Au-delà de quelles limites l’AMP n’est-elle plus valable ?

Au-delà de quelles limites l’AMP n’est-elle plus valable ?

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Gynécologie Obstétrique & Fertilité 30 (2002) 793–798 www.elsevier.com/locate/gyobfe

Mise au point

Au-delà de quelles limites l’AMP n’est-elle plus valable ?> Above what limits are ART of no avail? J. Belaisch-Allart * Service de gynécologie-obstétrique, CHI Jean-Rostand, 141, Grande-rue, 92311 Sèvres cedex, France

Résumé Les limites légales de l’assistance médicale à la procréation sont floues. La loi de juillet 1994 précise seulement que le couple doit être en âge de procréer, la référence médicale opposable de juillet 1998 demande seulement de ne pas commencer les explorations après 45 ans. Le guide des bonnes pratiques cliniques et biologiques recommande de ne prendre en charge au-delà de 37 ans que dans les cas où la fonction ovarienne a été jugée satisfaisante. Le corps médical a dû se fixer ses propres limites basées sur les taux de succès, l’âge limite de la femme le plus souvent retenu est de 42 à 43 ans. © 2002 E´ditions scientifiques et médicales Elsevier SAS. Tous droits réservés. Abstract Legal limits to assisted reproduction technologies are rather blurred. The law of July 1994 only says that people must be “in age of procreation”; medical opposable reference only says that infertility exploration must begin before 45 years. The guide of good practice in ART writes that over 37 only women with normal ovarian reserve must be included in ART programs. So physicians have to fix their own limits, according to success rate and this limit is often 42–43 years for women. © 2002 E´ditions scientifiques et médicales Elsevier SAS. All rights reserved. Mots clés: Assistance médicale à la procréation (AMP); Âge; Limites Keywords: Assisted reproductive technologies (ART); Limits; Age

« Jeune dans la vie, âgée pour la reproduction » cette phrase (ou plutôt ce leitmotiv) revient sans cesse, dans toutes les consultations d’infertilité, face à des femmes interloquées voire agressives. « Mais Docteur mon médecin m’avait dit d’attendre et que « ça » (c’est-à-dire la grossesse) viendrait ». Ce dialogue de sourds nous ne le connaissons que trop. La chute de la fécondité avec l’âge devrait être bien connue des médecins, tant elle est démontrée. La chute de la fécondité naturelle est démontrée par la diminution des

* Auteur correspondant. Adresse e-mail : [email protected] (J. BelaischAllart). > Communication présentée aux 29es Journées de gynécologie obstétrique & fertilité (9-10 novembre 2001). © 2002 Éditions scientifiques et médicales Elsevier SAS. Tous droits réservés. PII: S 1 2 9 7 - 9 5 8 9 ( 0 2 ) 0 0 4 4 1 - 1

naissances selon la tranche d’âge de la mère. Le modèle des inséminations artificielles avec donneur élimine tout autre facteur que l’âge de la mère (tel l’âge du père, la fréquence des rapports). Les CECOS ont parfaitement mis en évidence la chute des taux des succès en IAD avec l’âge de la femme. En fécondation in vitro (FIV), la chute des taux de succès qui s’amorce dès 37 ans, devient catastrophique après 42 ans (FIVNAT 1997 : taux d’accouchement par ponction à 30 ans : 16,4 %, à 42 ans : 6,3 %, voir Tableau 1, [1]). Et pourtant l’âge des candidates à la FIV va en augmentant. Il était de 33,3 ans en 1986, il est devenu 34,3 en 1999 [2]. Plus grave encore, la proportion de femmes de 40 ans et plus va en augmentant, passant de 12,1 % des candidates FIV en 1993 à 13,7 % en 1997. Les femmes attendent (ou on les fait attendre ?) de plus en plus avant d’avoir recours à l’ultime thérapeutique de l’infertilité.

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Tableau 1 Taux de grossesses et d’accouchements par ponction selon l’âge de la femme (1987–1996) Âge de la femme (ans)

Grossesses cliniques (%)

Accouchements (%)

25 30 35 37 38 40 42 45

20,3 20,8 19,3 18,4 15,9 14,0 9,4 5,2 p < 0,01

16,2 16,4 14,6 13,9 12,1 9,3 6,3 2,8 p < 0,01

. (FIVNAT 1997).

