Allaitement et homéopathie

Allaitement et homéopathie

La Revue d'Homéopathie 2012;3:100–106 Pratiques Allaitement et homéopathie Breastfeeding and homeopathy Élisabeth Latour Sage-femme, 123, rue du Gé...

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La Revue d'Homéopathie 2012;3:100–106

Pratiques

Allaitement et homéopathie Breastfeeding and homeopathy Élisabeth Latour

Sage-femme, 123, rue du Général-Leclerc, 95350 Saint-Leu-la-Forêt, France

Disponible en ligne sur SciVerse ScienceDirect le 9 août 2012

RÉSUMÉ Le lait maternel est le meilleur aliment pour le nouveau-né. Que ce soit pour la mise en route de la lactation, pour traiter les pathologies rencontrées en cours d'allaitement ou pour obtenir un sevrage, des outils thérapeutiques homéopathiques existent. Qu'il s'agisse d'une lactation ou d'une tétée douloureuse, d'une insatisfaction ou d'une prise de poids insuffisante du nourrisson, un traitement homéopathique adapté peut apporter des réponses. © 2012 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.

SUMMARY Breast milk is the best food for newborns. Various homeopathic remedies can be used to induce lactation, to treat any pathologies which arise during breastfeeding or to help with weaning. If breastfeeding or lactation is painful, if the newborn is dissatisfied or gaining insufficient weight, an adapted homeopathic treatment may provide solutions. © 2012 Elsevier Masson SAS. All rights reserved.

orsqu'une femme enceinte approche de son terme, il est temps pour elle de réfléchir à l'alimentation de son bébé. La nature prévoit, vers le 3e ou 4e jour après la naissance, ce qu'on a coutume d'appeler en France la « montée laiteuse », un terme désuet et impropre qui a cependant la vie dure. Des médicaments homéopathiques peuvent être prescrits avant l'accouchement pour faciliter la future lactation, pendant l'allaitement pour pallier les difficultés et pathologies rencontrées par la patiente et enfin lors du sevrage.

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AVANT L'ALLAITEMENT Les médicaments homéopathiques dont aura besoin une parturiente peuvent lui être prescrits d'avance, car ils ne sont qu'exceptionnellement disponibles en hospitalisation.

La prescription de base Ainsi la trousse de base contiendra : Apis 9 CH 1 tube, Bryonia 9 CH 1 tube, 100

Belladonna 9 CH 1 tube et Arnica 15 CH 1 dose :  Apis est un anti-inflammatoire antiœdémateux. La congestion mammaire est impressionnante en volume (œdème), le plus souvent améliorée par les applications fraîches. En raison de la fréquence des allergies aux piqûres d'abeille dans la population générale, nous ne prescrivons jamais Apis en basse dilution aux femmes enceintes. Pour éviter la multiplication des tubes dans les pharmacies familiales, nous avons choisi une dilution de 9 CH. Apis a une durée d'action brève et il convient de répéter les prises toutes les 10 minutes en espaçant en fonction de l'amélioration.  Bryonia est un anti-inflammatoire qui « assèche les muqueuses et fait pleurer les séreuses ». C'est donc un médicament incontournable, puisque l'élaboration du lait est issue du passage d'éléments du sang maternel vers l'acinus, à travers les membranes du vaisseau puis de l'acinus, puis de la cellule mammaire qui joue un rôle de

Mots clés Abcès Candidose Crevasse Fatigue Galactophorite Insuffisance Lactation douloureuse Lait maternel Lymphangite Sein Sevrage

Keywords Abscess Breast Breast milk Candidiasis Crack Fatigue Galactophoritis Insufficiency Lymphangitis Painful breastfeeding Weaning

Adresse e-mail : [email protected]

© 2012 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. http://dx.doi.org/10.1016/j.revhom.2012.07.004

