Application des critères internationaux de l’asphyxie perpartum à une population d’enfants infirmes moteurs cérébraux

Application des critères internationaux de l’asphyxie perpartum à une population d’enfants infirmes moteurs cérébraux

J Gynecol Obstet Biol Reprod 2006 ; 35 : 629-631. Revue de presse Application des critères internationaux de l’asphyxie perpartum à une population d’...

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J Gynecol Obstet Biol Reprod 2006 ; 35 : 629-631.

Revue de presse Application des critères internationaux de l’asphyxie perpartum à une population d’enfants infirmes moteurs cérébraux

Cerebral palsy and the application of the international criteria for acute intrapartum hypoxia EMM Strijbis, I Oudman, P van Essen, AH MacLennan. Obstet Gynecol 2006; 107: 1357-65.

Résumé En préambule, les auteurs rappellent que les infirmités motrices cérébrales (cerebral palsy), restent autour de 2 à 2,5 pour mille naissances vivantes, malgré la généralisation de l’enregistrement du rythme cardiaque fœtal au cours du travail et la multiplication par 6 du taux de césariennes entre 1960 et 2000. Pendant de nombreuses années, l’essentiel des handicaps moteurs de l’enfant était systématiquement attribué aux circonstances de l’accouchement. En réalité, les études épidémiologiques ont montré que l’asphyxie fœtale strictement intrapartum ne concernait que 5 à 10 % des IMC [1-5]. Dans les autres cas, il s’agissait soit d’une origine antépartum, soit d’une décompensation au cours de l’accouchement d’une pathologie préexistante, soit encore d’une atteinte postnatale. En 2003, le Collège Américain des Obstétriciens et Gynécologues (ACOG) et l’Académie Américaine de Pédiatrie ont repris les conclusions de la conférence de consensus réunie en 1999 pour définir les 4 critères essentiels prouvant la réalité d’une hypoxie fœtale sévère à la naissance [6, 7]. Ces 4 critères doivent être réunis pour établir une relation causale certaine entre le handicap neurologique de l’enfant et l’asphyxie fœtale. Cinq autres critères, non spécifiques en eux-mêmes, mais rendant compte de la chronologie intrapartum de l’agression fœtale ont été reconnus. Au moins 3 d’entre eux doivent être présents pour suggérer une origine perpartum du handicap plutôt qu’une décompensation d’une pathologie fœtale préexistante (prématurité, hémorragie gravidique, grossesse multiple, anomalie génétique, infection bactérienne, parasitaire ou virale, retard de croissance intra-utérin, anémie fœtale, troubles de la coagulation sanguine, malformation congénitale), d’une pathologie maternelle associée (hypothyroïdie, pré-éclampsie, diabète, addictions, etc.), ou d’une pathologie ovulaire (infarctus, villite chronique, chorio-amniotite, vasculopathie thrombotique du placenta ou circulaire serré du cordon). Les auteurs ont appliqué les critères internationaux de l’asphyxie perpartum reproduits ci-dessous à une série de 235 infirmes moteurs cérébraux, nés en Australie du Sud entre 1986 et 2003, dont le handicap avait été diagnostiqué avant l’âge de 5 ans et qui comportait aussi des atteintes postnatales survenues avant l’âge de 2 ans. Critères spécifiques de l’asphyxie fœtale à la naissance : 1. Acidose métabolique grave au sang du cordon (pH < 7,00 ou Base Déficit ≥ 12 mmol/L) ; 2. Encéphalopathie néonatale modérée ou sévère dans les 24 premières heures ; 3. Infirmité motrice cérébrale (quadriplégie spastique de type dyskinétique) ; 4. Élimination des autres causes possibles d’infirmité motrice cérébrale. Critères évocateurs non spécifiques de la chronologie intrapartum de l’asphyxie : 5. Événement hypoxique survenant juste avant ou pendant le travail ; 6. Modification soudaine, rapide et prolongée du RCF après l’hypoxie avec un tracé antérieur normal ; 7. Score d’Apgar restant entre 0 et 3 au-delà de la 5e minute ; 8. Défaillance multiviscérale dans les 72 premières heures de vie ; 9. Anomalie cérébrale aiguë non focalisée sur l’imagerie cérébrale précoce. Sur les 213 cas exploitables, seuls 127 dossiers comportaient une réponse claire aux 9 critères définis. Bien qu’initialement les critères

