Int. J. Insect Morphol. & Embryol. 4 (1): 77-88. 1975. Pergamon Press. Printed in Great Britain.
ANATOMIE ET HISTOLOGIE DES GLANDES ANNEXES MALES AU COURS DE LA VIE IMAGINALE CHEZ A C A N T H O S C E L I D E S OBTECTUS SAY (COLEOPTERA : BRUCHIDAE) J. HUIGNARD Laboratoire d'Ecologie exp6rimentale, Universit6 de Tours, Avenue Monge, Parc. Grand'mont 37200 Tours, France
(Accepted 23 July 1974) Abstract--Acanthoscelides obtectus males have 5 pairs of paragonia: the median, internal or external glands, the lateral glands, the tubular glands and the inferior glands. Their secretions are composed of proteins or mucopolysaccharids; lipids are absent. The tubular glands discharge their secretion into the lateral glands. The seminal vesicles also open into the lateral glands. The secretory activity of the paragonia changes during the life of males. The young males or the mating males, which produce many spermatophores, have glands with high and wide cells, but the lumens are reduced and empty. These cells have a basophilic cytoplasm (median, lateral or inferior glands) or a PAS-staining cytoplasm (tubular glands), and incorporate sodium radiosulfate (NazS3504) injected into the male abdomen. The 10-day-old, unmated males have secretions in the gland lumen and the epithelium becomes flat and stainless. These cells do not incorporate sodium radiosulfate, and their secretory activity is very low. Origins of these secretory activity variations are unknown. Index descriptors (in addition to those in the title): Paragonia, mucopolysaccharids, glandular cells, isotope incorporation, secretory activity. INTRODUCTION
CHEZ LA bruche d u h a r i c o t (Acanthoscelides obtectus), certaines s6cr6tions m~des d6pos6es dans le s p e r m a t o p h o r e au m o m e n t de la c o p u l a t i o n peuvent stimuler l'ovogen~se p a r voie h u m o r a l e ( H u i g n a r d , 1969, 1973). Ces s6cr6tions, 61abor6es p a r les glandes annexes males ont, en effet, acquis un r61e de signal et r6gularisent ainsi l'activit6 r e p r o d u c t r i c e des femelles. Les glandes annexes m~tles d'Acanthoscelides obtectus, qui ont donc un r61e physiologique i m p o r t a n t , seront 6tudi6es au cours de ce travail. MATERIEL
ET M E T H O D E S
Les glandes annexes sont pr61ev6es p a r dissection dans l ' a b d o m e n des males puis sont fix6es au C a r n o y , au Bouin ou au Bouin alcoolique. Les techniques utilisdes sont d6crites dans les livres de R. et M. M a r t o j a (1967) et de M. G a b e (1968).
1. Recherches topographiques C o l o r a t i o n au t r i c h r o m e de M a s s o n (variante G o l d n e r ) , 5_ l ' A z a n , au F e u l g e n - P i c r o i n d i g o c a r m i n ou au M a n n - D o m i n i c i . 77
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2. Recherches histochimiques -Ddtection des polysaccharides: PAS apr6s ac6tylation r6versible, Carmin de Best. -DOtection des mucopolysaccharides: Hydrate de fer colloidal par la m6thode de Rinehart et Abul-Haj, coloration au jaune et bleu Alcian pH = 0.5, coloration m6tachromatique. -Ddtection des protdines et des amino acides: Alloxane-Schiff, Tetrazor6action de Danielli, r6action de Tanzer et Pearse au 2-4 dinitro fluorobenz~ne, r6action de Barnett et Seligman au D.D.D., r6action de Morel et Sisley (variante Lillie), r6action de Lison et Pinheiro, r6action de Baker h l'a naphtol. -Ddtection des lipides: Recherches in toto sur les organes fix6s au formol-calcium et coior6s au noir soudan B, au rouge soudan III, au bleu du Nil (m6thode de Meuschik). -Etude des acides nucldiques: Vert de m6thyle-pyronine et test de Brachet/t la ribonucl6ase. 3. Etudes uhrastructurales Les glandes annexes incluses dans un petit cube de g61ose (ce qui facilite leur manipulation) sont fix6es dans de la glutarald6hyde h 2% dilu6e dans du tampon cacodylate (pH : 7.4) pendant 12 hr Elles sont ensuite postfix6es I hr dans du t6troxyde d'osmium tamponn6 par le cacodylate puis incluses dans l'6pon. Les coupes contrast6es par l'uranyle-plomb sont observ6es 5. l'aide d'un microscope Philips EM 300. 