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réorganisateur de ces éléments. Ayant passé cette dernière membrane les microgouttelettes de lait convergent vers le canal galactophore de l'acinus concerné. On retrouve une modalité d'amélioration franche par l'immobilité et donc le port du soutiengorge serré jour et nuit, puisque le simple fait de se retourner sans maintien est si douloureux qu'il réveille. Sa durée d'action est un peu plus lente que pour Apis, mais plus longue : 2 à 3 prises par 24 heures sont généralement efficaces, mais pour certaines patientes il en faut plus.  Belladonna 9 CH, reconnu par sa triade rubordolor-calor est un troisième anti-inflammatoire qui permet de répondre aux engorgements initiaux. La mise en route de la lactation peut être flamboyante. Un acinus s'engorge et une rougeur apparaît sur la peau. Ce placard ressemble plus ou moins à une part de camembert dont la pointe serait dirigée vers l'aréole et la base large dans l'un des quadrants supéroexternes. Ces quadrants sont difficilement accessibles au drainage par la langue du bébé, ce qui explique leur localisation. Le traitement le plus efficace consiste à installer la mère et l'enfant lors de la prochaine tétée de façon que le menton de l'enfant se situe sur la zone rouge, ce qui peut s'avérer acrobatique. En attendant, Belladonna est précieux, à une fréquence horaire à adapter par la patiente. Un engorgement méconnu peut conduire à la spectaculaire « fièvre de lait », montant facilement à 40 8C, avec un syndrome grippal très marqué. Outre Belladonna, qui est en règle suffisant en une demi-journée, la question de Gelsemium (faciès rouge et hébété, prostration, incapacité des acini à se contracter pour s'évacuer) peut se poser. En l'absence de traitement de l'engorgement (par la tétée ou par le médicament), on aboutit aux « seins de marbre » qui sont si douloureux qu'une injection de morphine peut être nécessaire pour son action antispasmodique et myorelaxante.  Arnica 15 CH, une dose prise juste après l'accouchement favorise la lactation qui peut être adoucie et accélérée. C'est une indication à la fois curative (stress post-traumatique) et préventive particulièrement utile en cas de césarienne. En effet, dans ce cas la lactation est retardée de 24 à 48 heures. Pour peu que le bébé soit un peu dodu, il peut avoir du mal à se contenter du colostrum.

Physiopathologie de la lactation Quand la lactation ne s'installe pas de façon harmonieuse, seule la réflexion sur la physiopathologie des mécanismes permet une réponse pertinente. La lactation s'installe par un mécanisme de rétrocontrôle hormonal. À l'expulsion du placenta correspond un arrêt de la mise en circulation massive d'oestrogènes et de progestérone. Par un mécanisme de bio-feed-back sur le prolactine-inhibiting-factor (PIF), la prolactine est

Pratiques alors secrétée par l'hypophyse. Elle est accompagnée d'une sécrétion d'ocytocine, hormone qui fait contracter les muscles des parois de l'acinus de la glande mammaire. En organothérapie, on utilisera donc Prolactinum, Hypophyse postérieure (à défaut, Hypophyse), Glandes mammaires selon les principes habituels, c'est-à-dire en 5 CH pour stimuler, en 9 CH pour réguler, en 15 ou 30 CH pour freiner. Chez certaines patientes, il est prévisible que la mise en route de la lactation sera difficile. On peut les rassurer quand il ne s'agit pas d'une première lactation. En effet, les difficultés d'une première lactation, notamment en quantité, se corrigent le plus souvent à la seconde, comme si le sein avait enfin compris ses propres mécanismes de régulation. Seuls les phénomènes de type infectieux (lymphangite, abcès) ont tendance à récidiver en s'aggravant : pour ces patientes la solution consiste à bien connaître le mécanisme de survenue de façon à réagir aux premiers prodromes, et éviter ainsi la complication. L'acupuncture peut compléter l'action de l'homéopathie. Les médicaments suivants n'ont pas prétention de constituer une liste exhaustive. Ils peuvent être des similimum ou des outils thérapeutiques. Nous les retrouverons régulièrement au long de cet article, et nous invitons le lecteur à se reporter à la Matière médicale :  Asa foetida est marquée par son hyperréflexie neuromusculaire. On la reconnaît à son hypersensibilité à la douleur et à son amélioration dans un lieu confiné ;  Conium a des seins qui passent immédiatement de la congestion à la flétrissure, en oubliant l'étape fonctionnelle efficace. Les seins sont durs et gonflent habituellement avant les règles ;  Dulcamara a des seins gonflés et tendus, sans lait, mais avec des adénites aiguës causées par le froid humide. Lors d'une fièvre de lait, où la fièvre est accompagnée d'une soif vive, le diagnostic différentiel avec Belladonna se fera sur la rougeur et la modalité hivernale ;  Lac defloratum est une grande migraineuse. Les migraines présentent des auras et sont invalidantes. Frileuse et assoiffée, la patiente a des seins hypoplasiques et la lactation sera absente ou insuffisante ;  Ricinus est un médicament d'hyperlactation, de mastite inflammatoire avec adénites axillaires douloureuses. C'est un médicament du syndrome aménorrhéegalactorrhée. C'est aussi un médicament de nausées de la grossesse. Tous les symptômes de Ricinus sont accompagnés d'une marque dépressive, aussi bien lors de la grossesse que dans le post-partum ou hors de ces périodes. On retrouve ici la correspondance entre hormones et humeur, qui est une notion fondatrice en ostéopathie ;  Secale cornutum présente une ischémie des extrémités par spasme vaso-constricteur des artérioles et des 101

