Échocardiographie de la souris

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Annales de Cardiologie et d’Angéiologie 57 (2008) 177–180

Mise au point

Échocardiographie de la souris Echocardiography in mouse A. Fayssoil ∗ Service de cardiologie, CHU de Bicêtre, AP–HP, 94275 Le-Kremlin-Bicêtre, France Rec¸u le 30 novembre 2007 ; accepté le 5 mai 2008 Disponible sur Internet le 2 juin 2008

Résumé L’analyse du phénotype cardiaque chez la souris repose soit sur une approche invasive, soit sur une approche non invasive. L’échocardiographie est un examen non invasif permettant d’analyser les mécanismes physiopathologiques impliqués dans les cardiomyopathies à l’aide notamment de souris transgéniques. L’objectif de ce travail est de revoir les modalités pratiques de l’examen et de souligner l’apport récent du doppler tissulaire myocardique. © 2008 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. Abstract Assessing cardiac phenotype requires invasive or noninvasive techniques in mouse. Echocardiography is a noninvasive technique for evaluating cardiac function. The purpose of this paper is to underline echocardiography modalities and new tools Doppler applications like tissue Doppler imaging. © 2008 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. Mots clés : Échocardiographie ; Souris ; Fonction systolique du VG ; Fonction diastolique du VG ; DTI ; Strain, Strain rate Keywords: Echocardiography; Mouse; Left ventricular systolic function; Diastolic function, DTI; Strain, Strain rate

1. Manuscrit L’échocardiographie est un examen non invasif permettant d’analyser la fonction myocardique dans les modèles pathologiques murins de cardiomyopathies. Elle aide à analyser les mécanismes physiopathologiques sous-jacents impliqués dans les cardiomyopathies hypertrophiques [1,2], les myocardiopathies dilatés et les cardiopathies ischémiques. À la différence de l’homme, la fréquence cardiaque physiologique de la souris au repos est entre 500 et 700 battements par minute. Dans ces conditions, pour l’examen échocardiographique, des capteurs linéaires de haute fréquence sont nécessaires. À partir des images obtenues en TM et en bidimensionnel, plusieurs paramètres peuvent être analysés, tels que le diamètre ventriculaire



Service de cardiologie, CHU de Bicêtre, AP–HP, 94275 Le-Kremlin-Bicêtre, France. Adresse e-mail : [email protected]. 0003-3928/$ – see front matter © 2008 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. doi:10.1016/j.ancard.2008.05.004

gauche en systole et en diastole, la fonction systolique du VG, le débit cardiaque, les valves, l’aorte, le péricarde [3]. L’examen est le plus souvent complété par le doppler tissulaire permettant l’analyse des vélocités intramyocardiques en systole et en diastole. L’échocardiographie peut être réalisée chez l’animal conscient [4] ou anesthésié. 1.1. Produits d’anesthésie Habituellement, on anesthésie la souris pour pouvoir effectuer l’examen dans de meilleures conditions. Le choix du produit d’anesthésie est crucial. En effet, les produits anesthésiants peuvent entraîner une dysfonction myocardique et/ou respiratoire [5,6] pouvant entraîner une difficulté quant à l’interprétation des données [7]. Deux types d’anesthésies sont actuellement disponibles : des formes injectables et des formes inhalées [8]. Les produits injectables incluent le pentobarbital, l’avertine, la kétamine et d’autres. Les agents inhalés incluent

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Fig. 1. Échocardiographie en mode TM : analyse des diamètres ventriculaires en systole et en diastole, calcul de la masse VG et de la FR.