d’asphyxie aient été définis pour des naissances > 34 SA, le groupe d’étude des IMC a été divisé en trois cohortes d’enfants à terme (≥ 37 SA), de prématurés légers (32 à 36 SA) et de grands prématurés (< 32 SA). Comme souvent, les données n’étaient pas toutes disponibles, notamment les gaz du sang au cordon et l’étude du placenta. Sur l’ensemble de la série des IMC, une acidose métabolique grave au cordon n’a été retrouvée que chez 3,8 % des enfants, les encéphalopathies anoxiques et ischémiques ne concernaient que 28,3 % des enfants nés à terme et le tableau clinique de l’incapacité motrice, typique de l’asphyxie périnatale, n’était retrouvé que chez 24,4 % des enfants. En revanche, une autre pathologie pouvant expliquer l’IMC a été découverte dans 98,1 % des cas. En ce qui concerne les critères non spécifiques, on remarque qu’un événement sentinelle évident n’a été mis en évidence que dans 0,9 % des cas, une anomalie du RCF dans 12,2 % des cas, un score d’Apgar < 4 à 5 minutes dans 2,8 % des cas, une défaillance multiviscérale dans 8,0 % des cas et une anomalie aiguë non localisée sur l’imagerie précoce du cerveau dans 9,4 % des cas. Sur l’ensemble de la série des IMC, la fréquence des naissances par le siège était élevée : 35,3 % avant 32 SA, 14,6 % entre 32 et 36 SA et 8,7 % à terme. Pour les naissances à terme, on constatait que les acidoses métaboliques sévères étaient deux fois plus fréquentes que chez les prématurés de 32 à 36 SA (8,7 % vs 4,2 %), et que les bradycardies sévères étaient 6 fois plus fréquentes (RR = 6,04 [2,67-27,92]) avec une imagerie cérébrale précoce plus souvent évocatrice d’asphyxie périnatale (RR = 4,66 [1,54-22,17]) que chez les grands prématurés (< 32 SA). Lorsque des données aussi importantes que l’équilibre acido-basique étaient manquantes, on ne pouvait qu’évoquer une très forte probabilité de relation causale à partir d’un événement sentinelle évident comme un hématome rétroplacentaire ou une rupture utérine. Dans d’autres observations, les critères essentiels de l’asphyxie néonatale étaient réunis, mais il n’y a pas d’événement sentinelle manifeste, ce qui permettait d’envisager un début antépartum des troubles de l’oxygénation avec d’autant plus de vraisemblance qu’il existait des lésions placentaires (villite, infarctus, thromboses) ou une pathologie maternelle grave associées (diabète, pathologie vasculorénale, etc). Enfin, dans certains dossiers, même s’il existait un événement sentinelle comme une extraction instrumentale difficile ou une dystocie sévère des épaules, la nature diplégique ou hémiplégique du handicap moteur évoquait en premier lieu un accident vasculaire cérébral de l’enfant et non pas une asphyxie périnatale. Dans le collectif des prématurés légers (32-36 SA), 3 cas ont présenté une hypoxie périnatale associée à des complications de la grossesse (hématomes rétroplacentaires et hémorragies fœtomaternelles). Sur les 119 grands prématurés, les lésions en rapport avec l’immaturité cérébrale prédominaient (hémorragies et leucomalacies périventriculaires). Les pathologies gravidiques associées étaient principalement les hémorragies antépartum (35,3 %), les grossesses multiples (27,7 %), les infections intra-utérines (32,8 %) et les retards de croissance (33,6 %), alors que l’acidose métabolique était très rare (1,7 %).