Pratiques capillaires. La patiente est donc maigre et frileuse, mais sa modalité d'aggravation à la chaleur l'oblige à se découvrir. Le défaut d'irrigation des seins rend la lactation difficile. Rappelons en passant que le mécanisme d'action fait que les basses dilutions doivent absolument être évitées pendant la grossesse (risque de fermeture des jonctions capillaires placentaires !) et que les autres dilutions doivent être manipulées avec une extrême prudence sur utérus non vide. Au-delà de l'installation, la lactation est entretenue par la succion du bébé. Si les enfants sont deux (jumeaux ou coallaitement d'enfants d'âges différents), les seins s'adaptent. Pour être efficace, la succion doit présenter deux phases : l'allongement de la langue bien au-delà de la cavité buccale, suivie de la déglutition qui est en général audible. Si le fait de tirer la langue est douloureux pour l'enfant, par exemple en raison du froissement d'un muscle sous-mandibulaire ou d'un torticolis, l'intervention de l'ostéopathe sera indispensable en urgence. En attendant on pourra proposer Arnica (douleur musculaire) ou Lachnantes (torticolis). Tous les cas de crevasse du sein sont quasiment dus à une mauvaise succion ou position. Est appelée mauvaise position toute position du couple mère-enfant où la succion aboutit à un pincement du mamelon (défaut de traction) ou à un étirement du mamelon hors de l'axe physiologique d'étirement. Dans ce dernier cas, les sillons d'étirement, au lieu de rester parallèles, se fendent en part de camembert. C'est la crevasse, si douloureuse qu'elle peut compromettre la poursuite de l'allaitement. La lactation étant un phénomène intermittent, rythmé mais à période variable, nous utiliserons fréquemment :  Nux vomica ou Psorinum pour débloquer la psore ;  Lac caninum pour son alternance symétrique ;  Pulsatilla par son côté fluctuant ;  Phytolacca pour le côté erratique et imprévisible de la luèse.

PENDANT L'ALLAITEMENT Lactation insuffisante, douloureuse, fatigue maternelle, prise de poids insuffisante ou encore appétit excessif du nourrisson malgré un apport apparemment correct sont les principales difficultés et problèmes rencontrés lors de l'allaitement.

Lactation insuffisante Certains médicaments sont de fidèles galactagogues :  Ricinus 4 CH (mécanisme de bio-feed-back hormonal) ;  Urtica urens 4 CH (l'œdème du sein est amélioré par des applications chaudes, au contraire d'Apis) ;  Asa foetida 5 à 9 CH (nervosité, hypersensiblité, spasmodicité) ; 102

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 Millefollium 4 CH (pour les phosphoriques, car la tétée

