Pratique Neurologique – FMC 2013;4:53–58
Démences et biomarqueurs
Apport des biomarqueurs cognitifs dans le diagnostic de la maladie d'Alzheimer Contribution of cognitive biomarkers to the diagnosis of Alzheimer's disease a
Service de neurologie et neuropsychologie, CHU la Timone, 264, rue Saint-Pierre, 13385 Marseille cedex 5, France b Inserm U 1106, laboratoire de neurophysiologie et neuropsychologie, faculté de médecine secteur Timone, Aix-Marseille université, 27, boulevard Jean-Moulin, 13385 Marseille cedex 5, France c Centre de recherche cerveau et cognition, université de Toulouse, UPS, 118, route de Narbonne, 31062 Toulouse cedex 9, France d CNRS CERCO UMR 5549, Pavillon Baudot CHU Purpan, BP 25202, 31052 Toulouse cedex, France
RÉSUMÉ Le diagnostic de certitude de la maladie d'Alzheimer (MA) reste fondé sur la confirmation neuropathologique, mais la caractérisation clinique précise des déficits cognitifs et comportementaux reste un élément déterminant dans l'approche diagnostique et permet très souvent de prédire la protéinopathie à l'origine du processus pathologique sous-jacent. De nombreux travaux s'intéressent au diagnostic précoce de cette maladie, aux stades où les lésions neuropathologiques sont encore circonscrites. Les premiers stades des affections dégénératives du cortex cérébral se caractérisant par l'atteinte sélective de circuits neuronaux, une meilleure connaissance des réseaux neuraux affectés dans les premiers stades des processus dégénératifs pathologiques paraît capitale pour améliorer le diagnostic clinique de manière générale, et notamment le diagnostic précoce. Prenant en compte la progression des dégénérescences neurofibrillaires dans la région temporale interne dans la MA débutante, nous avons récemment formulé l'hypothèse selon laquelle, au stade transentorhinal – le stade le plus précoce de la dégénérescence neurale – les lésions seraient à l'origine d'une dysfonction du système mésiotemporal antérieur et responsables de troubles de la mémoire décontextualisée (mémoire des faits et des connaissances). Ce ne serait que plus tardivement, au stade limbique, que l'atteinte du système mésiotemporal postérieur entraînerait une atteinte de la mémoire contextualisée (mémoire épisodique). Nous présentons ici une approche translationnelle dans laquelle l'appréciation des processus cognitifs par les méthodes de la neuropsychologie, basée sur les données neuropathologiques de la MA, est conçue comme indicatrice d'un dysfonctionnement lié à un processus pathologique en tant que « biomarqueur cognitif » et étudiée en conjonction avec l'apport des méthodes de neuroimagerie.
M. Didic a,b O. Felician a,b E.-J. Barbeau c,d M. Ceccaldi a,b
Mots clés Maladies dégénératives du cortex cérébral Maladie d'Alzheimer Diagnostic précoce Mémoire Lobe temporal interne Biomarqueurs
Keywords Neurodegenerative diseases Alzheimer's disease Early diagnosis Memory Mesial temporal lobe Biomarkers
© 2013 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
SUMMARY The diagnosis of Alzheimer's disease still relies on a neuropathological confirmation. Although there is no absolute concordance between clinical signs and underlying pathology, careful clinical phenotyping often allows prediction of histopathological change with a high level of accuracy. Many studies are currently attempting to improve the identification of patients with early Alzheimer's disease, when neuropathological change is minimal. Neurodegenerative diseases selectively target neuronal networks. The identification of these neuronal networks is crucial for diagnosis in general, but especially for early diagnosis. Based on the sequential stages related to the progression of neurofibrillary tangles within the mesial temporal lobe, we recently suggested © 2013 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. http://dx.doi.org/10.1016/j.praneu.2013.01.013
Auteur correspondant : M. Didic, service de neurologie et neuropsychologie, CHU la Timone, 264, rue SaintPierre, 13385 Marseille, France. Adresse e-mail :
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that the earliest, or transentorhinal stage of Alzheimer's disease, results in dysfunction of an anterior mesiotemporal network characterized by impaired context-free memory (memory for facts), while the subsequent dysfunction of the posterior mesiotemporal network results in dysfunction of context-rich (episodic) memory. We report on a translational approach based on pathophysiological data in Alzheimer's disease to suggest that cognitive processes reflecting dysfunction of neural networks that are the target of pathological change could lead to the development of "cognitive biomarkers'' reflecting neural dysfunction on a clinical level. © 2013 Elsevier Masson SAS. All rights reserved.