Commentaire Ce travail souligne non seulement la rigueur qui doit être de mise lorsque l’on veut analyser les relations entre une IMC et les circonstances de l’accouchement, mais encore l’importance d’un bilan complet permettant d’exclure les causes génétiques, infectieuses, métaboliques et hématologiques d’une IMC [8]. Il met aussi l’accent sur la nécessité d’avoir des dossiers obstétricaux bien documentés. En effet, il est primordial, voire indispensable devant toute mauvaise adaptation à la vie extra-utérine, toute anomalie neurologique précoce de l’enfant et tout transfert en néonatalogie de disposer d’une évaluation de l’équilibre acido-basique au sang du cordon. En effet, un dosage instantané des lactates, prélevé chez l’enfant dans les 30 premières minutes de vie, supérieur à 9 mmol/L est prédictif d’une encéphalopathie anoxique et ischémique [9]. Inversement, un dosage normal des lactates au sang du cordon permettra d’exclure une hypoxie perpartum. En outre, le placenta doit être systématiquement adressé en anatomopathologie, car cet examen peut retrouver des lésions qui établissent le début de l’hypoxie avant toute entrée en travail [10]. G. Boog, CHU de Nantes.

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Revue de presse

RÉFÉRENCES 1. Badawi N, Felix JF, Kurinczuk JJ, Dixon G, Watson L, Keogh JM, et al. Cerebral palsy following newborn encephalopathy: a population-based study. Dev Med Child Neurol 2005; 47: 293-8. 2. Badawi N, Kurinczuk JJ, Keogh JM, Alessandri LM, O’Sullivan F, Burton PR, et al. Intrapartum risk factors for newborn encephalopathy: the Western Australian case-control study. BMJ 1998; 317: 1554-8. 3. Blair E, Stanley FJ. Intrapartum asphyxia: a rare cause of cerebral palsy. J Pediatr 1988; 112: 515-9. 4. Nelson KB, Ellenberg JH. Antecedents of cerebral palsy. Multivariate analysis of risk. N Engl J Med 1986; 315: 81-6. 5. Yudkin PL, Johnson A, Clover LM, Murphy KW. Assessing the contribution of birth aspyxia to cerebral palsy in terme singletons. Paediatr Perinat Epidemiol 1995; 9: 156-70. 6. Mac Lennan AH for the International Cerebral Palsy Task Force. A template for defining a causal relation between acute intrapar-

Morbidité maternelle en relation avec les césariennes itératives multiples

Maternal morbidiy associated with multiple repeat cesarean deliveries

RM Silver, MB Landon, DJ Rouse, KJ Leveno, CY Spong, EA Thom, AH Moawad, SN Caritis, M Harper, RJ Wapner, Y Sorokin, M Miodovnik, M Carpenter, AM Peaceman, MJ O’Sullivan, B Sibai, O Langer, JM Thorp, SM Ramin, BM Mercer for the National Institute of Child Health and Human Development Maternal-Fetal Medicine Units Network. Obstet Gynecol 2006; 107: 1226-32.

Résumé Constatant l’inquiétante augmentation du taux des césariennes aux États-Unis, soit de 27,6 % à 29,1 % en l’espace d’une année (2004), à cause de la diminution des tentatives de voie basse sur utérus cicatriciel, de l’augmentation constante de l’âge maternel, de la pratique courante des déclenchements du travail, de l’abandon fréquent des extractions instrumentales, de la progression des plaintes médico-légales et de la dernière mode des césariennes de convenance, les auteurs se sont proposés d’évaluer la morbidité des césariennes itératives, réalisées a priori dans de bonnes conditions, puisque programmées. Il s’agissait d’une étude observationnelle prospective réalisée entre 1999 et 2002 dans 19 centres universitaires américains comprenant 4 années de suivi des césariennes itératives et 2 ans d’inclusion des premières césariennes programmées servant de groupe contrôle. Sur les 378 063 naissances dans ces divers centres, 83 754 ont eu lieu par césarienne dont 30 132 avant le début du travail constituant le groupe d’étude. Cette cohorte comprend 45 % de femmes de race blanche, 24 % d’Afro-Américaines, 29 % d’Hispaniques et 1,9 % d’autres ethnies. Quarante-sept pour cent des femmes avaient une assurance privée et 98,5 % avaient eu au moins une visite prénatale. Il s’agissait de singletons dans 96 % des cas. Il s’avère que les femmes qui avaient eu le plus grand nombre de césariennes étaient plus âgées, plus souvent d’origine afro-américaine et plus fréquemment dépourvues d’assurance privée (p < 0,05). En fonction d’un nombre croissant de césariennes, on note un risque accru de placentas accreta, d’hystérectomies, de transfusions d’au moins 4 culots globulaires, de cystotomies, de lésions intestinales ou urétérales, d’occlusions postopératoires, d’admissions en réanimation et on remarque une nette prolongation de la durée opératoire. Le taux de placentas accreta est de 0,24 % lors