4. Etudes autoradiographiques Du radiosulfate de sodium (Na 283504), dissous dans du liquide physiologique, ayant une activit6 volum6trique de 3 microcuries par millilitre est inject6 dans l'abdomen des males. Chaque insecte reqoit un microlitre de solution radioactive, puis les glandes sont pr61ev6es 24 hr apr6s l'injection. Les glandes sont fix6es au Carnoy, car les fixateurs aqueux ~t base de formol, conservent mal le radiosulfate (Martoja, 1966). Les coupes 6paisses de 5 microns sont color6es au Feulgen, au PAS, ou au Vert de m6thyle-pyronine, puis sont recouvertes par l'6mulsion pelliculable Kodak AR 10 (m6thode du stripping-film). La radioactivit6 est r6v616e apr~s une exposition de 15 jours. OBSERVATIONS Etude anatomique et histochimique des glandes annexes I1 y a cinq paires de glandes annexes males chez Acanthoscelides obtectus (Fig. 1). 1. Les glandes mddianes externes et internes (I .2), cylindriques, sont allong6es, elles contiennent une s6cr~tion blanchtttre tr~s visqueuse qui est d6vers6e dans les canaux d6f6rents lat6raux. Les glandes m6dianes externes produisent une s6cr6tion riche en mucopolysaccharides acides (surtout localis6s dans la zone p6riph6rique) et en prot6ines sulfhydril6es (abondantes dans la zone centrale). Les glandes m6dianes internes 61aborent une s6cr6tion finement granuleuse de nature prot6ique, contenant notamment de la tyrosine. 2. Les glandes tubuleuses sont tr~s d6velopp6es (3 A); elles sont form6es de tubes ramifi6s dont le diam~tre reste constant. Leur s6cr6tion hyaline a toujours l'aspect d'une trame mailles serr6es apr~s fixation au Bouin ou au Carnoy; elle est form6e de mucopolysaccharides acides carboxyl6s ou sulfat6s et de prot6ines riches en tyrosine. Cette s6cr6tion s'accumule dans un canal collecteur (3 B) qui s'ouvre h la base de la glande lat6rale correspondante.
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6 ,I0 Pll
FIG. 1. Glandes annexes males d'Acanthoscelides obtectus (vue dorsale) 1. gl. mfdiane externe: 2. gl. m6diane interne ; 3(A) gl. tubuleuse; 3(B) canal collecteur des gl. tubuleuses; 4. gl. latfrale; 5. gl. inffrieure; 6. testicule; 7. vfsicule sfminale; 8. ductus ejaculatorius; 9. bulbe 6jaculateur; 10. aedeagus; 11 ; endophallus.
CYT. BAS EP. F.P. GR. SE. GR. PAS. L. M.P. MV. N.
Abreviations utilisees dans les figures: Cytoplasme basophile; P.M. Paroi conjonctivo -musculaire; Epithelium SEC. Sfcrftion; Flaque prot~ique; TR. Sfcrftion en trame; Granule de Sfcrftion; V.S. Vfsicule sfminale. Grains PAS + ; V. Vacuole Lumifre; MED. EXT. Glande mfdiane externe Membrane plasmique; MED. INT. Glande mfdiane interne Microvillositf; PAp. Pfle apical Noyau;
3. Les glandes latdrales (4) ovoides, s'ouvrent ~, l'extrfmit6 des canaux dfffrents. Leur sfcrftion hftfrog~ne, est f o r m f e d ' u n e trame h mailles serrfes et de granules surtout abondants ~, la base des glandes. La trame riche en mucopolysaccharides et en protfines est analogue ~ celle trouvfe dans les glandes tubuleuses, tandis que les granules de nature protfique contiennent des acides aminfs soufrfs, de l'arginine et des groupements indols. Les vfsicules sfminales (7) et le canal collecteur des glandes tubuleuses (3 B) aboutissent/a la base des glandes latfrales. 4. Les glandes inf6rieures (5), moins dfveloppfes, sont facilement reconnaissables grfice leur sfcr6tion opalescente de nature protEique. O n peut dfceler ~ ce niveau la prfsence d'acides aminfs soufrfs, d'arginine et de groupements indols. Les glandes inffrieures s'ouvrent dans les canaux dfffrents latfraux entre les glandes mfdianes externes et les glandes latfrales. Les sfcrftions trouvfes dans les glandes annexes m~les d'A. obtectus sont donc formfes de mucopolysaccharides acides carboxylfs ou sulfatfs et de protfines riches en acides aminfs soufr6s ou en tyrosine. Elles ne contiennent jamais de lipides, toutes les rfactions utilisfes se sont, en effet, r~vfl~es negatives apr~s v~rification de leur sp~cificitf.
