Bilan et surveillance des carcinomes papillaire et vésiculaire de la thyroïde dans le service de médecine nucléaire de l’hôpital Ibn Sina de Rabat

Bilan et surveillance des carcinomes papillaire et vésiculaire de la thyroïde dans le service de médecine nucléaire de l’hôpital Ibn Sina de Rabat

Médecine Nucléaire 33 (2009) 599–603 Article original Bilan et surveillance des carcinomes papillaire et vésiculaire de la thyroïde dans le service ...

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Médecine Nucléaire 33 (2009) 599–603

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Bilan et surveillance des carcinomes papillaire et vésiculaire de la thyroïde dans le service de médecine nucléaire de l’hôpital Ibn Sina de Rabat Check-up and follow-up of papillary and follicular thyroid carcinoma in the department of nuclear medicine at Ibn Sina hospital Rabat N. Ben Raïs Aouad *, I. Ghfir, H. Guerrouj, S. Fellah, J. Rahali, R. Ksyar, F. Missoum, A. Bssis, S. Azrak Service de médecine nucléaire, CHU Ibn Sina, Rabat, Maroc Reçu le 5 juin 2009 ; accepté le 27 juillet 2009 Disponible sur Internet le 12 septembre 2009

Résumé Dans le service de médecine nucléaire de l’hôpital Ibn Sina du centre hospitalier de Rabat Salé, la stratégie de surveillance actuelle des carcinomes papillaire (CPT) et vésiculaire de la thyroïde (CVT) privilégie l’échographie cervicale et la mesure de la thyroglobuline (Tg). Le rôle du balayage isotopique (BI) dans la prise en charge du carcinome différencié de la thyroïde (CDT) est en baisse. Les CPT et CVT sont en général de bon pronostic et peuvent être totalement guéris ; cependant, les métastases tardives existent et sont souvent mortelles d’où la nécessité d’un suivi à vie. Le but principal du suivi est de détecter, à un stade précoce, la maladie résiduelle ou la récidive. Le diagnostic précoce des récidives ou de métastases reste le gage de la guérison. # 2009 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. Mots clés : Suivi ; Thyroïde ; Papillaire ; Vésiculaire ; Thyroglobuline ; TSHus ; Échographie ; Cytologie thyroïdienne

Abstract In the department of nuclear medicine at Ibn Sina universitary hospital. Thyroid carcinoma follow-up strategy has been modified and includes cervical ultrasonography and thyroglobulin measurement. The role of radio-iodine scanning in the management of differentiated thyroid carcinoma is decreasing. Papillary and follicular carcinoma have good prognosis but late metastases exist and can lead to death. A lifelong followup is therefore mandatory. The main goal of follow-up is to detect earlier persistent or recurrent disease. # 2009 Elsevier Masson SAS. All rights reserved. Keywords: Follow-up; Thyroid; Papillary; Follicular; Thyroglobulin; TSHus; Ultrasonography; FNAB

1. Introduction La surveillance dans le CPT et CVT occupe une place privilégiée, elle reste le gage d’une détection précoce de toute récidive et optimise les chances de guérison. Le service de médecine nucléaire de l’hôpital Ibn Sina occupe en carcinologie thyroïdienne une place capitale au carrefour du diagnostic, de la thérapie et de la surveillance :

* Auteur correspondant. Villa 38, résidence des Médecins, 12000 Harhoura, Maroc. Adresse e-mail : [email protected] (N. Ben Raïs Aouad).

irathérapie, balayage isotopique (BI), dosages de la thyroglobuline (Tg), de la TSHus, de la T3L et de la T4L. 2. Position du problème Au Maroc, le nombre de nouveaux cas de cancers dépasse 35 000 par an et le CDT reste un cancer rare dont l’incidence estimée à 0,6/100 000 [1] dans notre pays a doublé en 20 ans. Le CDT est un cancer qui peut guérir s’il est bien pris en charge [1,2]. Les métastases peuvent survenir des décennies plus tard et sont souvent mortelles [3,4], d’où la nécessité d’une surveillance à vie. Cette surveillance se doit d’être la plus