est accompagnée de flux de lochies et fièvre de survenue facile) à prescrire seul, en alternance ou sous forme de complexe (préparation magistrale à but thérapeutique en l'absence de spécialité équivalente), à raison de quelques granules trois fois par jour chacun, et avec une efficacité attendue en moins de 48 heures. Les arrêts intempestifs de la lactation à la suite d'événements indésirables répondent aux caractéristiques habituellement rencontrées en homéopathie, et les médicaments seront prescrits comme d'habitude en dose unique ou en échelle de 9 à 30 CH :  Aconit, suite d'angoisse de mort ;  Calcarea carbonica, suite de frayeur chez une patiente carbonique ;  Chamomilla, suite de colère ;  Conium, suite d'engorgement ;  Opium, suite de frayeur ;  Pulsatilla, suite de chagrin ou de deuil ;  Phytolacca, relance de lactation chez une patiente luétique ;  Staphysagria, chagrin que la maman veut cacher à son bébé. Le fait de prendre froid peut aussi arrêter la lactation. Ce sont le plus souvent Aconit (froid sec, climatisation), Bryonia (temps chaud après des jours de froid), Dulcamara et Rhus toxicodendron (froid humide). On peut encore penser aux médicaments d'arrêt intempestif des règles. Ils sont très nombreux et nous invitons le lecteur à se reporter au répertoire. Quand la lactation est plus anarchique qu'insuffisante, on prescrit des médicaments d'erratisme :  Phytolacca 4 à 7 CH pour les seins durs et sensibles qui se vident difficilement chez une patiente luétique ;  Ignatia avec son cortège de paradoxes, chez une patiente plutôt tuberculinique ;  Lac caninum 9 CH et/ou Ricinus 9 CH pour une régulation de la prolactine. L'insuffisance de lactation est parfois plus une question de qualité que de quantité :  Calcarea carbonica en cas de lait très abondant, aqueux, chargé en lactose ; l'enfant grossit très bien mais au prix de coliques avec selles mousseuses et vertes. On recommandera en outre de ne donner qu'un seul sein par tétée, en allant jusqu'au bout de la vidange du sein, où le lait devient gras et assure la satiété ;  Calcarea phosphorica pour un lait aqueux et peu chargé en sels minéraux. Si l'enfant est lui aussi phosphorique, les besoins ne sont pas couverts et les parents en sont généralement informés grâce à un afflux de décibels ;  Carbo animalis pour un lait peu épais, début de lymphangite non douloureuse, tristesse ;  Carbo vegetabilis lors d'un manque d'élan vital, associé à un besoin de surventilation, sensation de gastralgie pendant la tétée ;

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 Lachesis lors d'un lait fluide, avec sentiment d'être

privée de liberté. La viscosité du lait peut en gêner la sécrétion et/ou l'excrétion :  Borax, Chamomilla, Phytolacca lorsque le lait est caséeux avec des microcaillots ;  Bryonia lors d'un problème de passage membranaire ;  Causticum en cas de parésie des systèmes glandulaires ;  Kalium bichromicum en cas de viscosité et de difficultés d'évacuation ;  Secale cornutum lorsque les muscles des acini sont mal irrigués avec incompétence à la contraction. Dans tous les cas on peut accompagner la prescription de Glandes mammaires, 5 granules 1 fois par jour, à la dilution adéquate. Les tisanes galactogènes sont efficaces et dépendent des plantes régionales. On peut adresser les patientes au pharmacien herboriste. L'ordonnance doit bien spécifier « espacement et arrêt des médicaments dès amélioration », sous peine de se retrouver en situation d'engorgement !

Pratiques granules au coucher, ce qui correspond à l'heure du bois et du foie en acupuncture. En s'aggravant, la patiente désire s'aliter jour et nuit (Kalium phosphoricum) ;  Sepia déprime en désirant de la solitude. Son désintérêt affectif est masqué par un sens très élevé du devoir. Là encore, nous le préconisons en miroir pour maman et bébé, car c'est un médicament de lien ;  Helonias déprime et a absolument besoin de sortir de chez elle, car elle est améliorée par l'occupation, par exemple professionnelle. Outre une faiblesse générale, elle est aggravée par le toucher et le contact. Les apports céréaliers sont efficaces contre l'épuisement des femmes qui allaitent. Classiquement Avena sativa 2 DH et Alfalfa 2 DH en association à raison de 20 gouttes midi et soir permettent de faire face à la baisse de production de fin de journée. Les céréales germées existent en préparation formule composée. On retrouve aussi Secale cornutum (ergot de seigle), Humulus (houblon, galactagogue). . .

Lactation douloureuse Fatigue maternelle Une lactation excessive peut entraîner un affaiblissement de la mère :  Calcarea carbonica s'en plaint ;  Pulsatilla ne se plaint pas, dans son euphorie d'une relation fusionnelle avec son bébé, mais il convient de préparer le sevrage ;  Cistus canadensis, antipsorique d'action profonde, c'est-à-dire de cible glandulaire, est accompagné de volumineux prolongements axillaires de la glande mammaire. Même sans hypergalactie, certaines mères se sentent épuisées par leur allaitement :  Natrum muriaticum maigrit du haut du corps mais pas du bas. Son appétit est normal, mais elle déprime et est aggravée par la consolation. Nous préconisons une administration en miroir : une dose pour la mère (9 ou 15 CH) et une dose pour le bébé (9 CH), nous en verrons plus loin la raison ;  Aletris farinosa maigrit, car perd complètement l'appétit. Rappelons qu'Aletris est aussi un draineur de l'appareil génital féminin ;  Silicea maigrit comme à son habitude, l'appétit est variable, mais la récupération, difficile, est marquée par la persistance de lochies à chaque tétée. Il lui est difficile de se remettre de la phase accouchement alors que la phase lactation est déjà commencée ;  China est un classique médicament de suites de perte de liquides organiques ;  Kalium phosphoricum a des trous de mémoire gênants. Elle a une fatigue marquée par une perte de la force vitale. Nous recommandons de prendre les

Il convient de distinguer la lactation douloureuse liée à l'engorgement, à une lymphangite, à un abcès, les douleurs locales (meurtrissure, suçon, galactophorite) et la tétée douloureuse due à une crevasse du mamelon ou une candidose du sein.

