plasma d’argon, O2 hyperbare pour saignement ou ulcération Hématuries répétées nécessitant une ou plusieurs transfusions ou plus de deux cautérisations

nition du FCCC (2000), les probabilités de survie actuarielle sans échec biochimique à 48 mois étaient respectivement pour le groupe favorable 94 % (I C 95 % ; 88–100 %), pour le groupe intermédiaire 84 % (IC 95 % ; 77–91 %), pour le groupe défavorable 58 % (IC 95 % ; 49–68 %). 3.3. Toxicité Seules les rectorragies et les hématuries macroscopiques, de grades 1 à 4 selon une échelle adaptée des critères du M.D. Anderson Cancer Center pour la toxicité tardive [33] ont été analysées (Tableaux 2 et 3). Elles se distinguaient par leur délai médian de première apparition, 11 mois pour les rectorragies et 25 mois pour les hématuries, et leur fréquence de survenue, respectivement 17,4 et 13,6 %. Elles se distinguaient également par le caractère habituellement itératif des rectorragies et celui sporadique des hématuries, conduisant à deux attitudes thérapeutiques différentes, traitement médical et/ou coloscopie et/ou électrocoagulation, en cas de rectorragies (73,2 %) et échographie – examen cytobactériologique urinaire (ECBU) et

Hématurie sévère nécessitant une cystectomie

surveillance, après avoir écarté une autre cause de saignement, en cas d’hématurie (90,9 %). Pour les rectorragies, le délai médian entre la fin de la radiothérapie et l’électrocoagulation endoscopique au plasma d’Argon était de 18,5 mois (8 à 46 mois). Débutant au-dessus de la ligne anopectinée, la hauteur moyenne des télangiectasies, lorsque celles-ci étaient précisées, était de 4 cm (2–10), indépendante du protocole d’irradiation. 3.4. Étude des facteurs prédictifs pour la rectorragie Les facteurs prédictifs de la survenue de rectorragies ont été étudiés selon différents critères clinique, anatomique, protocolaire et dosimétrique. Aucun des trois critères cliniques liés aux patients étudiés rapportés lors de la première consultation en vue de la radiothérapie, n’était corrélé avec la survenue de rectorragies, qu’il s’agisse de l’âge, stratifié en trois sous-groupes, ≤ 65,] 65–75], ≥ 75 (p = 0,40) ; des antécédents de pathologie anale (p = 0,78) ; de la prise d’un traitement anticoagulant ou antiagrégant plaquettaire (p = 0,56). Tableau 3 Caractéristiques des saignements tardifs post-radiques Table 3 Late rectal and bladder bleeding characteristics Caractéristiques Échelle M.D. Anderson CC Grade 1 Grade 2 Grade 3 Total sur 321 patients Délai d’apparition Minimum 1er quartile Médiane 3e quartile Maximum Prise en charge des saignements

Fig. 2. Survie actuarielle sans échec biochimique (FCCC-2000) en fonction des groupes pronostiques. Fig. 2. Actuarial PSA relapse-free survival (FCCC-2000) by prognostic subgroups.

Pas de traitement Traitement médical seul Électrocoagulation Plus transfusion Total

Rectorragie n 31 20 5 56

Hématurie

% 9,6 6,2 1,6 17,4

n

%

– 42 2 44

– 13,0 0,6 13,6

Mois

Mois

3,6 9 11 17 32

5,7 16 25 35 67 %

%

26,8 41,1 28,5 3,6 100

90,9 0 6,8 2,3 100

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Les pourcentages de paroi rectale irradiée en fonction de la dose, d’après un relevé discontinu des histogrammes dose–volume, est présentée au moyen de diagrammes (boite à moustaches de Tukey). Prenant pour exemple la dose de 72 Gy, le diagramme est défini par sa médiane, 10 %. La boite qui représente 50 % des observations est comprise entre 8 et 13 %. Les deux moustaches, asymétriques, allant de 0 à 20,5 % encadrent au moins 95 % des observations. Au-delà de cette limite supérieure, 13 valeurs sont considérées comme atypiques et sont associées à cinq cas de rectorragies (Fig. 5). L’analyse des pourcentages de paroi rectale irradiée en fonction de la dose a montré les faits suivants :

Fig. 3. Intervalle libre actuariel sans rectorragie en fonction du volume cible prévisionnel prostatique. Fig. 3. Actuarial rectal bleeding-free interval by prostate planning target volume.

