Détermination de la température de la couche d'oxyde anodique formée sur le niobium en milieu acide: Relation avec le claquage électrochimique

Détermination de la température de la couche d'oxyde anodique formée sur le niobium en milieu acide: Relation avec le claquage électrochimique

Journal of the Less-Common Metals, 97(1984) 291-298 291 DETERMINATION DE LA TEMPERATURE DE LA COUCHE D’OXYDE ANODIQUE FORMBE SUR LE NIOBIUM EN MILI...

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Journal

of the Less-Common Metals, 97(1984) 291-298

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DETERMINATION DE LA TEMPERATURE DE LA COUCHE D’OXYDE ANODIQUE FORMBE SUR LE NIOBIUM EN MILIEU ACIDE: RELATION AVEC LE CLAQUAGE I~LECTROCHIMIQUE

G. JOUVE et I. Y. BEL~AeE~ Laboratoire de ~~tal~ur~ie C&dex (France) (Requ le 1”‘juillet

Physique,

asso&e

au CNRS

177, UniuersitL Paris&d,

91405 Orsay

1983)

L’augmentation de la temperature moyenne de la couche d’oxyde anodique form&e sur le niobium est determinee en condition galvanostatique, pendant sa formation, en milieu acide. Dans la phase de croissance ii cinetique lineaire, la temperature est directement proportionnelle a la puissance electrique fournie. Dans le phase de claquage ~lectrochimique du film, un regime thermique different est en jeu, qui conduit a une stabilisation de la valeur moyenne de la temperature de la couche.

Summary The mean temperature rise in an anodic oxide film on niobium was evaluated experimentally under galvanostatic conditions in an acid medium. In the linear growth stage of the film, the temperature was found to be directly proportional to the electric power supplied per unit area of oxide. During the breakdown stage a different heat transfer mechanism occurs which leads to stabilization of the mean value of the temperature.

1. Introduction Le probleme de l’elevation de la temperature d’une couche d’oxyde anodique, pendant sa formation, est domine par deux facteurs: l’energie electrique fournie (elle est considerable, de l’ordre d’ 1 kW cm- 3, et sa dissipation vers l’electrolyte. Cette energie est d’un ordre de grandeur tel que I’on peut negliger la chaleur de formation ou de dissolution du film. Young [l]a calculi? les valeurs de cet accroissement de temperature en l’absence d’agitation de la solution et a correle ces valeurs avec la diminution du champ electrique, observee en condition galvanostatique. 0022.5088/84/$3.00

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Elsevier Sequoia/Printed

in The Netherlands

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Des resultats experimentaux ont ete obtenus par Applewhite et al. [2] a propos de l’oxydation anodique de l’aluminium et par Zahavi et Yahalom [3] a propos de celle du tantale. Une etude anterieure nous a permis de juger de la sensibilite de ce type d’analyse thermique au phenomene de claquage puisque nous avions pu mettre en evidence un aspect particulier du claquage des films anodiques form& sur le titane pour des tensions de formation sensiblement inferieures a 20 V [4]. Nous decrivons ici des resultats relatifs au cas du niobium, plus simple que celui du titane, en ce sens que la couche formee ne presente pas de variation de structure ou d’epaisseur d’un grain a l’autre du metal, comme cela est le cas pour les couches anodiques formees sur le titane [5].

