Culture de la pomme de terre : enjeux écologiques

Culture de la pomme de terre : enjeux écologiques

Cahiers de nutrition et diététique (2010) 45, S17-S27 Culture de la pomme de terre : enjeux écologiques Key issues in potato crop ecology Anton J. H...

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Cahiers de nutrition et diététique (2010) 45, S17-S27

Culture de la pomme de terre : enjeux écologiques Key issues in potato crop ecology

Anton J. Haverkort A.J. Haverkort, Institut de recherche de l’université de Wageningen, P.O. Box 616, 6700AP Wageningen, Pays-Bas

MOTS CLÉS Agronomie, cisgenèse, modèle de croissance, performance de la culture, qualité de pomme de terre, sélection génétique, sélection assistée par marqueurs, système d’aide à la décision, système de fourniture des semences, viabilité

Résumé Cet article porte pour l’essentiel sur le contexte scientifique et sociétal des aspects « planétaires » du développement durable : l’amélioration de l’utilisation des ressources et la réduction des émissions de substances chimiques dans l’environnement. La pomme de terre fait l’objet de nombreuses recherches, et cet intérêt n’est probablement pas étranger au fait qu’elle apporte une valeur ajoutée supérieure aux autres cultures et qu’elle joue un rôle non négligeable dans la sécurité alimentaire mondiale. Ses caractéristiques écologiques de production ont été soumises à des études approfondies qui ont fourni des modèles de croissance importants, son génome est désormais séquencé, permettant ainsi d’effectuer des recherches portant sur les fonctions des gènes et des marqueurs moléculaires pour aider les programmes de sélection, publics et privés, à mettre au point de nouvelles variétés quasiment dans chaque pays producteur. Aujourd’hui, des milliers de variétés [1] sont répertoriés pour leurs facultés d’adaptation et leur résistance à la plupart des principaux ravageurs et maladies, et assurent une excellente utilisation du sol et une diminution du recours aux biocides. Le développement de systèmes d’aide à la décision (une fois encore rendu possible par ce système de culture à

Correspondance / Correspondence [email protected] © 2010 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.

KEYWORDS Agronomy, cisgenesis, crop performance, decision support system, genetic selection, growth model, marker assisted breeding, potato quality, seed supply system, sustainability

Summary This paper mainly deals with the societal and scientific background of the ‘Planet’aspects of sustainability: improved use of resources and reduced emission of chemicals to the environment. The potato crop – mainly due to the higher value addition than other crops and its global role in food security is a very well researched crop. Its production ecology is well investigated yielding prominent crop growth models, its genome is unraveled now allowing the research into the function of the genes and molecular markers to assist breeding programs that – public and private - now develop varieties in almost each producing country. Now thousands of varieties [1] are listed for optimal adaptation and resistance to most prevailing pests and diseases assuring best use of land and reduced use of biocides. The development of DSS – again made possible because of the capital intensive cropping system – further enhances the optimal use of resources and reduction of emission of biocides. The potato seed tuber of which 2-4 t/ha are planted assure a rapid emergence and ground cover as to absorb all sunlight, consequently the crop grows faster than most other crop thus assuring

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forte intensité de capital) améliore encore l’utilisation optimale des ressources et la réduction des émissions de biocides. Les tubercules de semence, plantés à raison de 2 à 4 tonnes/ hectares, garantissent une levée rapide et une couverture du sol permettant d’absorber tout le rayonnement solaire : la plante pousse plus vite que la plupart des autres plantes et assure une utilisation très efficace des ressources. Ce tubercule étant généralement cultivé pendant la période froide de l’année (l’hiver au Sahel et sous les climats de mousson), son évaporation est faible. Si l’on tient compte de son indice de récolte extrêmement élevé (75 % de l’ensemble des matières sèches terminent dans la partie comestible, contre 50 % seulement pour les céréales), cette culture présente une utilisation de l’eau très efficace, jusqu’à 4 fois plus efficace qu’un riz irrigué cultivé durant la saison précédant la mousson [2]. Les évolutions à venir, tels que la sélection assistée par marqueurs et la cisgénèse, contribueront à renforcer la production efficace de pommes de terre fraîches et de matières premières pour l’industrie de transformation. © 2010 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.

Introduction La pomme de terre est communément produite pour être vendue sur le marché du frais (importations précoces, variétés locales précoces et culture principale), mais elle peut également être cultivée localement pour être épluchée et emballée sous vide, et vendue surgelée dans les supermarchés. Les pommes de terre peuvent également être transformées en fécule, en flocons ou en farine pour reconstituer de la purée, ou être découpées (frites, pommes de terre sautées, ou chips par exemple). Les produits à base de pomme de terre sont souvent surgelés à l’issue de leur transformation. Chaque type de produit commercialisé exige une variété spécifique de pomme de terre présentant des qualités particulières. Le marché de la pomme de terre fraîche non épluchée exige des produits dont la couleur plaît à la clientèle, qui accorde également une grande importance à leur forme ainsi qu’à la profondeur des yeux. La couleur de la chair constitue une caractéristique essentielle : dans les pays anglo-saxons, la préférence va plutôt vers les pommes de terre à chair blanche, alors que les autres pays, eux, préfèrent à chair jaune ou crème. La texture après cuisson constitue une caractéristique importante pour les consommateurs : les Néerlandais plus âgés vont préférer les pommes de terre farineuses, alors que les plus jeunes vont s’orienter vers les variétés fermes. Cette caractéristique détermine leur utilisation en cuisine : les pommes de terre fermes en salades, les variétés farineuses en purée. Dans le secteur de la transformation, la teneur en matière sèche (amidon) constitue un facteur déterminant : les pommes de terre de petit calibre destinées à être blanchies, vendues congelées ou sous vide, nécessitent une faible teneur en matière sèche, alors que les pommes de terre utilisées pour la production de frites, de chips et d’amidon doivent présenter une teneur plus élevée. Cet article s’intéresse aux facteurs déterminant le rendement et la qualité des pommes de terre. Il traite des relations existant entre les acteurs de la chaîne d’approvisionnement logistique (sélectionneurs, agriculteurs, producteurs de semences) et de leur contribution à la production de tubercules destinés aux consommateurs ou à l’industrie de transformation. Nous passons en revue les facteurs génétiques, environnementaux et agronomiques qui influent sur les performances de la culture de pommes de terre. Les progrès réalisés dans

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a high land use efficiency. As the crop usually is grown in a cool part of the year (winter in Sahelian and Monsoon climates) its evaporation is low. Paired with its very high harvest index (75 percent of all dry matter end up in the edible part whereas it is only 50 percent in cereals) the crop has a very high water use efficiency, up to 4 times more efficient than an irrigated pre-monsoon rice crop [2]. Future developments such as marker assisted breeding and cisgenesis will further contribute to the efficient production of fresh potato and raw material for the processing industry. © 2010 Elsevier Masson SAS. All rights reserved.

