Chirurgie 1999; 124: 87-94 Q Elsevier, Paris
Historique
Antoine Joseph Jobert de Lamballe 1799-1867 M. Guivarc’h
Cent trente ans apres sa mort, le nom d’Antoine Joseph Jobert de Lamballe reste attache aux bases actuelles des sutures intestinales, de la chirurgie plastique et a l’introduction de l’anesthesie a l’hopital. Fascinante est l’histoire de cet homme fruste, venu de rien pour atteindre le pinacle, dans une periode meditale exceptionnelle &endue sur deux republiques,
Figure 1. Antoine-Joseph Jobert de Lamballe en 1858 par E. Giraud (avec l’autorisation de 1’AcadCmie nationale de mkdecine).
6loge pronon& au cows de la sCancesolennelle de 1’Acadkmie nationale de chirurgie le 20 janvier 1998
trois royaumes et deux empires ou Paris fut la Mecque du monde medical. Son enfance parait promise a la misere, d’abord a Matignon dans les CBtes-du-Nord oti il nait le 26 frimaire an VIII, 17 decembre 1799, sur la paille et dans le froid, puis a Lamballe oti son p&e, soldat devenu ouvrier chapelier vegete dans la gene, la promiscuite d’une famille de huit enfants entassee dans un logis Ctroit du quartier insalubre des tanneurs. 11va pourtant Cchapper a cette misere, grace a une vive intelligence, a son gout du travail, a son am&rite qui lui valent trois rencontres providentielles. A une vieille demoiselle catechiste, il doit de savoir lire et Ccrire couramment a sept ans, ce qui est alors aussi peu frequent qu’aujourd’hui. Un vieux pretre de 80 ans, Micault de Souleville, ex-chanoine assagi apres un parcours agite tres revolutionnaire, mais un esprit Cclaire au sens du XVIII” siecle, le recueille chez lui, lui enseigne le grec et le latin, et lui legue 6 000 francs or pour faire ses quatre annees d’etudes de medecine. Un jeune medetin lamballais, le docteur Bedel se charge de le guider, de lui donner des notions d’anatomie et de medecine de campagne, et le recueille. Le college municipal complete ma1une education rudimentaire dont les lacuries au plan culture1 et relationnel peseront toute sa vie sur ses comportements extramedicaux. Enfin il obtient son baccalaureat, obligatoire depuis 1808 pour etre docteur en medecine, son r&e d’adolescent. Au milieu de 1819, la diligence des Messageries le depose #audebut de la rue de Vaugirard, a la jonction de la rue Monsieur le Prince et de la Harpe. 11vit dans une chambre sous les toits, mene une vie frugale, mais il est proche de la faculte, des pavillons de dissection. Sajoie est pendant quelques mois temie par l’annonce d’un pro&s intent6 par les heritiers de l’abbe au
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docteur Bedel, pro&s gagnCmais qui Ccorne son legs ?I4 700 francs. A l’hbpital Saint-Louis, oh l’a conduit une recommandation B la M&e SupCrieure de l’hbpital, il est pris en charge, et pour longtemps, par Richerand et par Jules Cloquet son assistant. L’hbpital, depuis la RCvolution, est devenu le creuset du savoir mCdica1,ofi l’ktudiant apprend l’examen, l’autopsie, la mkthode anatomoclinique. La crkation du Conseil g&n&al des hospices, le recrutement au contours des chefs de service, des externes et des internes en 1802, y attire des postulants Venus de toute la France, form& B la pratique sur les champs de bataille de la RCvolution et de 1’Empire avec un esprit nouveau de travail en kquipe. La facultk avec la devise de Fourtroy <
sa fonction. Jobert loge en Salle de garde, & SaintLouis aux Enfants, BBic&re, BSaint-Antoine, BSaintLouis encore. Solitaire, tacitume, ma1 ?i l’aise parmi ses collkgues issus de milieux ai&, peu port6 sur les chansons B boire, il se fait de solides amis, dont Cazenave, mais dkjh quelques inimitiks par un mklange de timidit& de rudesse et de supkrioritk. Saint-Louis, 800 lits, annexe de I’HGtel-Dieu, aCrke, moderne, Cclairke au gaz, reqoit les urgences de ce quartier populaire et Cmeutier du faubourg du Temple et du boulevard du Crime. C’est B Saint-Louis qu’il dCbute d&s 1823, l’expkrimentation