J P~diatr Pudriculture 2002 ; 15 : 377-85 © 2002 t~ditions scientifiques et m6dicales Elsevier SAS. Tous droits rdserv~s
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aspects neuromoteurs du d veloppement du jeune enfant applications aux troubles de I'apprentissage L. Voivre-Douret Professeur des universit~s en psychalogie du d~veloppement, Paris X, directeur de recherche INSERM U483, Necker-Enfants Malades, neuropsychologue clinicienne et psychomotricienne-cadre de sant6 AP-HP
;us de d~veloppement du cerveau humain R
appelons que le ddveloppement du cerveau humain est r~alisd au cours de 1 ontogen~se. Le syst~me nerveux central de I homme se met en place dans la premiere moiti~ de la grossesse par une prolif6ration cellulaire accompagnde d'une migration cellulaire qui va former les diffdrentes couches neuronales du cortex. Des anomalies de la migration neurale peuvent exister lorsque des substances ndfastes, comme la cocaine par exemple [11], sont apport~es. Une progression graduelle des processus (prolifdration globale, migration neuronale et gliale, croissance axonale, croissance dendritique et synaptique, mort neuronale, rdgression axonale et synaptique) continue apr~s la naissance, la mydinisation ddbutant dans la deuxi~me moitid de la grossesse, autour de 20 ~t 24 semaines de gestation. La mise en place des structures sensorielles in utero est rdalisde selon un ordre fonctionnel precis. Tr~s pr6coce pour le syst~me cutan6 proprioceptif et le syst~me vestibulaire, elle est suivie par les structures des syst~mes gustatif, olfactif, auditif et enfin visuel, sans que les structures nerveuses soient compl~tement matures ~t la naissance. la naissance, le b6b~ a ddjfi des rdponses proprioceptives et kinesthdsiques, ce qui est important dans l'6valuation du d6veloppement. JOURNAL DE P~'DIATRIE ET DE PUERICULTURE n ° 7 - 2002
Edvolution de la maturation des voies motrices ddbute avec la mydlinisation pendant la pdriode de gestation et la maturation des voles sous-corticospinales issue de la rdticulde et des noyaux du tronc cdrdbral. La progression de la maturation s'effectue dans le sens caudocdphalique (des pieds vers la tSte) sur le plan du tonus passif et du tonus actif, assurant la fonction antigravitaire, la motricit6, la fonction r6flexe et la posture. Eenfant est tr~s hypotonique au d~but de la gestation, avec u n dcartement de tousles membres et des angles tr~s ouverts au niveau du tonus passif. Plus on se rapproche de la naissance, plus les angles sont fermds, le bdbd arrivant/t la naissance en hyperflexion. Sur le plan du tonus de l'axe, il y a un redressement progressifdu tonus actif, l'enfant rdpondant progressivement au niveau des jambes, du tronc, puis de la t~te [1, 3]. On met en dvidence cette r6ponse de redressement, avec la marche automatique lorsque l'enfant est mis debout fi la naissance. D~s 32 semaines de gestation, la mydlinisation progressive des voies motrices corticospinales (issues du cortex) intervient dans le contr61e de la posture et de la motricitd volontaire dans le sens cdphalocaudal et proximodistal. En effet, les fonctions inhibitrices ou excitatrices des voles corticospinales sur les motoneurones de la come antdrieure de la moelle va permettre un rel~chement progressif du tonus passif et un maintien progressif de l'axe postural, permettant la tenue de 377
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la t~te, puis du tronc, et enfin la station debout et la marche. I1 est indispensable d'dvaluer ~l la naissance un marqueur essentiel de la maturation des voles motrices : l'dquilibre parfait entre l'activit~ des muscles extenseurs et fldchisseurs du cou, qui traduit la maturation des voles sous-corticales et corticospinales. l'examen, l'enfant ne tient pas sa tete, mais un dquilibre est possible pendant 3 secondes environ lorsque l'enfant, empaumd au niveau des dpaules, est redressd de la position couchde vers la position assise (figure la). Sa tete passe par un maintien actif dans l'axe, quelques secondes seulement, qui atteste l'activitd des muscles fldchisseurs (figure lb), puis tombe en avant (figure Ic). La manoeuvre inverse, assis-couchd, permet de retrouver le meme 8quilibre de la t&e pendant quelques secondes avant qu'elle ne retombe en arri~re. Elle atteste un bon fonctionnement des muscles extenseurs. AprSs 3 mois de vie, physiologiquement, le tonus passif dvolue vers une ouverture des angles, au niveau des membres supdrieurs et des membres infdrieurs, pour permettre d'une part la prdhension et d'autre part la stabilitd de la station assise future. En meme temps que le tonus actif se renforce au niveau du tronc, il est ndcessaire que les angles s'ouvrent pour dviter que l'enfant bascule en arri~re. I1 est important de prendre en compte les stades transitoires du ddveloppement neuropsychomoteur, ndcessaires pour les acquisitions et les capacitds d'apprentissage ultdrieures.