Introduction Potato in general is produced for the fresh market unpeeled (early imports, early locals and main crop) or peeled and vacuum packed potato grown in the area and sold chilled in supermarkets. Potatoes may also be processed into cut potatoes (French fries, hash browns or crisps for example) or into starch, flakes or flour to be reconstituted to mashed potato. Potato based products are often frozen at the end of processing. For each type of marketed product, a specific type of potato is needed with specific quality traits. The fresh unpeeled potato market requires skin colors as preferred by consumers and also shape and eye depth are customer driven. The color of the flesh is also a major characteristic with English speaking countries preferring white fleshed potatoes and most other countries more yellow and cream colored flesh. The firmness or mealiness after cooking is another trait that depends on groups of customers: older Dutch prefer mealy potatoes and younger Dutch firm cooking types, and on use: firm ones for salads and mealy ones for mashed potato. For processing, dry matter concentration is a most determining factor: small potatoes destined for blanching, sold chilled or vacuum requires the lowest concentration; whereas raw material for the production of French fries, chips and starch requires increasing proportions of dry matter – starch mainly – in the tubers. This paper deals with factors that determine potato yield and quality and tackles how links in the supply chain (from breeders through seed potato producers to growers) contribute to the production of tubers for consumers or processors. Therefore it is first reviewed which genetic, environmental and managerial factors determine potato crop performance. Subsequently advances in breeding and genetics are discussed, with emphasis on cisgenesis, and issues in seed potato production are highlighted. Quality for processing potatoes differs largely from those for the fresh market and factors determining quality are reviewed. The paper subsequently describes which decision support tools growers increasingly have at their disposal to steer yield and quality and to optimize resources. It addresses the growing demand for environmentally friendly crop production and how this can be achieved through the identification of sustainability indicators and setting norms for their values. It concludes with remarks on the aspects of sustainability in terms of people, profit and planet.

Crop performance The potato is a vegetatively propagated crop. This means that the planting materials – seed tubers – are all

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le domaine de la sélection et de la génétique sont ensuite abordées, tout particulièrement la cisgénèse. Nous évoquons également les problématiques soulevées dans le secteur de la production de semences de pommes de terre. La qualité des pommes de terre utilisées pour la transformation est très différente de celle exigée pour le marché du frais, et nous passons en revue les facteurs influant sur cette qualité. Cet article décrit ensuite les outils d’aide à la décision dont disposent désormais les agriculteurs pour maîtriser le rendement et la qualité, et optimiser l’utilisation des ressources. Nous abordons également la demande sans cesse croissante en cultures respectueuses de l’environnement, et nous intéressons à la manière dont cet objectif peut être atteint en identifiant des indicateurs de durabilité et en définissant des normes encadrant leurs valeurs. Nous concluons cet article par quelques remarques portant sur les différents aspects du développement durable, au regard de la population, des bénéfices financiers et de la planète.

Performances de la culture La pomme de terre se reproduit naturellement par multiplication végétative. En d’autres termes, les tubercules de semence et les tubercules récoltés possèdent un patrimoine génétique identique. Les tubercules de semence (environ 2 500 kg par hectare) sont plantés dès que les températures le permettent : des températures diurnes moyennes supérieures à 5 degrés sont nécessaires après un hiver rigoureux dans les zones au climat tempéré, et des températures inférieures à 25 degrés sont quant à elles nécessaires après une période de forte chaleur dans les régions au climat méditerranéen ou sahélien. Le plant ne résiste ni au gel, ni aux températures très élevées. Le cycle de vie de la plante [3] commence par la production d’un à cinq germes, qui une fois sortis de terre se développent pour former une à cinq tiges. Quelques semaines après la levée, la partie souterraine de la tige développe plusieurs stolons, dont la longueur peut varier entre quelques centimètres et 20 cm, et dont les extrémités enflent pour former des tubercules. La tubérisation est favorisée par des températures relativement basses et par des journées courtes, mais dépend essentiellement du génotype du plant (variété). Les variétés précoces développent des tubercules peu après la levée et entrent alors en compétition avec le feuillage pour l’obtention de la matière sèche produite par la photosynthèse et le métabolisme. Dans le cas des variétés tardives, les feuilles sont moins soumises à la compétition avec les tubercules et poussent plus longtemps, si les conditions le permettent. Elles sont susceptibles d’offrir de meilleurs rendements, comme tout plant ayant achevé son développement. Sur l’ensemble de la matière sèche produite, environ 75 % se retrouve dans les tubercules. Après la récolte, les tubercules peuvent être stockés à température ambiante ou dans des locaux réfrigérés, pendant un maximum de 10 mois. Selon la variété et la température ambiante, de nouveaux germes se forment au bout de 4 mois, après quoi le cycle de vie de la plante est achevé. Outre les tubercules commercialisés pour assurer la propagation de la pomme de terre, de nombreuses variétés produisent des fleurs à la mi-saison, capables après pollinisation ouverte (vent, insectes) de produire des baies contenant plusieurs dizaines de graines botaniques. Certaines de ces graines peuvent produire des plantules à la saison suivante, qui sont ensuite éliminées (en même temps que les plantes des tubercules laissés accidentellement, si elles n’ont pas pourri ou gelé pendant l’hiver) pendant les opérations de désherbage. Le rendement et la qualité d’une culture de pomme de

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genetically identical. The seed tubers – about 2500 kg per hectare – are planted as soon as temperatures allow: average day temperatures above 5 degrees after a cold winter in temperate climates or below 25 degrees following a hot period in Mediterranean or Sahelian climates. The crop is not resistant to freezing or extremely high temperatures. Life cycle of the plant [3] starts with the production of one to about five sprouts that after emergence may develop into one to five stems. A few weeks after emergence the below ground part of a stem develops a few stolons of a few to 20 cm length which tips subsequently swell and develop into a tubers. Tuberization is favored by relatively low temperatures and short day lengths but is mainly determined by genotype (variety). Early maturing crops initiate tubers early after emergence and then compete with the foliage for dry matter produced in photosynthesis and metabolism. In later maturing varieties leaves suffer less from competition with tubers, hence grow longer if conditions allow. They potentially have higher yields as in any full grown crop, of all dry matter produced about 75 percent end up in the tubers. After harvest, tubers may be stored at ambient or refrigerated conditions for a few or up to 10 months. Depending on variety and temperature, new sprouts are formed after two to 4 months and then, plant’s life cycle is complete. Beside tubers as a commercial means of propagation, many varieties produce flowers mid season that following open pollination (wind, insects), may yield berries containing several tens of botanical seeds. Some of these seeds may produce plantlets in the following season which – together with volunteer plants from left behind tubers (when not rotten or frozen over winter) – are removed during weed control process. Yielding ability and quality of a potato crop – its performance (P) – is determined by three major interacting factors [4]: genotype (G), environment (E) and management (M). P = G × E × M. The genotype or variety has several characteristics; the major one being its adaptation to the environment it is grown. The length of its growing period, as determined by its earliness, should match the length of the available frost and heat free period. A late maturing variety is grown in long growing seasons of e.g. 160 days and an early maturing one in a short growing season of about 110 days. The same variety grown under shorter days will mature earlier. Other important varietal characteristics are its resistance to diseases such as bacteria, fungi and viruses, and to pests such as insects and nematodes. The major criteria, however, to grow a certain variety are its quality characteristics such as shape, size, color of skin, cooking type and taste. Once a potato crop is planted, the environment and variety cannot be altered anymore. Performance then depends on intelligent use of management options a grower has, such as the timing and dose of application of minerals, water and crop protection chemicals. Three yield levels can be distinguished: potential yield is the theoretical yield a potato crop could theoretically obtain when all solar radiation during the suitable temperature slot (the yield defining factors) is converted in dry matter and optimally distributed over tuber and other organs. The attainable yield is determined by the yield limiting factors such as minerals (especially nitrogen, phosphorus and potassium) and water. The actual yields that growers usually obtain are determined by the yield reducing factors such as pests, weeds and diseases. Typically potential-attainableactual yields may be 120 – 90 – 60 tons per hectare.

