Revue du rhumatisme monographies 80 (2013) 120–124
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Atteintes osseuses des mastocytoses systémiques Bone complications of systemic mastocytosis Karine Briot a,b,∗ a b
Université Paris Descartes, Sorbonne Paris Cité, 75025 Paris, France Service de rhumatologie, université Paris Descartes, hôpital Cochin, AP–HP, 27, rue du Faubourg Saint-Jacques, 75014 Paris, France
i n f o
a r t i c l e
Historique de l’article : Accepté le 3 janvier 2013 Disponible sur Internet le 15 avril 2013 Mots clés : Mastocyte Mastocytose Histamine Ostéoporose Fracture vertébrale
r é s u m é Les mastocytoses sont des affections caractérisées par une accumulation tissulaire anormale de mastocytes, le plus souvent dans la peau. Compte tenu de l’accumulation dans la moelle osseuse, des complications osseuses de type ostéoporose avec une augmentation du risque de fractures en particulier vertébrales peuvent être observées. L’atteinte osseuse peut également révéler le diagnostic et il faut savoir y penser en cas d’ostéopathie fragilisante. Les complications osseuses sont liées à l’infiltration par les mastocytes et à la libération de médiateurs par les mastocytes stimulés. Compte tenu du risque osseux, il est utile de faire une mesure de la densité minérale osseuse (DMO) et des radiographies des os en particulier du rachis à la recherche de fractures vertébrales. Il existe peu de données sur l’effet osseux des traitements de la mastocytose. Il est logique de proposer un traitement antiostéoporotique de type bisphosphonates compte tenu de l’augmentation de la résorption osseuse, chez les patients avec antécédent de fracture et/ou densité osseuse basse. © 2013 Société franc¸aise de rhumatologie. Publié par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
a b s t r a c t Keywords: Mast cell Mastocytosis Histamine Osteoporosis Vertebral fracture
Mastocytosis are characterized by an abnormal tissular proliferation of mast cells in at least one visceral organ. Considering the accumulation of mast cells in the bone marrow, bone complications as osteoporosis with an increased risk of vertebral fractures can be observed. Bone involvement may also be the sole presentation of abnormal proliferation and the diagnosis of mastocytosis should be discussed in case of bone fragility in young patients. Bone complications are related to mast cell’s infiltration and to mediators’ release by stimulated mast cells. Considering bone involvement, it is useful to assess bone mineral density (BMD) and to perform bone radiographs, especially for the assessment of vertebral fractures. There are very few data on the bone efficacy of mastocytosis treatments. Antiresorptive treatments as bisphosphonates are logical in patients with history of low trauma fracture and/or low BMD. © 2013 Société franc¸aise de rhumatologie. Published by Elsevier Masson SAS. All rights reserved.
Les mastocytoses sont des affections caractérisées par une accumulation tissulaire anormale de mastocytes, le plus souvent dans la peau. Les mastocytoses cutanées sont des affections bénignes, habituellement spontanément résolutives et essentiellement observées chez l’enfant. On leur oppose les mastocytoses systémiques (MS) qui sont des affections rares (10 % de l’ensemble des mastocytoses), de causes inconnues et dont l’expression clinique est très polymorphe. L’excès de mastocytes est lié à une hyper-activation constitutive du récepteur c-Kit dont il existe plusieurs mutations activatrices de c-Kit identifiées à ce jour dont la principale est
la mutation D816 V localisée au niveau du domaine catalytique du récepteur. Il existe plusieurs formes de MS pouvant être, soit indolentes, soit agressives (Tableau 1). Les organes les plus fréquemment atteints sont la peau (60–95 %), l’os (90 %), le foie (60 %), la rate (50 %) et le tube digestif. Compte tenu de l’accumulation dans la moelle osseuse des mastocytes, des complications osseuses peuvent être observées chez les patients atteints de MS ; l’atteinte osseuse peut également révéler le diagnostic et il faut savoir y penser en cas d’ostéopathie fragilisante. 1. Physiopathologie des complications osseuses
∗ Service de rhumatologie, université Paris Descartes, hôpital Cochin, AP–HP, 27, rue du Faubourg Saint-Jacques, 75014 Paris, France. Adresse e-mail :
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Les complications osseuses sont à la fois liées à l’infiltration tumorale mastocytaire et à la libération des médiateurs en grande quantité dans la moelle et dans la circulation par les mastocytes
1878-6227/$ – see front matter © 2013 Société franc¸aise de rhumatologie. Publié par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. http://dx.doi.org/10.1016/j.monrhu.2013.01.001
K. Briot / Revue du rhumatisme monographies 80 (2013) 120–124 Tableau 1 Classification des mastocytoses.
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les causes d’ostéoporoses secondaires mais la MS reste une étiologie rare.