Comment expliquer ce phénomène très général et qui touche toutes les femmes fertiles ou infertiles : le recul de l’âge du désir d’enfant ? Les progrès de la contraception, les études prolongées, le désir de faire carrière, l’instabilité du marché du travail, l’hostilité des employeurs à l’annonce d’une grossesse, tout se conjugue pour que les femmes programment de plus en plus tard leur grossesse. Sans compter celles qui ayant rencontré tôt (trop ?) l’homme de leur vie, à la quarantaine rencontrent le 2e homme. Bien évidemment il n’a pas d’enfant. Ces patientes ont certes quelques excuses, leurrées peutêtre par le slogan de la contraception « un enfant quand je veux », dont nul ne leur a donné la vraie interprétation « pas d’enfant tant que je n’en veux pas ». Les médias nous inondent par vagues de femmes (vraiment) âgées devenues enceintes après un séjour italien. Mais les dits médias oublient toujours de préciser qu’il s’agit d’un don d’ovocyte. Entre la science aux données décourageantes et peu divulguées et les ventres épanouis des actrices et chanteuses de 40 ans nos patientes ont choisi de croire ce qui les arrange. Les femmes ignorent les limites de la fertilité et surtout les limites de la prise en charge de l’infertilité. Ces limites, il faut le reconnaître sont assez floues.

de la ménopause pour la femme et ne fixe aucune limite pour l’homme dont on sait que les spermatozoïdes peuvent être présents et fécondants jusqu’à sa mort. Ce flou législatif serait, pour certains, voulu et bénéfique car il ouvre à la décision médicale des espaces de liberté. La référence médicale opposable sur la prise en charge de la stérilité du couple parue au Journal Officiel de juillet 1998 n’est guère plus restrictive. Il est écrit : « chez la femme de plus de 45 ans, il ne paraît pas souhaitable de commencer des explorations pour un bilan de stérilité ». À l’inverse, l’arrêté du 12 janvier 1999 relatif aux règles de bonnes pratiques cliniques et biologiques en assistance médicale à la procréation (Journal Officiel du 28 février 1999) est beaucoup plus restrictif : « … compte tenu de la faible efficacité des techniques au-delà de 37 ans, il est recommandé de ne prendre en charge des femmes plus âgées que dans les cas où la fonction ovarienne a été jugée satisfaisante ». Enfin l’arrêté du 25 janvier 2000 modifiant la nomenclature générale des actes professionnels des médecins, des chirurgiens dentistes, des sages femmes et des auxiliaires médicaux (Journal Officiel du 26 janvier 2000) avait introduit une limite nette en précisant : « conditions de prise en charge par l’assurance maladie de l’exploration et du traitement de la stérilité du couple : la prise en charge s’interrompt au jour du 43e anniversaire ». Malheureusement, sur requête d’une patiente le Conseil d’État a annulé pour excès de pouvoir l’arrêté du 25 janvier 2000, qui était signé par le ministre de l’Emploi et de la Solidarité. Le Conseil d’État a considéré que les ministres n’étaient pas compétents pour édicter par le moyen de nomenclatures de telles limitations, que les requérants étaient par suite, fondés à demander l’annulation des arrêtés attaqués en tant qu’ils prévoient ces limitations (Extrait de la délibération du Conseil d’État, séance du 6 novembre 2000). À l’heure où ces lignes sont écrites, il n’y a donc plus de limites légales à la prise en charge de l’infertilité en France ; à chaque médecin en son âme et conscience, de se donner ou non une limite à la prise en charge en AMP.

1. La loi 2. Les limites médicales à L’AMP La loi dite de bioéthique de juillet 1994 n’est guère claire. L’article L 152–2 (Journal Officiel du 30 juillet 1994), précise seulement que « l’homme et la femme, formant le couple, doivent être vivants, en âge de procréer, mariés ou en mesure d’apporter la preuve d’une vie commune d’au moins deux ans et consentant préalablement au transfert d’embryons ou à l’insémination ». La signification de la formule en âge de procréer n’est pas évidente. Si cela signifie tant que la procréation est naturellement possible, cela signifie que la loi autorise l’Assistance Médicale à la Procréation (AMP) jusqu’à l’âge

2.1. Âge de la femme Un certain nombre de praticiens plaident pour qu’il n’y ait pas d’âge limite pour prendre en charge une femme infertile. J. Cohen estime que si les chances de grossesse à 42 ans sont très faibles, elles sont égales aux pourcentages de guérison de certains cancers avancés, pourtant pris en charge par la société [3]. Pour lui, si le couple est conscient des faibles chances de succès, il n’y a pas de raison de refuser à une femme qui a cotisé à la Sécurité Sociale depuis

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Tableau 2 Taux de grossesses selon l’âge. IIU ou FIV Âge de la femme < 35

35-39

≥ 40

IIU (%) (Sèvres, grossesses évolutives)

15,9

11,1

4,8

FIV (%) (FIVNAT, accouchements) .