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terre (en d’autres termes, ses « performances », P) sont déterminés par trois principaux facteurs et leurs interactions [4] : le génotype (G), l’environnement (E) et les principes agronomiques (A). P = G × E × A. Le génotype (ou la variété) présente différentes caractéristiques, la principale d’entre elle étant sa faculté d’adaptation à l’environnement dans lequel le plant est cultivé. La longueur de sa période végétative, déterminée par sa précocité, doit correspondre à l’étendue de la période pendant laquelle le climat ne présente ni gel, ni chaleur excessive. La culture d’une variété tardive s’inscrira sur de longues saisons de croissance (de l’ordre de 160 jours), alors que la culture d’une variété précoce engendrera des saisons de croissance courtes, d’environ 110 jours. La même variété cultivée lorsque les jours sont plus courts arrivera plus tôt à maturité. La variété influe également sur d’autres caractéristiques importantes : la résistance aux maladies, d’origine fongique, bactérienne ou virale, ainsi qu’aux ravageurs, comme les insectes et les nématodes. Le critère essentiel qui préside au choix d’une variété spécifique reste ses qualités intrinsèques, telles que la forme du tubercule, sa taille, la couleur de sa peau, sa tenue à la cuisson et son goût. Une fois qu’un plant de pomme de terre est planté, l’environnement et la variété ne peuvent plus être altérés. Les performances dépendent également de l’utilisation judicieuse par l’agriculteur des options agronomiques dont il dispose, telles que le moment et la dose choisis pour l’arrosage, l’apport d’engrais et de substances chimiques destinées à protéger les cultures. On distingue trois niveaux de rendement : le rendement potentiel est le rendement théorique qu’une culture de pomme de terre pourrait théoriquement atteindre lorsque tout le rayonnement solaire disponible pendant le créneau de température adapté (les facteurs déterminant le rendement) est converti en matière sèche et réparti de manière optimale entre les tubercules et les autres organes. Le rendement possible est déterminé par les facteurs limitant ce rendement, tels que les engrais (notamment l’azote, le phosphore et le potassium) et l’eau. Le rendement effectif généralement obtenu par les producteurs est déterminé par les facteurs réduisant ce rendement, tels que les ravageurs, les adventices et les maladies. Les rendements potentiels-possibles-effectifs sont généralement de l’ordre de 120 – 90 – 60 tonnes par hectare.

Sélection et manipulation génétique Pour créer une nouvelle variété de pomme de terre, bénéficiant de nouveaux atouts par rapport à celles disponibles pour un marché et une niche environnementale spécifiques, les sélectionneurs utilisent le pollen d’une variété existante pour fertiliser une fleur castrée d’une autre variété présentant le trait recherché. Ils sélectionnent ensuite dans la descendance les individus présentant le trait recherché en plus des caractères favorables déjà présents dans la variété d’origine. Une entreprise de sélection produit en règle générale 100 000 plantules par an, et rejette chaque année la plupart d’entre elles, et parvient à obtenir une nouvelle variété environ dix ans après que le croisement a été effectué. Suivant ce modèle, une variété peut être baptisée et mise sur le marché chaque année, si les autorités nationales en charge des variétés végétales reconnaissent son caractère unique. L’introgression de traits issus d’une variété sauvage de pomme de terre, tels que le gène de résistance (gène R) au mildiou provoqué par Phytophthora infestans, est un exercice des plus délicats, car il implique le recours éventuel à des espèces-ponts issues de l’hybridation d’espèces sauvages : la

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Breeding and genetics To create a new variety of potato, with added advantages compared to the ones available for a specific market and environmental niche, breeders take pollen of an existing variety to fertilize an emasculated flower of another variety having the desired trait. They select in the progeny individuals, having the desired trait added to the already desired traits of the original variety. Typically, a breeding firm may produce some 100,000 plantlets per year and each year rejects most of them and so arrives at a new variety about ten years after the cross was made. Each year – following this scheme – about one variety may be given a name and be released, if the national plant variety board accepts its uniqueness. Introgression of traits from a wild relative of potato, such as a resistance gene (R-gene) against late blight caused by Phytophthora infestans, is a much cumbersome exercise as bridge crosses between wild species may be needed: the domesticated potato (Solanum tuberosum) which has 12 chromosomes in four replicates (4n) may not cross directly with wild species containing only duplicates of chromosomes (2n). Due to so called linkage drag, where many undesired traits are accompanying the desired resistance gene, breeders have to make many back crosses with the S. tuberosum to remove (dilute) the undesired traits. The creation of late blight resistant varieties, with a single R-gene from the wild species Solanum bulbocastanum in the Netherlands (which suit organic farming), took about 50 years to achieve. And then only a single R-gene was introduced with the risk of the disease breaking this resistance as was the case with many single R-genes introduced from Solanum demissum over much of the last century. Late blight (due to the gomycete Phytophthora) is the most important potato disease and farmers in Europe have to control it by weekly spraying fungicides. The control and losses costs about 20 percent of total production costs and at the global level are estimated at ten billion Euros annually. Furthermore, it is a burden to the environment and a threat to food security in developing countries. A major effort to combat late blight through cisgenesis takes place at Wageningen University in the Netherlands [5]. Here, existing varieties are supplied with a cassette of several R-genes from different wild species to make it more difficult for Phytophthora to break the resistance. Pathotypes of the disease, containing an avirulence gene and emit certain proteins (effectors) that are recognized by potato variety containing the corresponding R-gene upon infection, cannot infest the plant as it kills a group of plant cells and the disease with it in a hypersensitivity reaction. Stacking several genes will require more adaptation efforts of the pathogen. By varying the composition of the R-genes in time and place researchers expect to ‘outsmart’the disease thereby reducing the chemical input by over 80 percent. The methodology is that of genetic modification (cloning isolated R-genes with Escherichia coli and transferring it to existing varieties with the bacterial vector Agrobacterium tumefaciens) but without the use of a selection marker such as antibiotic resistance. This approach has several advantages: the variety’s characteristics remain the same except its increased resistance to late blight; the end product contains potato genes only, as genes from crossable wild species are used; and with judicious management of the limited amount of R-genes their effect is preserved.