sur l’animal d’une technique des sutures intestinales, dont l’affrontement exact des lkvres ou des tranches d’adossement et d’invagination des &reuses et leur rkunion par des points de fils cirks. no& et coup& restent les bases de notre actuelle chirurgie visckrale. Son memoire sur les plaies et les sutures du canal intestinal de 1828 lui vaudra un prix de 1’AcadCmie des Sciences. En 1829 il publie un trait6 des maladies chirurgicales du canal intestinal eni deux volumes, qui envisage notamment les anomalies congknitales, imperforation anale, mCga-recturn, les plaies extCriorisCes ou non, opkkes par voie Clective, les corps &rangers bloquks, les hernies CtranglCes,les colostomies. En 1823, l’hostilitk des ktudiants ti la mainmise de l’figlise sur l’universitk amkne la fermeture de la facult& la rkvocation de I 1 professeurs jug& opposants au Roi, la crkation de 36 agrCgCsen trois sections de mkdecine, chirurgie et sciences accessoires dont l’anatomie. C’est la chance de Jobert dont la vie se prkcipite : aide d’anatomie, prosecteur ri la facultk, docteur en 1828 avec une thkse sur les hkmorro’ides, il est en 1829 nommC Professeur Agrkgk d’anatomie, et ce qui est plus prestigieux encore socialement et matCriellement, chirurgien du bureau central des h8pitaux. La rkvolution de 1830 de juillet va chasser Charles X. amener Louis Philippe au pouvoir B la fureur des RCpublicains, et Jobert au premier plan qui opkre B Saint-Louis les insurges vainqueurs, tandis que Larrey, le militaire, reqoit au Gros Caillou les bless& des forces de l’ordre, et que Dupuytren fiddle a Charles X, reste en retrait. En 1833, il publie son Trait6 sur les plaies d’armes Bfeu, bask sur l’observation de 6 14 bless% des membres don1 352 des membres infkrieurs, mais aussi de l’cesophage, cervical ou thoracique, et de l’abdomen. S’y ajoute curieusement un chapike sur un spkculum B bascule et sur la cautkrisation
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du co1 uterin. Jobert sera en 183 1 Chevalier de la LCgion d’Honneur, nomme Chirurgien Consultant de Louis Philippe et de l’influente Madame Adelaide sa soeur.En 183 1 il sera aussi nomme chirurgien de l’hopita1 Saint-Louis, l’assistant de Richerand. En octobre 1830, il a 30 ans, il est fort be1 homme, Ctabli, promis a une riche can-i&e, peut-etre a l’anoblissement. Alors on le marie a une jeune fille de 19 ans, bien dotee au sortir du couvent. Ce mariage est un douloureux et rapide echec, qu’on accuse la leg&rete de l’une, ou le machisme de l’autre plus habitue au cadavre et au malade qu’aux jeunes femmes du monde. La separation a l’amiable Cvitera une procedure publique g&ante dans sa position pres du Roi. Mais elle aura sur les comportements et le caractbre de Jobert une influence durable. 11restera seul, affectivement et socialement. Meme si des suppleantes furent influentes dans sa vie, meme si ses amis l’entourent, Cloquet, Cazenave et le Baron Richerand son Maitre qui le fait s’installer a deux pas de son hotel rue de Bondy, belle preuve d’affection desinteressee. La periode Saint-Louis de 1832 a 1849, va etre scientifiquement la plus feconde et la plus brillante : il opere, publie, communique, voyage. Son etude sur le systeme nerveux central date de 1838 et reflete son ouverture d’esprit, son gout pour l’experimentation animale et la physiologie dont Magendie est le maitre a penser avec la regle de fuir tout systeme et de s’en tenir aux faits. Jobert est considere comme le per-eou le novateur de la chirurgie plastique modeme. Son trait6 de chirurgie plastique en deux volumes et un atlas en 18 planches date de 1849, consacrent ses succ&s dans la cure des fistules vesico-vaginales jusqu’alors considerees comme incurables, et lui valent une grande reputation en France, et en Europe et mCme outre-Atlantique avant que Sims en ajoutant des petits details, lui ravisse la vedette, mais il utilise aussi son lambeau de glissement dans les fistules rectovaginales, la fermeture de la paroi thoracique apt-es mastectomie large, etc. Jobert a le premier introduit l’anesthesie g&r&ale en France et darts son service. L’idCe Ctait dans l’air... La premiere anesthesie, chez Warren au Massachusetts Hospital date du 16 octobre 1846. Le 2 fevrier 1847, il presente a I’AcadCmie de Medecine 20 observations avec la methode, les resultats, les indications. Un travail vraiment scientifique dont on ne peut pas crediter Malgaigne, se precipitant a I’Academie des Sciences le 12 janvier pour presenter cinq essais