entre autres l’isoflurane, l’halothane. La kétamine présente un effet inotrope négatif moindre. Néanmoins, il a des effets chronotropes négatifs surtout en cas d’association avec la xylazine [9]. L’isoflurane, en revanche, est peu cardiodépresseur [9]. En cas d’examen réalisé sans anesthésie, il faut savoir que la fréquence cardiaque de la souris éveillée s’approche de celle obtenue avec un agent inotrope comme la dobutamine [4]. 1.2. Réalisation de l’échocardiographie Avant de démarrer l’examen, à l’aide d’une crème épilatoire, la souris est épilée au niveau de la paroi antérieure du thorax. On applique ensuite du gel préchauffé sur le thorax. La souris est gardée au chaud, à l’aide d’une plaque électrique, en position couchée sur le dos avec une inclinaison légère (décubitus gauche) et scopée (ECG). Des images sont alors enregistrées en parasternal grand axe et parasternal petit axe (2D et TM). À partir de l’image échocardiographique en parasternal grand axe, le curseur du mode M est placé perpendiculairement au septum interventriculaire (IVS) et à la paroi ventriculaire gauche postérieure (PP) pour mesurer les diamètres du ventricule gauche et les épaisseurs du septum et de la paroi postérieure en systole et en diastole (Fig. 1). On réalise les mesures en suivant les directives de l’American Society of Echocardiography (ASE) [10]. À partir des données obtenues en TM parasternal grand axe, on détermine la fonction systolique du VG, la masse du VG, la taille du VG. L’analyse de la fonction diastolique est difficile car, d’une part, la fréquence cardiaque de la souris est très élevée et, d’autre part, il est difficile d’obtenir des images en apicale pour un bon alignement du tir doppler au niveau de l’entonnoir mitral. 1.3. Analyse de la fonction systolique du VG Classiquement, la dp/dt maximale [11] est un bon paramètre de fonction systolique du VG mais elle nécessite une approche invasive. Grâce à l’échocardiographie, la fonction systolique du VG est analysée actuellement par le calcul de la fraction de raccourcissement (FR) du VG ou de la fraction d’éjection (FE) du VG.

La FR est calculée à partir des mesures obtenues en M mode selon l’équation : FR (%) = [(DTDVG – DTSVG)/DTDVG)] × 100 DTDVG : diamètre télédiastolique du VG DTSVG : diamètre télésystolique du VG La FE peut être calculée à partir du petit axe selon l’équation : FE (%) = [(LVDS – LVSS)/(LVDS)] × 100 LVDS : surface du VG en diastole LVSS : surface du VG en systole Quelques valeurs moyennes obtenues d’après Tanaka et al. [9] : DTDVG = 3,73 mm ± 0,5 DTSVG = 2,22 mm ± 0,45 Mur antérieur en diastole = 0,70 mm ± 0,06 Mur postérieur en diastole = 0,71 mm ± 0,08 FR = 41 ± 6 (%) 1.4. Masse du ventricule gauche À partir des paramètres obtenus en M mode, la masse du VG peut être calculée en utilisant la formule des cubes : LVmasse = 1,055[(IVS + LVEDD + PP)3 − (LVEDD)3 ], où 1,055 est la densité du myocarde. Il existe une bonne corrélation entre la masse VG obtenue avec cette formule et la masse du VG retrouvée en autopsie [12]. 1.5. Analyse de la fonction diastolique du VG Classiquement, la dp/dt minimale est un bon reflet de la fonction diastolique, mais elle nécessite une approche invasive. Cette dp/dt minimale est utilisée pour déterminer la constante de Tau [13]. En échocardiographie doppler, la fonction diastolique est analysée à l’aide du flux transmitral obtenu à partir d’un tir doppler pulsé, l’échantillon doppler étant positionné au niveau de l’entonnoir mitral. L’obtention de ce flux mitral nécessite des acquisitions en apical grand axe avec comme objectif un alignement parfait parallèle du tir doppler par rapport à l’écoulement du flux sanguin. Le volume d’échantillon doppler pulsé est alors positionné au sommet de l’entonnoir des feuillets mitraux. On

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Fig. 2. Doppler tissulaire myocardique : analyse de la paroi postérieure chez la souris.

recueille le flux mitral composé d’une onde E, d’une onde A ; on mesure aussi le temps de décélération de l’onde E (TDE) et le temps de relaxation isovolumique (TRIV). Plusieurs études ont retrouvé une association entre l’altération de la relaxation myocardique, la baisse du rapport E/A et l’allongement du TRIV [14]. Les mécanismes moléculaires impliqués durant la diastole peuvent ainsi être étudiés à l’aide des souris transgéniques. La recapture du calcium cytosolique et la dissociation du couplage actine/myosine sont les déterminants importants pendant la diastole. Pendant la diastole, le réticulum sarcoplasmique Ca2+ -ATPase (SERCA) joue un rôle important permettant la recapture du calcium. La fonction de SERCA est sous le contrôle du phospholamban (PLB) qui l’inhibe en temps normal [15]. Il a été retrouvé une altération importante des paramètres diastoliques chez les souris PLB/KO [16]. De même, les souris PLB/N27A [16] présentent des anomalies classiques de la fonction diastolique avec une onde E diminuée et une contribution auriculaire plus importante comparativement à des souris PLB/KO. 1.6. Les limites des paramètres diastoliques Une limitation majeure de l’analyse doppler chez les souris tient à la grande variabilité de valeurs de référence à cause des effets secondaires des produits d’anesthésie, de la fréquence cardiaque élevée (fusion souvent de l’onde E et de l’onde A) [17] et enfin de la variabilité du stress imposée à l’animal. 1.7. Apport du doppler tissulaire L’analyse classique de la fonction systolique du VG par la FE ou la FR présente des limites. En effet, ces deux paramètres sont dépendants des conditions de charge [9,10]. En outre, ils ne permettent pas d’analyser la fonction myocardique régionale.