Classification de la mastocytose selon l’OMS Mastocytose cutanée (CM) Mastocytose cutanée maculo-papulaire (MPCM) (anciennement : Urticaria Pigmentosa [UP]) Mastocytose cutanée diffuse (DCM) Mastocytome Mastocytose systémique (SM) Mastocytose systémique indolente (ISM) (forme la plus commune de mastocytose systémique) Mastocytose limitée à la moelle osseuse (BMM) Mastocytose systémique intermédiaire (SSM) Mastocytose systémique avec maladie hématologique clonale associée non mastocytaire (SM-AHNMD) Mastocytose systémique agressive (ASM) Leucémie à mastocytes (MCL) Sarcome à mastocytes Mastocytome extracutané
stimulés [1]. L’atteinte osseuse se caractérise par une résorption osseuse excessive qui aboutit à une ostéopathie fragilisante ; la formation osseuse peut également être anormalement élevée et des lésions d’ostéosclérose peuvent être observées. Trois type de médiateurs sont libérés ou produits : des médiateurs préformés dans les mastocytes (histamine, sérotonine, héparine), des médiateurs lipidiques (leucotriènes, prostaglandines. . .) des cytokines (TNF-␣) et chémokines. Ces médiateurs peuvent modifier le remodelage osseux par un effet direct sur les cellules osseuses ou par la libération de cytokines et autres médiateurs locaux. L’histamine est le principal médiateur impliqué dans les complications de la mastocytose. Plusieurs observations suggèrent que l’histamine est impliquée dans le métabolisme osseux. Les mastocytes sont localisés près du périoste et de la surface osseuse et peuvent ainsi facilement interagir avec le remodelage osseux [2]. Les souris déficitaires en histamine ont une masse osseuse augmentée et l’inhibition du récepteur histaminique H2 par un antagoniste prévient la perte osseuse trabéculaire des souris soumises à l’ovariectomie [3,4]. In vitro, l’histamine augmente la différenciation des ostéoclastes et augmente l’expression de RANKL par les ostéoblastes [5–7]. L’héparine joue également un rôle majeur en augmentant la résorption osseuse [8]. La prostaglandine E2 agit plutôt sur la formation osseuse et pourrait jouer un rôle dans les lésions condensantes [3]. Les médiateurs produits par les mastocytes stimulés (TNF-␣, interleukines [IL] [1,4,6,8,10,13,15,17,18], interférons [IFN]-␥ et -, sérotonine et chémokines [CCL2 et CCL3, CXCL12]) agissent également sur la résorption osseuse. Le RANKL, élément majeur de la différenciation des ostéoclastes serait présent dans les mastocytes [9]. La résorption et la formation osseuse sont étroitement liées et les mécanismes qui conduisent à une lyse osseuse plutôt qu’à une condensation osseuse ne sont pas connus.