0928-1258/$ – see front matter # 2009 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. doi:10.1016/j.mednuc.2009.07.013

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efficace et la moins contraignante possible pour le patient. Cette surveillance inclut aussi bien les patients à bas et haut risque. En l’absence de consensus chirurgical généralisé, nous essayons d’adopter un protocole de suivi adapté au risque de récidive, en tenant compte des stades selon la classification UJCC, de la classification pTNM de 2002, des scores pronostiques [5,6] et avec quelques particularités pour les patients considérés à bas risque. L’irathérapie a été initiée en 1985 pour s’imposer progressivement en routine à partir de 1987. La surveillance du CDT occupe une place de choix au sein du service et ce depuis plus de 20 ans et concerne plus de 3200 patients. Le CPT représente 66 % contre 22 % pour le CVT bien différencié et 12 % pour le CVT moyennement différencié [1]. Le sexe ratio est de 3,5 femmes pour un homme [1]. 3. Nécessité de suivi au long cours – comment optimiser le suivi ?

au moindre signe d’appel le médecin traitant nous adresse le patient pour un bilan plus complet, voire pour une décision d’irathérapie. 4. Bilan de la maladie et moyens de surveillance Le bilan de la maladie est généralement fait dans le service et permet de réajuster la stadification initiale, ce bilan comprend :       

l’étendue de l’acte chirurgical ; la scintigraphie thyroïdienne ; l’échographie cervicale avec une sonde haute fréquence ; le dosage de la Tg avec des anti-Tg ; la décision d’irathérapie quand elle est indiquée ; le balayage à j5 ou j7 post-irathérapie ; le traitement freinateur.

4.1. L’étendue de l’acte chirurgical 3.1. Prise en charge par une équipe d’un même service La prise en charge du CPT et du CVT de la thyroïde est pluridisciplinaire. Le patient est souvent partagé entre le chirurgien ou l’ORL, l’endocrinologue et l’isotopiste, d’où la nécessité d’une surveillance bien codifiée et la moins contraignante pour le patient. Si le patient n’ayant pas bénéficié d’irathérapie est suivi par l’endocrinologue ou le chirurgien, tout patient ayant reçu une irathérapie est en général suivi par l’isotopiste. La pertinence du suivi par une seule équipe, voire par le même médecin, facilite aisément le suivi. Le médecin assurant le suivi peut discuter le dossier du patient, si besoin, en staff pluridisciplinaire et le patient bénéficiera de la décision. 3.2. Le patient est sensibilisé et devient acteur de sa maladie Le patient doit être correctement informé sur sa maladie et sensibilisé sur les risques à court, moyen et long terme. L’isotopiste doit, dès l’ouverture du dossier, expliquer au patient l’état de sa maladie et l’inciter à devenir acteur dans la prise en charge et le suivi de celle-ci. Le patient doit être mis en confiance tout en étant informé sur l’importance et le bénéfice d’une surveillance au long cours. La surveillance régulière permet d’équilibrer le traitement et surtout de dépister précocement toute récidive et d’optimiser les chances de guérison. Ainsi à l’hôpital Ibn Sina, où actuellement plus de 3200 cas sont suivis, la première consultation au sein du service de médecine nucléaire a un intérêt majeur et tous les médecins nucléaires sont sensibilisés à ce premier contact avec le patient. Aussi, l’isotopiste fait le bilan de la maladie, informe le patient sur l’irathérapie éventuelle et sur les étapes du suivi. Les patients correctement informés reviennent régulièrement à leur consultation au cours des deux premières années (85 %) et ne sont plus que 60 % à cinq ans. Pour les patients ayant bénéficié d’une irathérapie et habitant loin des centres universitaires, le suivi est assuré dans la ville la plus proche et