16,4 (30 ans)

12,1 (38 ans)

9,3 à 40 ans 6,3 à 42 ans

(Belaisch-Allart, 2000, FIVNAT 1997).

de longues années, la prise en charge de son traitement pour l’infertilité. La question posée est fondamentale, l’efficacité est-elle une condition de la prise en charge médicale ? La réponse est évidemment non dans de nombreux domaines en médecine tels la cancérologie, les greffes d’organe, la chirurgie cardiaque… La question suivante est de savoir si l’infertilité est une maladie. L’impossibilité de procréer est reconnue partout comme un déficit de santé [3]. Un refus de soin basé sur un rapport coût/bénéfice ne serait pas éthique. Tous ces arguments plaident pour une prise en charge de l’infertilité sans limite, ni d’âge, ni de rang de tentative. Les arguments médicaux pour une limite d’âge existent cependant. La RMO est peu contraignante, cependant elle limite avant 45 ans le début de la prise en charge. Aucun médecin en 2002 ne peut plus concevoir une médecine à l’abri des contraintes matérielles. Il est de notoriété publique que le rapport coût/efficacité commence à être pris en charge en particulier avant d’accueillir en réanimation des patients de plus 90 ans ou à un stade avancé d’une maladie incurable. La manne financière dévolue à la Santé est désormais limitée. Est-il plus éthique de prendre en charge la tentative de FIV d’une patiente de 44 ans qui n’a pratiquement aucune chance ou plus éthique de prendre en charge la 5e tentative d’une jeune femme de 30 ans, ayant subi une salpingectomie bilatérale et qui n’a que la FIV comme ressource thérapeutique ? Les taux de succès des différentes techniques d’AMP plaident pour une limitation à la prise en charge. L’âge de la femme est en effet le premier facteur de succès quel que soit l’AMP envisagée. En insémination intra-utérine (IIU) le taux de succès passe à Sèvres de 15,9 % de grossesse

évolutive avant 35 ans à 4,8 % à partir de 40 ans [4]. Frederick et al. [5] sont encore plus sévères en annonçant sur 77 patientes de plus de 40 ans un taux de naissance par cycle de 1,4 % et par patiente de 3,9 %. Les résultats en IIU sont si mauvais après 40 ans que de nombreuses équipes préfèrent passer directement en FIV, parfois même dès 38 ans (Tableau 2 [4]). En FIV, comme le démontre FIVNAT, les résultats passent de 16,2 % d’accouchement par ponction à 25 ans à 13,9 % à 37 ans et à 6,3 % à 42 ans (Tableau 1 [1]). Ron el et al. [6], étudiant 431 cycles FIV/ICSI de femmes de 41 ans et plus, n’ont observé aucun accouchement après 43 ans (Tableau 3). De plus, avec l’âge le taux de FCS augmente, passant de 14,5 % dans le groupe 25–29 ans à près de 40 % après 42 ans [1]. À ces FCS, il faut encore ajouter les interruptions médicales de grossesse liées aux aberrations chromosomiques (0,3 % d’IMG dans le groupe 25–29 ans contre 2,2 % après 42 ans, FIVNAT 97 [1]). L’existence d’une infertilité masculine et le recours aux techniques de fécondation assistée ne modifient pas l’altération des taux de succès avec l’âge. Les travaux de Nikolettos et al. [7] démontrent qu’en cas d’ICSI avec sperme éjaculé le taux de grossesse par cycle après 40 ans n’est que de 9,35 % (avec 50 % de FCS). De même en cas d’azoospermie, Silber et al., après ICSI avec sperme épididymaire ou testiculaire, passent de 46 % d’accouchement par cycle entre 20 et 29 ans à 4 % après 40 ans [8]. Les résultats globaux FIVNAT [1] comme les résultats individuels de chaque équipe démontrent bien que la chute réelle des taux de succès ne débute que vers 38–39 ans, avant 38 ans il n’y a donc aucune raison médicale de limiter l’AMP.