Figure 1a. Test de I'~quilibre de la t~te.
Les grands stades du ddveloppement sont: la tenue de la tete entre 2 et 4 mois (pathologique audel~i), l'acquisition de la station assise dans la limite des 9 mois et racquisition de la marche dans la limite des 18 mois.
Figure 1b. Test de I'activit~ des muscles fl~chisseurs.
I1 existe une augmentation des degrds de libertd des mouvements au cours du ddveloppement. In utero, lessens se mettent en place, avec la crdation de boucles sensitivo-sensorielles et sensori-motrices puis perceptivo-motrices. Le foetus peut bouger les globes oculaires et fake des mouvements in utero, bien ddcrits ~i l'&hographie. La motilitd de l'enfant se construit progressivement, trSs dgocentrde au ddbut, puis s'exocentrant progressivement. Un mo&le interne de la perception [25, 28] se construit progressivement grace ~ une engrammation neurophysiologique des diffdrentes impressions sensitives et motrices. Eexpdrience propre des fonctions du syst~me nerveux instaure progressivement une corticalisation de chacun des syst~mes sensoriel et moteur, partir de cartes corticales mettant en corrdlation la 378
Figure lc. ka t~te tombe en avant. J O U R N A L DE PEDIATRIE ET DE PUERICULTURE n ° 7 - 2 0 0 2
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commande motrice et l'effet sensoriel qui en r&ulte. Des r&eaux neuronaux s'instaurent, par l'exercice et par l'exp&ience comme la r~p~tition du mouvement par exemple, ce qui permet de maintenir une autostimulation neurophysiologique c&~brale permanente. Le b6b6 encode ainsi des propridt6s perceptives, objectives et actives d'~v~nements ou de sensations qui proviennent de lui-m~me (<),tout en int~grant les composantes dmotionnelles. Cet encodage est r6alisd ~t un <stockde sous forme de mdmoire. Un traitement interm~diaire peut ~tre r~alisd grace aux neurones de mise en correspondance ou neurones ,~ match >~ [6, 8], qui mettent en relation deux parties du corps (la main droite et la main gauche par
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exemple). Ces parties du corps peuvent devenir ensuite des buts pour les autres articulations, le bdbd regarde sa main par exemple, ~t un niveau intraparidtal et occipital. Le bdbd peut ainsi contr61er progressivement l'ensemble des segments de son corps grace ~ cette mise en correspondance multiarticulaire [28] (figure 2). Des gains posturaux successifs compldmentaires lui permettront de mieux se connakre ,< en action )>et d'amdliorer sa perception spatiotemporelle. Le geste v a se lib&er, en correspondance avec un niveau de traitement diff&encid au niveau neuronal, et l'activitd motrice s'organiser en fonction d'un but atteindre exocentrd (niveau temporal) par rapport au rdfdrentiel corporel, ~i l'origine d'une variation expo-
Neurone "Ma~.h"
Neurone '~/[atch"
Main
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Regard