En l’absence de consensus chirurgical, nous distinguons deux types de situation. 4.1.1. Le patient est opéré pour une pathologie thyroïdienne non cancéreuse Le patient est opéré pour une pathologie thyroïdienne non cancéreuse telles une thyroïdite ou une hyperthyroïdie [7–10] ou autre. . . Le CDT est découvert lors de la lecture de la pièce anatomopathologique. Le plus souvent, le patient nous est adressé pour une irathérapie. Nous conseillons que le patient soit repris pour une totalisation lorsqu’elle n’a pas été pratiquée avec curage central et latéral, en particulier s’il s’agit d’un CPT [5,13]. Lorsqu’il s’agit de la découverte d’un microcarcinome papillaire, en l’absence de multifocalité et d’effraction capsulaire, le patient peut ne pas être repris chirurgicalement. Aussi, et selon les cas, une simple lobectomie peut s’avérer suffisante chez les patients à très bas risque dont le microcarcinome est bien localisé sans effraction capsulaire et ce d’autant plus que le lobe controlatéral s’avère normal à l’échographie en préopératoire alors qu’une thyroïdectomie de prudence paraît utile dans le consensus français [11] et ce en raison du risque de microcarcinomes controlatéraux. Ces deux attitudes sont suivies par les équipes chirurgicales. 4.1.2. Le patient opéré est suspect de carcinome de la thyroïde Les circonstances de découverte dans notre contexte sont représentées par le nodule suspect dans 68 % des cas, le goitre multinodulaire dans 22 % des cas, les adénopathies cervicales dans 8 % des cas et les métastases à distance dans 2 % des cas [1]. Malgré la forte suspicion de néoplasie, l’examen extemporané est rarement pratiqué et reste réservé à quelques équipes des CHU et de cliniques privées. Pour cette raison, le patient est, en général et dans près de 80 % des cas, opéré en deux temps et la totalisation chirurgicale n’a lieu qu’après la confirmation anatomopathologique.

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Le curage ganglionnaire dans le CPT ne fait pas toujours l’unanimité, ce qui pose problème dans la stadification correcte du patient. Nous insistons auprès de nos collègues chirurgiens sur l’intérêt du curage ganglionnaire pour plusieurs raisons. En effet, les métastases ganglionnaires sont retrouvées chez près de 48 % de nos patients et dépassent 80 % chez l’enfant [12,1]. Ces métastases sont souvent multiples et de taille variable, d’où l’intérêt d’une dissection en bloc [13–15]. Le compartiment central du cou et le compartiment latéral sont impliqués dans 80 à 95 % des cas [13,5]. Chez les patients porteurs de carcinome V, les métastases ganglionnaires sont retrouvées dans près de 10 % des cas [12,1]. L’atteinte ganglionnaire augmente le risque local, régional ou de métastases à distance. La chirurgie reste le meilleur traitement des métastases ganglionnaires d’autant plus que ces métastases ne fixent pas l’iode 131 dans au moins un tiers des cas [13]. L’irathérapie sera d’autant plus bénéfique si le curage a été réalisé, elle ne semble efficace que sur les petites métastases et ne permet pas d’éradiquer les métastases dépassant un centimètre [13,1]. Une réintervention au niveau du compartiment central risque de s’avérer difficile avec haut risque de complications. L’échographie préopératoire peut être utile pour détecter les ganglions difficilement individualisables tels que ceux situés derrière les vaisseaux par exemple. Enfin, la Tg sous traitement freinateur peut rester indétectable chez 20 % des patients avec métastases ganglionnaires. Même en l’absence d’adénopathie suspecte lors du bilan préopératoire, une exploration minutieuse du compartiment central des régions récurrentielles, sus- et sous-isthmiques est recommandée [13]. Dans notre contexte, le bénéfice du curage prophylactique du compartiment central reste fortement recommandé en raison du bas niveau socioéconomique chez près de 85 % de nos patients [1,11]. 4.2. La scintigraphie thyroïdienne Elle est réalisée au Tc-99m chez un patient sous bonne stimulation endogène après chirurgie ; elle vise à visualiser le ou les résidus cervicaux. le BI diagnostique réalisé systématiquement quatre semaines après l’acte chirurgical n’est plus de pratique courante. 4.3. L’échographie cervicale haute fréquence L’échographie utilise une sonde de détection d’au moins 7,5 MHz et est souvent couplée à un examen doppler. Elle joue un rôle capital dans le bilan et la surveillance des CPT et CVT. Cet examen doit être réalisé par une équipe experte de référence. Dans le service, nous essayons d’adresser les patients à la même équipe et les résultats sont corrélés à ceux de la Tg. Lors du bilan, l’échographie est pratiquée avant la chirurgie initiale et assurément avant la totalisation chirurgicale, avant l’irathérapie et six mois après l’irathérapie. Lors du suivi, l’échographie joue un rôle central et reste recommandée tous les six mois à un an, voire tous les deux ans selon les cas. Il est inutile de répéter cet examen tous les ans chez les patients à bas risque avec un taux de Tg indétectable en