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pomme de terre cultivée (Solanum tuberosum), qui possède 4 jeux identiques de 12 chromosomes (4n, tétraploïde), ne peut pas être croisée directement avec des espèces sauvages diploïdes (2n). En raison du « linkage drag », phénomène par lequel de nombreuses caractéristiques non recherchées restent liées au gène cible de résistance, les sélectionneurs sont contraints d’effectuer bon nombre de rétrocroisements avec S. tuberosum pour retirer (diluer) les traits non recherchées. Aux Pays-Bas, la création de variétés résistantes au mildiou de la pomme de terre, possédant un seul gène R issu de l’espèce sauvage Solanum bulbocastanum (utilisables en agriculture biologique), a nécessité environ 50 ans. Un seul gène R a été introduit : il existe donc le risque que la maladie parvienne à briser cette résistance, comme cela a déjà été le cas pour bon nombre de gènes R uniques introduits depuis Solanum demissum au cours du siècle dernier. Le mildiou de la pomme de terre (provoqué par le champignon Phytophthora) est la principale maladie touchant les pommes de terre. Les agriculteurs européens luttent contre son développement par des épandages hebdomadaires de fongicides. Les coûts engendrés par la lutte contre cette maladie et les pertes représentent près de 20 % des coûts totaux de production, et sont estimés à l’échelle mondiale à dix milliards d’euros par an. Elle constitue en outre un fardeau pour l’environnement et une menace pour la sécurité alimentaire des pays en développement. L’université de Wageningen, aux Pays-Bas, déploie d’importants efforts pour lutter contre le mildiou de la pomme de terre grâce à la cisgénèse [5]. Une cassette d’expression contenant plusieurs gènes R provenant de différentes espèces sauvages est transférée à des variétés existantes, afin que Phytophthora ait davantage de difficultés à briser la résistance. Les pathotypes de la maladie, comprenant un gène d’avirulence, produisent certaines protéines (effecteurs) reconnues lors de l’infection par la variété de pomme de terre possédant le gène R correspondant, et ne peuvent donc infecter la plante. Cette reconnaissance déclenche une réaction d’hypersensibilité au cours de laquelle un groupe de cellules de la plante est tué, et la maladie avec lui. Le transfert de plusieurs gènes va exiger davantage d’efforts d’adaptation de la part de l’agent pathogène. En variant la composition des gènes R dans le temps et dans l’espace, les chercheurs espèrent « duper » la maladie, et ainsi réduire les quantités d’intrants chimiques nécessaires de plus de 80 %. La méthodologie employée consiste en une modification génétique (cloner des gènes R isolés avec Escherichia coli et les transférer à des variétés existantes à l’aide du vecteur bactérien Agrobacterium tumefaciens), mais n’utilise aucun marqueur de sélection, tel que l’antibiorésistance. Cette approche présente plusieurs avantages : les caractéristiques de la variété de pomme de terre restent identiques, mais cette dernière dispose d’une résistance accrue au mildiou. Le produit final ne contient que des gènes de pomme de terre, puisqu’on utilise des gènes issus d’espèces sauvages hybridables. Enfin, avec une gestion judicieuse du nombre limité de gènes R, l’effet est préservé. Le séquençage complet du génome de la pomme de terre [6] (de l’ensemble de ses 12 chromosomes) permettra d’identifier plus facilement l’emplacement et la fonction de nombreux gènes. Ces gènes déterminent la résistance du spécimen aux ravageurs et aux maladies, son adaptation aux conditions environnementales (températures extrêmes, sel et sécheresse), ses aspects sanitaires et ses vertus qualitatives. Cette avancée va permettre de réaliser des progrès rapides dans le développement du rôle de la pomme de terre au sein d’un régime équilibré et dans l’accès des pays en développement à la sécurité alimentaire.

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With the completion of the sequencing of the potato genome [6] - of all its 12 chromosomes - the location and function of many genes will more easily be uncovered than before. These genes will be related to resistance to pests and diseases, to adaptation to environmental conditions (extreme temperatures, salt and drought) and to quality and health aspects. This will allow rapid progress to develop the role of potato in a healthy diet and in securing food for developing countries.

Seed supply systems The clonal multiplication of potato has advantages and disadvantages. The major advantage is that all individual tubers of the same variety are genetically identical. This facilitates the process into products, such as French fries or crisps where the original structure of the tuber tissue is still visible and palatable. The little variation among tubers allows the production of a rather homogeneous product, with the same cooking time, resulting in products with similar color and taste. The major disadvantage of a clonally multiplied crop is that if one seed tuber is invested with a fungus, virus or bacterium, all its progeny is infected as well, thereby seriously reducing its yielding ability. Crops propagated through seed have a more heterogeneous progeny (product), which when processed into e.g. bread is without consequence but – major advantage - most diseases are not transferred through the sexual multiplication stage. The aim of a seed potato program therefore is to make sure the variety is pure – not mixed with other varieties – and meets pre-set health standards. These health standards regard pests (nematodes) and diseases especially virus diseases. The latter are transmitted from an infected plant in the field to healthy neighboring plants by aphids of which the green peach aphids (Myzus persicae) is most effective. There are several methods to keep seed potato as much as possible devoid of pests and diseases. They all have the same principles: start with clean material and multiply it for a limited number field stages, thereby removing infected plants and dedicating the last field stage to marketing for consumption. In developing countries often hardly any official seed production scheme exists. Often growers use the smallest tubers left over from the previous crop as seed, not realizing that diseased plants yield small tubers thereby aggravating the degeneration of the seed stock. At best growers apply positive selection whereby seed tubers from the most vigorous plants in a field are kept as seed for the next planting. A much more advanced system makes use of clonal selection. In this system a specialized seed potato grower selects a healthy plant from his basic seed stock and collects its tubers. A few of these tubers are tested in a laboratory to ascertain the absence of especially viruses (such as potato virus Y (PVY) and potato leaf roll virus (PLRV)) and if found healthy the rest of the tubers of this plant (clone) are planted next season. If the field develops no symptoms and if a sample is also disease-free, the result of this clone is planted next year. After a few generations the bulked lot in e.g. the Netherlands [7] is certified as Super (S), its progeny as Super Elite (SE), its progeny as Elite 1 (E1), then E2, A and C. The crops resulting from A and C are marketed. The main principles of a seed potato scheme are: zero disease level at the top

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Systèmes de fourniture de semences La reproduction de la pomme de terre par clonage a des avantages et des inconvénients. Le principal avantage réside dans le fait que tous les tubercules de la même variété sont strictement identiques du point de vue génétique. Cela facilite la transformation des tubercules en produits finis, tels que les frites ou les chips, sur lesquels la structure d’origine des tissus du tubercule reste visible et agréable au goût. Les légères variations entre les tubercules permettent la fabrication d’un produit relativement homogène, nécessitant le même temps de cuisson, et présentant une couleur et un goût similaire. L’inconvénient majeur des cultures à multiplication végétative est que si un seul tubercule de semence est infecté par un champignon, un virus ou une bactérie, toute sa lignée sera elle aussi infectée, réduisant ainsi considérablement sa capacité de rendement. Les cultures propagées grâce à des semences présentent une descendance plus hétérogène, ce qui ne porte pas à conséquence lorsqu’elles sont transformées pour produire du pain par exemple. Elles recèlent cependant un atout essentiel : la plupart des maladies ne sont pas transmises par la reproduction sexuée. L’objectif d’un programme de semences de pommes de terre est de s’assurer que la variété est pure, qu’elle n’est pas mêlée à d’autres variétés, et qu’elle répond aux normes sanitaires établies. Ces normes sanitaires portent sur les ravageurs (nématodes) et les maladies, et plus particulièrement les virus. Ces derniers sont transmis d’un plant infecté dans le champ aux plants sains voisins par des pucerons, les pucerons verts du pêcher (Myzus persicae) étant les plus virulents. Il existe différentes méthodes permettant de protéger le mieux possible les semences de pommes de terre des ravageurs et des maladies. Toutes s’appuient sur les mêmes principes : commencer avec un matériel végétal sain, et le multiplier sur un nombre limité de générations au champ, retirer les plants infectés et consacrer la dernière génération au champ à la commercialisation pour la consommation. Il n’existe quasiment aucun programme de production officiel de semences dans les pays en développement. Les producteurs utilisent souvent les plus petits tubercules issus de la récolte précédente, sans savoir que les plantes malades produisent de petits tubercules, ce qui a pour effet d’aggraver la dégénérescence du stock de semences. Dans le meilleur des cas, les producteurs ont recours à une procédure de sélection positive : les tubercules des plantes les plus vigoureuses d’un champ sont conservés pour servir de semences lors de la prochaine plantation. Une alternative bien plus sophistiquée consiste à utiliser la sélection clonale. Dans le cadre de cette technique, un agriculteur spécialisé dans les semences de pomme de terre sélectionne une plante saine dans son stock de base et recueille ses tubercules. Certains de ces tubercules sont testés en laboratoire afin de vérifier l’absence de virus (tels que le virus Y de la pomme de terre, abrégé PVY, et le virus de l’enroulement de la pomme de terre, abrégé PLRV). Si les tests confirment qu’ils sont sains, le reste des tubercules de cette plante (des clones) sont plantés à la saison suivante. Si le champ ne développe aucun symptôme, et si un échantillon prélevé s’avère également exempt de maladie, le résultat de ce clone est planté l’année suivante. Au bout de quelques générations, le lot obtient, par exemple aux Pays-Bas [7], la certification Super (S), sa descendance la certification Super Elite (SE), la descendance de cette dernière la certification Elite 1 (E1), puis E2, A et C. Les récoltes issues de A et C sont commercialisées. Les principes essentiels auxquels obéit un programme de semences de pommes de terre sont les suivants : des individus entièrement exempts de toute maladie au sommet de la pyramide,