INTRODUCTION Le diagnostic de certitude de la maladie d'Alzheimer (MA) reste fondé sur la confirmation neuropathologique. Un diagnostic de probabilité est formulé du vivant du malade, avec toutefois une marge d'erreur. Au cours de ces dernières années, l'apparition de nouveaux biomarqueurs, dosage des taux de protéine beta-amyloide, tau et phospho-tau dans le liquide céphalo-rachidien, et visualisation des dépôts intracérébraux de protéine beta-amyloide à l'aide de ligands spécifiques en TEP, ont permis d'améliorer les diagnostics positif et différentiel des démences. Malgré ces avancées, les corrélations clinico-pathologiques montrent que la caractérisation clinique précise des déficits cognitifs et comportementaux reste un élément déterminant de l'approche diagnostique et permet très souvent de prédire la protéinopathie à l'origine du processus pathologique sous-jacent (Snowden et al., 2011). Le diagnostic de la MA probable est généralement évoqué à un stade de la maladie auquel la perte neuronale et les lésions neuropathologiques ont atteints de nombreuses régions cérébrales. Bien qu'il soit imaginable que ces lésions soient potentiellement réversibles, il serait idéalement souhaitable de commencer un traitement au stade ou les patients présentent des symptômes légers et au stade prédémentiel. Ainsi, en raison du développement potentiel de thérapies agissant sur l'évolution de la MA, de nombreux travaux s'intéressent au diagnostic précoce de cette maladie, aux stades où les lésions neuropathologies sont encore circonscrites. La majorité des études a évalué l'apport au diagnostic précoce des biomarqueurs du LCR, du volume hippocampique, de l'hypometabolisme en TEP-FDG et des radioligands des dépôts amyloïdes en PET. Or, dans un travail comparant les valeurs prédictives respectives de ces différentes mesures sur la conversion et le déclin cognitif chez des patients MCI (mild cognitive impairment ou trouble-cognitif léger), l'évaluation neuropsychologique de la mémoire apportait une contribution supérieure à celle des marqueurs de neuroimagerie, comme le volume hippocampique et le FDG-PET, ainsi qu'à celle des biomarqueurs dans le LCR (Landau et al., 2010). Il reste cependant à déterminer quel type de mémoire doit être évalué pour établir un diagnostic fiable dans les stades les plus précoces de la maladie et quel type d'épreuve neuropsychologique est le plus adapté dans ce contexte (Nestor et al., 2004). Les tests neuropsychologiques utilisés dans le cadre du diagnostic de la MA et des syndromes associés sont majoritairement dérivés des modèles de la psychologie cognitive défendant une organisation fonctionnelle modulaire des processus cognitifs. Par exemple, le désormais classique test de « Grober et Buschke » évalue les différentes étapes qui interviennent dans la mémorisation, à savoir l'encodage, le stockage et le rappel en mémoire, sans référence explicite à l'implication des différents systèmes neuraux, bien que des travaux récents suggèrent que le rappel total dans cette
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tache soit en relation avec une dysfonction du secteur CA1 de l'hippocampe (Sarazin et al., 2010). Selon la définition d'un groupe de travail missionné par le NIH (Biomarkers Definitions Working Group, 2001), un biomarqueur est défini comme « une caractéristique qui peut être mesurée de manière objective et évaluée comme l'indicateur de processus biologiques normaux, pathologiques ou d'une réponse pharmacologique à une intervention thérapeutique. Le développement de biomarqueurs doit être basé sur une connaissance des bases neuropathologiques de la maladie étudiée. Ces biomarqueurs devraient contribuer au diagnostic et au diagnostic différentiel, mesurer la sévérité de la progression de la maladie, la réponse aux approches thérapeutiques ou avoir une valeur prédictive concernant le pronostic. Les processus cognitifs sont le reflet d'un processus biologique, car ils dépendent de l'activité et de l'intégrité de réseaux neuraux. Nous présentons ici une approche translationnelle dans laquelle l'appréciation des processus cognitifs par les méthodes de la neuropsychologie, basée sur les données neuropathologiques de la MA, est conçue comme indicatrice d'un dysfonctionnement lié à un processus pathologique et étudiée en conjonction avec l'apport des méthodes de neuroimagerie.
