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Aspect scanographique du silent sinus syndrome CT-scan findings in “silent sinus syndrome” Nous présentons le cas d’une femme de 22 ans, sans antécédent, qui a consulté en ophtalmologie pour l’apparition d’une asymétrie faciale avec chute de sa paupière supérieure gauche. L’examen clinique a montré un ptosis et une énophtalmie gauche. L’acuité visuelle et l’oculomotricité étaient normales. La patiente était apyrétique. Le scanner des sinus de la face (Figs. 1 et 2) montrait à gauche un comblement partiel du sinus maxillaire et une ostéolyse de ses parois postérolatérale et antérieure, ainsi qu’une ostéolyse du plancher de l’orbite à l’origine d’une ptose de l’œil gauche. Il existait également un comblement ostial ipsilatéral. Le sinus maxillaire controlatéral et les cornets étaient normaux. Le bilan biologique inflammatoire et infectieux (vitesse de sédimentation, protéine C réactive et numération globulaire) était normal. Devant la présentation clinique et radiologique caractéristique, le diagnostic de silent sinus syndrome a été posé. La prise en charge thérapeutique a consisté en une ponction biopsie sinusienne gauche par voie de Cadwell Luc avec mise en place d’un drain afin de rétablir une pression intrasinusienne normale. Le prélèvement était aseptique et l’examen anatomopathologique a mis en évidence un amas de tissu mucoïde et de cellules éosinophiles compatible avec une sinusite chronique. Une reconstruction chirurgicale du plancher de l’orbite a secondairement été réalisée afin de corriger l’énophtalmie. Le silent sinus syndrome est caractérisé par une énophtalmie progressive avec ptose du globe oculaire liée à une diminution de la pression dans le sinus maxillaire par hypoventilation chronique. Ce phénomène est connu depuis 1964 grâce à Montgomery [4] et le terme de « silent sinus
Figure 1 Scanner des sinus de la face sans injection de produit de contraste, en reconstruction coronale. Atélectasie du sinus maxillaire gauche par obstruction du méat moyen (flèche longue). Ptose oculaire gauche liée à la lyse du plancher de l’orbite (flèches courtes). Le processus unciné est attiré latéralement contre le plancher de l’orbite, occluant le méat moyen.
Figure 2 Scanner des sinus de la face en coupe axiale, en fenêtre osseuse (2a) et partie molle (2b). Atélectasie du sinus maxillaire gauche avec lyse et rétraction des parois antérieures et postérieures (flèches). Comblement partiel spontanément hyperdense (*) en rapport avec le contenu mucoïde chronique.
syndrome » a été utilisé pour la première fois en 1994 par Davidson et al. [5]. La sémiologie radiologique est typique si elle associe une obstruction ostioméatale, un comblement plus ou moins complet du sinus, parfois des anomalies du sinus maxillaire controlatéral et surtout une lyse des parois sinusiennes et du plancher orbitaire allant de l’amincissement à la déhiscence [2]. Il en résulte un aspect scanographique caractéristique de rétraction des parois du sinus maxillaire avec diminution du volume du sinus. La clinique est évocatrice devant une énophtalmie indolore (pseudoptôsis) avec diplopie [1] et l’absence d’antécédent, en particulier de sinusite. Cette affection atteint l’adulte à tous les âges [1] avec un sex-ratio égal à 1. Différentes théories sur la physiopathologie ont été proposées. Elles ont en commun une obstruction ostioméatale initiale, par apposition de la paroi latérale du processus unciné contre la paroi inféromédiale de l’orbite, responsable d’une réduction de l’aération de l’antre. Ce défaut d’aération, entraînerait une dépression chronique intrasinusienne et une atélectasie des parois du sinus [2,3,5]. Il s’agit d’une entité encore peu connue des radiologues [3] et probablement sous-diagnostiquée. Cette entité pose deux principaux problèmes : esthétique et fonctionnel oculaire. Dès lors que le diagnostic est posé, il convient d’en arrêter l’évolution. Cette étape passe par une ponction drainage du sinus afin de rétablir la pression normale, bien que dans quelques cas le recours à la chirurgie ne semble pas nécessaire [3]. La seconde étape parfois nécessaire est la reconstruction du plancher orbitaire afin de réduire l’énophtalmie et de corriger un éventuel trouble fonctionnel oculaire.
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Références [1] Boyd JH, Yaffee K, Holds J. Maxillary sinus atelectasis with enophtalmos. Ann Otol Rhinol Laryngol 1998;107:34–9. [2] Gillman GS, Schaitkin BM, May M. Asymptomatic enophtalmos: the silent sinus syndrome. Am J Rhinol 1999;13:459–62. [3] Illner A, Christian Davidson H, Ric Harnsberger H, Hoffman J. The silent sinus syndrome: clinical and radiographic findings. AJR 2002;178:503–6. [4] Montgomery WW. Mucocele of the maxillary sinus causing enophthalmos. Eye Ear Nose Throat Monthly 1964;43:41–4. [5] Davidson JK, Soparkar CN, Williams JB, Patrinely JR. Negative sinus pressure and normal predisease imaging in silent sinus syndrome. Arch Ophthalmol 1999;117:1653–4.
C. Brochart S. Blanpain P. Lehmann Service de radiologie A, hôpital Nord, place Victor-Pauchet, 80054 Amiens cedex 01, France A. Smail Service de médecine interne, hôpital Nord, place Victor-Pauchet, 80054 Amiens cedex 01, France
S. Testelin Service de stomatologie et de chirurgie maxillofaciale, hôpital Nord, place Victor-Pauchet, 80054 Amiens cedex 01, France M.-C. Lacour Service de neuroradiologie, hôpital Bicêtre, 78, avenue du Général-Leclerc, 94275 le Kremlin-Bicêtre cedex, France J.-P. Ducroix V. Salle Service de médecine interne, hôpital Nord, place Victor-Pauchet, 80054 Amiens cedex 01, France G. Saliou* Service de neuroradiologie, hôpital Bicêtre, 78, avenue du Général-Leclerc, 94275 le Kremlin-Bicêtre cedex, France Adresse e-mail :
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F. Demuynck H. Hassani Service de radiologie A, hôpital Nord, place Victor-Pauchet, 80054 Amiens cedex 01, France
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