Neurone "Match"
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Tronc
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Tron¢ Main Regard
Figure 2. Mod&le des bases neuronales de I'acquisition du geste. Neurone ,~ Match ,, : neurone de mise en correspondance entre des articulations diff~rentes mises en jeu progressivement. JOURNALDE PI~DIATRIEEl" DE PUI~RICULTUREn° 7- 2002
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nentieUe des conduites perceptives. La phase optimale permet une gestion efflcace du corps, associ6e ~t une ddpense d'dnergie adaptde et calibrde ~i l'action, les mouvements sdlectionnds pouvant etre soit coordonnds, soit dissocids. Ces prdrequis sont automatisds ~i un niveau d'intdgration prdconscient sous forme de schemes, disponibles dans un espace d'action-perception reprdsentd et identifid ~i l'aide d'un rdfdrentiel stable extracorporel (exocentrd) [25. 28]. La qualitd des activitds toniques (tonicitd globale ou souplesse segmentaire des gestes manuels) et de la rdgulation cdrdbelleuse rdpondent de la qualitd des mouvements intentionnels adaptds ~i un but prenant en compte la perception de l'espace et du temps. I1 existe donc un gradient d'organisation des acquisitions, c'est-~i-dire un ordre de ddveloppement (figure 3) contribuant en retour ~i un modelage struc-
turel des zones cdrdbrales concerndes en cours de maturation [25, 28]. Le r61e de l'affectivitd dans le ddveloppement est capital, et se fait sur un mode transversal. L'ensemble des couches cdrdbrales est influencd par le syst~me limbique, si&ge de l'dmotion [9], qui est un moteur et un garant du ddveloppement, et qu'il faut solliciter sans cesse. Le ddveloppement ne se fait pas par la surstimulation, mais par le plaisir, plaisir de ressentir, de ddcouvrir et de connaltre. L'enfant prend du plaisir ~i ddcouvrir les mouvements qu'il peut initier avec son corps et qui mettent en jeu des sensations tactiles, vestibulaires et kinesthdsiques. Le comportement moteur du sujet est inscrit au niveau c6r6bral, mais l'influence du milieu oriente le choix des comportements en fonction des particularit~s de l'environnement.
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Figure 3. Interpretation neurale des apprentissages des coordinations et s~quences matrices. 380
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La vitesse de d&,eloppement des acquisitions ddpend de l'intensitd de l'exp~rience vdcue (exercices cumulds et capacit~s de traitement), elle-m~me lide aux qualit~s propres de l'affectivitd, qui sous-tend et oriente le ddsir d'agir et d'apprendre. Ce n'est pas la datation des dtapes motrices qui est la plus importante mais leur chronologie, qui permet de prendre en compte les aspects quantitatifs (dtapes de transition) ainsi que les aspects qualitatifs (niveaux de coordination) [25, 28].