• les pourcentages de paroi rectale irradiée étaient plus élevés, quelle que soit la dose analysée (de 50 à 75 Gy) en cas d’irradiation ganglionnaire, lorsque l’on comparait les 248 patients traités par le protocole 76–56–0 Gy aux 41 patients traités par le protocole 76–56–44 (test du χ2 , p = 0,0001) ; • il y avait une corrélation entre la survenue des rectorragies et le pourcentage de paroi rectale irradiée à dose élevée (de 65 à 75 Gy). La corrélation la plus forte étant observée pour la dose de 72 Gy (Tableau 4 et Fig. 6).

Parmi les critères anatomiques et protocolaires, nous avons observé que le volume cible prévisionnel prostate plus vésicules séminales et le volume cible prévisionnel prostate (médianes respectives de 190 cm3 et 130 cm3 ) n’étaient pas corrélés avec la survenue de rectorragies ; respectivement p = 0,93 et p = 0,99 (Fig. 3), que les volumes de paroi rectale supérieurs à 50 cm3 étaient corrélés avec un risque plus faible de rectorragies (p = 0,027) (Fig. 4), que l’irradiation des aires ganglionnaires, lorsqu’on comparait les 248 patients traités par le protocole 76–56–0 Gy aux 41 patients traités par le protocole 76–56–44 Gy, était corrélée avec la survenue de rectorragies de grades 2 et 3 (p = 0,02).

Fig. 4. Intervalle libre actuariel sans rectorragie en fonction du volume de paroi rectale. Fig. 4 Actuarial rectal bleeding-free interval by rectal wall volume.

Fig. 5. Distribution des pourcentages de paroi rectale irradiée en fonction de la dose des 321 patients (boite à moustaches de Tukey)*. Max : valeur maximale ; moust. sup : limite supérieure des moustaches ; Q3: troisième quartile ; médiane : valeur médiane ; Q1 : premier quartile ; moust. inf : valeur inférieure des moustaches ; min : valeur minimale ; (val. atyp.) : nombre de valeurs atypiques. Interprétation : 50 % des observations sont inclus dans la boite. Le trait gras divise la boite à la valeur médiane. L’écart interquartile (EIQ) est calculé en soustrayant le premier quartile (Q1) du troisième quartile (Q3). La valeur supérieure des moustaches est égale à Q3 + 1,5*(EIQ). La valeur inférieure des moustaches est égale à Q1 − 1,5*(EIQ). Les observations qui se situent en dehors de l’intervalle défini par les valeurs supérieure et inférieure des moustaches sont considérées comme atypiques. Le nombre de rectorragies pour les valeurs atypiques de 50 à 75 Gy sont respectivement (4/9, 5/11, 4/10, 4/11, 3/9, 5/13, 3/13). Fig. 5. Distribution of percentage of irradiated rectal wall by dose for 321 patients (Tukey’s box & whiskers plot)*. Max: maximum value; moust.sup: upper whisker value; Q3: 3rd quartile; Médiane: median value; Q1: 1st quartile; moust.inf: lower whisker value; min: minimum value; (val.atyp.): number of outliers. Interpretation: 50 % of observations are inside the box. Bold line divides the box at median value. Interquartile range (IQR) is calculated by subtraction the first quartile (Q1) from the third quartile (Q3). The upper value of whisker is equal to Q3 + 1.5*(IQR). The lower value of whisker is equal to Q1 − 1.5*(IQR). Observations which lie outside of the interval limited by upper and lower values of whiskers are considered as outliers. Number of rectal bleeding for outliers from 50 to 75 Gy are respectively (4/9, 5/11, 4/10, 4/11, 3/9, 5/13, 3/13).