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Relations entre glandes latdrales et glandes tubuleuses Ces deux glandes, qui ont des relations anatomiques &roites, contiennent la m6me s6cr6tion "en trame" riche en prot6ines et en mucopolysaccharides acides. Cette s6cr6tion peut ~tre 61abor6e par les deux glandes ou par I'une d'entre elles. Une ablation des glandes tubuleuses a 6t6 r6alis6e afin d'6tudier ce probl6me.
I. M(thode employee L'ablation est faite apr6s la mue imaginale Iorsque le t6gument est encore mou. Une incision est pratiqu6e ventralement, au niveau de l'articulation s6parant les sternites abdominaux 3 et 4 puis une 16g6re pression est exerc6e sur l'abdomen. Les glandes tubuleuses situ6es contre le t6gument font alors saillie. Elles sont sectionn6es ~ la base du canal collecteur et retir6es du corps de l'insecte. La plaie est soigneusement referm6e puis recouverte d'une mince couche de vernis, 6vitant ainsi les pertes d'h6molymphe.
2. R~sultats (Fig. 2) 30 m~les ont subi une ablation unilat6rale des glandes tubuleuses; 27 ont v6cu et ont pu s'accoupler. Lorsque ces m~tles sont diss6qu6s 10 jours plus tard, la glande lat6rale situ6e du c6t6 op6r6 (A) est tr~s r6duite; sa lumi~re contient des flaques prot6iques, mais, la s6cr6tion "en trame" est absente. Ls glande lat6rale situ6e du c6t6 oppos6 (B) reli6e normalement au canal collecteur des glandes tubuleuses, est, par contre, distendue et contient les 2 types de s6cr6tions.
FIG. 2. Glandes Laterales dix jours apres l'ablation des glandes tubuleuses du c6t6 droit. Bouin - PAS h6matoxyline La s6cr6tion en trame est donc produite par les glandes tubuleuses, elle s'accumule dans le canal collecteur puis p6n~tre dans la lumi~re de ia glande lat6rale correspondante. Les flaques prot6iques, qui continuent ~ &re synth6tis6es m~me apr~s l'ablation des glandes tubuleuses, sont 61abor6es par les glandes lat6rales qui ont leur propre activit6 s6cr&rice.