L'engorgement L'engorgement est l'une des doléances des allaitements prolongés ou répétés. Négligé, il conduit à la fièvre de lait (température élevée, syndrome grippal majeur, avec signe d'appel de mastite), voire aux « seins de marbre » où aboutissent les femmes qui ont refusé d'exécuter la prescription de mise au sein ou de vidange très partielle du sein. Accidentel et débutant, l'engorgement relève habituellement de Belladonna 9 CH en prise horaire, qui montre son efficacité en 2 à 3 prises. Dans notre expérience, nous avons été déçus par la 5 CH, ce qui nous fait penser qu'il s'agit d'un phénomène de physiopathologie régionale et non locale seule. Le sein présente un placard rouge, chaud, douloureux, en forme de part de camembert car situé sur l'acinus et suivant le trajet du canal galactophore. Pyrogenium pourra accompagner la prescription, soit en 5 CH à titre préventif, soit en 9 CH à titre préventif ou curatif. Si l'engorgement récidive, on se tournera volontiers vers Phytolacca (4-7 CH : seins durs se vidant difficilement, ou 7-9 CH : engorgement mais vidange aisée) ; ou Cistus canadensis marqué par des adénopathies axillaires. Dans notre expérience, Phytolacca est plus efficace sur les luétiques, et Cistus sur les psoriques. 103

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Pratiques La lymphangite Survenant indépendamment d'un engorgement, la lymphangite se remarque par la couleur bleue plus ou moins entourée d'un halo rouge de l'une des veines du sein. Elle relève de Rana bufo 5 CH, à raison d'une à deux prises par jour. Mais, en urgence, si le médicament n'est pas disponible, ou que la patiente présente en outre une poussée hémorroïdaire, on peut proposer une dose de Lachesis 9 CH. Ici encore, on peut prescrire Pyrogenium si l'on soupçonne une mastite infectieuse.

L'abcès du sein L'abcès du sein est, par ordre de gravité, la pathologie suivante. À ce stade, Pyrogenium est indispensable. Nous utilisons en général avec grand profit Hepar sulfur 9 CH à raison d'une dose par jour ou de 2 prises de granules par jour, pendant 3 à 4 jours. Au décours, l'abcès a commencé à réduire de volume, la douleur a quasiment disparu, il n'y a plus de suppuration et Hepar sulfur 15 CH finira de le faire disparaître, parfois aidé de Hepar sulfur 30 CH. Théoriquement, après les premiers jours de 9 CH, l'abcès peut s'aggraver et Hepar sulfur 5 CH préparerait alors la maturation en vue d'une chirurgie, mais dans notre expérience l'issue a toujours été favorable, sauf pour une seule patiente qui présentait des abcès multiples, récidivants et torpides.

La meurtrissure locale ou le suçon La tétée peut être douloureuse en raison d'une meurtrissure locale ou d'un suçon. Arnica est bien connu, mais Bellis perennis 5 CH est méconnu, alors qu'il est surnommé par certains « l'Arnica des organes génitaux ».

dos par un fil », magnifique signe d'appel homéopathique), China (la tétée est accompagnée d'une douleur dorsale et/ou dentaire), Aletris (la patiente mange pendant la tétée, par sensation de vide gastrique et se tient dans son canapé ou dans une chaise à bascule car elle est améliorée penchée en arrière).