LES MALADIES DÉGÉNÉRATIVES DU CORTEX CÉRÉBRAL : UNE ATTEINTE SÉLECTIVE DE SYSTÈMES ANATOMO-FONCTIONNELS Les maladies dégénératives du cortex cérébral, comme la MA ou la maladie de Pick, ont longtemps été considérées comme des maladies affectant le cortex cérébral de manière diffuse, responsables d'un état de démence. Cependant, les premiers stades de ces affections se caractérisent par l'atteinte sélective de circuits neuronaux en étroite relation sur les plans anatomiques et fonctionnels, assimilant ces pathologies à des maladies de système (Didic et al., 1999). Ainsi, il existe des arguments en faveur de l'atteinte du système prémoteur dans l'anarthrie progressive – une forme clinique de dégénérescence fronto-temporale (DFT) – la séméiologie des patients pouvant être expliquée par des troubles de la planification de la motricité (Didic et al., 1998a), et de différents systèmes anatomo-fonctionnels frontaux et temporaux dans les sous-types de la variante comportementale des DFT (Didic et al., 1998b ; Rohrer et al., 2011). Plus récemment, les travaux de la neuroimagerie, reposant notamment sur les techniques de connectivité fonctionnelle, ont apporté des arguments concrets en faveur de l'atteinte de réseaux neuronaux distincts dans la MA, mais également dans la DFT, la dégénérescence cortico-basale ou la démence sémantique (Seeley et al., 2009). Une meilleure connaissance des réseaux neuraux affectés dans les premiers stades des processus dégénératifs pathologiques parait donc capitale pour améliorer le diagnostic
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clinique de manière générale, et notamment le diagnostic précoce.
QUELS SYSTÈMES DE MÉMOIRE SONT AFFECTÉS AUX STADES INITIAUX DE LA MALADIE D'ALZHEIMER ? Dans le cadre du diagnostic précoce de la MA, il reste à déterminer quel type de mémoire est atteint aux stades les plus précoces de la maladie et quel type d'épreuve neuropsychologique doit être utilisé afin d'obtenir une valeur prédictive optimale. Si certains travaux pourraient suggérer que la mémoire sémantique est atteinte aux stades les plus précoces (Amieva et al., 2008), d'autres proposent que les troubles de la mémoire épisodique caractérisent la phase initiale de la maladie (Collie et Maruff, 2000 ; Nestor et al., 2004 ; Dubois et al., 2007). Or, pour répondre à cette question, il est crucial de savoir quel est le système neural qui est le plus précocement affecté par le processus pathologique. Dans la MA, les dégénérescences neurofibrillaires (DNF), dont la distribution topographique est corrélée à la nature des déficits cognitifs (Arriagada et al., 1992), se développent initialement dans les cortex sous-hippocampiques (cortex transentorhinal – berge interne du cortex périrhinal – et entorhinal) avant de s'étendre vers la formation hippocampique (Braak et Braak,
Démences et biomarqueurs 1991). Un nombre croissant de travaux chez l'animal et chez l'homme suggère que les différentes structures composant la région mésiotemporale (MTL) – cortex sous-hippocampique et formation hippocampique – contribuent de manière différentielle à la mémoire déclarative (Mishkin et al., 1997 ; Aggleton et Brown, 2006). Ainsi, les structures sous-hippocampiques jouent un rôle crucial dans la mémoire décontextualisée (mémoire des faits et des connaissances), alors que l'hippocampe est impliqué dans la mémoire contextualisée (mémoire des épisodes, indexée dans le temps et l'espace). Chez l'homme, ces différentes structures s'intègrent dans deux réseaux neuraux impliquant la région temporale interne distincts : un réseau MTL antérieur et un réseau MTL postérieur (Kahn et al., 2008). Les études réalisées auprès de patients cérébrolésés suggèrent que chacun de ces deux systèmes et leurs composantes respectives apportent une contribution spécifique à la mémoire déclarative, le réseau MTL antérieur étant préférentiellement impliqué dans la mémoire décontextualisée (mémoire des faits et des connaissances) (Gour et al., 2011), et le réseau MTL postérieur étant associé à la mémoire contextualisée (mémoire épisodique). La majorité des travaux ayant étudié les profils mnésiques et les réseaux neuraux atteints dans les stades initiaux de la MA insistent sur l'atteinte de la mémoire épisodique en relation avec la dysfonction du réseau MTL postérieur (Desgranges et al., 2002 ; Nestor et al., 2006). Prenant en compte la progression des DNF dans la région temporale interne, nous avons récemment formulé
Figure 1. Schéma des stades successifs qui prennent en compte la progression des dégénérescences neurofibrillaires et les systèmes de mémoire dans le lobe temporal interne (coupe coronale) dans la maladie d'Alzheimer (MA) débutante. Le stade transentorhinal ou « soushippocamique » de la MA (stades I et II de Braak et Braak), responsable d'une dysfonction du système mésiotemporal (MTL) antérieur, entraînerait une atteinte de la mémoire decontextualisée (mémoire des faits et des connaissances). Au stade limbique de la MA (stades III and IV de Braak and Braak), la dysfonction du système MTL postérieur serait responsable d'une atteinte de la mémoire contextualisée et decontextualisée (mémoire des faits et des connaissances et mémoire épisodique). Les dégénérescences neurofibrillaires sont représentées par des points rouges.