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DES G L A N D E S A N N E X E S
L'6pith61ium s6cr6teur qui limite les glandes annexes m~des est form6 d'une seule couche de cellules, doubl6e ext6rieurement par une tunique conjonctivo-musculaire. Evolution de I'~pithelium sdcrdteur chez des m~les vierges au cours de la vie imaginale 1. Glandes annexes preldvdes au moment de la mue imaginale (Fig. 3(a. b. c)). Elles sont limit6es p a r des cellules hautes (20 h 30/z) et larges (15 ~t 20/~), mais leur lumi6re est pratiquement vide. L'6pith61ium des glandes m6dianes, lat6rales et inf6rieures est form6 de cellules ayant un cytoplasme fortement basophile, riche en A R N (cette basophilie disparait, en effet, apr6s action de la ribonucl6ase). Les cellules des glandes tubuleuses ont, par contre, un cytoplasme faiblement basophile, qui contient de n o m b r e u x granules PAS -~. Les noyaux des cellules glandulaires sont situ6s dans la r6gion centrale (cas des glandes m6dianes,
FIG. 3. Evolution de l'6pithelium s6cr6teur des glandes annexes au cours de la vie imaginale chez les males vierges--gl, m6dianes chez un male de 0 jour (a), 5 jours (d), 10 jours (g); --gl. lat6rales chez un m~le de 0 jour (b), 5 jours (e), 10 jours (h); --gl. tubuleuses chez un m~le de 0 jour (c), 5 jours (f), l0 jours (i). Bouin--PAS h6matoxyline ou Azan
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lat6rales et inf6rieures) ou dans la r6gion apicale (cas des glandes tubuleuses); leur chromatine est r6partie en mottes denses ~t l'int6rieur du nucl6oplasme. On remarque au p61e apical des cellules des glandes m6dianes, lat6rales et inf6rieures des microvillosit6s (Fig. 4 ( b e t a) ), entre lesquelles sont d6vers6s les granules de s6cr6tion qui vont s'accumuler dans la lumi6re des glandes. Par contre, ces microvillosit6s sont absentes au niveau des glandes tubuleuses (Fig. 4 (c)).
2. Glandes annexes de males vierges dgOs de 5 jours (Fig. 3 (d. e. f) ) On observe une r6duction notable de l'6paisseur des parois glandulaires tandis que les s6cr6tions s'accumulent dans les lumi6res. Les cellules sont, en effet, moins hautes (10 h 15/z) mais plus larges; leur n o y a u est repouss6 vers le p61e basal dans les glandes m6dianes et lat6rales, il reste localis6 pros de la r6gion apicale dans le cas des glandes tubuleuses. Cependant, leur cytoplasme pr6sente les m~mes affinit6s tinctoriales que dans les cellules glandulaires, examin6es au m o m e n t de la mue imaginale.
FIG. 4. Diff6renciation de la membrane plasmique au p61e apical (a) P61e apical des cellules s6cr6trices des glandes lat6rales au moment de la mue imaginale avec microvillosit6s; (b) P61e apical des cellules s6cr6trices des glandes m6dianes au moment de la mue imaginale avec microvillosit6s; (c) P61e apical des cellules s6cr6trices des glandes tubuleuses au moment de la mue imaginale. La membrane plasmique ne pr6sente aucune diff6renciation ~t ce niveau; (d) P61e apical des cellules s6cr6trices des glandes m6dianes chez un m~le vierge ~g6 de 10 jours. Echelle en microns (mi).
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3. Glandes annexes de males vierges ages de lO jours (Fig. 3 (g. h. i) ) Les glandes contiennent une quantit6 importante de s6cr6tions, mais l'6pith61ium est tr~s aplati (4/t 5/z). Le cytoplasme des cellules glandulaires devient parfois vacuolaire (Fig. 3 (g)) et n'est plus colorable; leur noyau comprim6 poss6de une chromatine dense. On observe encore des microvillosit6s au p61e apical des ceUules des glandes m6dianes et lat6rales mais il n'y a plus de granules de s6cr6tion ~. ce niveau (Fig. 4 (d)). L'6pith61ium des glandes inf6rieures r6gresse moins que celui des autres glandes; les cellules, hautes de 10 h 15/z, ont toujours un cytoplasme fortement basophile. Evolution de l'dpithelium s~crdteur chez les males ayant une activitO sexuelle --Experiences. 