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sans échec biochimique soit établi avec deux ans de moins que le recul médian [29]. De même, la présentation des résultats par groupes pronostiques s’est généralisée sans pour autant s’harmoniser. Plusieurs auteurs ont proposé leur classification [6,26,27,35]. Elles suivront l’amélioration des résultats amenée par l’escalade thérapeutique [34]. 4.2. Saignements tardifs

Fig. 6. Intervalle libre actuariel sans rectorragie en fonction du pourcentage de paroi rectale irradiée à 72 Gy. Fig. 6. Actuarial rectal bleeding-free interval by percentage of rectal wall to 72 Gy.

4. Discussion 4.1. Contrôle local Depuis une dizaine d’années, l’importance de la dose sur le contrôle biologique des adénocarcinomes de la prostate localisés a été rapportée par les équipes de Philadelphie [11,12], de New-york [34,35], de Cleveland [17,18] et par le groupe coopératif franc¸ais [3]. Dès 1993, des essais randomisés, ont comparé deux niveaux de doses et confirment le gain significatif de l’escalade de dose : 70 Gy contre 78 Gy pour la série de Houston [25,26], 70,2 Gy contre 79,2 Gy pour la série de Boston [37], 68 Gy contre 78 Gy pour l’essai hollandais [21] et 64 Gy contre 74 Gy pour l’essai britannique [8]. Cette analyse, réalisée en mai 2004, a validé la faisabilité de notre escalade thérapeutique. Nos résultats préliminaires, en fonction des groupes pronostiques du Memorial Sloan-Kettering Cancer Center [35], ont été étudiés selon la définition de l’échec biologique de l’ASTRO de 1997 [1] et celle du Fox Chase Cancer Center [13], mieux adaptée à notre population en raison du rebond du taux de PSA observé à l’arrêt de l’hormonothérapie [29]. Nos probabilités de survie actuarielle sans échec biochimique à quatre ans selon ces deux définitions (ASTRO contre FCCC) étaient respectivement 87 % contre 94 %, 78 % contre 84 %, 54 % contre 58 %, pour les groupes de pronostics favorable, intermédiaire et défavorable. Depuis 2005, l’ASTRO et le RTOG (Radiation Therapy Oncology Group) proposent une nouvelle définition de l’échec biologique, applicable quelles que soient les modalités thérapeutiques, soit une élévation de la concentration sérique de PSA de 2 ng/ml ou plus au-dessus du nadir du PSA. Le groupe d’experts recommande également que le calcul de la probabilité de survie