La crevasse du sein La crevasse du sein est si douloureuse qu'elle peut compromettre un allaitement. Outre l'application de Calendula en teinture mère (TM) avec un coton-tige® ou, si elle est mal tolérée ainsi, en cataplasme, sur une compresse mouillée, plusieurs médicaments sont possibles. On peut obtenir du laboratoire tous les complexes en préparation magistrale, mais en raison du délai de fabrication sur une pathologie qui requiert un traitement rapidement efficace, nous indiquerons les formes galéniques disponibles en circuit de distribution rapide. Si la crevasse est propre, nette, en coup d'ongle, tend à saigner au fond et provoque une douleur d'écharde, on proposera Nitricum acidum en 5 à 15 CH (en granules, 3 fois par jour). Il est bien complété par Causticum 5 CH (en granules, 3 fois par jour) dont la douleur ressemble à une gerçure et s'aggrave à la tombée de la nuit, voire Petroleum (en dose) dans le cadre d'une approche du similimum. Ensemble ils traitent à la fois la crevasse du sein et les éraillures vaginales. Si la crevasse est large et de contours irréguliers, avec un suintement évoquant le miel, on pense à Graphites (granules ou crème). Castor equi (crème ou granules) est un médicament de cicatrisation en général et Ratanhia (crème ou granules) est un médicament des jonctions cutanéo-muqueuses avec prurit brûlant. Si de petites papules pruriantes sont présentes au méat des canaux galactophores, Rhus toxicodendron sera préféré.

La galactophorite La galactophorite est une inflammation du canal galactophore. Si la jonction cutanéo-muqueuse est le siège d'un prurit brûlant, Ratanhia sera proposé en crème. On peut aussi penser à Calendula (teinture mère, crème ou granules) pour ses propriétés à la fois antiseptiques et cicatrisantes. Si la galactophorite est un peu plus profonde, elle se traduit par une douleur transfixiante du mamelon (Phellandrium) qui peut aller encore plus en profondeur jusqu'à une douleur transfixiante du sein (Silicea). Chez Phytolacca 5 CH, la douleur irradie jusqu'au dos, et pour Aurum sulfuricum la douleur fait hocher la tête (key-note). La galactophorite peut être douloureuse aussi bien pendant qu'en dehors de la tétée. Pendant la tétée, la douleur peut avoir un siège différent du sein tété. C'est le cas de Borax (douleur du sein controlatéral), Chamomilla (douleur excessive irradiant à l'autre sein), Croton tiglium (« le sein est tiré dans le 104

La candidose du sein Pathologie très douloureuse du mamelon, mais méconnue et donc largement sous-diagnostiquée, la candidose du sein est due à Candida albicans. La contamination a, en général, sa source dans la bouche du bébé (muguet). Le mamelon prend alors un aspect de framboise, franchement rose foncé, et augmente de volume. Comme pour toutes les candidoses, le traitement homéopathique est à la fois local et général. Localement, on peut appliquer du violet de gentiane à 1 % ou Calendula TM. Les anti-inflammatoires sont Apis et Belladonna, éventuellement Rhus toxicodendron ou Ratanhia. Dans notre expérience, Cantharis a été très décevant, quelle qu'en soit la dilution. Le traitement antifongique est Monilia 9 CH à raison d'une dose par jour pendant 10 jours ou 5 granules, 2 fois par jour pendant 15 jours, relayé par une dose

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hebdomadaire pendant un mois, à administrer conjointement à la maman et au bébé. Pour éviter les récidives, fréquentes, on associera un traitement de fond, souvent Sepia pour la mère et Mercurius pour l'enfant. L'arrêt de l'allaitement ne diminue pas la douleur et n'accélère pas la guérison.

Prise de poids insuffisante du bébé La première précaution est de vérifier les apports, aussi bien en quantité qu'en qualité. On évalue les apports en premier lieu par les exonérations, selles et urines. Au-delà de 3 selles grumeleuses et de 4 à 6 mictions par 24 heures, les apports sont avec certitude hors de cause. Si les tétées sont trop rares (moins de 4 par 24 heures chez un enfant de moins de 2 mois), avec une impression de bébé sec ou déshydraté, le fonctionnement de l'acinus est remis en cause. La réduction du volume des cellules bordant l'acinus entraîne une perméabilité intercellulaire. Les passages membranaires en provenance des vaisseaux sanguins privilégient les sels minéraux et le lait est alors trop salé. Un enfant Natrum muriaticum ne s'en plaindra pas, il ne se plaindra même de rien puisqu'il n'aime pas être consolé, mais il dépérira ; pour peu que sa maman soit un peu débordée avec les autres enfants, le danger est réel, et c'est pour cette raison que l'on recommande aux mamans de peser leur bébé de temps en temps si les consultations médicales sont espacées. Là encore, une prescription en miroir est tout à fait indiquée, la maman recevant soit une dose, soit une échelle. Les bébés Silicea, après une grossesse inquiète marquée par un retard de croissance intra-utérin, ont des difficultés pour manger et grossir : là où on attendrait des phénomènes de rattrapage, la convalescence peine, marquée par des épisodes infectieux ou ORL à répétition. Si le bébé ne boit pas bien parce que la maman est occupée à autre chose pendant la tétée (télévision, téléphone, autres enfants. . .), des conseils et une dose de Lachesis 9 CH pourront être utiles, cette dose pourra même être proposée à la fratrie. Les bébés relevant des biothérapiques naissent souvent en petit poids, mais celui qui a le moins bon appétit est Luesinum.