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défreination, puisque le risque de récidive à dix ans est de moins de 1 % [5]. La sensibilité de la palpation est faible parce que certains ganglions sont difficilement palpables de par leur situation derrière les vaisseaux ou dans le compartiment central. Le guidage échographique de la cytoponction est d’une grande utilité devant tout nodule suspect et permet une analyse cytologique du liquide d’aspiration et une mesure de la Tg dans le liquide de rinçage [5]. Malheureusement, cette pratique, malgré la demande, reste sous utilisée et est exceptionnelle même au sein des centres universitaires ; toute adénopathie suspecte est en général confiée au chirurgien. L’hyperplasie ganglionnaire bénigne est fréquente. Les caractéristiques échographiques orientent le diagnostic et l’examen peut détecter des ganglions métastatiques de 2 à 3 mm. Les ganglions suspects sont situés à la partie basse de la chaîne jugulo-carotidienne ou dans le compartiment central cervical. Ces ganglions sont généralement hypoéchogènes, avec une ligne centrale échogène ou présentant des microcalcifications, une composante kystique et sont très vascularisés à l’examen doppler [5]. Pour les patients à haut risque (stade II ou plus), nous recommandons une échographie cervicale tous les ans pendant les cinq premières années. 4.4. La thyroglobuline La Tg est produite aussi bien par le tissu thyroïdien normal que pathologique dans le CPT et CVT. Elle est dosée en routine par méthode radioimmunométrique (IRMA) dans le service depuis 1997. Nous utilisons un dosage avec une sensibilité analytique de 0,3 ng/mL et une sensibilité fonctionnelle de 0,1 ng/mL. Ce dosage a révolutionné la prise en charge du patient atteint de CPT et CVT et a considérablement allégé le suivi au long cours. Avant 1997, le patient était contraint de subir des BI en défreination au moins une fois par an. Le couplage de la Tg à l’échographie a profondément bouleversé le suivi du patient et a surtout permis de surseoir à l’inconfort consécutif au BI diagnostique. La Tg est une glycoprotéine qui peut rester détectable plusieurs semaines ou mois après le traitement initial avant de devenir indétectable. Nous recommandons de la doser en défreination six mois après l’irathérapie lors de la réalisation du balayage d’efficacité. Il arrive que la Tg devienne détectable à la suite de défreination et ce six à 12 mois après le traitement initial, puis régresse chez un tiers à deux tiers des patients sans évidence de maladie résiduelle ou de métastases [13]. En revanche, les récidives sont observées chez les patients dont les taux de Tg sont en augmentation sous traitement freinateur et/ ou en défreination. L’interférence avec les anticorps anti-Tg est retrouvée chez 15 à 20 % des patients et il est important d’évaluer leur taux avant la mesure de Tg. Pour chaque patient, il faut rechercher les anticorps anti-Tg par méthode RIA [11,13,15]. L’utilisation de trousses IRMA pour la détermination de la Tg peut sous-estimer ou être à l’origine de faux négatifs en raison de la réactivité de la Tg endogène avec les anticorps anti-Tg. Le recours au test de récupération permet de