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tum events and cerebral palsy: international consensus statement. BMJ 1999; 319: 1054-9. Neonatal encephalopathy and cerebral palsy. Defining the pathogenesis and pathophysiology; 2003: a report by the Task Force American College of Obstetricians and Gynecologists and the American Academy of Pediatrics. Washington, DC: ACOG; 2003. Badawi N, Kurinczuk JJ, Keogh JM, Alessandri LM, O’Sullivan F, Burton PR, et al. Antepartum risk factors for newborn encephalopathy: the Western Australian case-control study. BMJ 1998; 317: 1549-53. Da Silva S, Hennebert N, Denis R, Wayenberg JL. Clinical value of a single postnatal lactate measurement after intrapartum asphyxia. Acta Paediatr 2000; 89: 320-3. Badawi N, Kurinczuk JJ, Keogh JM, Chambers HM, Stanley FJ. Why is the placenta being ignored? Aust N Z J Obstet Gynaecol 2000; 40: 343-6.

de la 1re césarienne, puis il augmente à 2,13 % à la 4e et 6,74 % à partir de la 6e. Neuf pour cent des patientes ayant eu 6 césariennes ou plus ont dû subir une hystérectomie. Après la 1re césarienne on remarque aussi une augmentation des placentas praevia, des ventilations artificielles maternelles postopératoires, et un allongement de la durée des hospitalisations. Parmi les facteurs non influencés par le nombre des césariennes itératives, on relève les lâchages de suture et les infections de paroi, les thromboses veineuses profondes, les embolies pulmonaires, les réinterventions et les décès. Les endométrites étaient plus fréquentes lors de la 1re césarienne (5,98 %) de même que les décès (0,19 %). Cependant les morts maternelles véritablement imputables à l’intervention ne concernaient que des deuxièmes césariennes. Les odd ratios des deux plus graves complications, enregistrées après au moins 4 césariennes et à partir de 6 césariennes ou plus, étaient respectivement multipliés par 9 et 30 pour les placentas accreta, et par 4 et 15 pour le risque d’hystérectomie. Sur les 216 hystérectomies, 195 ont été faites lors de la césarienne et 21 ont été nécessaires secondairement. Le risque d’insertion accreta du placenta était, en cas d’insertion basse, de 3,3 % lors de la 1re césarienne, de 40 % à la 3e et de 61 % à la 4e césarienne ou plus. Curieusement, en l’absence de placenta praevia, l’envahissement anormal du myomètre restait également préoccupant avec la répétition des hystérotomies : 0,03 % à la 1re, 0,1 % à la 3e, 0,8 % à la 4e et 4,7 % à la 6e césarienne ou plus. En analyse multivariée incluant la race, l’âge maternel, le statut marital, la nature de l’assurance médicale, le nombre des fœtus, les pathologies maternelles et la qualité de la surveillance prénatale, les risques de placenta accreta et d’hystérectomies restaient inchangés. Par conséquent, même en l’absence de placenta praevia ou accreta, les femmes ayant eu de nombreuses césariennes ne peuvent pas être totalement rassurées car toutes les complications en dehors des thromboses veineuses profondes sont augmentées, qu’il s’agisse des complications peropératoires incluant les hémorragies et les blessures d’organes de voisinage ou qu’il s’agisse des comlications postopératoires, notamment les iléus et les séjours en réanimation.

Commentaire Ce travail confirme les risques déjà évoqués par Makoha et al. [1] à propos de 3 191 patientes ayant eu une césarienne entre 1997 et 2002 à Jeddah en Arabie Saoudite. En effet, par rapport aux femmes ayant été césarisées trois fois, le risque de morbidité majeure était significativement augmenté à la 5e césarienne et surtout à la 6e pour le placenta praevia (OR = 3,8 [1,9-7,4]), le placenta accreta (OR = 6,1 [2,0-18,4], et l’hystérectomie (OR = 5,9 [1,5-24,4]. Cette très grande série d’utérus cicatriciel confirme la publication de Clark et al. [2], insistant sur le redoutable risque d’invasion placentaire du myomètre en cas de placenta praevia sur utérus cicatriciel. Ce risque est de 2/3 à partir de 4 césariennes.

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