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Démences et biomarqueurs l'hypothèse selon laquelle, au stade transentorhinal – le stade le plus précoce de la dégénérescence neurale – les lésions seraient à l'origine d'une dysfonction du système MTL antérieur et responsables de troubles de la mémoire décontextualisée (mémoire des faits et des connaissances). Ce ne serait que plus tardivement, au stade limbique, que l'atteinte du système MTL postérieur entraînerait une atteinte de la mémoire contextualisée (mémoire épisodique) (Fig. 1) (Didic et al., 2011).
BIOMARQUEURS COGNITIFS : UNE APPROCHE TRANSLATIONNELLE En utilisant une approche translationnelle, nous avons conduit plusieurs travaux qui visent à documenter la contribution de l'étude des cortex sous-hippocampiques – avec les méthodes de la neuropsychologie et de la neuroimagerie – au diagnostic précoce de la MA. En s'inspirant de travaux chez le primate ayant démontré le rôle crucial du cortex périrhinal dans la mémoire de reconnaissance visuelle des items uniques (Meunier et al., 1993), notre équipe a développé une tache expérimentale adaptée à l'homme, le DMS48 (Fig. 2) (Barbeau et al., 2004). Les travaux chez les patients aMCI et les patients avec une MA montrent que ceux-ci ont au DMS48 une performance inférieure aux sujets contrôles (Barbeau et al., 2004 ; Poissonnet et al., 2012). Le fait que le cortex périrhinal soit impliqué dans la mémoire de reconnaissance visuelle est suggéré par les corrélations du volume du cortex périrhinal (Barbeau et al., 2008) et de la connectivité du réseau mésiotemporal antérieur (Gour et al., 2011) aux performances au
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DMS48. De plus, les patients aMCI qui échouent au DMS48 présentent des profils d'hypoperfusion, d'atrophie corticale et d'anomalie métabolique en spectroscopie IRM comparables à ceux rapportés dans la MA débutante (Guedj et al., 2006 ; Barbeau et al., 2008 ; Didic et al., 2010). Enfin, le suivi longitudinal de ces patients sur six ans suggère que le DMS48 possède une valeur prédictive élevée, car une performance inférieure au cut-off de 89 % permet de prédire chez des patients aMCI la conversion vers une démence de type MA avec une sensibilité de 80 % et une spécificité de 91 % (Didic et al., sous presse). Cependant, cette dernière étude montre que le rappel d'un matériel complexe comme les histoires logiques de l'échelle de mémoire de Wechsler révisée (sollicitant donc plutôt des représentations mnésiques contextualisées et impliquant vraisemblablement le réseau MTL postérieur) possède également une valeur prédictive élevée de conversion vers la démence chez les patients aMCI. Cela reflète certainement le fait que la plupart des patients avec une MA au stade prédémentiel qualifiés de aMCI sont à un stade pathologique impliquant déjà le réseau MTL postérieur, comme le suggèrent les études neuropathologiques (Bennett et al., 2005) et de neuroimagerie (Nestor et al., 2006). Ces questions illustrent l'intérêt de travaux reposant sur une approche « translationnelle » du diagnostic de la MA au stade prédémentiel, dérivés de l'expérimentation animale, visant à évaluer l'impact fonctionnel de lésions sélectives de différents réseaux neuronaux, en référence à la physiopathologie et à l'histoire naturelle des premiers stades de la maladie. Il faut cependant ajouter que toute dysfonction de la voie visuelle ventrale est susceptible d'entraîner des déficits dans les tâches évaluant la mémoire de reconnaissance visuelle, comme cela a récemment été rapporté dans la maladie à Corps