20 mtdes sont maintenus vierges pendant les huit premiers jours de la vie imaginale, puis chacun d'entre eux est mis en pr6sence de 10 femeUes pendant 48 heures. Ils 6mettent durant cette p6riode 7 ou 8 spermatophores, qui contiennent les diverses s6cr6tions 61abor6es par les glandes annexes males (Huignard, 1973). -10 m~des sont diss6qu6s le jour 10 apr~s cette phase d'activit6 sexuelle importante; -10 m~tles sont isol6s apr~s cette phase d'activit6 sexuelle et sont diss6qu6s 3 ou 6 jours plus tard. Rdsultats. Avant d'etre mis en pr6sence des femelles, les males poss~dent des glandes annexes limit6es par un 6pith61ium aplati et contenant une quantit6 importante de s6cr6tions. 1. Males diss~quOs lejour 10: La lumi~re des glandes m6dianes, lat6rales et tubuleuses est pratiquement vide (Fig. 5 (a. b. c) ), mais l'6pith61ium est tr6s d6velopp6. Les cellules hautes (20 h 30/z) et larges (15 h 20/~) poss~dent un cytoplasme fortement basophile (cas des glandes m6dianes et lat6rales) ou riche en granules PAS -I- (cas des glandes tubuleuses). Les glandes inf6rieures, par contre, 6voluent peu; leur lumi~re contient toujours des s6cr6tions, et l'6pith61ium ale m~me aspect que chez les m~tles vierges 6tudi6s au d6but de l'exp6rience. 2. Males diss6qu~s aprds la pdriode d'isolement: Les s6cr6tions sont ~t nouveau pr6sentes dans les lumi~res glandulaires, et l'6pith61ium d'abord volumineux (Fig. 5 (d. e. f) ), r6gresse progressivement. Apr~s une p6riode d'isolement de 6 jours, les cellules sont 5. nouveau aplaties tandis que leur cytoplasme devient peu colorable (Fig. 5 (g. h. i) ). Les glandes inf6rieures ne changent pas durant cette p6riode. Apr~s la p6riode d'isolement qui suit la phase d'activit6 sexuelle, l'6pith61ium des glandes m6dianes lat6rales et tubuleuses 6volue donc de la mSme faqon que chez les males vierges. Toutes ces observations montrent que la structure des glandes annexes males peut varier au cours de la vie imaginale. Chez les m,~les jeunes ou chez les m~des ayant une activit6 sexuelle importante et, produisant ainsi de nombreux spermatophores, les cellules glandulaires sont hautes et larges, tandis que leur cytoplasme est fortement colorable. Par contre, chez les males n'ayant aucune activit6 sexueUe pendant une p6riode prolong6e, les s6cr6tions non utilis6es s'accumulent dans la lumi~re des glandes annexes, tandis que l'6pith61ium r6gresse. Ces transformations r6versibles semblent avoir une signification fonctionnelle. L'incorporation au niveau des glandes annexes d'un radioisotope inject6 dans l'abdomen des males ~t diff6rents moments de la vie imaginale doit permettre de pr6ciser ce ph6nom6ne. Incorporation du radiosulfate de sodium au cours de la vie imaginale chez les males vierges Martoja (1966) a montr6 que du radiosulfate de sodium, inject6 dans l'abdomen des males d'Orthopt~res, 6tait incorpor6 par les glandes annexes, au niveau des prot6ines ou des sulfomucopolysaccharides. Ce radioisotope a donc 6t6 utilis6 chez A. obtectus. Du
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radiosulfate dissous dans d u liquide physiologique, a y a n t une activit6 sp6cifique de 3 microcuries p a r millilitre, est inject6 dans F a b d o m e n des m~des ~t diff6rents m o m e n t s de la vie imaginale. (a) Injection de radiosulfate au moment de la vie imaginale (Fig. 6 (a b c) ) Le c y t o p l a s m e des cellules glandulaires est nettement marqu6, mais on observe surtout
Ft6. 5. Evolution des glandes annexes au cours de l'exp6rience --Glande m6diane (a), lat6rale (b), tubuleuse (c), le jour 10 apr+s la phase d'activit6 sexuelle; --Glande m6diane (d), lat6rale (e), tubuleuse (f), apr6s la p6riode d'isolement de 3 jours; --Glande m6diane (g), lat6rale (h), tubuleuse (i), apr~s la pbriode d'isolement de 6 jours. N.B. Remarquer (h) la liaison entre v6sicule s6minale et glande lat6rale. Bouin--PAS h6matoxyline ou Azan.
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FIG. 6. Incorporation du radiosulfate de sodium au niveau des glandes annexes - - G l a n d e s m6dianes (a), lat6rales (b), tubuleuses (c), fix6es apr~s une injection au moment de la mue imaginale; - - G l a n d e s m6dianes (d), lat&ale (e), tubuleuse (f), fix6es apr~s une injection chez des rubles hg6s de 5 jours; - - G l a n d e s m6dianes (g), lat6rale (h), tubuleuse (i), fix6es apr~s une injection chez des mfiles hg6s de l0 jours. C a r n o y - - V e r t de m6thyle pyronine.