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distinguer les sérums avec interférences quand il est supérieur à 120 %, alors qu’il est près de 100 % dans les sérums sans interférence. Un taux de moins de 80 % reste douteux de présence d’auto-anticorps ou d’autres effets non spécifiques. En l’absence d’anticorps anti-Tg, on a recours au test de récupération à chaque détermination de la Tg. Le résultat de celle-ci doit être comparé au degré de stimulation estimé par le taux de TSHus. Chez les patients à haut risque (stade II ou plus), la Tg est dosée deux fois par an sous traitement freinateur et au moindre signe d’appel, elle est dosée en défreination. Si elle devient indétectable le patient est considéré comme guéri. Si elle augmente au-delà de son taux précédent, une rechute doit être recherchée. 4.5. Limites de la Tg Sous traitement freinateur, la Tg reste indétectable chez 98 % des patients en complète rémission [13]. En cas de métastase ganglionnaire isolée, la Tg peut être indétectable dans 20 % des cas, lorsqu’elle est dosée sous traitement freinateur. Il en est de même lors de miliaire isotopique sans traduction radiologique où la Tg peut être négative dans moins de 5 % des cas [5]. La mesure de la Tg en défreination augmente la sensibilité et, malgré cela, 5 % des patients avec atteinte ganglionnaire et moins de 1 % de patients avec miliaire isotopique garderaient une Tg indétectable [5]. Ces faux négatifs peuvent être rattrapés par l’échographie qui peut détecter des ganglions métastatiques de 2 à 3 mm et par le BI pour la détection de miliaire. En cas de larges métastases locales et/ou à distance, la Tg est augmentée aussi bien sous traitement freinateur qu’en défreination. Chez les patients à bas risque ayant subi une thyroïdectomie totale sans irathérapie, la Tg est indétectable dans plus de 90 % des cas sous traitement freinateur et reste faiblement détectable dans les autres cas. 4.6. L’irathérapie L’irathérapie est indiscutable en cas de résection tumorale incomplète ou en cas de résection complète avec haut risque de récidive. L’âge du patient au moment du diagnostic est de 42,5 ans pour le CPT et 48 ans pour le CVT, la taille de la tumeur dépasse 2 cm dans 70 % des cas [1]. Les métastases à distance, le retard à la prise en charge thérapeutique et la non accessibilité aux soins concernent au moins 15 % des patients. Les patients à bas risque (stade I), traités systématiquement par irathérapie jusqu’en 2008 sont discutés au cas par cas, en tenant compte du niveau socioéconomique et de la proximité des centres de soin et de suivi. La décision de l’irathérapie se fait généralement dans le service de médecine nucléaire et, si besoin, en staff pluridisciplinaire et reste fortement indiquée dans plus de 98 % des cas. Elle est réalisée sous bonne stimulation endogène avec un taux de TSHus dépassant 50 mU/mL. La TSH humaine recombinante n’est pas disponible au Maroc. L’activité