chelles standardis es du d veloppement de I'enfant La premiere dchelle de d&eloppement de l'enfant standardisde est l'dchelle de Gesell, rdalisde en 1947. En 1951, l'dchelle de Brunet-Lezine est crdde, puis dtalonnde de nouveau en 1997. Cette dchelle cornporte des items posturaux, de coordination, de langage et de sociabilitd, les acquisitions dtant notifides de mois en mois. Le nombre de points obtenus aux diffdrents items ~lun age donnd permet d'obtenir un quotient de d~veloppement (QD) calcul~ ~ partir de la totalit~ des points obtenus. Le QD n'a aucune relation avec le QI. Les scores partiels calculds (postural, coordination, langage, sociabilitY) sont ~galement int~ressants. Les items qui concernent la coordination et le comportement postural ne sont pas choisis dans cette dchelle sur un plan de l'organisation de la fonction neuromotrice par le cerveau, mais sur des aspects de r~ponse motrice. ActueUement, on a plut6t tendance utiliser des tests dvaluant une fonction prdcise de fa~on fine plut6t que des tests globaux, o~a diffdrents facteurs peuvent intervenir. Par exemple, l'enfant obtient un point dans l'dchelle de Brunet-Lezine lorsqu'il est capable de rdaliser l'item ~,se retourner du c6td sur le dos ,~. Tous les enfants pathologiques en hyperextension en sont capables, ce qui leur donne des points de ddveloppement, alors que cet item postural ne correspond pas fi une vdritable coordination. Lorsqu'un enfant ne remplit pas certains items, il est important de les noter, car ils peuvent ~tre rdvdlateurs de troubles sous-jacents, l'enfant compensant son QD par d'autres fonctions prddominantes. Un enfant peut, par exemple, comprendre une fonction d'empilement mais ne pas pouvoir la rdaliser en raison d'un probl~me d'organisation motrice. Beaucoup de questions s'adressent aux parents dans cette dchelle, ce qui est ddlicat, ceux-ci ne se rappelant pas toujours de fa~on prdcise les capacitds de l'enfant. JOURNAL DE PEDIATRIE ET DE PUI~RICULTURE n ° 7 - 2 0 0 2
La prdsentation des normes statistiques [25, 28] diff~re suivant les auteurs des diffdrentes dchelles [4, 5, 7, 12, 13-16]. Certains auteurs utilisent les pourcentages, d'autres les frdquences ou encore les m6dianes. Plus les 6chelles sont rdcentes et plus les 6carts-types sont pris en compte, ce qui permet d'avoir une id6e de la dispersion. I1 existe des diffdrences dans la position de couchage des bdb6s en fonction des ~poques o0 ont dt6 r6alis6es les 6chelles, ce qui a une influence sur les acquisitions motrices [29, 32]. L'dchelle de Bayley raise au point en 1969 a 6td rddtalonnde dans les anndes 1995. Edchelle de Pickler de 1969 a ~td rdalisde chez des enfants observds en pouponni~res. Edchelle de Capute, 6chelle amdricaine mise au point en 1985, montre des diff6rences entre les populations noires et blanches, avec un mois d'avance dans la population noire, ce qui est dgalement retrouvd dans nos ~aluations. I1 est ndcessaire de connaltre avec quelle dchelle renfant est dvalud, un d6calage d'un mois dtant important chez les nourrissons. Des variations importantes, de 1 mois ~ 4 mois, existent dans les dates d'acquisition des items suivant les dchelles utilisdes. Le maintien de la t~te, par exemple, s'acquiert en moyenne ~l 2 mois, 3 mois ou encore 4 mois et 18 jours, selon les dcheUes. Les items choisis ne sont pas identiques dans toutes les dchelles, qui ont peu d'items communs. Dans certaines ne sont 6tudides que les grandes dtapes (station assise, station debout), alors que dans d'autres, comme les 6chelles de Pickler et de Bayley, des items transitoires sont utilisds. Les items qui permettent d'accdder fi une dtape, items de transitions cindtiques comme le retournement ou les pivotements, sont tr~s peu ddcrits dans ces dchelles, alors que ce sont des dldments essentiels de l'dvaluation, pr6fdrables fi l'observation d'une statique posturale passive. I~tre capable de changer de position demande un niveau de coordination important et constitue un ddbut d'autonomie. Un bon niveau de coordination motrice permet fi un enfant de prendre une position, de la contr61er, de changer de position et de reprendre la position initiale. A l'oppos~, les enfants ~ cosy ~,ou les enfants ~ potiches ),, placds dans un cosy toute la journde, ont un ddveloppement neuromoteur spontand tr~s pauvre, ~tl'origine de certaines maladresses du corps. I1 faut dgalement souligner que les dchelles citdes sont des dtudes transversales, un groupe d'enfants ayant dtd observd fi un ~ige donnd. La nouvelle dchelle prdsentde plus loin est basde sur un suivi longitudinal 381
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de l'enfant tenant compte de l'enchalnement cindtique des acquisitions. La position de couchage de l'enfant est tr~s importante e t a un r61e sur l'organisation du d~veloppement psychomoteur de l'enfant [10, 21, 23, 30].