Bébé affamé malgré des apports corrects Nous nous intéresserons ici aux cas où les apports sont a priori corrects. Un bébé peut manifester un appétit excessif pour plusieurs raisons : soit il a de gros besoins, soit il réclame sans cesse, soit il a une préférence pour l'alimentation nocturne. Les besoins des petits phosphoriques tuberculiniques sont importants : il faut encore plus de calories pour

Pratiques grandir en longueur qu'en largeur. Les enfants ayant pour habitude de ressembler un peu à leurs parents, la dose de Calcarea phosphorica pourra être administrée en miroir à la mère et au bébé : ces enfants nourris d'un lait manquant des corps gras qui donneront la satiété ont une double raison d'être affamés. La croissance en taille est préservée, mais il faut s'assurer d'apports suffisants en acides gras omégas 3 et 6, indispensables à la croissance cérébrale. D'autres enfants réclament sans cesse, pour s'arrêter de boire après quelques gorgées. C'est le cas des enfants Lycopodium, que l'on reconnaît à leur météorisme sous-ombilical aggravé en fin d'après-midi et en début de soirée, à leur comportement éveillé, à leur exigence du biberon chauffé quand ils sont complétés, à leur latéralité droite (torticolis) ou allant de droite à gauche (sens du côlon). Le fait de s'arrêter après quelques gorgées peut être un signe de fatigue : la tétée est un vrai travail, et d'ailleurs les bébés apprécient que leur mère les encourage du regard. Chez les enfants fatigables, un examen cytobactériologique des urines (ECBU) doit être prescrit car 8 % des bébés de 2 mois font une infection urinaire ou une pyélonéphrite. Dans notre expérience, presque tous étaient des tuberculiniques. . . Il faut savoir que le lait maternel est extrêmement antalgique. La tétée est accompagnée de production d'endorphines, précieuses en cas de reflux gastro-oesophagien. Celui-ci doit donc être recherché et éventuellement traité (Robinia, Iris versicolor, Sulfuricum acidum, Èsophage. . . en attendant l'élégante prescription du similimum). Les stomatites (à cet âge, le muguet) peuvent nécessiter des antalgiques. Parmi les bébés gloutons, on retrouve sans surprise Antimonium crudum, langue blanche posant la question d'un muguet, prise de poids excessive (> 1,2 kg/mois), comportement peu gratifiant pour la maman avec, après la tétée, vomissement de lait caillé et très mauvaise humeur. Argentum nitricum, toujours pressé, naît fréquemment en avance ou prématuré, a peur de tout et vomit le lait gras ; ses selles sont donc vertes par excès relatif de lactose ; il présente une ophtalmie purulente, comme s'il n'avait pas reçu de collyre préventif. Psorinum dépense ses calories à essayer de se réchauffer, surtout la nuit, et rejoint en cela Petroleum, Phosphorus et d'autres médicaments moins connus quoique fort efficaces sur les tout-petits : Jalapa (agitation et coliques exclusivement nocturnes), Cypripedium (enfants surstimulés le jour et qui ne peuvent plus se calmer), Abies nigra (anorexie le matin, petit appétit à midi, appétit normal le soir et boulimie nocturne). Cet appétit excessif n'est pas toujours le signe d'une pathologie. Si la fin de la grossesse a été marquée par des problèmes placentaires, l'enfant a été moins bien alimenté en vie intra-utérine et doit rattraper son retard ; mission accomplie, l'appétit se calme et la maman s'inquiète car « il ne mange pas plus qu'il y a 2 mois 105

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Pratiques et il ne grossit plus aussi bien ». Il suffit de reprendre et lisser la courbe de poids pour la rassurer, et d'un peu d'Ignatia qui suffira peut-être à la détourner d'un sevrage prématuré.