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une radioactivit6 importante dans la s6cr6tion en "forme de trame" accumul6e dans les glandes lat6rales, dans les glandes tubuleuses et dans la s6cr6tion p6riph6rique des glandes m6dianes externes. Par contre, les granules prot6iques trouv6s dans les glandes lat6rales, les s6cr6tions des glandes m6dianes internes et inf6rieures ne sont pas radioactifs. Le radiosulfate a donc 6t6 incorpor6 tr~s rapidement par les glandes annexes au moment de la mue imaginale. On peut constater que ce sont les s6cr6tions riches en mucopolysaccharides acides et en prot6ines qui deviennent radioactives. Cependent, le marquage n'apparaR pas lorsque les coupes sont trait6es avant le couchage de l'6mulsion dans le m61ange alcool m6thylique absolu (100 ml)acide chlorhydrique concentr6 (0.8 ml) pendant 4 heures ~ 60°C. Ce traitement tr~s s61ectifdissocie en effet les sulfomucopolysaccharides(Kantor et Schubert, 1957; Spiecer, 1960; Martoja, 1966). La radioactivit6 persiste, par contre, lorsque les coupes subissent l'action de l'acide nitrique ~ 2 % qui provoque l'hydrolyse des prot6ines. Ces r6actions de contr61e montrent que les ions sulfates sont incorpor6s par les glandes m6dianes externes et par les glandes tubuleuses (qui produisent seules la s6cr6tion en trame) au niveau des sulfomucopolysaccharides. I1 n'y a aucune conversion de soufre min6ral en soufre organique dans les glandes annexes males d'Acanthoscelides obtectus. (b) Injection de radiosulfate de sodium chez des males vierges agds de 5 jours (Fig. 6(d. e. f)) On observe alors une radioactivit6 importante dans les glandes m6dianes externes, dans les glandes lat6rales et dans les glandes tubuleuses. Cette radioactivit6 disparait apr~s le traitement des coupes par le m61ange alcool m6thylique absolu-acide chlorhydrique. Ces glandes incorporent doric le soufre radioactif qui se fixe au niveau des sulfomucopolysaccharides. (c) Injection de radiosulfate de sodium chez des males vierges ag6s de lOjours (Fig. 6 (g. h. i)) A cet age, les glandes annexes distendues, contiennent une quantit6 importante de s6cr6tions et sont limit6es par un 6pith61ium mince. On constate alors que les glandes annexes n'incorporent pratiquement plus le radiosulfate inject& Les s6cr6tions trouv6es dans les glandes m6dianes externes, dans les glandes lat6rales et dans les glandes tubuleuses ont, en effet, une radioactivit6 r6duite.
DISCUSSION
Les glandes annexes mfiles ont 6t6 assez peu 6tudi6es chez les insectes, mais les recherches histochimiques entreprises dans quelques ordres aboutissent aux mSmes r6sultats que chez Acanthoscelides obtectus. On observe toujours des s6cr6tions form6es de mucopolysaccharides acides et de prot6ines, chez Locusta migratoria (Odhiambo, 1969; Cantacuz~ne, 1971), chez Blatellagermanica (Ballan-Dufranqais, 1968), chez Popilliajaponica (Anderson, 1950), chez L ytta nuttali (Gerber et al., 1971), chez A crolepia assectella (Thibout, 1971), chez Apis mellifica (Ruttner, 1968), chez Formica polyctena (Jeantet, 1972) et chez Musca domestica (Leopold et al., 1971). Cependant, des lipides ou des phospholipides, absents chez A. obtectus, ont 6t6 signal6s dans les glandes annexes de Popilliajaponica, Lytta nuttali et Acrolepia assectella. Mann (1964) constate que la plupart des s6cr6tions 61abor6es par les glandes annexes males, aussi bien chez les vert6br6s que chez les invert6br6s, ont la m~me constitution chimique. Elles ont d'ailleurs la m~me fonction puisqu'elles permettent le transfert des spermatozoides dans les voles g6nitales males et leur apportent peut-~tre des 616ments 6nerg6tiques indispensables. Elles peuvent acqu6rir secondairement d'autres fonctions chez les insectes.