~ i s e au point d'une (~chelle de d~veloppement moteur des 0-4 ans Edchelle fonctionnelle de d~veloppement moteur des 0 ~t 4 ans est divis~e en deux parties, 0-12 mois et 13 mois-4 ans [25, 27]. L'dchelle de ddveloppement moteur des 0-4 ans est une dchelle standardis~e (1997) qui dvalue ~i la fois le niveau de coordination global et le niveau de coordination fine. Hie est composde d'une ~chelle d'items posturomoteurs et locomoteurs et d'une dchelle de prehension-coordination visuomanuelle [25, 26]. Cette dchelle prend en compte l'~ge corrigd de l'enfant jusqu'~i deux ans, sa position de couchage ainsi que son mode de garde. Edvaluation a dt~ rdalis~e chez des enfants en creche, de fagon longitudinale, ce qui permet de ,~ normer ~, les acquisitions transitoires dynamiques avant l'acc~s ~l une nouvelle acquisition de compdtence motrice, les dispersions dtant rdduites pour l'enchalnement des items d'un m~me enfant. Dans les trois premiers jours apr~s la naissance, on observe l'oculomotricitd, avec le suivi de la cible. E~quilibre lateral, les retournements guides, sont des dpreuves que l'on dolt obtenir au d~but de la vie. Un enfant dolt tenir son dquilibre latdral ~i la naissance. Un enfant mis sur le c6td ~t la naissance est capable de tenir sa position (figure 4), car il existe un ~quilibre parfait entre les muscles fldchisseurs et les muscles extenseurs. I1 en est incapable en cas de malposition posturale in utero ~l type de torticolis ou d'hyperextension, ou encore en raison d'une cause neurologique qui dolt conduire ~t des investigations plus pouss~es. La tate dolt ~tre dans l'axe du tronc et lorsque l'enfant est maintenu debout, il y a un redressement des membres infdrieurs, puis du tronc et de la t~te (figure 5). Lorsque l'enfant est mis en position semi-assise, on a un relfichement des membres supdrieurs, possible d~s la naissance (figure 6). Eenfant ~i la naissance ales poings fermds, mais il est capable d'ouvrir les mains. II a des mouvements d'orientation dans t o u s l e s sens des doigts. Cette ouverture est un bon signe. Entre 2 et 3 mois, la tenue de la t~te est v~rifi~e en amenant l'enfant en station assise au bord de la table 382
pour ne pas ~tre g4n4 par les membres inf4rieurs encore trhs ferm4s, et pour v4rifier la tenue de l'axe du tronc. On a une parfaite tenue dans l'axe tronc-t4te. Le retournement est possible a la naissance, l'enfant orientant sa t4te et passant son bras avec une rotation du tronc, tout en 4tant guid4 par les membres inf4rieurs (figure 7). Cette coordination est r4alisable de fagon dissoci4e au niveau des parties du corps en jeu, sauf s'il existe des contraintes neurologiques ou posturales, l'enfant n'ayant alors pas la possibilit4 de l'ex4cuter aussi harmonieusement. Vers 6 mois, l'enfant effectuera le retournement tout seul. La station tripodique est possible ~i 5 mois, l'enfant tenant ~t l'aide de ses mains pos4es en avant. Tourner la t4te sans perdre son 4quilibre en station assise est rdalisable vers 7 mois. La station assise est un dl4ment important, mais qui reste pauvre. Eexamen dolt appr4cier la capacit4 de l'enfant ~ pivoter pour aller chercher un objet plac4 ~i c6t4 de lui, ce qui permet d'observer s'il bascule, s'il est d4s4quilibr4 et s'il est capable de reprendre sa position de lui-meme. Vers 9 mois, l'enfant va pouvoir passer par la quadrupddie et organiser sa coordination de fa~on ~i 4tre autonome. I1 peut se mettre assis seul. I1 est important de savoir qu'il existe des diff4rences de comportement moteur en fonction de la position de couchage pendant la premihre ann4e de vie. En particulier, l'utilisation exclusive du d4cubitus dorsal, par rapport ~i une alternance de positions, sur le c6td ou sur le dos et sur le c6t~, rend