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non dales avec deux Cchecs,faits a Saint-Louis ou il Ctait chdrurgien en second... Mais Malgaigne etait remuant et redoutable orateur. Jobert fera ulterieurement une etude experimentale sur l’animal precisant les trois phases et les accidents de l’anesthesie a l’ether et au chloroforme, etude que developpera Flourens. 11se heurte moins a Velpeau <
>a Gensoul <>qu’a la farouche opposition du grand Magendie. La chirurgie abdominale deviendra possible mais avec la maitrise de l’asepsie. L’ambiance des interventions va changer, les hurlements faire pl.ace au silence, le chirurgien a voix a l’opkrateur calme precis et rapide, ce que fut excellemment Jobert, admirable et admire pour l’elegance, la surete du geste, et le sang froid dans les situations les plus difficil’es. Dans son service a l’hbpital il passait pour bourru, quinteux, avec les malades comme avec ses trois intemes - et l’on cite quelques affrontements violents generateurs d’amities durables notamment avec Alphonse GuCrin, ce breton fougueux precurseur de l’asepsie -, et avec ses 12 extemes dont un certain... Emile Blanche...De 6 a 10 heures en CtC,de 7 a 10 heures en hiver, il opere, visite, autopsie, enseigne par compagnonnage. Le salaire hospitalier est alors die 1 000 francs/an, celui d’un ouvrier parisien. La clie.ntele est done une necessite vitale. 11donne chez lui, Chaussee-d’Antin trois consultations par semaine de 11 a 14 heures, puis la voiture attelee le conduit en ville pour les visites, les interventions a domicile dans des conditions d’hygiene bien meilleures qu’a l’hopital. Ses honoraires sont eleves et c’est dans ce:milieu de riches bourgeois et de banquiers une fagon d’affirmer sa valeur. Le gout de l’argent dont le taxent les jaloux n’altere pas son sens du devoir, et il soigne indistinctement riches et pauvres. Maintes anecdotes le prouvent, qui Ctaient peut-Ctre necessaires a sa memoire. Le soir il lit, prepare des publications, sort un peu dans le monde, ou il se sent deplace, dans l’entourage de Flaubert ami de Cloquet, de Louis Boulanger, le peintre de Balzac et des Hugo, qui enverra le portrait de Jobert au Salon de 1837. En 1837, il est fait Officier de la Legion d’Honneur. Le mardi, il se rend a I’AcadCmie de medecine... 11a presente de nombreuses communications dont celles sur les sutures, intestinales devant I’AcadCmie Royale de Chirurgie, en fait la section chirurgicale de I’AcadCmie creee en 1820 apres les echecs de Larrey pres de Napoleon 1”’ et du Pere Elysee pres de Louis XVIII,
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2. Jules-Germair) Cloquet. Manurl d’unotomie cicscriptilv (avis au lecteur par Liliane Pariente). Paris : Pariente ; 199X. Volume I, Avec I’autorisation de I’Cditeur. La fqade sur la cow d’entrck de I’h6pital Saint-Louis (ven I820).
Figure
Figure 3. Salle de Garde ZII’h8pital de la CharitC. Paris. Gustave Dori: (m : Hi.\toirc polw~~~p1~c’tie /‘lrrtc~m/r dc PNl.i.\).
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Figure 4. Premiere anesthCsie g&n&ale le 16 octobre 1846 au Massachusetts Hospital de Boston par Robert Hinckley, 1882.
Figure 5. Porte de l’H&el-Dieu l’lnternat
vers 1830. Gustave Dare (in : Hisroirepolymorphe
de
de Par-is).
Figure 6. Leqon au lit du malade en 1868, dessin de Rickedebusch. Biblioth&que interuniversitaire de mCdecine.