2. Conditions expbrimentales Le principe est base sur la determination de la variation de resistance electrique d’un film de niobium sous son Qchauffement pendant la croissance du film. Cette variation de resistance est suivie par la determination de la tension de desequilibre d’un pont (Fig. l), prealablement equilibre, dont l’une des branches est constituee par l’echantillon (fil de niobium). Celui-ci est lui-meme place en anode d’un circuit alimentation stabilisee-contre-electrode de platine. Le pont est attaquer par un generateur basse frequence 1000 Hz. L’amplitude du signal aux bornes de l’echantillon est de 300 mV. La tension de desequilibre est suivie a I’aide d’un amplificateur a detection synchrone dont la reference est calee sur la frequence du generateur. Le systeme nous a permis d’obtenir une sensibilite de 15 x 10m3 et 65 x 10e3 V K-’ en utilisant des fils de niobium de diametres respectifs 0,5 mm et 0,25 mm. A temperature ambiante le niobium a une resistiviti! de 18,3 x lO-‘j R cm. Les resistances des fils sont alors de 0,151 et 0,608 R pour une longueur calibree de fil de 16,3 cm; 10 cm de fil sont immerges dans la solution. Pour I’etalonnage, l’echantillon est d’abord immerge dans de I’eau distillee a la temperature ambiante; l’equilibre du pont est soigneusement realise a l’aide de l’oscilloscope. On immerge enfin l’echantillon dans de l’eau bidistillee a differentes temperatures, et la tension V’ de desequilibre du pont est relevee pour chaque valeur de temperature. L’etalonnage est realise pour les deux diamittres de fils utilises. Les courbes de la Fig. 2 donnent la variation de desequilibre du pont en fonction de la temperature. La valeur AV’/AT est obtenue a &5% pres. Ces etalonnages ont egalement ete realises pour le fil de diametre 0,5mm h une temperature de reference de 0 “C (glace fondante). Pour un meme diametre de fil, on obtient des droites paralleles dont l’abscisse a I’origine est identique h la temperature de reference a l’equilibre du pont. Les fils de niobium, de purete 99,9x et recuits, etant prealablement polis par voie electrochimique, nous avons dQ envisager une possible reduction de section du fil, qui pourrait entrainer une erreur d’etalonnage. Dans ce but, deux

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AV’

(mV)

1000

Fig. 1. Schema du montage. Fig. 2. Etalonnage de la tempkrature en fonction de la tension de d&quilibre mm;~,d=0,5mm;x,d=0,5mm.

du pont: f, d = 0,25

fils de meme diametre ont ete polis, l’un 15 min, l’autre 5 min. Les courbes d’etalonnage effect&es h la suite ne font apparaitre aucune difference en ce qui concerne la valeur de d V’/dT. La preparation de surface des echantillons est realisee par polissage electrochimique dans le bain suivant: 30 cm3 d’acide perchlorique; 175 cm3 de buthanol; 300 cm3 de methanol. Les conditions de polissage les plus favorables sont les suivantes: tension, 12 V; temperature, -45 “C; duree, 15 min; agitation, mode&e. Les electrolytes utilises pour l’oxydation anodique ont etl! prepares a partir d’eau bidistillee et de composition suivante: bain phosphoborique de conductibiliti! Qlectrique (T= 19,8 x 10m3 Q-’ cm-’ et de composition pond&ale 96% H,O, 3% H,PO, et 1% HBO,; H,S04 0,l N, 0 = 24,2 x 10e3 R-’ cm-‘; H,SO,1N,cr=190x10~3~~1cm~‘;H,SO,3,6N,a=492x10~3~~‘cm~‘.

3. Rbsultats et discussion La Fig. 3(a) donne un exemple d’oscillogramme obtenu dans une experience galvanostatique a 50 x 10e3 A cm-’ en milieu H,SO, 1 N, avec en ordonnee la tension de desequilibre du pont, c’est-a-dire la temperature. L’instant t = 0 est marque par une transitoire; la temperature croit lineairement jusqu’au claquage du film (point C). Elle reste ensuite sensiblement constante pendant 18 s, alors que la tension aux bornes du film continue a croitre, comme on peut le voir sur la Fig. 3(b), qui donne la variation de la tension de formation en fonction du temps dans cette meme experience. La tension V, de claquage est definie dans ce cas par le critere thermique

Fig. 3. (a) Exemple d’oscillogramme obtenu (milieu, H,SO, 1 N; densit de courant, 50 x 10e3 A cm-‘; en 2, 1 carreau = 2s; en y, 1 carreau = 100 mV): point C, elaquage, AT= 22°C; trace 1, premier balayage; trace 2, deuxi&me balayage. (b) Courbe donnant la tension de la cellule relative & (a).