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L'activit6 s6cr6trice des glandes annexes m~.les 6volue au cours de la vie imaginale chez A. obtectus; les observations cytologiques, confirm6es gfftce 5_l'utilisation d'un radioisotope permettent de distinguer: (a) une phase de sdcrOtion (chez les m~tles jeunes ou chez les males ayant une activit6 sexuelle 61ev6e), durant laquelle les cellules glandulaires volumineuses incorporent intens6ment le radioisotope. Les s6cr6tions ainsi 61abor6es sont ensuite extrud6es dans les lumi6res glandulaires. (b) Une phase d'inactivitd s~crdtrice (chez les m~tles ne produisant aucun spermatophore durant une p6riode prolong6e), au cours de laquelle les cellules glandulaires tr6s aplaties n'incorporent plus ou incorporent faiblement le radioisotope. Ces variations de l'activit6 s6cr6trice des cellules glandulaires sont probablement li6es 5_ des modifications ultrastructurales qui seront 6tudi6es ult6rieurement. De telles variations ont 6t6 observ6es dans les glandes annexes males des vert6br6s apr6s castration puis injection d'hormones androg~nes (Price et Williams, 1964; Dahl et Kjaerheim, 1973 a, b). La castration est en effet, suivie d'une diminution de la taille des cellules, s'accompagnant d'un tassement du reticulum endoplasmique, d'une r6duction importante du corps de Golgi et du nombre de granules de s6cr6tion dans le cytoplasme. L'injection d'hormones rn~tles provoque toujours un nouvel accroissement de l'6pith61ium glandulaire, dfi au d6veloppement des organites cytoplasmiques. I1 n'y a pas de relations entre l'activit6 des glandes annexes et celle des testicules chez A. obtectus puisque la castration n'emp~che pas la synth~se des s6cr6tions males (Huignard, 1973). Ce ph6nom~ne semble assez g6n6ral chez les insectes. Cependant, l'activit6 s6cr6trice des glandes annexes m~tles peut ~tre contr616e par les corpora allata chez Rhodniusprolixus (Wigglesworth, 1936) Leucophea maderae (Scharrer, 1946), Schistocerca gregaria (Cantacuz6ne, 1967) Leptinotarsa decemlineata (De Loof et Lagasse, 1972). Chez tous ces insectes, en effet, l'allatectomie est suivie d'une r6gression des glandes annexes males. Une telle 6tude n'a pu &re entreprise chez A. obtectus et les causes de ces variations de l'activit6 s6crftrice que nous avons pu observer au cours de ce travail, sont, jusqu'5_ pr6sent, hypoth6tiques.
RESUME Les males d'Acanthoscelides obtectus ont 5 paires de glandes annexes; les glandes m6dianes externes et internes, les glandes lat6rales, les glandes tubuleuses, les glandes inf6rieures. Leurs s6cr6tions sont des m61anges complexes de prot6ines et de mucopolysaccharides sulfat6s ou carboxyl6s mais elles ne contiennent jamais de lipides. Les glandes tubuleuses et ies v6sicules s6minales s'ouvrent 5- la base des glandes lat6rales. Ces glandes re~oivent les s6cr6tions 61abor6es par les glandes tubuleuses mais produisent 6galement leur propre s6cr6tion. L'activit6 s6cr6trice des glandes annexes varie au cours de la vie des m~tles. Chez les m~tles jeunes ou chez les m~.les ayant une activit6 sexuelle importante et produisant ainsi de nombreux spermatophores, les cellules glandulaires hautes et larges ont un pouvoir de synth6se 61ev6; elles incorporent intens6ment le radiosulfate de sodium inject6 dans l'abdomen des insectes. Chez les mS.les maintenus vierges pendant une dur6e prolong6e, les cellules s'aplatissent tandis que les lumi6res des glandes sont remplies de s6crftions. L' activit6 s6cr6trice des cellules glandulaires, qui n'incorporent plus le radiosulfate 5_ ce moment, est tr6s r6duite. Les facteurs responsables de ces variations de l'activit6 s6cr6trice ne sont pas connus chez. A. obtectus.
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J. HURINARD BIBLIOGRAPHIE
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