difficile l'acc~s ~i des acquisitions transitoires dynamiques telles que les retournements en position couchde, le pivotement en station assise, le ramper h quatre pattes, et conduit fi une marche autonome plus tardive [29, 31]. L'autonomie qu'acquiert l'enfant va lui permettre de d~velopper et d'afiqner ses connaissances cognitives, le mouvement s'dgocentrant vers un but. La connaissance des objets alentours est constructive dans le dfiveloppement de l'enfant, pour sa motilitd propre et pour son propre savoir. L'enfant va rechercher sans cesse ~l construire son d~veloppement et ~ acqudrir des stratdgies pour accdder ~l un but [25, 28]. Un enfant qui est souvent portd, qu'on laisse peu bouger au sol ou qui est laissfi longtemps dans un cosy, a peu de richesse d'organisation du mouvement, connait mal son corps et est effrayd lorsqu'il se trouve dans une situation nouvelle. Lorsqu'il est devant un obstacle, cet enfant peut tomber, parce qu'il n'a pas d'exp~rience du corps. Une attitude comportementale rdgressive peut ~tre attribude ~i un probl~me psychoaffectif, sans tenir compte de la confiance qu'a l'enfant dans son corps et J O U R N A L DE PI~DIATRIE El" DE pUI~RICULTURE n ° 7 - 2 0 0 2
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Figure 4. A la naissonce, I'enfant tient so position. Figure 6. Mis en position semi-assise, il peut y avoir un rel6chement des membres supdrieurs, d~s la naissance.
Figure 5. ~, la naissance, il y a redressement des membres inf~rieurs, du tronc puis de la t~,te.
Figure 7. ~. la naissance, le retoumement est possible, guidd par les rnembres infdrieurs.
du niveau de coordination qu'il a acquis lui permettant une autor6gulation de sol. L'dchelle de ddveloppement moteur des 0-4 ans est simple et permet d'obtenir un niveau moteur fonctionnel moyen en fonction de l'age de l'enfant. Tous les items posturomoteurs sont explicit6s, avec l'age moyen d'acquisition et l'6cart-type, et exprim6s en jours puis en mois. Les dtapes transitoires sont pr6cis6es, mais il n'y a pas beaucoup d'items en fonction des ages. Des d~monstrations sont ~t faire en fonction des items, pour 6viter une mauvaise comprdhension de la consigne.
I1 existe une repr6sentation graphique des normes d'acquisition en fonction de l'age afln de fournir un contr61e visualisd du d~veloppement de l'enfant en fonction des 6carts-types autour de la moyenne d'age d'acquisition.
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L'~chelle permet de situer le niveau fonctionnel moyen de l'enfant par rapport ~i celui des autres enfants de son age. ~ 4 mois par exemple, l'enfant doit avoir acquis les quelques items de 4 mois ainsi que les items des deux tranches d'age antdrieures, 3 mois et 2 mois. L'dchelle a dt~ con~ue de fa~on ~ ne pas additionner et ainsi compenser un d6ficit. 383
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Le niveau moteur de l'enfant correspond ~l celui du dernier item soumis, s'il a acquis ses items moteurs ant&ieurs, ce qui permet d'dvaluer un niveau de coordination. En ce qui concerne la prdhension, une &olution du mouvement de la main et des diffdrentes prises, ainsi que de la coordination visuomanuelle avec l'dcart-type et l'fige moyen d'acquisition sont prdcisds. Rep&er un probl~me de fa~on prdcoce est important car les conseils donn& tr~s t6t aux parents, par rapport ~i l'environnement de l'enfant (jouets, dquipements...), les postures et les sollicitations motrices [20, 24] fi lui proposer, peuvent permettre d'accompagner au mieux son ddveloppement et dviter de rentrer dans une rddducation active, la plasticitd cdrdbrale dtant importante ~i cet ~tge. I1 est int&essant de favoriser, d'accompagner, de soutenir, voire de guider si ndcessaire le d~veloppement