administrée est de 3,7 GBq et peut augmenter, voire doubler, pour des métastases à distance multiples. 4.7. Le balayage isotopique post-irathérapie Le BI requiert une haute sensibilité et ce d’autant plus que les reliquats thyroïdiens sont de petite dimension, d’où l’intérêt d’une bonne stérilisation chirurgicale. Ce BI est réalisé en j5 ou j7 après irathérapie. Il a une valeur diagnostique inestimable ; il complète le bilan d’extension et précise l’absence ou la présence de métastases et ce d’autant plus que le patient a une Tg détectable, voire élevée. 4.7.1. Absence de fixation en regard de la loge thyroïdienne Aucun de nos patients n’a présenté une absence de fixation en regard de la loge thyroïdienne. 4.7.2. Présence d’un ou plusieurs foyers cervicaux de fixation Le BI révèle un foyer de fixation ou plusieurs en regard de la loge thyroïdienne, la pyramide de Lalouette est souvent visualisée. Des métastases fixantes peuvent être visualisées au niveau cervical, ce qui peut modifier la stadification. 4.7.3. Métastases à distance Le BI va mettre en évidence des métastases connues ou les découvrir. Ces métastases sont dans 56,5 % des cas des métastases pulmonaires et dans 23,5 % des métastases osseuses [1]. Dans 16 % des cas, les métastases sont pulmonaires et osseuses [1]. Dans 4 % des cas, on retrouve des métastases au niveau du cerveau, de l’orbite, du foie et d’autres foyers moins habituels (hypophyse, surrénales, tissu mou) [1,4]. 4.8. Autres examens La radiopulmonaire a un intérêt très limité et reste normale en cas de métastases pulmonaires micronodulaires. Le scanner spiralé sans produit de contraste peut montrer des micronodules pulmonaires [1,5]. Les métastases osseuses sont généralement ostéolytiques à la radiographie, la scintigraphie peut montrer une hyperfixation modérée. Dans ce cas, un examen tomodensitométrique ou une IRM peuvent s’avérer utiles. L’IRM reste meilleure en cas de métastases vertébrales. En cas d’élévation de la Tg avec forte suspicion de métastases à distance, on peut utiliser des traceurs tels que le thallium 201 ou le MIBI-Tc 99m qui ont l’avantage d’être réalisés sous traitement freinateur. Le MIBI-Tc 99m a été utilisé avec succès chez quatre patients et a objectivé des foyers de fixation, ce qui a permis d’orienter la prise en charge thérapeutique [1]. 4.9. L’imagerie moléculaire À Rabat, on disposera dans un futur proche d’une TEP18FDG, ce qui va renforcer la détection précoce des récidives ou

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des métastases. Un cyclotron dédié à la production du 18FDG, situé à 50 km de Rabat, est actuellement prêt à la livraison. La sensibilité de la TEP-18FDG est proche de 100 % quand la Tg est supérieure à 10 ng/mL et est de 60 à 70 % pour des taux de Tg compris entre 2 et 10 ng/mL [11]. Malheureusement, le coût de cet examen va être un facteur limitant. 4.10. Le traitement freinateur Le traitement freinateur consiste en une prise unique de thyroxine, le matin à jeun, 20 à 30 minutes avant le petitdéjeuner. La dose moyenne est de 2 mg/kg par jour ; elle est augmentée (3 à 4 mg/kg par jour) chez l’enfant de moins de dix ans, diminuée au-delà de 40 ans et réduite à près de 1 mg/kg par jour au-delà de 60 ans [16]. L’objectif est d’avoir un taux de TSHus le plus bas avec une dose minimale suppressive tout en évitant la thyréotoxicose. Le contrôle hormonal se fait deux à trois mois après le début du traitement par le dosage de la TSHus et de la T3L. Celle-ci doit être normale afin d’éviter une thyréotoxicose iatrogène. Une dose correcte correspond à un taux de TSHus de 0,1 mU/ mL. Pour les patients à bas risque, le taux de TSHus peut être de 0,1 à 0,5 mU/mL. En cas de déséquilibre, on augmente ou diminue de 25 mg et on contrôle à trois mois. Ce traitement peut être ajusté chez le patient cardiaque en concertation avec le cardiologue. Une fois le patient équilibré, le taux de la TSHus est par la suite estimé tous les ans. Chez la femme enceinte, la dose de thyroxine est augmentée de 25 à 50 % [16,17] en tenant compte de la TSHus, qui doit être dosée tous les deux mois. Après accouchement, la femme reprend la dose normale. 4.11. Le balayage d’efficacité Ce balayage est réalisé six mois après l’irathérapie sous stimulation endogène, il est confronté au taux de Tg réalisé dans les mêmes conditions. Pour les patients qui ont présenté de simples reliquats de fixation au BI post-irathérapie, ce balayage est en général négatif avec un taux de Tg indétectable et le patient est considéré guéri. Lorsque la fixation des reliquats est faible, elle va persister quelques mois avant de disparaître. Pour les patients présentant des foyers métastatiques fixants et qui ne peuvent être traités chirurgicalement, il faut continuer les cures d’irathérapie selon les protocoles habituels. 5. Conclusion Les CPT et CVT sont guérissables s’ils sont pris à temps et même à des stades relativement avancés. Les métastases