La radiothérapie des cancers de la prostate est mieux tolérée depuis qu’elle est devenue conformationnelle [8]. Si l’escalade de dose a augmenté son efficacité, c’est au prix d’une toxicité accrue jugée acceptable par la majorité des auteurs, en raison du faible pourcentage de grades 2 et 3 [9,12,25,36,37]. Passée la phase aiguë, rectite et cystite radiques se manifestent le plus fréquemment par des saignements chroniques secondaires à l’apparition d’une néovascularisation superficielle, sous la forme de télangiectasies muqueuses. Dans cette étude préliminaire, nous nous sommes limités à analyser ces saignements tardifs. Nous avons adopté une échelle de 1 à 4 adaptée des critères du M.D. Anderson Cancer Center pour la toxicité tardive [33] : • les rectorragies et les hématuries se distinguent par leur délai médian de première apparition, 11 mois contre 25 mois, de telle sorte que leur fréquence, respectivement 17,4 contre 13,6 %, pourront s’équilibrer avec le recul ; • nos taux d’effets de grades 2 et 3 respectivement 6,2 et 1,6 %, pour les rectorragies, 13 et 0,6 % pour les hématuries sont acceptables à ce stade de l’analyse. Toutefois, il ne faut pas méconnaître l’incidence du choix de la prise en charge thérapeutiques sur la cotation de grade 2, ni l’influence des maladies associées sur la gravité de ces saignements. La place prise par l’électrocoagulation endoscopique au plasma d’argon des télangiectasies mérite d’être soulignée. Son développement, en France, a été contemporain des études d’escalade de dose dans le cancer de la prostate. Grâce à sa procédure sécurisante et à son efficacité, elle est devenue le traitement de référence des rectites chroniques hémorragiques post-radiques. Elle est d’autant plus efficace qu’elle est pratiquée à distance des phénomènes inflammatoires de la phase aiguë post-thérapeutique et en dehors des périodes hémorragiques. Aujourd’hui, dans le service de gastroentérologie de Cochin, elle termine habituellement une coloscopie recommandée aux patients souffrant d’un saignement chronique, quelles que soient sa fréquence et sa gravité. 4.3. Facteurs de risque de rectorragies En 2000, Skwarchuk et al., analysant la série du Memorial Sloan-Kettering Cancer Center selon quatre types de critères, clinique, anatomique, dosimétrique et géométrique, ont décrit trois paramètres prédictifs pour la survenue de rectite chronique hémorragique : le faible volume rectal, la dose maximale rec¸ue par le rectum et l’inclusion de la paroi postérieure du rectum

D. Pontvert et al. / Cancer/Radiothérapie 12 (2008) 78–87 Tableau 4 Comparaison des intervalles libres actuariels sans rectorragie en fonction du pourcentage de paroi rectale irradiée et de la dose rec¸uea Table 4 Comparison of actuarial rectal bleeding-free interval by percentage of irradiated rectal wall and received dosea Dose rectale

% de paroi rectale irradiée

Gy

min–1er

≥ 75 ≥ 72 ≥ 70 ≥ 65 ≥ 60 ≥ 55 ≥ 50

≤1 0–8– < 10 0–10– < 12 4–15– < 18 5–20– < 25 7–23– < 29 10–27– < 33

q– < méd

≥ méd–3e

p q–max

> 1–5–32 ≥ 10–13–38 ≥ 12–16–41 ≥ 18–22–50 ≥ 25–31–64 ≥ 29–38–79 ≥ 3 3–44–85

Valeur 0,003 0,0007 0,01 0,02 0,2 0,5 0,6

a Distribution des pourcentages de paroi rectale irradiée de part et d’autre de la valeur médiane en fonction de la dose rec¸ue. Méd : médiane ; min : minimun ; max : maximum ; 1er q : premier quartile ; 3e q : troisième quartile. a Distribution of percentages of irradiated rectal wall on both sides of median value according to the received dose. Méd: median value; min: smallest value; max: largest value; 1er q: 1st quartile; 3e q: 3rd quartile.

