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www.sciencedirect.com Médecine et maladies infectieuses 43 (2013) 254–257
Lettres à la rédaction Arthrite à Paracoccus yeei Arthritis due to Paracoccus yeei
Mots clés : Arthrite ; Paracoccus ; PCR ARN 16S Keywords: Septic arthritis; Paracoccus; 16S rRNA PCR
1. Introduction Paracoccus yeei est une bactérie environnementale réputée comme faiblement pathogène chez l’immunocompétent, mais de démembrement assez récent et pouvant facilement être confondue avec un staphylocoque à coagulase négative. Le premier cas d’infection humaine documentée a été publié en 2003 [1], date à laquelle les premières séquences génétiques d’ARNr 16S ont été disponibles sur la base GenBank (http://www.ncbi.nlm.nih.gov/GenBank/). Nous rapportons le premier cas d’infection ostéoarticulaire à P. yeei documentée par la présence d’ARNr 16S dans le liquide synovial. 2. Observation Une femme de 78 ans était hospitalisée pour monoarthrite aiguë fébrile de hanche gauche évoluant depuis 15 jours. Ses antécédents étaient un diabète de type 2 non insulino-requérant, une polyarthrite rhumatoïde peu sévère, évoluant depuis plus de 20 ans, traitée par corticothérapie seule (8 mg/j), et un adénocarcinome colique droit abcédé, opéré dix mois auparavant et récemment traité par chimiothérapie (protocole LV5FU2). L’examen clinique initial notait une fièvre autour de 39 ◦ C, une raideur articulaire coxofémorale globale gauche responsable d’une impotence fonctionnelle majeure imposant l’usage de deux cannes béquilles. La biologie révélait une hyperleucocytose modérée à 13 000/mm3 associée à un syndrome inflammatoire biologique marqué par une CRP à 230 mg/L. La radiographie de bassin ne montrait aucune anomalie de l’articulation coxofémorale gauche. L’échographie de la hanche gauche retrouvait une synovite associée à un épanchement coxofémoral. La ponction articulaire ramenait un liquide trouble, puriforme, composé de 91 000/mm3 éléments nucléés dont 97 % de polynucléaires neutrophiles, sans microcristaux à l’examen microscopique. 0399-077X/$ – see front matter © 2013 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
L’examen direct bactériologique était négatif ainsi que les cultures prolongées à 15 jours. L’ECBU et les hémocultures réalisées avant toute antibiothérapie étaient négatives. La recherche de bactérie par la technique de PCR universelle ARNr 16S était positive et retrouvait après séquenc¸age la présence de P. yeei. L’ADN était extrait avec le kit QIAamp DNA Mini Kit® (Qiagen, Courtabœuf, France). Les produits de PCR étaient purifiés en utilisant le kit Xterminator BigDye® (Applied Biosystems). Le séquenc¸age était réalisé en utilisant le séquenceur ABI Prism 3130, puis les séquences ont été comparées avec la base de données de la GenBank par l’algorithme BLAST nucléotides. Devant la forte suspicion d’arthrite septique, une antibiothérapie probabiliste par ceftriaxone 4 g/j était instaurée immédiatement après la ponction articulaire. L’évolution clinique était très rapidement favorable avec une apyrexie obtenue j2, une régression quasi complète des douleurs à j5 et une CRP inférieure à 10 mg/L à j7, autorisant la sortie de la patiente au domicile sous ceftriaxone 2 g/j pour une durée totale de quatre semaines d’antibiotiques. La consultation à un mois d’évolution ne notait aucune séquelle fonctionnelle ou radiographique.