2.1. Ostéoporose L’ostéoporose définie par une densité minérale osseuse (DMO) basse (T score ≤ −2,5) est présente chez 20 à 30 % des patients atteints de MS [10,13–15]. L’ostéoporose est souvent sévère (T ≤ −3) et prédomine au rachis lombaire (os trabéculaire). Elle est associée à un excès de fractures vertébrales (15 à 20 % des patients) parfois multiples et symptomatiques alors que le risque de fractures périphériques est moins important [10,13,15]. La recherche de fractures vertébrales systématique chez 154 patients (âge moyen 54 ans, 65 hommes) a montré que sur les 140 fractures de faible énergie recensées, 62 % étaient des fractures vertébrales. La présence d’une ostéoporose est plus fréquente chez les hommes et chez les sujets avec mastocytoses agressives [13,15]. Aucune association n’a été trouvée entre la diminution de la DMO, la présence de la mutation C-kit D816 V et le taux de tryptase sérique. Des études ont montré une relation entre la présence de fractures et des taux élevés d’histamine urinaire. L’apport des marqueurs du remodelage osseux reflétant la résorption osseuse (CTX-1) ou la formation osseuse (phosphatases alcalines, ostéocalcine) est difficile à apprécier car ils peuvent être élevés ou bas et ne sont pas corrélés aux valeurs de DMO chez les patients ostéoporotiques avec MS [13]. Les biopsies osseuses montrent une augmentation du remodelage osseux de l’os trabéculaire et cortical avec une augmentation du nombre d’ostéoblastes, d’ostéoclastes, des surfaces érodées, du volume ostéoïde et des surfaces ostéoïdes sans trouble de la minéralisation [16,17]. 2.2. Autres atteintes osseuses Les lésions d’ostéosclérose sont plus rares (5 à 8 % des patients) [10,18] (Fig. 1). Ces formes condensantes prédominent au squelette
2. Complications osseuses des mastocytoses L’atteinte osseuse est fréquente, observée chez près de 50 % des patients atteints de MS suivis dans trois services de référence franc¸ais [10]. L’ostéoporose est l’atteinte la plus fréquente, mais des lésions d’ostéosclérose peuvent être observées, parfois chez un même patient (forme mixte) [10]. L’atteinte osseuse peut être isolée sans atteinte cutanée notamment [11,12]. C’est parfois l’atteinte osseuse qui peut révéler la mastocytose ; le diagnostic est alors difficile car il n’existe aucun signe extra-osseux. Il n’existe pas de données dans la littérature portant sur la prévalence de la MS parmi
Fig. 1. Lésions condensantes au cours de la mastocytose systémique.
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K. Briot / Revue du rhumatisme monographies 80 (2013) 120–124 Tableau 2 Critères de diagnostic de la mastocytose systémique [34]. Le diagnostic de la mastocytose systémique est posé sur des patients qui présentent une biopsie d’un organe interne (normalement la moelle osseuse) répondant au moins à un critère majeur et à un critère mineur ou au moins à trois critères mineurs Critère majeur Présence d’infiltrations multifocales denses de mastocytes (> 15 mastocytes) Critères mineurs Plus de 25 % des mastocytes présentent une morphologie anormale (forme hélicoïdale ou allongée) détection d’une mutation du KIT sur le codon 816 Expression de CD2 et/ou CD25 sur les mastocytes Taux de tryptase sérique > 20ng/mL
Brunsen et al. a étudié le rôle des mastocytes dans l’ostéoporose idiopathique masculine chez 48 patients en étudiant la relation entre l’infiltration mastocytaire de la moelle osseuse, les taux urinaires d’histamine et la sévérité de l’ostéoporose [22]. Un infiltrat mastocytaire avec des mastocytes anormaux et une augmentation de l’excrétion urinaire d’histamine a été observé chez 9 % des hommes qui ne présentaient pas de signes cliniques de MS illustrant la rentabilité clinique de la recherche de mastocytose dans les situations d’ostéoporose inexpliquée [22]. 3.2. Principaux signes extra-osseux de la mastocytose systémique
3. Diagnostic des mastocytoses osseuses
Bien que l’atteinte osseuse puisse survenir en l’absence d’autres signes et être révélatrice de la MS, il peut être utile de rechercher les signes cliniques évocateurs de MS. Les signes cliniques des MS sont la conséquence de la dégranulation mastocytaire et/ou de l’infiltration tissulaire. Les manifestations associées à la dégranulation mastocytaire sont paroxystiques, surviennent spontanément ou déclenchée par des stimuli variés. Il s’agit le plus souvent de flushs associés à d’autres signes : prurit, manifestations cardiaques (palpitations, hypotension pouvant aller jusqu’à la syncope), manifestations pulmonaires et troubles digestifs. Les manifestations liées à l’infiltration tumorale sont souvent cutanées : urticaire pigmentaire (macules ou maculopapules violacées ou brun beige prédominant au tronc) avec signe pathognomonique de Darier (turgescence des éléments après frottement). Les manifestations extra-cutanées comportent une infiltration médullaire avec perturbations de l’hémogramme, un syndrome tumoral (hépatosplénomégalie), une atteinte digestive (diarrhées, douleurs abdominales, syndrome de malabsorption avec ulcères, inflammation de la muqueuse intestinale). Des signes généraux sont fréquemment observés avec une fatigue parfois handicapante, des troubles neuropsychiques (anxiété, dépression, troubles de l’attention et de la concentration) [23]. Les manifestations cliniques sont hétérogènes d’un patient à l’autre et responsable d’un handicap qui n’est pas forcément corrélé à la masse mastocytaire, à l’agressivité de la maladie, au taux de tryptase sérique, ni au type de mutations C-Kit.