Figure 2. DMS48 (delayed matching to sample 48 items – appariement avec délai – 48 items). Cette épreuve consiste en un apprentissage incident d'une série de 48 images (cibles) telles que représentées sur la partie gauche de la figure, présentées individuellement. Après un délai de trois minutes puis d'une heure, l'examinateur montre au sujet des paires d'images constituées d'une des images préalablement vues ainsi que d'une nouvelle image à laquelle le sujet n'a jamais été exposé (distracteur). L'examinateur demande au sujet d'indiquer quelle image il a déjà vue au préalable. Un exemple de paire de stimuli est présenté sur la partie droite de la figure. Le DMS48 peut être téléchargé gratuitement (http ://cerco.ups-tlse.fr/DMS48).
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de Lewy, tout en contribuant au diagnostic différentiel avec la maladie de Parkinson (Mondon et al., 2007). Ainsi, si des troubles de la mémoire de reconnaissance visuelle sont en faveur d'une MA chez des patients aMCI, quand elles sont associées à des fluctuations cognitives et des signes extrapyramidaux, ces perturbations doivent orienter vers une maladie à Corps de Lewy. Par ailleurs, il est évident que le diagnostic des maladies dégénératives repose sur la convergence de l'approche neuropsychologique avec la clinique, les données de la neuroimagerie et de la biologie, mais également que cette approche implique l'utilisation de plusieurs types de tâches évaluant la mémoire et toutes les autres fonctions cognitives. Enfin, les travaux cités ci-dessus s'appliquent à la forme la plus fréquente de la MA, avec des troubles mnésiques inauguraux, mais pas aux formes « néocorticales » de cette maladie dont la symptomatologie initiale concerne d'autres fonctions cognitives.
CONCLUSION Dans le cadre du diagnostic des maladies dégénératives du cortex cérébral, il paraît primordial que l'approche neuropsychologique prenne en compte les systèmes neuraux atteints par les processus pathologiques. Nous avons illustré cette démarche dans le cadre du diagnostic précoce de la MA, mais ce type d'approche est susceptible de s'appliquer à toutes les affections neurodégénératives et à tous les stades de ces maladies. Ainsi, l'analyse clinique est indispensable pour poser une hypothèse relative au système neural atteint, afin de faciliter l'orientation diagnostique, comme le montre l'étroite relation entre la sémiologie et la protéinopathie responsable des lésions dégénératives (Snowden et al., 2011). Pour développer des outils diagnostics plus performants, il paraît souhaitable de développer une approche qui combine la neuropsychologie avec les méthodes de la neuroimagerie et/ou de l'électrophysiologie. Les outils ainsi développés pourraient alors être considérés comme des « biomarqueurs cognitifs » et à ce titre contribuer au diagnostic en tant qu'indicateurs de processus biologiques normaux, pathologiques ou de réponse pharmacologiques à une intervention thérapeutique de type disease modifying.
Points essentiels La MA et les syndromes apparentés sont en
relation étroite avec des systèmes anatomofonctionnels. L'analyse clinique des symptômes et la compréhension de la dysfonction des systèmes anatomo-fonctionnels atteints contribue de manière significative au diagnostic. Le diagnostic précoce devrait s'orienter vers l'évaluation du système anatomo-fonctionnel altéré aux stades les plus précoces de la maladie.
Démences et biomarqueurs Déclaration d'intérêts Les auteurs déclarent ne pas avoir de conflits d'intérêts en relation avec cet article. Remerciements Nous remercions Eve Tramoni, Natalina Gour, Michèle Balzamo, Marie-Luce Royere et Caroline Latger-Florence pour leur contribution. Ce travail a reçu un soutien financier par AP–HM PHRC 2001/54 et France Alzheimer.
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