Tableau 3 Résultats de l’AMP sur 431 cycles FIV/ICSI à 41 ans et plus Âge 41 ans N Grossesses % Accouchements % . (Ron-el et al., 2000)

FIV 72 14 7

42 ans ICSI 70 15 7

FIV 54 9 2

43 ans ICSI 56 9 2

FIV 23 26 13

44 ans ICSI 45 16 4

FIV 8 0 0

ICSI 25 3 0

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Tableau 4 Taux de grossesse clinique selon l’âge et le nombre d’ampoules de FSH/hMG consommées (%) Ampoules

25–29 ans

30–34 ans

35–37 ans

38–39 ans

40–41 ans

42–50 ans

≤ 20 20 – 29 30 –39 40 – 49 50 – 59 60 – 69 ≥ 70 .

22,2 23,5 22,8 20,6 15,4 23,0 12,0

21,6 25,0 23,3 20,5 17,9 17,0 12,0

18,9 23,5 22,9 20,0 15,9 13,6 13,9

13,7 20,2 19,1 15,4 13,6 8,8 9,1

19,4 16,6 14,2 14,6 15,1 8,3 7,8

6,6 10,5 9,5 7,5 7,1 3,2 1,7

Chi2 ajustés : grossesse selon le nombre d’ampoules, ajusté sur l’âge : p < 0,001 ; grossesse selon l’âge, ajustée sur le nombre d’ampoules : p < 0,001. (FIVNAT 1997).

Entre 38 et 42 ans, l’estimation de l’âge ovarien par les tests de réserve ovarienne est imposée par le guide des bonnes pratiques cliniques et biologiques. Les résultats FIVNAT 97 [1] ont parfaitement démontré qu’une femme de 30 ans qui consomme plus de 70 ampoules de gonadotrophines pour arriver au jour de déclenchement de l’ovulation (i.e. dont les ovaires répondent mal à la stimulation) n’a que 12 % de chances de grossesse alors qu’une femme de 40 ans qui consomme moins de 20 ampoules (i.e. dont les ovaires répondent bien (Tableau 4) a près de 20 % de chances de grossesse. La notion d’âge ovarien ou plus scientifiquement de réserve ovarienne est un concept récent qui a progressivement pris une place prépondérante dans le bilan d’une infertilité. Comment explorer l’âge ovarien ? 2.1.1. Le dosage de la FSH de base La technique la plus simple et la moins coûteuse repose sur le dosage de la FSH de base en début de phase folliculaire. La valeur prédictive du taux de FSH plasmatique sur les taux de grossesse en AMP est désormais bien démontrée [9]. Dès 1989, Scott et al., étudiant 758 cycles de FIV, avaient mis en évidence une chute du taux de grossesses lorsque le taux de FSH au 3e jour du cycle était élevé. Le taux de grossesses était inférieur à 5 % lorsque le taux de FSH était supérieur à 25 UI/l, le taux normal étant dans cette étude inférieur à 15 UI/l [10]. En 1991, ces données furent confirmées sur une série de 1478 cycles dans laquelle le taux de FSH en début de cycle était corrélé avec tous les paramètres de la réponse ovarienne (taux d’annulation, pic d’œstradiol, nombre d’ovocytes recueillis, d’embryons obtenus et taux de grossesse). Dans cette étude, la valeur prédictive du taux de FSH est supérieure à celle de l’âge pour l’ensemble de paramètres testés. Le problème est dans le seuil limite qui est variable suivant la technique de dosage utilisé et donc suivant le laboratoire où est réalisé le dosage. En ce sens l’étude de Toner et al. est particulièrement intéressante [11]. Dans leur population, le dosage de FSH moyen des femmes de moins de 36 ans avec deux ovaires

