Comment faire le bilan d’extension du cancer bronchique ?

Comment faire le bilan d’extension du cancer bronchique ?

Revue des Maladies Respiratoires Actualités (2014) 6, 76-79 Disponible en ligne sur www.sciencedirect.com BILAN INITIAL DU CANCER DU POUMON : LES R...

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Revue des Maladies Respiratoires Actualités (2014) 6, 76-79

Disponible en ligne sur

www.sciencedirect.com

BILAN INITIAL DU CANCER DU POUMON : LES RECOMMANDATIONS INCa-SPLF

Comment faire le bilan d’extension du cancer bronchique ? How to make the bronchial cancer assessment? Article rédigé par M.-A. Cornetto (Paris)*, d’après la communication de J. Tredaniel (Paris)1 1Service

de pneumologie et cancérologie thoracique, Groupe Hospitalier Paris Saint-Joseph, Université Paris Descartes, 42 Rue de Grenelle, 75007 Paris, France

T

out cancer du poumon localisé au thorax, accessible à une chirurgie ou à une association chimio- radiothérapie, est en situation potentiellement curatrice. Le bilan d’extension doit dater de moins de 6 semaines avant l’initiation d’un traitement pour un carcinome bronchique car la tumeur évolue rapidement chez 10 à 20 % des patients. La très faible médiane de survie des patients métastatiques doit inciter à la mise en place très rapide d’un traitement. Le bilan pré-thérapeutique consiste en une évaluation de l’état général (Performans status et degré d’amaigrissement), un bilan fonctionnel, un bilan d’extension locorégional (T, N) et à distance (M). En France en 2010, l’âge moyen lors du diagnostic de cancer pulmonaire était de 65 ans avec un quart de femmes. Soixante-dix pour cent des patients présentaient un état général conservé au diagnostic (PS = 0 ou1), 30 % avaient un mauvais état général et 10 % avaient une perte de poids de plus de 10 kg dans les 3 mois avant le diagnostic [1].

Cancer bronchique non à petites cellules Le cancer bronchique non à petites cellules représente 86,5 % des cancers bronchiques en France [1]. Le bilan d’extension de ce type de cancer varie selon le tableau initial. Dans la situation d’une tumeur apparemment localisée au thorax

potentiellement accessible à un traitement locorégional (Fig. 1), la tomodensitométrie (TDM) par émission de positon (TEP) représente l’examen de référence et a une forte valeur prédictive négative. [2] Concernant l’évaluation de la tumeur (T), les deux principaux examens sont la bronchoscopie souple et la TDM thoracique. La bronchoscopie souple permet la réalisation de biopsies multiples notamment des éperons adjacents. Elle est réalisée systématiquement aÀn de dépister d’autres lésions endobronchiques. La TDM thoracique avec injection de produit de contraste permet d’évaluer la localisation et l’extension tumorale, de différencier les ganglions et les structures vasculaires et enÀn de délimiter l’envahissement médiastinal par une tumeur centrale. Par contre, le scanner n’est pas toujours formel devant un envahissement œsophagien ou cardiaque. La recherche d’une atteinte atriale nécessite la réalisation d’une échographie trans-œsophagienne (ETO). EnÀn, l’imagerie par résonnance magnétique nucléaire (IRM) ne montre pas de supériorité par rapport au TDM et est réservée pour l’évaluation des atteintes nerveuses des tumeurs de l’apex. Pour ce qui est de l’évaluation du statut ganglionnaire (N) (Fig. 2), le scanner thoracique est insufÀsant. Il signale des adénomégalies (petit axe du ganglion > 10 mm) sans se prononcer sur leur caractère tumoral ou non. Le TEP-scanner est indispensable. [3] Il présente une meilleure sensibilité (62 %) et spéciÀcité (90 %)

*Auteur correspondant. Adresse e-mail : [email protected] (Marie-Alice Cornetto).

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Cancer bronchique non à petites cellules : tumeur apparemment localisée au thorax, potentiellement accessible à un traitement loco-régional

Évaluation du T

Bronchoscopie souple

Scanner thoracique avec injection de produit de contraste

Biopsies multiples et biopsies des éperons adjacents

Il précise la localisation et l’extension tumorale, discrimine entre ganglions et structures vasculaires

Si non effectuée à visée diagnostique, elle est indiquée à titre systématique afin de dépister d’autres lésions endobrochiques

Il délimite l’envahissement médisatinal par une tumeur centrale

Mais il n’est pas toujours formel dévant un envahissement œsophagien ou cardiaque

La recherche d’une atteinte atriale peut justifier une échographie trans-œsophagienne

Pas de supériorité de l’IRM en déhors de l’évaluation des atteintes nerveuses (tumeur de l’apex)

Figure 1. Algorithme d’évaluation du T dans le bilan d’extension d’une tumeur bronchique apparemment localisée au thorax (Àgure originale).

Évaluation du N : TEP-TDM

Preuve anapath de l’atteinte N si :

Hypermétabolisme ganglionnaire médiastinal (car taux élevé de faux positifs)

Pas d’exploration médiastinale si : absence d’adénomégalie TDM et TEP-TDM négatif (car valeur prédictive négative élevée) u« o b u y lk d e m ia t s » n i

Malgré une TEP-TDM négative si : – tumeur centrale, – doute sur un envahissement hilaire, – ganglions > 16 mm (petit axe) en TDM et faible métabolisme de sa tumeur Ive

Figure 2. Algorithme d’évaluation du N dans le cancer bronchique non à petites cellules apparemment localisé au thorax (Àgure originale).