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tardives existent et sont souvent mortelles d’où la nécessité d’un suivi à vie. Les moyens de surveillance disponibles ont permis d’alléger considérablement le suivi et permettent de détecter précocement les rechutes et les métastases pour un meilleur bénéfice thérapeutique. Références [1] Ben Raïs Aouad N, Ghfir I, Missoum F, Rahali J, Guerrouj H, Ksyar R, et al. Aspects épidémiologiques du cancer différencié de la thyroïde (médullaire exclu) au Maroc. Médecine nucléaire. Imagerie Fonctionnelle Metabolique 2008;32:580–4. [2] Parkin DM, Whellan SI, Ferlay J. Cancer incidence in five continents. IARC Scientific publication No. 143, International agency for research on cancer, Lyon, vol. 7 1997. [3] Ennibi G, Ben Raïs N. Les métastases pulmonaires micronodulaires de type miliaire dans le cancer thyroïdien bien différencié (médullaires exclus) à propos de dix cas. Médecine nucléaire. Imagerie Fonctionnelle Metabolique 2007;31:85–92. [4] Fellah S, Ksyar R, Missoum F, Ben Raïs N. Métastase du tissu mou révélant un carcinome folliculaire différencié de la thyroïde. Médecine nucléaire. Imagerie Fonctionnelle Metabolique 2008;32: 308–10. [5] Schlumberger M, Pacini F. Prognostic factors. In: Thyroid tumors. Paris: Nucleon Editions; 2003. p. 111–25. [6] Schlumberger M, Challentou C, De Vathaire F, Travagli JP, Gardet P, Lumbroso J, et al. Radioactive Iodine treatment and external radiotherapy for lung and bone metastases from thyroid carcinoma. J Nucl Med 1996; 37:598–605. [7] Ron E, Doody MM, Becker DV, Brill AB, Curtis RE, Goldman MB, et al. Cancer mortality following treatment for adult hyperthyroidism. Cooperative thyrotoxicosis therapy follow up study group. JAMA 1998;280: 347–55. [8] Olen E, Klink GH. Hyperthyroidism and thyroid cancer. Arch Pathol 1966;81:531–5. [9] Wemeau JL, Gouze V, Boucher A, et al. Hyperthyroïdie et cancer. Rev Fr Endocrinol Clin 1998;39:351–69. [10] Rieger R, Pimple W, Money S, Rettenbacher L, Galvan G. Hyperthyroidism and concurrent thyroid malignancies. Surgery 1989;106:6–10. [11] Herry JY. Prise en charge des cancers papillaires et vésiculaires de la thyroïde. Médecine nucléaire. Imagerie Fonctionnelle Metabolique 2008; 32:242–6. [12] Travagli JP, Schlumberger M, de Vathaire F, Frances S, Parmentier C. Cancer de la thyroïde chez l’enfant : expérience de l’IGR. Lyon Chirur 1995;91:4769. [13] Schlumberger M, Pacini F. Fellow-up. In: Thyroid tumors. Paris: Nucleon Editions; 2003. p. 147–64. [14] Hay ID, Bergstrahl EJ, Grant CS, McIver B, Thompson GB, van Heerden JA, et al. Impact of primary surgery on outcome in 300 patients with pathogenic tumor node- metastasis stage III papillary thyroid carcinoma treated at one institution from 1940 through 1989. Surgery 1999;126: 1173–81. [15] Sherman SI. Thyroïd carcinoma. Lancet 2003;361:501–11. [16] Schlumberger M, Pacini F. Fellow-up. In: Hormonal therapy. Paris: Nucleon Editions; 2003. p. 207–17. [17] Moosa M, Mazzaferri EL. Outcome of differentiated thyroid cancer diagnosed in pregnant women. J Clin Endocrinol Metab 1997;82: 2862–6.