pour retablir notre Compagnie. Jobert y est Clu en 184 1, mais improvisant mal, Cmotif sous des airs assures, il preferera vite lire des textes prepares. Ses difficult& oratoires, sa maladresse dans le debat public et sa position academique le tiendront Cloigne de la SociCtCde chirurgie de Paris creee en 1843 par 17 chirurgiens des hbpitaux ou du bureau central, dont Malgaigne qui lui donnera sa devise c,et sous l’aile fugace de Berard. Ce group’e un peu opposant aux gens en place, attendra 92 ans pour redevenir 1’Academie de Chirurgie et 154 ans pour etre I’AcadCmie nationale de chirurgie. Le declin de la medecine hospitaliere s’amorce apt-es 1840, marque par la fuite des Ctudiants &rangers. :Sescauses incitent B mediter : le clinicisme pur a l’hopital Cloigne et meconnait les sciences fondamentales considerees encore comme accessoires : la microscopic done l’anatomie pathologique, la physiologic, lapharmacologie et la chimie done les anesthesiques et les desinfectants, leur etude est pour Trousseau tc du temps perdu D, la the’rapeutiyue medicale <,la statistique <
cause d’une effroyable mortalite : 60 % apres amputation de cuisse, 100 % apres hysterectomie. La meconnaissance de l’asepsie est Ctonnante. Bien avant Pasteur en 1821, les exemples de Cullerier, Poutteau a Lyon, Davaine a Lariboisiere, Guerin des sa these de 1847 sont dedaignes. Semmelweiss a Vienne est injurie, revoque, exile. Lister appliquera a Glasgow d&s 1861 les travaux de Pasteur.... Mais ni l’AcadCmie, ni la jeune SociCtCde chirurgie n’y croient. Le service de Jobert donne sur la malsaine rue de la Bticherie, et il y restera tandis qu’on detruit des rues sordides au nord du Parvis pour construire, lentement, le nouvel Hotel-Dieu, l’actuel. Plus que le coup d’etat du 2 decembre 185 1, c’est le massacre du 4 decembre, sur les boulevards qui a de nouveau rempli de blesses I’HGtel-Dieu. La deuxieme Republique va glisser vers 1’Empire. Le Prince President devient Napoleon III en 1852. La suppression des contours pour les professeurs va favoriser a la mort de Roux en 1854 la creation a l’H& tel-Dieu. pour Jobert, d’une deuxieme Chaire de clinique chirurgicale. Un semestre sur deux, il assurera un enseignement suivi et apprecie par les etudiants pour le contenu plus que pour l’eloquence, car s’il improvise ma1 il enseigne clair et bien. Jobert est pour 15 ans encore le chirurgien en vogue aussi actif a l’hopital qu’en clientele de ville, ou il doit augmenter ses consultations et ses tarifs, visiter, operer. dans un monde de riches et de proches de la Cour. Ses domiciles suivent les Grands Boulevards. alors l’axe vital de Paris, des finances, des cercles, des plaisirs, des hotels particuliers... Chaussee-d’Antin, rue de Grammont, Place de la Madeleine enfin. I1 recoit et il est requ, par les Haussmann, par Conneau, les proches de I’Empereur, des amis aussi, les Lava], les Cloquet, les Cazenave, des visiteurs de Lamballe pas toujours desinteresses. L’hBte est juge mediocre, il reste ma1 a l’aise dans le monde, malgre sa reussite, <
Antoine Joseph Jobert de Lamb.alle
fauteuil de Magendie, titulaire de nombreuses distinctions de Hollande, du Bresil, de G&e, d’Espagne... En 1858, il est l’un des 27 membres fondateurs de 1’Association g&r&ale des medecins de France, prefiguration du Conseil de l’ordre, des secours mutuels, et des syndicats medicaux. En 1862, membre du Conseil d’hygiene publique de la Seine qui conseille Haussmann pour les grands travaux qui bouleversent Paris. En 1862, il est Clu conseiller general des C&esdu-Nord. 11agit de Paris, notamment pour un plan de secours aux indigents des campagnes. Fait Commandeur de la Legion d’Honneur en 1852, il est nomme sur sa reputation Chirurgien Ordinaire de 1’Empereur avec Hippolyte Larrey. En 1855 les frequents troubles urinaires de Napoleon III le font appeler aux Tuileries : il aurait park? de (>.11est certes re$u a la Cour, et est un familier de Compiegne en 1853 ; on l’imagine ma1a l’aise dans un monde futile et brillant. En aoQt 1858 il accompagne la Cour dans un long periple en Bretagne, voyage tres politique avec un a&t a Lamballe oti devant <>emu, Napoleon III d&ore le vieux docteur Bedel de la Legion d’Honneur. 