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of the pyramid, increasingly allowing tolerance levels (up to a few percentages at the lowest certification levels) and put in a lower class with each field stage and destined for consumption after eight field stages. This procedure assures healthy certified seed with fixed legal standards for buyers. It also keeps the inoculum pressure in the country at a low level by legally enforcing the planting of certified seed only. Seed potato fields in general are harvested well before ware potato fields to avoid aphid populations to build up to undesired levels. Aphids are monitored through suction traps and yellow traps and growers are obliged to kill the foliage before a certain date to assure the proper certificate. The classical clonal selection scheme described above is increasingly shortened by the mass introduction of in vitro rapidly multiplied material where growers receive in vitro plantlets and produce minitubers from them in aphid proof screen houses. This results in less field generations with reduced risk of accumulating pests and diseases. In certain areas in the world major potato processing companies go as far as buying great quantities of minitubers produced in low labor cost countries and processing the third field generation without any further seed inspection and removal of diseased plants.

Quality determining factors The most important indicator for the processing industry is the recovery of finished product per raw material unit. i.e. potatoes procured to this end. The recovery rate in case of French fries (Ff) is the number of kg of Ff produced per ton of potato. Another means of approaching this is measuring or calculating the yield of Ff per hectare rather than potato yield. To obtain a high recovery for Ff the following characteristics of the crop are relevant: First, the tuber size: this should be over 50 mm diameter for small sized fries and over 110 mm for long fries. Secondly, the shape matters too: round tubers with a length: width ratio of close to 1 are suitable for the production of chips, whereas long tubers with a length: width ratio of above 1.7 are suitable for Ff production. Farmers can control the size by selecting varieties with few tubers and managing nutrients and water to allow maximum growth. Tuber shape mainly depends on variety and the length of the period tubers are allowed to grow. Concentration of dry matter in a potato tuber is expressed as a percentage. For example, for Ff it is preferably close to 21.5 percent; for chips, a few percentage points higher. Lower dry matter concentrations lead to a longer period of frying to evaporate excess water from the potato strips or slices. Higher concentration may lead to too dry Ff. Beside the choice of variety, a potato grower can strive for higher dry matter concentrations by reducing the amount of nitrogen and potassium fertilizer during the growing season and by reducing irrigation towards the harvest. The dry matter concentration is the most important factor that determines the recovery rate. It is estimated that each percentage point dry matter concentration increase, increases the recovery by 2.5 percent. Defects constitute a major cause of losses in potato processing. The most important ones are green skin, caused by exposure to sunlight and bruising from falling or pressure resulting in black corky spots. Growers have much control over these losses by avoiding exposure of the tubers to

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et des niveaux de tolérance revus progressivement à la hausse (jusqu’à atteindre un faible pourcentage dans les niveaux de certification les plus faibles), et des individus affectés à une classe inférieure à chaque génération au champ et destinés à la consommation au bout de huit générations au champ. Cette procédure garantit aux acheteurs de disposer de semences saines certifiées dans le cadre de normes légales définies. Elle permet également de maintenir la pression d’inoculum à un faible niveau dans le pays en instaurant une obligation légale de planter exclusivement des semences certifiées. Les champs de tubercules de semence sont récoltés bien avant les champs de pommes de terre de consommation, afin d’éviter l’apparition de populations de pucerons à des niveaux indésirables. Les populations de pucerons sont surveillées grâce à des pièges aspirants et des pièges collants jaunes, et les agriculteurs ont l’obligation de retirer le feuillage avant une certaine date, afin de garantir la bonne certification. Le programme de sélection clonale classique décrit précédemment est fortement concurrencé par l’introduction massive de matériel végétal obtenu rapidement par multiplication in vitro. Les agriculteurs reçoivent des plantules conservées in vitro et les utilisent pour produire des minitubercules dans des serres à l’abri des pucerons. Cette méthode diminue le nombre de générations au champ, et réduit donc les risques de prolifération des ravageurs et des maladies. Dans certaines régions du monde, de grandes sociétés de transformation de pommes de terre vont jusqu’à acheter de grandes quantités de minitubercules produits dans des pays à faible coût de main d’œuvre, et à transformer la troisième génération au champ, sans procéder à une inspection des semences et au retrait des plants malades.

sunlight, by improved hilling techniques and by more gentle harvesting, transport and storage procedures. These defects as well as scab require extra deep peeling in the factory and consequently a lower recovery rate. Other defects may be hollow and black hearts, which lead to Ff rejects after frying and much depend on erratic weather patterns in the second half of the growing season. A particular concern of growers and processors is the concentration of reducing sugars – glucose and fructose - in the tubers due to insufficient conversion into sucrose or starch or insufficient respiration into carbon dioxide and water. When the concentration exceeds 0.3 percent of the tuber there is a risk of brown coloration of the Ff and chips which is undesired. Sugar ends of French fries only show the browning at the rose end of the tuber. It may be caused by secondary growth that follows a cooling after a heat wave and increases the reducing sugar concentration at one end of the tuber only. In general too high reducing sugar concentrations are associated with immature tubers as during tuber growth the concentration decreases. Tubers may be immature at harvest because of too early harvesting but the maturity of the tubers may also be delayed because of erratic temperatures – also responsible for sugar ends – during growth and excessive fertilization with nitrogen. During storage at temperatures of about 9 degrees centigrade the concentration of reducing sugars initially further decreases until a few months after harvest, and then increases, causing the so-called ‘senescence sweetening’. When the storage temperature is low – 2 to 5 degrees – respiration is slowed and reducing sugars accumulate easily to unacceptable levels.