est de 11,26 ± 5,77 UI/l. Lorsque le taux d’une patiente est inférieur à cette moyenne, le taux de grossesse évolutive est le meilleur (18 %). Lorsque le dosage de la femme est supérieur à la moyenne mais en dessous de deux fois la moyenne le taux de grossesse est encore de 15 %. Par contre lorsque le dosage dépasse deux fois la moyenne, le taux de grossesse devient nul. La valeur prédictive du taux de FSH porte également sur la qualité ovocytaire, comme cela est démontré par la prédiction du taux de grossesse après décongélation d’embryon. Toner et al., dans une étude portant sur 284 transferts d’embryons congelés ont démontré une liaison significative entre le taux de grossesse et la FSH basale [12]. La valeur péjorative d’un taux unique de FSH élevée a été parfaitement démontrée par Scott et al. [13] qui ont démontré, sur 88 patientes ayant eu trois FIV en deux ans, que la réponse ovarienne n’est pas meilleure dans les cycles où la FSH est basse que dans les cycles où la FSH est élevée. Cet état apparemment fluctuant traduit donc en fait une résistance ovarienne stable. De ces diverses constatations est née la notion d’insuffisance ovarienne occulte définie par Cameron et al. [14]. Les patientes atteintes d’insuffisance ovarienne occulte sont des non répondeuses à FSH élevée, mais ce syndrome diffère de la ménopause précoce car il ne s’accompagne d’aucun signe clinique. 2.1.2. Les autres tests dits de réserve ovarienne Différents tests dits de réserve ovarienne ont été proposés pour tenter de cerner au mieux l’âge ovarien, c’est-à-dire la capacité de répondre aux stimulations de l’ovulation et d’obtenir une grossesse [15]. Citons le test de Navot (ou test au citrate de clomifène), le test à la FSH exogène, le test aux agonistes du GnRH, le dosage de l’œstradiol en début de cycle et enfin le dosage de l’inhibine B en début de phase folliculaire [17]. L’inhibine B s’élève chez les femmes de plus de 35 ans et est le reflet de la réserve ovarienne [16]. Dès 1990, Hughes et al avaient étudié la réponse en inhibine aux stimulations de l’ovulation pour FIV et observé une réponse en inhibine plus basse chez les femmes de 35 ans et plus. Ils en avaient déduit que la réponse en inhibine était un

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indice précoce du dysfonctionnement ovarien lié à l’âge. Balash et al. [17] en 1996 ont comparé un groupe de 120 patientes réalisant leur 1re tentative de FIV et 40 patientes annulées pour réponse ovarienne suffisante. Ils ont constaté que les taux de FSH et d’inhibine mesurés au 2e ou au 3e jour d’un cycle antérieur permettent mieux que l’âge de prévoir la qualité de la réponse ovarienne. Ils en ont conclut que le taux de FSH de base et celui d’inhibine ont une valeur prédictive identique et peuvent donc être utilisés indifféremment ; par contre l’addition des deux marqueurs n’est pas dans leur étude plus prédictive qu’un seul. Seifer et al. [18] en 1996 étudiant 156 cycles FIV en protocole long ont établi un seuil de 45 pg/ml pour l’inhibine B en dessous duquel le taux de succès est significativement diminué. La valeur de l’inhibine B est cependant déjà contestée. Selon Corson et al. [19], il n’y aurait pas de corrélation entre l’inhibine B et le taux de grossesse et seul compterait le taux de FSH (si l’inhibine B est supérieure à 45 pg/ml leur taux de grossesse est de 34,5 % contre 31,8 % (NS) si l’inhibine est inférieur à 45). L’inhibine B semble un marqueur intéressant de la réserve ovarienne actuellement en cours d’évaluation. Aucun des autres tests n’a fait la preuve de sa supériorité sur le simple dosage de FSH plasmatique en début de cycle. Il est souhaitable de dépister les patientes dont la réponse ovarienne est diminuée, afin de les avertir de leurs chances limitées de grossesse et de savoir les orienter rapidement vers le don d’ovocyte d’emblée ou après quelques essais de stimulation de l’ovulation selon leur taux de FSH. Il faut cependant rappeler avec Sharara et al. [20] que ces tests n’ont pas une sensibilité et une spécificité absolue. Les patientes à FSH élevée doivent être averties de leurs chances réduites de grossesse et il faut leur proposer adoption et/ou don d’ovocytes. Faut-il cependant les exclure d’emblée de nos traitements ? Si leurs dosages sont très anormaux la question ne se pose pas (d’ailleurs la référence médicale opposable consacrée à l’infertilité dit bien qu’il ne faut pas stimuler l’ovulation des femmes dont la FSH est franchement et constamment élevée). Tout le problème est celui des dosages limites. Dans ces cas limites, sur des patientes averties des risques élevés d’annulation, il est parfois légitime de tenter une ou deux stimulations qui permettront à la patiente de faire plus doucement le deuil d’une grossesse avec leurs propres ovocytes. Entre 38 et 42 ans si les tests de réserve ovarienne sont favorables, c’est-à-dire si la FHS plasmatique en début de cycle est normale ou inférieure à 10 mUI/ml, les chances de grossesses sont diminuées mais réelles, il est donc encore logique d’accepter les femmes en AMP. Entre 43 et 45 ans la prise en charge doit rester l’exception comme l’a écrit Frydman [21].