Dans cette optique, le doppler tissulaire myocardique présente un intérêt surtout en cas d’anomalies inframyocardiques. Pour cela, la fréquence cardiaque moyenne de l’animal doit être moins de 400 battements par minute pour obtenir un signal doppler analysable. À partir des images parasternal petit axe, on positionne l’échantillon doppler au niveau myocardique antérieur puis postérieur ; on recueille alors un flux composé d’une onde S de contraction systolique, suivi d’une onde Ea et d’une onde Aa (Fig. 2). Chez l’homme, une dysfonction diastolique se traduit par une diminution de l’onde Ea et du ratio Ea /Aa [18]. Chez la souris, dans les modèles de cardiomyopathies liées à une sténose aortique, on a retrouvé une altération de la fonction diastolique en couplant doppler mitral et doppler tissulaire myocardique [19]. Cependant, l’étude des vélocités myocardiques présentent aussi des limites. En effet, le déplacement d’un segment myocardique est influencé, certes, par la contraction du segment étudié, mais aussi par la contraction des segments adjacents. D’où l’utilisation récente d’une nouvelle technologie d’analyse de la déformation myocardique régionale : strain et strain rate. Le strain d’un objet est la déformation de l’objet normalisée par ses dimensions initiales. Ainsi, si L0 est la longueur initiale de l’objet et L1 la longueur de l’objet après déformation. Le strain S = L1 – L0/L0, il est exprimé en pourcentage. Le strain rate correspond à la vitesse à laquelle la déformation (strain) se produit. C’est la dérivée temporelle du strain SR = dS/dt. Il s’exprime en s–1 . La valeur moyenne du SR est de 14,2 ± 0,7 s–1 chez des souris [19]. Le pic de strain rate est corrélé à la dp/dt maximale dans des modèles animaux [11,20]. Dans les modèles animaux de cardiopathie ischémique, l’occlusion coronaire provoque une diminution du strain et du strain rate plus importante dans les couches sous-endocardiques,

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que dans les couches sous-épicardiques [21] ; les couches sousendocardiques étant plus sensibles à l’ischémie, que la zone sous-épicardique. 2. Conclusion L’ETT est d’un apport capital dans l’étude des modèles de cardiomyopathies dans les modèles murins. La fonction systolique et la fonction diastolique peuvent être analysées. L’apport récent du doppler tissulaire et du strain permet d’aller plus loin dans l’analyse de la fonction myocardique par l’étude des vélocités et des déformations des parois myocardiques. Remerciement Au Dr Gilles Renauld (plateforme d’imagerie du petit animal, CNRS UMR 8104, Inserm, U567, institut Cochin, Paris) pour l’iconographie. Références [1] Rockman HA, Ross RS, Harris AN, Knowlton KU, Steinhelper ME, Field LJ, et al. Segregation of atrial-specific and inducible expression of an atrial natriuretic factor transgene in an in vivo murine model of cardiac hypertrophy. Proc Natl Acad Sci U S A 1991;88:8277–81. [2] Patten RD, Aronovitz MJ, Deras-Mejia L, Pandian NG, Hanak GG, Smith JJ, et al. Ventricular remodeling in a mouse model of myocardial infarction. Am J Physiol Heart Circ Physiol 1998;274:H1812–20. [3] Hoit BD, Khoury SF, Kranias EG, Ball N, Walsh RA. In vivo echocardiographic detection of enhanced left ventricular function in gene targeted mice with phospholamban deficiency. Circ Res 1995;77:632–7. [4] Syed F, Diwan A, Hahn HS. Murine echocardiography: a practical approach for phenotyping genetically manipulated and surgically modeled mice. J Am Soc Echocardiogr 2005;18(9):982–90. [5] Doursout MF, Chelly JE. Effects of basal anaesthesia on cardiac function. Br J Anaesth 1988;60(8 Suppl. 1):119S–22S. [6] Murray D, Vandewalker G, Matherne GP, Mahoney LT. Pulsed Doppler and two-dimensional echocardiography: comparison of halothane and isoflurane on cardiac function in infants and small children. Anesthesiology 1987;67(2):211–7.

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