Facteurs influant sur la qualité

Bringing models to practice

L’indicateur essentiel pour l’industrie de la transformation est la quantité de produit fini obtenu pour une quantité de matière première donnée (à savoir les pommes de terre achetées à cette fin). Dans le cas des frites, le taux de récupération correspond au nombre de kilos de frites produits par tonne de pommes de terre. Une autre approche consisterait à mesurer ou à calculer le rendement de frites par hectares, plutôt que le rendement de pommes de terre. Pour obtenir un taux de récupération élevé pour les frites, les caractéristiques suivantes de la récolte sont pertinentes. En premier lieu, la taille du tubercule : son diamètre doit être supérieur à 50 mm pour des frites de petite taille, et supérieur à 110 mm pour des frites de grande taille. En second lieu, la forme a également son importance : les tubercules arrondis présentant un rapport longueur/largeur proche de 1 sont adaptés à la production de chips, alors que les tubercules longs présentant un rapport longueur/largeur supérieur à 1,7 sont mieux adaptés à la production de frites. Les agriculteurs peuvent contrôler la taille des tubercules en sélectionnant des variétés produisant peu de tubercules, et en gérant les apports en nutriments et en eau de façon à favoriser une croissance optimale. La forme des tubercules dépend principalement de la variété et de la période laissée aux tubercules pour pousser. La teneur en matière sèche d’un tubercule de pomme de terre s’exprime en pourcentage. Par exemple, pour les frites, cette teneur doit de préférence être proche des 21,5 %, et être supérieure de quelques points pour les chips. En cas de teneurs en matière sèche plus faibles, une période de friture plus longue est nécessaire pour évaporer toute l’eau présente en excès dans les bâtonnets ou

When growing a potato crop in field trials with e.g. different planting times, amounts of nitrogen or planting densities a number of observations are crucial. They are: the date of planting; planting depth; seed tuber size; length of the sprouts; date of emergence; development of the foliage, expressed as the proportion of the soil covered with it or the area of leaves per unit area soil; date when the soil is fully covered with green leaves; dry mass of the leaves and tubers, measured at regular intervals; and soil cover development throughout the season until the foliage dies naturally or is desiccated chemically. When soil (depth of the rooting zone, water availability and uptake, organic matter concentration and carbon: nitrogen ratio known), atmospheric conditions (temperature, rainfall and evaporation) and management of the crop (supply of water and nutrients) are monitored simultaneously, a simple crop growth model can be derived from it [8-10]: • Y = R × E × H/D; • Y = fresh potato yield; • R = resource such as solar radiation, water, nitrogen; • E = efficiency with which this resource is used to produce dry matter; • H = harvest index, i.e. the proportion of all dry matter produced by the crop that is distributed to the tubers; • D = dry matter concentration of the tubers. The elegance in crop modeling is that many potato crop parameters appear to be very conservative and once established need not be reconfirmed by field trials but can be used in the model. Examples are the temperature dependent sprout growth (0.7 mm/d degree) and leaf expansion

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les tranches de pommes de terre. Des teneurs plus élevées produiront des frites trop sèches. Outre le choix de la variété, le producteur de pommes de terre peut tenter d’obtenir des teneurs en matières sèches plus élevées en réduisant les apports en engrais azotés et potassiques pendant la phase végétative, et en réduisant l’irrigation à l’approche de la récolte. La teneur en matière sèche est le facteur principal influant sur le taux de récupération. On estime que chaque point de plus dans le pourcentage exprimant la teneur en matière sèche augmente le taux de récupération de 2,5 %. Les défauts sont à l’origine de l’essentiel des pertes dans le secteur de la transformation de pommes de terre. Les défauts les plus importants sont la coloration verte de la peau, provoquée par une exposition directe au soleil, et le noircissement provoqué par une chute ou une pression excessive, entraînant l’apparition de tâches noires liégeuses. Les producteurs peuvent largement maîtriser ces pertes en évitant d’exposer les tubercules à la lumière du soleil, en améliorant leurs techniques de buttage, et en employant des méthodes de récolte, de transport et de stockage plus respectueuses du produit. À l’instar de la gale, ces défauts nécessitent un épluchage excessif en usine, et entraînent donc un taux de récupération plus faible. On retrouve parmi les autres défauts le cœur creux et le cœur noir, qui entraînent le rejet de frites pendant la fabrication, et sont pour l’essentiel le fruit de conditions climatiques changeantes au cours de la seconde moitié du cycle végétatif. Les producteurs et les sociétés de transformation portent une attention particulière à la teneur en sucres réducteurs (le glucose et le fructose) des tubercules, conséquence d’une conversion insuffisante en sucrose ou en amidon, ou d’une respiration insuffisante qui n’a pas permis de consommer les sucres et de dégager du gaz carbonique et de la vapeur d’eau. Si leur teneur dépasse 0,3 % du tubercule, les frites et les chips risquent de prendre une coloration brune indésirable à la cuisson. La répartition inégale des sucres dans le tubercule se manifeste lors de la cuisson des frites par l’apparition d’une coloration brunâtre au niveau des extrémités. Cela peut être provoqué par une croissance secondaire suite à un refroidissement succédant à une vague de chaleur, qui va avoir pour conséquence d’accroître la teneur en sucres réducteurs à une seule extrémité du tubercule. Des teneurs en sucres réducteurs trop élevées sont généralement le signe de tubercules immatures, car cette teneur diminue au fil de la croissance du tubercule. Les tubercules peuvent être immatures au moment de la récolte si cette dernière est trop précoce, mais la maturation des tubercules peut également être retardée par l’exposition à des températures erratiques (également responsables de la mauvaise répartition des sucres dans les tubercules) pendant leur croissance, et par un apport excessif en engrais azotés. Pendant la phase de stockage à des températures avoisinant les 9 degrés centigrade, la teneur en sucres réducteurs commence par diminuer au cours des quelques mois suivant la récolte, avant d’augmenter à nouveau, provoquant finalement le « sucrage de sénescence ». Lorsque le stockage est réalisé à basse température (2 à 5 degrés), la respiration est ralentie et les sucres réducteurs s’accumulent facilement à des niveaux inacceptables.

(0.013 per day degree) rates and the water (5 g per liter), light (1.25 g per MJ) and nitrogen (30 g per g) use efficiencies. This model is being used to explore potato yields in areas where future processing plants are planned without actually carrying out field trials there, to benchmark actual to attainable and potential yields, to monitor and predict yields for a factory or a country based on actual weather possibly supported by satellite images, to predict the performance of a new variety in a range of environments and to be part of decision support systems. Growers worldwide use more and more decision support [11] for their strategic (e.g. which proportion of the farm to dedicate to what kind of potato crop), tactical (e.g. which variety to grow) and operational (e.g. when to irrigate and which dose) decisions. Especially operational decisions are being offered by consultancy firms on preand post-planting amounts of nitrogen, phosphorus and potassium (NPK) fertilizer to apply, seed rates depending on variety seed size and destiny (seed or ware) of the crop, control of pests (e.g. nematodes, aphids, Colorado beetle, psyllids), weeds and diseases (early and late blight fungicide sprays), irrigation scheduling and harvest planning. Decision support systems (DSS) aid growers in more efficiently use their resources such as land, water energy, nutrients and biocides. Without decision support they often tend to over supply the resource as an insurance against yield reduction risked when not sufficiently applying e.g. nitrogen fertilizer, fungicide or irrigation water. DSS have in common that they require observations such as soil samples for nutrients, water holding capacity or presence of nematodes, crop sampling for e.g. aphid counts and meteorological observations for e.g. late blight control (as this disease depend on humidity and temperature). Next DSS need a model or a historical database to which the observations are fed and a decision rule is generated such as time and dose of nitrogen, water or biocide to apply. There is a tendency that the use of DSS becomes mandatory for e.g. the application of water, nitrogen and biocides as a license to deliver. Increasingly, processing and retail companies want to source potatoes where growers showed that they efficiently use their resources and only applied them as they were prescribed by the DSS. The amount of data gathered when growing a crop is considerable: data a grower is required to supply the company that buys the crop, the company assessing its yield and quality, data a grower has to supply to the government (complying with regulations), generic data from soil and weather and field/crop specific data needed to feed the DSS and the DSS replies An added advantage of gathering this data is that it represents a (future) valuable data base that given a right structure (ontology) will be a valuable tool in data mining for the farmer, his peer group and other parties such as buyers, governments and DSS providers.