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2.2. Existe-t-il une limite d’âge en cas de don de gamète ? L’arrêté du 12 janvier 1999, relatif aux règles de bonnes pratiques cliniques et biologiques en AMP précise que le couple receveur doit respecter les conditions légales prévues à l’article L 152–2 (c’est-à-dire : être en âge de procréer). Dans la pratique courante, les CECOS n’inscrivent plus en don de sperme les patientes de 40 ans voire 38 ans pour certains CECOS. La raison officielle en est le délai d’obtention de paillettes de sperme congelé en raison de la pénurie de donneur et de la fécondité diminuée du sperme après congélation qui diminue d’autant plus les chances de succès des femmes de plus de 40 ans. Le bilan ovarien est de première importance dans les cas limites pour moduler l’âge d’acceptation ou de refus d’une femme. Pour ce qui est du don d’ovocyte, la majorité des centres français n’acceptent pas les patientes âgées de plus de 42–43 ans. 2.3. Et chez l’homme ? De l’âge du conjoint, il est rarement question. Le terme des lois dites de bioéthique est flou ; il est seulement écrit « en âge de procréer ». Cependant de plus en plus de centres d’AMP ont introduit une limite à l’âge du conjoint : 50 à 60 ans. Pour les IAD, les CECOS ont désormais une limite d’âge pour l’homme donneur qui est de 45 ans (en raison du risque de maladies génétiques liées à l’âge du père) et une limite d’âge pour l’homme receveur qui est de 55 ans. Est-il raisonnable d’avoir 80 ans lorsque l’enfant aura 20 ans ? Est-il raisonnable d’aider à la naissance d’enfants qui ont tous les risques d’être rapidement orphelins ? Ces désirs tardifs ou très tardifs d’enfant reposent sur une illusion, celui de l’allongement de la durée de vie, en oubliant que « ce n’est pas la vie qui est rallongée, c’est la vieillesse » [22]. 2.4. Le nombre d’enfants antérieurs ? Ni la loi, ni la médecine n’ose aborder ce sujet. Le nombre d’enfants des premières unions de la femme ou de l’homme, pas plus que le nombre d’enfants du couple ne sont jamais évoqués … 2.5. Le rang de la tentative L’arrêté du 25 janvier 2000 avait limité à 4 le nombre de tentatives prises en charge. Cette limitation a été cassée par le Conseil d’État en même temps que la limitation à 43 ans. Est-il raisonnable de ne pas limiter le nombre de tentatives, de stimulations de l’ovulation, de ponctions ovocytaires, d’anesthésies fussent-elles ambulatoires ? Les données FIVNAT montrent bien que le taux de succès décroît avec le rang de la tentative (Tableau 5), passant de 20,2 % à la première tentative à 7,3 % à la 7e [23, 24].

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Tableau 5 Taux de grossesse selon le rang de la tentative Rang

Couples

Grossesses par ponction (%)

Taux cumulés Abandons %

Grossesses %

Accouchements %

1 2 3 4 5 6 7 8

35 174 14 818 6380 2494 826 268 96 42

20,2 17,4 16,0 13,3 13,4 12,7 7,3 11,9

38,3 39,6 44,9 53,6 54,1 51,5 49,0 -

20,2 34,1 44,6 52,0 58,4 63,7 66,4 70,4

15,6 26,3 34,4 40,1 45,0 49,1 51,2 54,2

Total .

60 638

18,6

31,6*

24,4*

FIVNAT 1997 * ce pourcentage est calculé en considérant les abandons comme des échecs.

La RMO proposait six tentatives pour l’obtention d’une grossesse, chiffre demandé alors par les professionnels du groupe de travail de cette RMO ; ce chiffre paraît toujours raisonnable. En conclusion, c’est aux médecins qu’il appartient de lever les illusions de leurs patientes mais aussi les leurs et de savoir adopter une prise en charge différente de l’infertilité après 35 ans, prise en charge dans laquelle il n’y a plus de place pour « laisser faire le temps ! ». Il est temps de faire comprendre à nos patientes que « l’abus de contraception nuit gravement à la reproduction ». Non que la contraception soit néfaste en elle-même à la reproduction, mais parce que, sous contraception, la femme et son conjoint vieillissent !

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Références

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