LE SEVRAGE Le sevrage est souvent aisé et la maman n'a pas forcément besoin de médicaments homéopathiques. Parfois il est plus brutal et est alors motif de consultation.

Refus, intolérance et allergie C'est le cas lorsque le bébé refuse le sein. Natrum muriaticum et Calcarea phosphorica ont un lait salé. Le lait peut être épais et donc difficile à téter, et bébé le refuse car il lui trouve mauvais goût ou mauvaise odeur (Borax, Kalium bichromicum, Phytolacca). Les médicaments sont administrés à la mère, et éventuellement en miroir à l'enfant. L'alimentation maternelle peut engendrer chez certains enfants une acidité gastrique (Magnesia carbonica), une intolérance (le sang des crevasses du sein si le lait maternel est très sanglant chez Silicea), voire une allergie (le lait pour Calcarea carbonica). Le mouvement de tétée peut être douloureux pour des raisons musculaires (Lachnantes, Arnica) ou à cause d'une stomatite (Mercurius). Rheum trouve le lait amer quand il est en période de dentition. Le sevrage peut être accompagné sur 3 ou 4 semaines (Phytolacca 4 CH), ou un tout petit peu plus rapidement (Phytolacca 6 DH en granules). Si la maman a du mal à s'y résoudre, Pulsatilla 9 CH l'aidera.

Alternative à l'allaitement Dans le cas où le sevrage doit être immédiat, on donnera des médicaments d'alternative à l'allaitement, éventuellement accompagnés de médicaments de séparation ou de deuil. Parfois la galactorrhée se prolonge très au-delà de la fin de l'allaitement. Seront alors utiles les médicaments du syndrome aménorrhée-galactorrhée : Actaea racemosa, Ricinus, Lac caninum, Hypophyse, Prolactinum. En reprenant la physiologie de la lactation, on retrouve les médicaments hormonaux à dilution freinatrice (Ricinus 30 CH, Prolactinum 30 CH, Lac caninum 9 CH,

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Glandes mammaires 30 CH). On peut aussi utiliser des médicaments de sein comme Phytolacca (1 DH, 4 granules 3 fois par jour) ; Lac caninum 9 CH, car il faut plutôt réguler ; Lac defloratum chez une migraineuse ; Conium 9 CH si le sein à tendance à involuer et se flétrir. Les médicaments de terrain seront également précieux pour endiguer les flots lactés de Calcarea carbonica et Pulsatilla, et accompagner le conflit d'intérêt entre désir et devoir chez Sepia. Si une mastite survient malgré tout, le bandage des seins, Apis, Bryonia et Belladonna auront grand avantage à avoir été prescrits d'avance, comme pour les femmes qui avaient prévu d'allaiter. Déclaration d'intérêts L'auteur déclare ne pas avoir de conflits d'intérêts en relation avec cet article.

POUR EN SAVOIR PLUS Berrebi A, Parant O, Ferval F, Thene M, Ayoubi JM, Connan L, et al. Traitement de la douleur de la montée laiteuse non souhaitée par homéopathie dans le post-partum immédiat. Journal de gynécologie obstétrique et de biologie de la reproduction 2001;30:353–7. Boericke W. Matière médicale. 9e éd. Paris: Similia; 2003. Coulamy A, Jousset C. Basses dilutions et drainages homéopathiques. Paris: Similia; 2000. Deltombe M. L'allaitement maternel et la sémiologie mère-enfant. La Revue d'Homéopathie 2010;1(4):124. Deltombe M, Jagerschmidt G. Le tout-petit et l'homéopathie. Paris: Similia; 2000. De Mattos L. Homéopathie et gynécologie. Paris: Similia; 1987. Greco J. Homéopathie en gynécologie. Paris: Maloine; 1988. Lamothe J. Homéopathie pédiatrique. Paris: Similia; 1998. Moreau-Delgado F. Manuel pratique d'homéopathie en gynécologieobstétrique. Paris: Iprédis; 1995. Petit P. L'allaitement et ses problèmes. Les cahiers de biothérapie 2003;(184):36–9. Pigeot CA. Traité de gynécologie homéopathique. Paris: Similia; 1992. Rocher C. Homéopathie : la femme enceinte. Paris: Marabout; 2003. Tétau M. Les constitutions homéopathiques. Paris: Similia; 2007. Tétau M. Les diathèses homéopathiques. Paris: Similia; 1996. Voisin H. Matière médicale du praticien homéopathe. Paris: Maloine; 2003.