De la théorie à la pratique

Society’s first need is food security, as was the case in the first decades after the Second World War and still so in many developing countries (notably in Asia and Africa). In the second half of the last century – food security taken care of – there was a demand (formulated by the food processing and retail industry) for food to be safe, devoid of harmful

Lorsqu’on cultive une pomme de terre dans le cadre d’essais en champ en plantant à différents moments, et en utilisant différentes quantités d’azote ou densités de plantation, un certain nombre d’observations sont déterminantes. Il s’agit

Sustainability indicators

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de la date de plantation, la profondeur de plantation, la taille du tubercule planté, la longueur des germes, la date de levée, le développement du feuillage, exprimé en proportion du sol couvert par ce dernier ou en surface de feuilles par unité de sol, la date à laquelle le sol a été entièrement recouvert de feuilles vertes, la masse sèche des feuilles et des tubercules, mesurée à intervalles réguliers, et le développement de la couverture du sol au fil de la saison, jusqu’à ce que le feuillage meurt naturellement ou soit desséché chimiquement. Si le sol (profondeur de l’enracinement, disponibilité de l’eau et absorption, teneur en matières organiques et rapport carbone/ azote connus), les conditions atmosphériques (températures, précipitations et évaporation), et la gestion agronomique de la culture (apports en eau et en nutriments) font l’objet d’un suivi simultané, il est possible de dériver de ces observations un modèle simple de croissance des cultures [8-10] : • R = RS × E × IR / MS ; • R = rendement en pommes de terre fraîches ; • RS = ressources, telles que le rayonnement solaire, l’eau, l’azote ; • E = efficacité avec laquelle cette ressource est utilisée pour produire de la matière sèche ; • IR = indice de récolte, à savoir la proportion de l’ensemble de la matière sèche produite par le plant transmis aux tubercules ; • MS = teneur en matière sèche des tubercules. L’intérêt de la modélisation des cultures réside dans le fait que de nombreux paramètres concernant les plants de pomme de terre restent très conservateurs, et peuvent être utilisés dans le modèle sans avoir besoin, une fois établis, d’être reconfirmés par des essais en champ. On citera notamment l’exemple de la relation entre la croissance des germes et la température (0,7 mm/degré-jour), le rythme de développement des feuilles (0,013 par degré-jour) et l’efficacité d’utilisation de l’eau (5 g par litre), de la lumière (1,25 g par MJ) et de l’azote (30 g par g). Ce modèle est utilisé pour étudier les rendements de pommes de terre dans les régions où l’installation à venir de sites de transformation est prévue, sans pour autant avoir à pratiquer des essais en champ à cet endroit, pour établir des points de référence concernant les rendements possibles et potentiels, pour effectuer un suivi et prévoir les rendements pour une usine ou un pays, sur la base des conditions climatiques actuelles, éventuellement avec l’aide d’images satellite, pour prédire les performances d’une nouvelle variété dans différents environnements et pour intégrer ces méthodes aux systèmes d’aide à la décision. Dans le monde entier, les producteurs ont de plus en plus recours aux outils d’aide à la décision [11] pour leurs choix stratégiques (par ex. quelle proportion de l’exploitation agricole dédier à quel type de culture de pommes de terre), tactiques (par ex. quelle variété cultiver), et agronomiques (par ex. quand irriguer et dans quelles proportions). Des sociétés de conseil offrent leurs services essentiellement pour les décisions agronomiques, portant sur les quantités d’engrais azotés, phosphorés et potassiques (NPZ) à utiliser avant et après la plantation, la densité de plantation en fonction de la taille de la semence de la variété et de la finalité de la culture (semences ou consommation), la lutte contre les ravageurs (par ex. les nématodes, les pucerons, les doryphores, les psylles), les adventices et les maladies (sprays fongicides contre l’alternariose et le mildiou), les programmes d’irrigation et la planification de la récolte. Les systèmes d’aide à la décision aident les producteurs à utiliser plus efficacement leurs ressources, telles que les terres, l’eau, les nutriments et les biocides. Sans ces systèmes d’aide à

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substances such as particles of glass, toxins and bacteria. National food authorities later formalized it by setting pre-competitive standards such as maximum residue levels and procedures (HACCP, ISO-norms accredited certifying bureaus). More recently [12] industry requires raw material to be produced according to good agricultural practices (GAP), initially aimed at reducing pesticide residues but now increasingly at adding elements that are beneficial for the environment: optimal use of resources (land, water, energy) and minimal emission of nutrients and biocides to the environment. Setting standards or norms for environmental impact, however, is far more difficult for environmental indicators than for food safety indicators. Moreover it is a moving target with new elements coming in, such as climate change (reduced emission of carbon dioxide and nitrogenous gases) and use restriction of fresh water. Yet principles (e.g. fresh water should not be threatened), criteria (its quantity and quality should be preserved) and indicators (the use of water from rain, soil and irrigation for potato production) are being formulated in pilots. Norms (desired indicator value considered to be sustainable) are being derived from pilot, such as when a crop produces less than 5 g potato per liter of water available it is considered unsustainable, it should be higher than 8 g per liter and when a grower performs in between he/she has to move it up within a pre-defined number of years. The difficulty of setting norms is their transportability between environments: growing a crop in summer or in winter and it’s relevance for instance the water use efficiency is of no consequence where a rain fed crop is supplied with sufficient precipitation. Yet in future sustainability indicators are likely to become pre-competitive just as food safety indicators are now. Farmers likely will have to indicate the amount of resource made available to the crop and how efficient it was used. The “Cool Farm Tool” [13] is an example that presently serves as a tool to compare practices and farms but such tools in future may become compulsory and will take up data from DSS which have their data stored in automated directories.

Potato, a sustainable crop Potato production globally is on the rise especially in developing countries with areas and yields increasing rapidly thanks to the availability of adapted varieties, agro-chemicals and seed potato from dedicated schemes usually using in-vitro based rapid multiplication techniques. People’s aspect of sustainability is the crop’s increasing contribution to global food security and its contribution to people well being and pleasure in consuming products such as French fries and chips. The industry associated with potato production, processing, commercialization and consumption is rapidly expanding in countries like China and India but also in e.g. Belgium where, within a decade, processing doubled to over three million tons per annum. The impact on livelihood of many is great and the crop more than cereals adds values at each link of the chain: potato crop, multiplied vegetatively, requires a special seed potato scheme and the investment of planting 2.5 t of expensive propagation material needs to be paid back. The crop – after harvest – contains over 75 percent water which adds value in transport and storage. A quick calculation shows that planting a single minituber