3. Discussion P. yeei est une bactérie aérobie du genre Rhodobacteraceae. Il s’agit d’un coccobacille à Gram négatif, mais il peut être Gram variable, et être confondu avec un staphylocoque à coagulase négative. Daneshvar et al. [1] ont proposé le nom P. yeei pour un premier groupe CDC EO-2 en 2003. Le genre Paracoccus comprend 32 espèces différentes. Leur croissance optimale est détectée à 35 ◦ C, plutôt qu’entre 20 et 25 ◦ C. P. yeei forme des petites colonies convexes de 0,5 à 1 mm de diamètre, de couleur blanchâtre ou grisâtre, sur gélose Columbia au sang de mouton et gélose chocolat, devenant très mucoïde après 72 heures, ressemblant alors à un staphylocoque à coagulase négative. La croissance sur gélose MacConkey est retardée (> 72 h) ou négative. P. yeei est catalase + , fortement oxydase + , producteur d’une nitrate réductase, indole négatif et saccharolytique. Plusieurs espèces de Paracoccus sp. ont été utilisées comme dénitrifiant (utilisation de bactéries pour transformer les nitrates), mais P. yeei est surtout une bactérie de l’environnement associée aux sols, saumures, milieux aquatiques, ou boues activées en usine de traitement des eaux usées [2]. Certains auteurs
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ont évoqué la possibilité que ces bactéries soient entretenues et/ou transmises par les tiques [3]. Le cas rapporté ici est à notre connaissance le premier cas d’infection ostéoarticulaire à P. yeei. Seuls quelques cas d’infections à P. yeei ont été publiés [4–6] : une pneumopathie infectieuse, une infection de liquide de dialyse péritonéal, une myocardite chez un transplanté cardiaque et plusieurs infections oculaires. Notre patiente présentait plusieurs facteurs de risque d’arthrite septique comme le diabète, la polyarthrite rhumatoïde. Elle présentait également un certain degré d’immunodépression : corticothérapie au long cours, chimiothérapie récente, diabète. La plupart des cas rapportés d’infection humaine à P. yeei étaient également immunodéprimés. L’absence de culture positive, preuve diagnostique formelle d’arthrite septique, doit nous interroger sur l’implication réelle de P. yeei détecté par la PCR ARN 16S du liquide synovial. Aucune antibiothérapie préalable à la ponction de hanche n’a été retrouvée. Sur un plan technique, l’ADN a été extrait avec le kit QIAamp DNA Mini Kit® , selon le protocole fourni par le fabricant (Qiagen, Courtabœuf, France), et les éluats ont été conservés à − 20 ◦ C. Pour éviter la contamination des échantillons d’ADN, l’isolement de l’ADN a été réalisé dans une hotte à flux laminaire décontaminée quotidiennement par les rayons UV. La présence d’un liquide purulent, composé de plus de 95 % de polynucléaires neutrophiles, sans présence de microcristaux, plaidait pour une origine infectieuse. Il n’y avait pas d’autre atteinte articulaire inflammatoire faisant évoquer une poussée de la polyarthrite. Enfin, l’efficacité rapide des antibiotiques rendait peu probable une évolution naturelle favorable d’un accès aigu au cours d’un rhumatisme inflammatoire chronique. La place de la PCR ARN 16S n’est pas encore bien définie dans le diagnostic des arthrites septiques, mais son intérêt semble réel pour la documentation bactérienne des arthrites septiques à culture négative de l’immunodéprimé [7]. L’antibiothérapie probabiliste par ceftriaxone était choisie pour être active sur les Staphylococcus sp.,méticilline-sensibles, streptococoques et entérobactéries compte tenu de l’âge de la patiente et de l’absence d’hospitalisation récente. Les -lactamines et les fluoroquinolones étaient les principaux antibiotiques utilisés dans les cas décrits dans la littérature [4–7]. Parmi les -lactamines, Wallet et al. [5] retrouvaient des CMI plus basses pour l’amoxicilline (< 0,1 mg/L), et la carboxy-pénicilline (< 0,5 mg/L) que pour les céphalosporines de troisième génération (C3G) (1 mg/L) tandis que les céphalosporines de première génération (C1G) étaient résistantes.
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G. Coiffier a,∗,c A. Gougeon b,c J.-D. Albert a,c H. Le Bars b a Service de rhumatologie, hôpital Sud, CHU de Rennes, 16, boulevard de Bulgarie, BP 90347, 35203 Rennes cedex 2, France b Laboratoire de bactériologie, hôpital Pontchaillou, CHU de Rennes, 2, rue Henri-Le-Guilloux, 35043 Rennes cedex, France c Centre de référence en infections ostéoarticulaires complexes du grand ouest (CRIOGO), CHU de Rennes, 35043 Rennes, France ∗ Auteur
correspondant. Adresse e-mail :
[email protected] (G. Coiffier) Rec¸u le 8 f´evrier 2013 Rec¸u sous la forme révisée le 4 mars 2013 Accepté le 25 avril 2013 Disponible sur Internet le 14 juin 2013 http://dx.doi.org/10.1016/j.medmal.2013.04.004
Cervical spondylodiscitis due to Staphylococcus equorum Spondylodiscite cervicale à Staphylococcus equorum
Déclaration d’intérêts
Keywords: Staphylococcus equorum; Spondylodiscitis; Lung abscess; Septicemia
Les auteurs déclarent ne pas avoir de conflits d’intérêts en relation avec cet article.
Mots clés : Staphylococcus equorum ; Spondylodiscite ; Abcès pulmonaire ; Septicémie
Références [1] Daneshvar MI, Hollis DG, Weyant RS, Steigerwalt AG, Whitney AM, Douglas MP, et al. Paracoccus yeeii sp. nov (formerly CDC group EO-2), a
A 63-year-old farmer was admitted to the Douala General Hospital in May 2003, complaining of severe neck pain for the previous six weeks. This was complicated three weeks before consultation by progressive weakness and decreased sensation