3.1. Circonstances diagnostiques
3.3. Critères diagnostiques de la mastocytose systémique
Fig. 2. Biopsie osseuse au cours de la mastocytose systémique ; a : infiltration mastocytaire focale sur biopsie ostéomédullaire (coupe histologique) ; b : infiltration mastocytaire focale sur biopsie ostéomédullaire : immunomarquage à la tryptase.
axial et sont associées aux mastocytoses les plus agressives avec des anomalies hématologiques (anémie, thrombopénie, éosinophilie) et des taux de tryptase élevés [10,19]. La DMO de ces patients est en général plus élevée. Les marqueurs du remodelage osseux sont augmentés et il existe une hyperfixation des lésions osseuses en scintigraphie osseuse. Des lésions ostéolytiques localisées avec petites lacunes rondes ou ovalaires parfois cernées par un liséré condensé, du crâne et des métaphyses des os longs peuvent être observées [20]. La coexistence de lésions lytiques et condensantes dans un même os ou dans différents os est évocatrice d’une mastocytose. 2.3. Douleurs musculosquelettiques Les patients atteints de MS décrivent fréquemment des douleurs diffuses musculosquelettiques le plus souvent mal systématisées (40 %) à l’origine d’un handicap (20 %) [10,21].
Différentes situations peuvent être envisagées : • la mastocytose est connue : il est recommandé de rechercher une atteinte osseuse par des radiographies et une ostéodensitométrie (cf. chapitre 4.1) ; • l’atteinte osseuse peut être révélatrice ; le diagnostic doit être évoqué chez les patients ayant ostéoporose sévère (fractures vertébrales) inexpliquée et en cas d’ostéoporose « idiopathique » chez l’homme en particulier même en l’absence de signes extraosseux, en particulier cutanés.
Le diagnostic est histologique, fait sur biopsie cutanée s’il existe des lésions cutanées ou sur biopsie ostéomédullaire. La présence de mastocytes est attendue dans la moelle et c’est la mise en évidence d’infiltrats denses et multifocaux et la forme des mastocytes qui permet de faire le diagnostic [24] (Fig. 2 et Tableau 2). La réalisation de biopsies nécessite une technique rigoureuse et l’utilisation d’anesthésiques locaux non adrénalinés, la dégranulation étant facilement induite par des traumatismes ou certains agents physiques ou chimiques. Les prélèvements cutanés, réalisés sur des lésions non urticariennes et non traumatisées sont analysés
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avec des colorations spéciales (bleu de toluidine, Giemsa) ; les biopsies médullaires ne sont pas décalcifiées et sont fixés dans le formol tamponné ou l’alcool. L’utilisation d’un marquage immunohistochimique par anticorps antitryptase est recommandée pour détecter, soit des infiltrats extrêmement peu importants, soit des infiltratscomposés de cellules mastocytaires immatures et non granuleuses (Fig. 2). La recherche des antigènes CD25, CD68, CD117 et CD2 par immunohistochimie peut aider au diagnostic [25]. Une aspiration médullaire et un frottis doivent compléter la biopsie car l’étude cytologique médullaire peut apporter des éléments importants au diagnostic. La mutation activatrice du C-Kit (généralement D816 V) peut être recherchée sur prélèvement cutané ou médullaire. Le dosage de la tryptase sérique qui est le reflet de l’infiltration mastocytaire peut être réalisé, il est évocateur du diagnostic si le taux est supérieur ou égal à 20 ng/mL. Il est le plus souvent élevé mais peut être normal. Il doit être interprété à distance d’une réaction allergique. Une élévation du taux d’histamine urinaire n’est observée que dans 70 % des MS [26]. 4. Prise en charge des complications osseuses de la mastocytose systémique 4.1. Explorations à réaliser chez les patients atteints de mastocytose systémique Les mastocytoses sont associées à une augmentation du risque d’ostéoporose et de fracture [10,13–15]. Il n’existe pas de recommandations sur les explorations à réaliser mais il est nécessaire de réaliser chez les patients ayant une MS : • une mesure de la DMO par absorptiométrie biphotonique à rayons X (DXA) ; • compte tenu du risque élevé de fractures vertébrales [15], il est logique de réaliser au moins une fois des radiographies de face et profil du rachis dorsal et lombaire surtout si la DMO est basse. Il est possible de remplacer les radiographies par la réalisation d’une Vertebral Fracture Assessment (VFA) qui permet la visualisation du rachis de face et de profil sur un appareil d’ostéodensitométrie [27] ; • des radiographies osseuses (bassin, os longs) à la recherche de lésions lytiques et/ou condensantes ; • la recherche d’une carence en vitamine D par un dosage sanguin de 25OHD est