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la décision, ils ont souvent tendance à abuser des ressources et de s’en servir comme d’une assurance contre la diminution des rendements susceptible de survenir si les apports en engrais azoté, en fongicides et en eau d’irrigation sont insuffisants. Les systèmes d’aide à la décision ont pour point commun de tous nécessiter des observations précises, portant par ex. sur des échantillons de sols pour y évaluer les nutriments, la capacité de rétention en eau ou la présence de nématodes, des échantillons de plants, pour y dénombrer les pucerons par exemple, ou encore des observations météorologiques, par exemple pour la lutte contre le mildiou (cette maladie étant étroitement liée à l’humidité et à la température). Les systèmes d’aide à la décision ont également besoin d’un modèle ou d’une base de données historiques où saisir les observations relevées. Des règles décisionnelles sont alors générées, telles que le moment et la dose à laquelle l’azote, l’eau et les biocides doivent être apportés. On observe une tendance consistant à vouloir rendre obligatoire l’utilisation de ces outils d’aide à la décision, par ex. pour les apports en eau, en azote et en biocides (à l’image d’une licence). Les entreprises de transformation et les détaillants désirent commander leurs produits auprès de producteurs capables de prouver qu’ils exploitent efficacement leurs ressources et ne les utilisent que de la manière prescrite par les systèmes d’aide à la décision. Les volumes de données recueillies lors de la culture d’une denrée sont considérables et regroupent les données que le producteur est tenu de communiquer à l’entreprise qui achète la récolte, cette dernière évaluant son rendement et sa qualité, les données que le producteur est tenu de communiquer au gouvernement (pour respecter ses obligations), les données génériques concernant le sol et les conditions climatiques, et les données spécifiques au champ/à la culture nécessaires pour alimenter le système d’aide à la décision et les réponses de ce dernier. L’avantage supplémentaire que procure le recueil de ces données est qu’elles participent à la constitution d’une base de données (future) précieuse qui, si on la structure correctement (ontologie), offrira un outil précieux d’exploration de données pour l’agriculteur, le groupe auquel il appartient et d’autres parties prenantes, telles que les acheteurs, les gouvernements et les fournisseurs de systèmes d’aide à la décision.

Indicateurs de durabilité La sécurité alimentaire est le besoin prioritaire de toute société, comme on a pu l’observer au cours des décennies qui ont suivi la Seconde Guerre mondiale et comme c’est toujours le cas actuellement dans de nombreux pays en développement (notamment en Asie et en Afrique). Au cours de la seconde moitié du siècle dernier (une fois la sécurité alimentaire assurée), on a commencé (les industries de la transformation des produits alimentaires et les détaillants) à demander davantage de garanties de sécurité des aliments, ceux-ci devant être exempts de toute substance nocive, telle que des particules de verre, des toxines et des bactéries. Les autorités nationales en charge des questions alimentaires ont formalisé plus tard cette demande en établissant des normes précompétitives, comme par exemple des niveaux maximum de résidus et diverses procédures (HACCP, bureaux de certification accrédités pour certifier les établissements selon les normes ISO). Plus récemment [12], l’industrie a exigé que les matières premières soient produites dans le respect de bonnes pratiques agricoles (BPA), visant initialement à réduire les résidus de pesticides, mais également de plus en plus aujourd’hui à ajouter des éléments bénéfiques pour l’environnement : une utilisation optimale des ressources (terres, eau, énergie)

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costing € 0.5 after 7 field generations yields 25 t of potato from which 12.5 t of Ff are produced, costing € 200,000 at a quick service restaurant: a 400,000 fold increase of value with profit in it for all links of the supply chain.

Conflict of interest The author has been paid normally for writing this article.

et des émissions minimales de nutriments et de biocides dans l’environnement. Définir des standards ou des normes en matière d’impact environnemental pour des indicateurs environnementaux est toutefois bien plus délicat que pour des indicateurs de sécurité alimentaire. Cela revient à viser une cible en perpétuel mouvement, de nouveaux éléments s’ajoutant en permanence, comme le changement climatique (réduction des émissions de dioxyde de carbone et de gaz azotés) et les restrictions touchant l’utilisation de l’eau douce. Et pourtant des principes (par ex. les réserves d’eau douce ne doivent pas être menacées), des critères (elle doit être préservée en termes de quantité et de qualité) et des indicateurs (utilisation de l’eau de pluie, du sol et de l’irrigation pour la production de pommes de terre) sont formulés dans des projets pilotes. Des normes (valeur d’indicateur recherchée considérée comme durable) sont établies à partir de ces projets pilotes : par ex. une culture est considérée comme non durable si elle produit moins de 5 g de pomme de terre par litre d’eau disponible. Ce chiffre doit être supérieur à 8 g par litre d’eau, et si un agriculteur ne l’atteint pas, il dispose d’un certain nombre d’années pour rectifier la situation. La difficulté inhérente à la définition de normes est leur transposabilité à différents environnements : selon que l’on cultive une denrée en été ou en hiver, la pertinence du critère d’efficacité d’utilisation de l’eau n’est pas la même lorsqu’une culture pluviale bénéficie de précipitations suffisantes. Toutefois, les indicateurs de durabilité sont amenés à l’avenir à devenir précompétitifs, tout comme les indicateurs de sécurité alimentaire le sont aujourd’hui. Les agriculteurs seront très probablement obligés d’indiquer les ressources mises à disposition pour la culture et de préciser l’efficacité d’utilisation de ces ressources. L’outil Cool Farm Tool [13] sert actuellement à comparer les pratiques et les exploitations agricoles, mais ce type d’outil pourrait bien à l’avenir devenir obligatoire, et recueillir des informations dans les systèmes d’aide à la décision, dont les données sont stockées dans des répertoires automatisés.

La pomme de terre, une denrée durable À l’échelle mondiale, la production de pommes de terre est en augmentation, en particulier dans les pays en développement, dont les zones consacrées à cette culture et les rendements connaissent une croissance rapide grâce à la mise à disposition de variétés adaptées, de substances chimiques agricoles et de semences de pommes de terre issues de programmes dédiés, utilisant généralement des techniques de multiplication rapides in vitro. Du point de vue de la population, cette culture est durable en raison de

Culture de la pomme de terre : enjeux écologiques / Key issues in potato crop ecology

sa contribution croissante à la sécurité alimentaire dans le monde et au bien-être de la population, généré par le plaisir procuré par la consommation de produits tels que les frites et les chips. L’industrie associée à la production de pommes de terre, à leur transformation, à leur commercialisation et à leur consommation connaît une expansion rapide dans des pays tels que la Chine et l’Inde, mais également en Belgique, où les volumes transformés ont doublé en seulement dix ans, pour passer la barre des trois millions de tonnes par an. L’impact sur les moyens d’existence de bon nombre d’individus est énorme. Bien plus encore que les céréales, cette culture procure une valeur ajoutée à tous les maillons de la chaîne : le plant de pomme de terre, à multiplication végétative, nécessite un programme de semences spécifique, et il est nécessaire de bénéficier d’un retour sur l’investissement consenti pour planter 2,5 tonnes

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d’un matériel de multiplication coûteux. La récolte contient plus de 75 % d’eau, qui ajoute de la valeur pour le transport et le stockage. Un rapide calcul permet d’établir que planter un seul minitubercule coûtant 0,5 € rapporte au bout de 7 générations en champ 25 tonnes de pommes de terre, à partir desquelles 12,5 tonnes de frites sont produites, pour une valeur de 200 000 € dans une enseigne de restauration rapide : une valeur correspondant à 400 000 fois le coût de départ, avec des bénéfices pour chacun des maillons de la chaîne d’approvisionnement logistique.

Conflit d’intérêts L’auteur a été normalement rémunéré pour la rédaction de cet article.

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