11n’a pas CtCanobli par l’Empereur, il cut ete baron comme Cloquet, mais autorise a supprimer les parentheses et ajouter officiellement de Lamballe a son nom. L’homme a suscite des jugements contradictoires meme dans les Cloges. 11a eu des amities solides et durables avec Richerand son maitre jusqu’a la mort de celui-ci en 1840, avec Jules Cloquet son mentor, son heureux rival a 1’Academie qui fit campagne pour lui l’annee suivante, avec Alphee Cazenave le dermatologue, avec Arnal, avec cette Madame Lava1 dont il avait soigne le mari et qui fit don a 1’AcadCmie du portrait qu’il lui avait offert et du moulage de sa main. 11s’est fait aussi de solides inimities par sa sensibilite d’ecorche, son caractbre rugueux, irkgal, un jour grossier ou hautain, le lendemain affectueux et confiant. Le desastre conjugal, son malaise dans le monde, la competition, l’orgueil de la reussite peutetre, ont peu a peu gate son caractere. Les gens de Lamballe a Paris, il les a reGus, aides, conseilles, accueillis dans son service. Certains pourtant, tels Pellarin ou de Chalus parlent de lui avec une agaqante condescendance. Avec les Bedel, en revanche, il est dans sa vraie famille, il voue au vieux medecin un respect filial, il passe plusieurs semaines de vacances chez eux ou chez leur gendre Paul Louis de Chalus dans la baie de Saint-Brieuc, got&e a une vie de
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manoir, se confie a Madame Bedel qui le pousse a acheter en 1850 pres de Pleherel sur la tote d’ Armor une malouinibre ou il sejournera peu, jouxtee d’une ferme qui lui donnera bien des soucis. I1 aidera et aimera profondement sa vieille mere, celle que les Lamballais appellent <>crie Jobert qui se precipite pour tirer la t&e et l’accoucher. 11est m&rise avant qu’on le conduise a la clinique du Dr Blanche, a Passy, dans l’ancien hotel de la Princesse de Lamballe, dans ce trois Ctoiles des intellectuels alien&, ou furent soignes Nerval, Gounod, Jules Goncourt, Maupassant et tant d’autres. Car elle est fort repandue alors cette maladie a laquelle Fournier donnera 10 ans plus tard le nom de paralysie g&kale. Cette meningo-encepahlite diffuse est une complication de la syphilis, diagnostic que l’on tient de Jobert lui-meme decrivant en 1859 dans une lettre au docteur Bedel tous les signes de la periode secondaire et l’inoculation par une piqure au doigt faite en operant une tumeur chez une femme. On peut douter du mode d’inoculation, mais pas du diagnostic. Cinq ans apres cet accident revelateur oti basculait la raison, la paralysie generale Ctait en 18 mois et par &apes une lente et tragique deterioration de la memoire, I’intellect, du jugement, avec des phases de delire megalo-maniaque incoherent oti Dieu vous parle, ou depressif. L’animalisation, la deliquescence de cet homme brillant constemaient ses amis, dont la fiddle Mme Lava1 ou Cloquet et ses anciens extemes les docteurs Blanche et Meuriot qui surent Cviter la lamentable mediatisation de la fin de Maupassant en 1893. Jobert, mort le 19 avril 1867, eut le 26 a la Madeleine des funerai lles grandioses, avec la pompe des delegations de la Maison de l’Empereur, de la faculte, avec le Doyen et les professeurs en robe, des Academies de medecine et des sciences, les discours, et plus etonnant
encore la masse des Ctudiants..., le cortkge vers le cimetikre de Montmartre avant le dkpart le 27 pour celui de Lamballe oti il avait souhaitCrejoindre sa m&-e,et ob son mausolie est entourk des caveaux d’une famille enfin regroupke. L’lk-itage de Jobert a beaucoup fait r&ver. Les paquets de billets jet& dans les tiroirs, les cassettespleines de pikes d’or soi-disant iventoriks lors de l’internement, tout cela est excessif ou faux, je I’ai v& rifZ. Trois millions de francs or, Jobert &ant mort intestat. c’est ce qui revint comme une aubaine g cinq hkritiers t&s mod’esteset soudain trk riches.
Avril 1867 : face B la clinique de Passy. I’exposition universelle attire I’Europe, cache les craquelures de I’Empire, 3 ans avant Sedan. Dix lignes de faire-part dans le Moniteur annoncent le 24 avril la mort de Jobert qui a quittC la sckne pour entrer dans l’oubli. 11reste ces admirables portraits B l’Acadkmie de Mkdecine. cette main poke sur la table de lecture de sa bibliothkque, et les trois points majeurs de son ceuvre : les sutures intestinales. les fistules recta-vaginales. I’introduction de l’anesthksie B I ‘hbpital.