recommandée. Il n’existe pas suffisamment de données sur l’apport des marqueurs du remodelage osseux en particulier en cas d’ostéoporose pour justifier leur utilisation systématique dans l’évaluation du risque osseux au cours de MS. 4.2. Explorations à réaliser pour confirmer le diagnostic de mastocytose devant une ostéoporose Devant une ostéoporose, le diagnostic doit être suspecté s’il existe des signes extra-osseux, en particulier cutané (Tableau 3). Le diagnostic de MS est histologique ; il est fait sur la biopsie cutanée (en cas de lésions cutanées) et/ou sur la biopsie ostéomédullaire. La mise en évidence d’infiltrats denses et multifocaux de mastocytes est un critère majeur du diagnostic de MS (Tableau 2). Le dosage de tryptase sérique est un bon reflet de l’infiltration mastocytaire et est un des critères mineurs du diagnostic de MS (Tableau 2). Néanmoins, un taux élevé ne signe pas une mastocytose et son élévation lors de réactions allergiques systémiques impose des contrôles répétés. Une élévation du taux d’histamine urinaire n’est observée que dans 70 % des MS [26] et ne rentre pas dans les critères diagnostiques de MS.
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Tableau 3 Principaux signes évocateurs de mastocytose systémique devant une ostéoporose. Type d’ostéoporose Ostéoporose sévère Fractures vertébrales multiples Ostéoporose de l’homme Signes extra-osseux Lésions cutanées : urticaire pigmentaire (signe de Darier) Manifestations paroxystiques (flush la plus évocatrice) Autres manifestations (cf. paragraphe) Lésions osseuses radiographiques : zones de condensations focales Élévation du taux de tryptase sérique (à distance d’un épisode allergique) ≥ 20ng/mL
4.3. Traitements des conséquences osseuses 4.3.1. Effets des traitements de la mastocytose systémique Il existe peu de données sur l’effet des traitements de la mastocytose sur l’atteinte osseuse. Graves et al. ont rapporté le cas d’un patient dont la biopsie osseuse a montré une diminution du nombre de mastocytes dans la moelle, des indices de résorption et une augmentation des indices de formation osseuse après trois mois de traitement par kétotifène (antagoniste du récepteur H1R) [28]. Le suivi de huit patients avec ostéoporose fracturaire traités par IFN-␣ et perfusions intraveineuses de bisphosphonates (pamidronate de sodium tous les mois pendant deux ans puis tous les trois mois) a montré une augmentation de la DMO au rachis lombaire (+12,6 %) et à la hanche (+1,9 %) à deux ans. Aucune fracture n’a été observée au cours du suivi. Chez deux sujets qui ont arrêté l’IFN-␣ au bout de trois mois et poursuivi le traitement par bisphosphonates, la variation de DMO est de 2,4 % au rachis lombaire et de 0,1 % à la hanche [29,30]. Il n’y a pas de données disponibles avec les autres traitements de fond utilisés au cours de la MS, en particulier avec les nouveaux traitements de la classe des inhibiteurs de la tyrosine kinase (masitinib) [31]. Des travaux expérimentaux ont suggéré que l’imatinib, un inhibiteur de tyrosine kinase diminue l’activité des ostéoclastes et augmente leur apoptose [32]. L’atteinte osseuse isolée en particulier l’ostéoporose fracturaire n’est pas une indication en général à un traitement de fond de la MS. 4.3.2. Effets des traitements anti-ostéoporotiques Compte tenu de l’augmentation de la résorption osseuse au cours de la MS, il est logique de proposer un bisphosphonate. Dans l’étude franc¸aise de Barete et al., l’ensemble des patients ostéoporotiques (n = 23) recevaient un bisphosphonate et une supplémentation vitamino-calcique. Le suivi disponible pour neuf patients (65 mois en moyenne) a montré une augmentation significative de la DMO lombaire de 2,05 % par an sans variation de la DMO à la hanche ; aucune fracture n’a été observée au cours du suivi [10]. Seuls deux patients recevaient un traitement de fond de la mastocytose (cladribine) suggérant que le gain de DMO n’est pas expliqué par ce traitement de fond. Un effet bénéfique des bisphosphonates intraveineux a également été rapporté chez cinq patients avec MS sur la DMO et la réduction des douleurs osseuses [33]. 4.4. Traitement en cas d’atteinte osseuse 4.4.1. En présence de fracture(s) vertébrale(s) prévalentes ou de fracture périphérique à faible traumatisme Un traitement anti-ostéoporotique de type bisphosphonates est indiqué si la fracture est liée à un faible traumatisme et les tous les autres causes de fragilité osseuse ont été écartées. La réalisation d’autres examens biologiques et d’examens complémentaires d’imagerie (scanner ou IRM) peut être nécessaire en cas de doute sur l’origine de la fracture.