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que la TDM thoracique (55 % sensibilité-81 %spéciÀcité) pour l’analyse des adénopathies [2]. Mais même si la TEP apporte de meilleurs résultats que la TDM, la réalisation de biopsie est toujours nécessaire pour conÀrmer l’atteinte tumorale d’un ganglion. En l’absence d’adénomégalie sur le scanner et le TEP-scanner (VPN élevée) et si la tumeur est périphérique, l’exploration médiastinale n’est pas recommandée. Il en est de même si le patient présente un bulky mediastin, c’est-à-dire si le médiastin est entièrement envahi par des adénopathies. Une exploration médiastinale est indiquée : • si le TEP scanner montre une faible Àxation des adénopathies médiastinales (car le taux de faux positifs est élevé) ; • si la tumeur est centrale malgré un TEP-scanner négatif ; • s’il y a un doute sur un envahissement hilaire ; • si le ganglion a un petit axe de plus de 16mm au TDM ; • et enfin si la tumeur primitive présente un faible métabolisme. Il est important de souligner que l’exploration du médiastin n’est pratiquée que si elle permet de changer la stratégie thérapeutique. Les deux techniques d’exploration médiastinale sont la médiastinoscopie cervicale, examen de référence (sensibilité de 81 %, spéciÀcité de 100 %, VPP de 100 %, VPN de 91 %) qui permet l’exploration des niveaux 1, 2, 4, 7 et 10R. Il est recommandé de prélever au minimum un ganglion sur les aires para-trachéales droite et gauche et sous-carénaire (Fig. 3) [4]. Le second examen est la ponction transbronchique ou transœsophagienne écho-guidée. Elle n’a d’intérêt que si elle est « positive ». C’est une procédure ambulatoire qui donne accès aux ganglions sous-carénaires (7), hilaires (10) et intra-pulmonaires (11). Cette exploration peut être répétée, contrairement à la médiastinoscopie, notamment dans le cas de la réévaluation médiastinale après traitement d’induction des tumeurs de stade III. Dans les recommandations américaines (NCCN guidelines version 3.2014) pour les stades IA, il est préconisé pour tous les patients une évaluation du médiastin par médiastinoscopie ou échoendoscopie même si le TEP-scanner est négatif. Les recommandations de l’ESMO 2013 [5] préconisent plutôt une écho-endoscopie dans le cas des N2 ou N3 et plutôt une médiastinoscopie en présence d’un No ou N1 quand l’exploration doit être faite. EnÀn, l’évaluation de l’extension à distance (M) est réalisée, en cas de tumeur potentiellement accessible à un traitement loco régional curatif, avec le TEP-scanner et l’imagerie cérébrale. Une imagerie cérébrale (scanner avec injection de produit de contraste ou une IRM en cas de contre-indication au produit de contraste iodé) est systématique et doit être réalisée en raison du risque de métastases cérébrales élevé. Pour les lésions extra cérébrales, le TEP-scanner est limité si la lésion mesure moins de 10 mm. Toutefois, ses performances sont supérieures à la scintigraphie osseuse ou à l’échographie pour la détection des métastases osseuses, surrénaliennes ou hépatiques. En cas de métastase isolée, il est nécessaire d’obtenir une preuve histologique. Dans le cas d’un épanchement pleural une ponction pleurale est réalisée. Si la tumeur est opérable et que la cytologie est négative sur deux ponctions exploratrices, une thoracoscopie première avec une analyse extemporanée est réalisée. Si l’examen extemporané de la plèvre est positif, la procédure est arrêtée et un traitement médical est mis en place. Si

J. Tredaniel

Supraclavicular zone 1 Low cervical, supraclavicular, and sternal notch nodes SUPERIOR MEDIASTINAL NODES Upper zone 2R Upper Paratracheal (right) 2L Upper Paratracheal (left) 3a Prevascular 3p Retrotracheal 4R Lower Paratracheal (right) 4L Lower Paratracheal (left) AORTIC NODES AP zone

5 Subaortic

6 Para-aortic (ascending aorta or phrenic) INFERIOR MEDIASTINAL NODES Subcarinal zone 7 Subcarinal Lower zone 8 Paraesophageal (below carina) 9 Pulmonary ligament

N1 NODES Hilar/Interlobar zone 10 Hilar 11 Interlobar Peripheral zone 12 Lobar 13 Segmental 14 Subsegmental

Figure 3. Aires ganglionnaires médiastinales, d’après [5].

l’anatomopathologie de la plèvre est négative la chirurgie curatrice est poursuivie. Dans le cas de tumeur non accessible à un traitement locorégional c’est à dire d’emblée métastatique (60 % des patients au diagnostic en milieu hospitalier en France) [1], les données actuelles ne permettent pas de déÀnir l’intérêt ou non d’une imagerie cérébrale systématique. Le TEP-scanner n’est pas indiqué même si son intérêt peut être discuté dans le cadre de l’évaluation thérapeutique. En cas de symptômes évoquant des métastases osseuses une analyse première du scanner en fenêtres osseuses est réalisée. L’évaluation dans ce contexte repose donc sur le scanner thoraco abdomino pelvien ± cérébral.

Cancer bronchique à petites cellules La place du TEP-scanner est encore discutée. Tout site métastatique apparemment unique doit être confirmé histologiquement. La classiÀcation TNM doit être utilisée. Une lecture du scanner en fenêtre osseuse est faite pour rechercher des métastases osseuses. Il n’y a pas lieu de d’explorer systématiquement la moelle osseuse.

Conclusion En conclusion, un bilan d’extension rapide et complet doit être réalisé en priorité dans la prise en charge des patients atteints d’un cancer bronchique aÀn d’évaluer le staging exact de la tumeur et adapter en conséquence la prise en charge oncologique.

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Liens d’intérêts J. Tredaniel, M.-A. Cornetto : aucun.

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Références

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[1]

[5]

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