de renfant, en respectant son rythme propre, pour ne pas tomber dans la sur-stimulation. Les stimulations doivent rdpondre aux besoins de chacun, en privil~giant la qualit~ sur la quantitd, tout en appr~ciant la qualitd de l'interaction parent-enfant. Les troubles du comportement sont gdndralement les premiers signes qui rdv~lent un probl~me chez un enfant en maternelle. Ils sont le plus souvent rapportds ~i des troubles psychologiques, les aspects fonctionnels dtant le plus souvent ndgligds, alors qu'ils qui peuvent etre ~i l'origine du probl~me, une hyperactivitd par exemple [33]. La maturation physiologique, l'environnement physique et social (espace, lieu, mat&iel, amdnagements...) et social de l'enfant (famille, pairs, milieu socioculturel, conditions de vie pratiques et dducatives...), l'dtat psychoaffectif des parents, l'affectivitd du sujet (motivation, loisir, craintes...) sont importants prendre en compte dans le ddveloppement [25, 28, 32]. La motivation de l'enfant, sans laquelle il n'y a pas d'&olution des acquisitions, est essentielle ~i prendre en compte. ]2dtat staturopond&al est dgalement important, l'enfant pouvant etre gend dans ses acquisitions par sa propre corpulence. De m~me, l'intdgritd de l'dquipement neurobiologique, en particulier les syst~mes sensoriels et perceptifs, sont dgalement des dldments indispensables ~l un bon d&eloppement. l~tudier la maturation de l'enfant et son organisation hdmisph&ique permet de faire la part des troubles associds. I1 est important de raisonner sur des dvaluations diff&entielles pour pouvoir isoler une fonction qui peut ~tre perturb& et retentir sur l'apprentissage de la lecture ou sur l'dcriture, et ne pas avoir une vue restrictive sur un seul domaine. 384
Soixante pour cent des enfants qui viennent pour un trouble de l'apprentissage ont des signes neuromoteurs a minima ou bien des troubles de la fonction tactile et gnosique [2, 17, 19, 22]. La fonction praxique est souvent touchde. Un enfant qui a des troubles de l'apprentissage et un ddbut de scolaritd normal ddveloppe des compensations, des stratdgies comportementales et des d&ournements. Ces compensations ont cependant des limites. Devant un trouble des apprentissages, un diagnostic diffdrentiel doit ~tre posd dans le but de mieux comprendre la cause [18]. Le mddecin gdn&aliste et le pddiatre doivent pouvoir s'appuyer sur des bilans &ablis par les spdcialistes des domaines fi explorer (orthophoniste, psychologue, psychomotricien, neurologue, psychiatre, ORL, ophtalmologiste...) afin d'orienter la prise en charge addquate. II est dgalement important de contr61er l'dvolution au cours d'une prise en charge, pour dventuellement revoir les orientations th&apeutiques, la prise en charge pouvant apparaltre inefficace sur un travail ~ long terme. Personne fi part enti~re, possddant sa propre fagon de rdagir et de penser en fonction de son bagage gdndtique, de son ddveloppement biologique et neurophysiologique et de son histoire familiale, dans un contexte environnemental et culturel prdcis, l'~tre humain est unique. I1 est donc ndcessaire de comprendre ses processus de fonctionnement. Chacun peut &re porteur d'une vulndrabilitd gdndtique ~l l'origine de dysfonctionnements qui peuvent s'exprimer au cours de l'existence, lors de la confrontation avec un &dnement par exemple. Le ddveloppement c&dbral doit &re pris en compte, comme ses dispositions initiales. Un m~me probl&me ou une m~me t~tche seront abordds plus facilement par certains, par l'intermddiaire d'une voie sensorielle ou sensori-motrice (visuelle, spatiale, auditivo-verbale, tactile...). i ......................................................... ~f~rences 1
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