dans l’isodose 50 % [32]. En 2001, Jackson et al., développant les critères dosimétriques, ont montré l’influence du pourcentage de paroi rectale irradiée à 71 et 77 Gy pour les paliers de dose prostatique de 70,2 et 75,6 Gy et, après ajustement sur le volume rectal, l’interaction possible d’un volume rectal plus large irradié à dose intermédiaire (46 Gy) [16]. Dans notre série, l’optimisation dosimétrique visait principalement à inclure le volume cible prostatique dans l’isodose 95 % égale à 72 Gy. À ce palier de dose, après avoir fixé les paramètres de la technique d’irradiation, nous jugions qu’il n’était pas nécessaire de définir des contraintes de dose stricte au niveau des organes critiques pour le protocole 76–56–0 Gy. Notre analyse des rectites hémorragiques chroniques selon des critères clinique, anatomique, protocolaire et dosimétrique retrouve 3 paramètres prédictifs : un faible volume de paroi rectale (≤ 50 cm3 ) pour tous les grades, l’irradiation des aires ganglionnaires pour les grades 2 et 3, et le pourcentage de paroi rectal irradiée à 65, 70, 72 et 75 Gy pour tous les grades. La dose de 72 Gy s’est révélé la plus discriminante (p = 0,0007) (Tableau 4). 4.4. Irradiation des aires ganglionnaires Le curage ganglionnaire avant la radiothérapie, sans incidence sur nos indications thérapeutiques, nous apparaissait comme un geste inutile. De même, lorsque nous avons débuté cette étude, l’intérêt d’une l’irradiation ganglionnaire pour les groupes de pronostics intermédiaire et défavorable était encore discuté. En 2003, l’étude randomisée RTOG 9413, a montré que l’irradiation ganglionnaire combinée à une hormonothérapie néoadjuvante améliorait la probabilité de survie sans échec biochimique lorsque le risque d’envahissement ganglionnaire était supérieur à 15 % [28,30]. Au début de notre escalade de dose, influencés par le choix du Memorial Sloan-Kettering Cancer Center, nous avons abandonné l’irradiation des aires ganglionnaires pelviennes.

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Progressivement, après un premier échec ganglionnaire précoce, nous l’avons reprise pour certains patients atteints de cancer présentant des critères pronostiques défavorables : score de Gleason ≥ 8, stade clinique ≥ T3, concentration sérique de PSA > 20 ng/ml, sans pour autant définir des critères stricts, les indications étant également influencées par l’âge du patient et les maladies associées. En juin 2001, date à laquelle s’arrête cette étude, nous avons modifié notre technique d’irradiation après avoir constaté les faits suivants : • l’irradiation ganglionnaire était associée à des doses plus élevées au niveau de la paroi rectale quelle que soit la dose considérée (p = 0,0001), notamment pour les doses élevée, localisées à la partie basse du rectum, pourtant éloignée des aires ganglionnaires ; • le siège des saignements rectaux était habituellement bassitué, sus-anal, qu’il y ait eu ou non une irradiation ganglionnaire. À partir de cette date, une technique à cinq faisceaux a été utilisée pour tous les patients. Les faisceaux étant obtenus par l’expansion manuelle, incluant les aires ganglionnaires, des faisceaux utilisés pour le volume cible prévisionnel prostate plus vésicules séminales. 4.5. Privation androgénique L’association hormonothérapie–radiothérapie contribue à l’amélioration des résultats thérapeutiques dans les cancers localisés de la prostate [4,5,23,7]. La place que nous avons donnée à l’hormonothérapie dans nos protocoles thérapeutiques ne sera pas développée dans cette discussion. 5. Conclusion L’escalade de dose, associée ou non à une hormonothérapie, a accru l’efficacité de la radiothérapie conformationnelle des cancers localisés de la prostate. Ces résultats sont obtenus au prix de saignements rectaux et vésicaux tardifs, exceptionnellement graves, dont il faut informer les patients afin qu’une prise en charge adéquate leur soit appliquée, et qu’il conviendra de diminuer par les actions suivantes : • l’amélioration de la technique d’irradiation conformationnelle [20] et le respect de contraintes qui lui sont associées ; • la recherche et la prise en compte des facteurs prédictifs pour les saignements tardifs ; • le développement de techniques d’irradiation plus performantes, telles que la radiothérapie conformationnelle avec modulation d’intensité, et la radiothérapie adaptative [10] grâce à l’introduction de nouvelles modalités d’imagerie dans la salle d’irradiation [real time application interface (RTAI) – radiothérapie assistée par l’image, tomothérapie].

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Remerciements Nous remercions C. Dauphinot, O. Cordonnier et Y. De Rycke pour l’aide apportée au recueil, à la saisie et à l’analyse des données, ainsi que A. de la Rochefordière pour la relecture du manuscrit.

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