comme &ant la tension de formation atteinte lors de la rupture observ6e SW la courbe temperature en fonction du temps (Fig. 3(a), point C). Nous avons v&if% que cette valeur coincide bien avec I’apparition des premikes oscillations 6lectriques observables par voie oscillographique. Elle coincide aussi avec l’apparition de I’endommagement du film observe par microscopic 6lectronique g balayage ou en transmission. L’61BvationATde la tempkature de la couche d’oxyde obtenue a la tension V, de claquage est lin6aire en fonction de la densit de courant de formation 10, pour les di&rents 6lectrolytes utilis& (Fig. 4). Remarquons que par ailleurs V, a &6 trouv6, pour un m&meCtlectrolyte,independante de la valeur de la densite de courant I,. On est alors amen6 2 penser que ATest proportionnel B la puissance 6lectrique fournie IQ,. Nous avons rep&sent& sur la Fig. 5, ATen fonction de la puissance P = VI0 dissipBe par unit&de surface pour les diffkentes densites de courant et les divers 6lectrolytes utilis6s. Les points expkimentaux regroup& sur cette figure comprennent les valeurs de tensions qui correspondent aux tensions V, de claquage (voir Fig. 4), ainsi que des points exp6rimentaux pour

Fig. 4. Relation entre la variation de temperature et de la densit de courant, obtenue B la tension V, de claquage: II, H,SO, 0.1 N; 0, H,SO, 1 N; A, HZSO, 3,6 N; x, acide phosphoborique.

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lesquels la tension Vest inferieure a la tension de claquage. La relation lineaire trouvee permet de determiner le coefficient ATlAP. Nous l’avons trouve &gal a 4,05 x 10m4 K W-’ m2. Cette valeur est tres proche de celle de 4,lO x 10e4 K W-’ m -2 deja trouvee sur le titane [4]. Nos resultats semblent en bon accord avec ceux de Zahavi et Yahalom [S] obtenus sur le tantale. Nous avons evalue, a partir des courbes experimentales que presentent ces chercheurs, un coefficient AT/APcomprisentre4x10-4et5,5x10-4KW-’m2. Les quantites de chaleur mises en jeu par la formation et la dissolution du film &ant negligeables devant l’energie electrique fournie, on peut s’attendre a des valeurs de ATlAP voisines pour l’oxydation anodique des differents metaux valves. Autrement dit, dans les memes conditions experimentales, et en particulier en l’absence d’agitation de la solution, le coefficient h = APJAT d’echange thermique superficiel oxyde-solution est probablement voisin pour les differents oxydes anodiques en presence du meme electrolyte, car il depend surtout du rapport des conductibilites thermiques de I’oxyde et de l’electrolyte. On remarque que pour un meme electrolyte et une meme densite de courant I,, l’accroissement de temperature AT releve semble independant des diametres de fils utilises (voir Fig. 5). A ce propos, en regime stationnaire, la temperature du film est don&e [4] par la relation suivante: T=I



O--F h

RpCPa + To

dans laquelle I, est la densite de courant, V la tension de formation, 6 le coefficient d’echange superficiel oxyde-solution, R le rayon du fil de niobium, p la masse volumique du niobium, C, la capacite calorifique du niobium, a = d V/dt et To la temperature initiale. Lorsque I, est constant, Test proportionnel a V. Le coefficient angulaire T = f( VIo) de la droite permet de determiner une valeur du coefficient d’echange superficiel h. Nous avons trouve h = 2470 W m - ’ K _ ‘. 11est d&s lors possible de chiffrer la valeur de l’expression RC,a T’ = IoF pour les differents diametres de fil utilise. Avecp=8570kgm-3,C,=271JK-‘kg-‘eta=3,3Vs-’ontrouvepour T’ respectivement 0,15 “C et 0,07 “C pour les fils de diametre 0,5 mm et 0,250 mm. Ces valeurs sont trop faibles pour Btre decelables par la technique utilisee; ceci explique done l’invariance de la temperature observee avec le diametre du fil utilise. 3.1. Tempe’rature et claquage du film Concernant la temperature moyenne du film durant la phase de claquage, nous avons fait les constatations suivantes. (1) Au tours d’une experience don&e, la temperature n’augmente pas alors que la puissance electrique fournie continue de croitre (V continue