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4.4.2. En l’absence de fracture prévalente Il n’y a pas de seuil densitométrique validé dans la mastocytose pour l’institution d’un traitement anti-ostéoporotique. Un traitement est nécessaire en cas de T score très bas ( ≤ −3) après avis spécialisé. Si le T score est supérieur à −3, le traitement n’est pas systématique ; l’indication dépend de l’âge du patient, du type et de la sévérité de la mastocytose, de la présence d’une ménopause et d’autres facteurs de risque et éventuellement de valeur d’un marqueur de résorption osseuse. Le FRAX® n’est pas validé dans l’ostéoporose secondaire à la mastocytose et ne peut être utilisé. 5. Conclusion Les atteintes osseuses au cours de la MS sont fréquentes et variées et peuvent être la manifestation initiale isolée de la MS. Elles illustrent le fait que le mastocyte participe également à la régulation du remodelage osseux par la libération de nombreux médiateurs. Des études sont nécessaires pour évaluer l’effet osseux des nouveaux traitements disponibles dans la MS. Déclaration d’intérêts L’auteur déclare ne pas avoir de conflits d’intérêts en relation avec cet article. Références [1] Chiappetta N, Gruber B. The role of mast cells in osteoporosis. Semin Arthritis Rheum 2006;36:32–6. [2] Fouilloux I, Duplan MB, Baroukh B, et al. Mast cell activation and degranulation occur early during induction of periosteal bone resorption. Bone 2006;38:59–66. [3] Fitzpatrick LA, Buzas E, Gagne TJ, et al. Targeted deletion of histidine decarboxylase gene in mice increases bone formation and protects against ovariectomy-induced bone loss. Proc Natl Acad Sci U S A 2003;100:6027–32. [4] Lesclous P, Guez D, Baroukh B, et al. Histamine participates in the early phase of trabecular bone loss in ovariectomized rats. Bone 2004;34:91–9. [5] Ikawa Y, Yonekawa T, Ohkuni Y, et al. A comparative study of histamine activities on differentiation of osteoblasts and osteoclasts. J Toxicol Sci 2007;32:555–64. [6] Biosse-Duplan M, Baroukh B, Dy M, et al. Histamine promotes osteoclastogenesis through the differential expression of histamine receptors on osteoclasts and osteoblasts. Am J Pathol 2009;174:1426–34. [7] Gilfillan AM, Tkaczyk C. Integrated signalling pathways for mast-cell activation. Nat Rev Immunol 2006;6:218–30. [8] Simmons HA, Raisz LG. Effects of acid and basic fibroblast growth factor and heparin on resorption of cultured fetal rat long bones. J Bone Miner Res 199;6:1301–5. [9] Ali AS, Lax AS, Liljeström M, et al. Mast cells in atherosclerosis as a source of the cytokine RANKL. Clin Chem Lab Med 2006;44:672–4. [10] Barete S, Assous N, de Gennes C, et al. Systemic mastocytosis and bone involvement in a cohort of 75 patients. Ann Rheum Dis 2010;69:1838–41.
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