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d’augmenter au-delh de V, A I,, constant) mais demeure constante au-de& de V,, du moins lorsque les valeurs de densite de courant imposees restent faibles. (2) On constate meme une diminution de la temperature durant la phase de claquage par rapport a sa valeur a V,, lorsque la densite de courant imposee est elevee et la concentration en H,SO, est plus importante. Nous pensons qu’en V, a lieu un changement de regime de transfert thermique. Tant que V est inferieur a V,, la dissipation de la chaleur se fait radialement en regime stationnaire. Pour Vsuperieur a V,, la dissipation se fait essentiellement a partir des sources ponctuelles que sont les points de claquage. On doit alors faire intervenir un mecanisme de dissipation par convection. Celui-ci sera favorise par I’augmentation de la conductibilite thermique de la solution, I’augmentation de l’energie dissipee en chaque point de claquage (lice a la densite de courant imposee) et par I’agitation de la solution. Nous avons verifie experimentalement que ces trois facteurs tendent a minimiser la valeur de la temperature moyenne du film pendant la phase de claquage. Par ailleurs, la tension V, de claquage (definie par le critere thermique) varie, a geometric de cellule constante lineairement, en fonction du logarithme de la conductibilite electrique r~ (Fig. 6). Ce resultat est connu a propos de nombreux metaux valves et a eti! obtenu en particulier par Wood et Pearson [6]. Ce dernier point semble attribuer au phenomene de claquage electrochimique un caractere interfacial. Nous avons pu confirmer cet aspect dans les experiences sequentielles suivantes. Dans un premier temps, on fait croitre le film en milieu H,SO, 3,6 N, sous une densite de courant constante (35 mA cmd2) jusqu’a ce que la tension de formation atteigne 80 V, tension inferieure de 7,5x a V, dans ce milieu (Fig. 7, courbe 1, point A). On interrompt alors l’oxydation. Celle-ci est reprise en milieu

Fig. 5. Variation

de la temperature du fil en fonction de la puissance dissiphe par unite de surface.

Fig. 6. Relation entre la tension V, de claquage et la conductibilitb

blectrique de la solution.

phosphoborique h la meme densite de courant. On constate que le film claque a 161 V, tension sensiblement identique a celle qui correspond au claquage du film lorsque toute la croissance est realisee en bain phosphoborique (Fig. 7, courbe 2). Autrement dit, la couche ne conserve aucune “memoire” du traitement anodique et le claquage ne depend que du dernier electrolyte employ& 11 est interessant de voir ce que donne l’experience inverse: l’echantillon est anodise a la meme densite de courant, tout d’abord en milieu phosphoborique jusqu’a 14OV, soit 8,5x au-dessous de V, en milieu phosphoborique (Fig. 8, courbe 1, point A, et Fig. 9). L’experience est ensuite reprise en milieu H,SO, 3,6 N pour lequel V, n’est plus que de 86 V. Les Figs. 8, courbe 2, et 10 montrent que d&s la remise sous tension de la cellule le film claque. La courbe de temperature est particulierement nette a ce sujet (Fig. 10). La densite de courant &ant constante dans tous les cas, le champ Qlectrique auulioui! au film est le meme; seuls varient la conductibilite et le pH de la solution. Ces deux

Fig. 7. Relation tension-temps a la densite de courant de 35 mA cm-‘: courbe 1, electrolyte H,SO, 3,6 N, experience interrompue a 80 V; courbe 2, electrolyte phosphoborique jusqu’au claquage. Fig. 8. Relation phosphoborique, claquage.

tension-temps a la densite de courant de 35 mA cm-‘: experience interrompue a 140 V; courbe 2, electrolyte

Fig. 9. Oscillogramme carreau = 100 mV). Fig. 10. Oscillogramme carreau E 50 mV).

correspondant correspondant

a la Fig. 8, courbe a la Fig. 8, courbe

courbe 1, electrolyte H,SO, 3,6 N jusqu’au

1 (en X, 1 carreau ii

s; en y, 1

2 (en .r, 1 carreau = 05 s; en y, 1

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parametres ne sont pas s&pares dans ce travail. On peut cependant penser que l’injection des porteurs a partir de la solution constitue le mecanisme dominant du phenomene de claquage, quel que soit le modele pris en compte.

Rbfkrences 1 L. Young, Trans. Faraday Sot., 53 (1957) 229. 2 F. R. Applewhite, J. S. L. Leach et P. Neufeld, Corros. Sci., 9 (1969) 305. 3 J. Zahavi et J. Yahalom, Electrochim. Acta, 16(1971) 89. 4 G. Jouve et J. S. L. Leach, Thin Solid Films, llO(1983) 263. 5 G. Jouve et N. E. Derradji, J. Less-Common Met., 86(1982) 161. 6 G. C. Wood et C. Pearson, Corros. Sci., 7(1967) 119.