Endomorphismes de certaines algèbres à identités polynomiales

Endomorphismes de certaines algèbres à identités polynomiales

C. R. Acad. Sci. Paris, t. 331, Série I, p. 111–114, 2000 Algèbre/Algebra Endomorphismes de certaines algèbres à identités polynomiales Jacques PEYRI...

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C. R. Acad. Sci. Paris, t. 331, Série I, p. 111–114, 2000 Algèbre/Algebra

Endomorphismes de certaines algèbres à identités polynomiales Jacques PEYRIÈRE a , Zhi-Xiong WEN b , Zhi-Ying WEN c a

CNRS, UMR 8628, Mathématiques, bâtiment 425, Université Paris-Sud, 91405 Orsay cedex, France Courriel : [email protected] b Department of Mathematics, Wuhan University, Wuhan 430072, The People’s Republic of China Courriel : [email protected] c Department of Mathematics, Tsinghua University, Beijing 100084, The People’s Republic of China Courriel : [email protected] (Reçu le 17 avril 2000, accepté le 4 mai 2000)

Résumé.

Horowitz [2] a défini une application du groupe libre Γ de rang n dans un quotient R de l’anneau des polynômes en 2n − 1 variables à coefficients entiers de façon que la valeur de cette application (un caractère de Fricke) en un point w permette le calcul de la valeur en w du caractère de toute représentation de Γ dans SL(2, C). Il a aussi montré [3] qu’un endomorphisme de Γ induit un endomorphisme de R. Un moyen de calculer ces caractères de Fricke est de se placer dans une algèbre A à identité polynomiale universelle pour la situation Γ → SL(2, C). Tout endomorphisme de Γ en induit un de A. Nous montrons qu’en rang 2 certaines des propriétés des endomorphismes de A provenant d’endomorphismes de Γ s’étendent à tous les endomorphismes.  2000 Académie des sciences/Éditions scientifiques et médicales Elsevier SAS

Endomorphisms of certain algebras with polynomial identities Abstract.

Horowitz [2] defined a mapping from a free group Γ of rank n into a quotient ring R of a ring of polynomials on Z with 2n − 1 variables in such a way that the value of this mapping (a Fricke character) at a point w in Γ allows to compute the value at w of the character of any representation of Γ in SL(2, C). He also showed [3] that an endomorphism of Γ induces an endomorphism of R. A way of computing these Fricke characters is to consider a PI-algebra A universal for the situation Γ → SL(2, C) and perform computations in it. Any endomorphism of Γ induces an endomorphism of A. In this work, we show that, in the case of rank 2, some properties of endomorphisms of A coming from endomorphisms of Γ extend to all endomorphisms of A.  2000 Académie des sciences/Éditions scientifiques et médicales Elsevier SAS

1. Introduction Soit A et B deux matrices 2 × 2 sur un corps de caractéristique différente de 2. On sait [2] que Qk la trace de tout produit j=1 xj où, pour tout j, xj ∈ {A, B} est un polynôme en les variables tr A, tr B, tr AB, det A et det B. Note présentée par Jean-Pierre K AHANE. S0764-4442(00)00328-1/FLA  2000 Académie des sciences/Éditions scientifiques et médicales Elsevier SAS. Tous droits réservés.

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Autrement dit, si w appartient au groupe libre Γha,bi engendré par a et b, il existe un unique polynôme Pw tel que, si ϕ est une représentation  de Γha,bi dans SL2 (C), la trace de ϕ(w) soit égale à la valeur de Pw au point tr ϕ(a), tr ϕ(b), tr ϕ(ab) . C’est ce que Horowitz [2] appelle les caractères de Fricke. À chaque endomorphisme σ de Γha,bi , on associe [3] l’application polynomiale Φσ = Pσ(a) , Pσ(b) ,  Pσ(ab) . Considérons le polynôme λ = 4 + xyz − x2 − y 2 − z 2 . Puisque la relation λ(tr A, tr B, tr AB) = 0 exprime que les matrices A et B ont une direction propre commune, pour tout σ, le polynôme λ ◦ Φσ est divisible par λ : λ ◦ Φσ = Qσ · λ. Nous montrons ici que cette divisibilité résulte d’une identité ayant lieu dans un cadre plus général. Ces applications et leurs relations avec les automorphismes de groupes libres ont été étudiés notamment dans [3,4] et [5]. 2. Des identités Un moyen d’obtenir les polynômes Pw est de calculer dans des algèbres à identités polynomiales ([6] et [7]) dont voici la définition.  On considère les anneaux A = Z[x, y, z, u, v] et A0 = Z 12 [x, y, z, u, v]. On note A la A-algèbre associative et unifère engendrée par a et b satisfaisant les relations : a2 − xa + u = 0,

b2 − yb + v = 0 et ab + ba = z − xy + ya + xb

et A0 la A0 -algèbre unifère engendrée par a et b. Ces algèbres, considérées comme A ou A0 -modules, ont pour base 1, a, b et ab. Il est facile de vérifier que tout élément w de A ou A0 a un polynôme minimal de degré au plus 2 : w2 − τ (w)w + δ(w) = 0, où τ (w) et δ(w) appartiennent à A ou A0 . La forme A ou A0 -linéaire τ est une trace : τ (w1 w2 ) = τ (w2 w1 ). On a τ (1) = 2, τ (a) = x, τ (b) = y et τ (ab) = z. Nous appellerons évidemment δ le déterminant, c’est une forme quadratique dont la matrice par rapport à la base 1, a, b, ab est   2 x y z 1 x 2u xy − z uy   . 2v vx 2 y xy − z z uy vx 2uv On a δ(w1 w2 ) = δ(w2 w1 ) = δ(w1 )δ(w2 ). Le centre de ces algèbres est engendré par l’unité. Elles sont intègres : on montre que w = 0 équivaut à δ(w) = 0. L’opération qui à w ∈ A ou A0 associe w∗ = τ (w) − w est une involution. Elle a les propriétés suivantes : τ (w∗ ) = τ (w),

δ(w∗ ) = δ(w),

(w1 w2 )∗ = w2∗ w1∗ ,

ww∗ = δ(w)

et

τ (ww∗ ) = 2δ(w).

Comme A0 -module, A0 admet la décomposition : A0 = A0 ⊕ ker τ , c’est-à-dire w = 12 τ (w) + 12 (w − w∗ ). On notera w˙ la projection de w sur le second facteur. On a [a, b]2 = (ab − ba)2 = vx2 + uy 2 + z 2 − xyz − 4uv. Notons également les formules suivantes où w1 et w2 sont des éléments de A0 : [w1 , w2 ]∗ = [w2∗ , w1∗ ] = −[w1 , w2 ], w1 [w1 , w2 ] = [w1 , w1 w2 ] = [w1 , w2 ]w1∗ ,

[w1 , w2 ]w1 = [w1 , w2 w1 ] = w1∗ [w1 , w2 ],

w2 [w1 , w2 ] = [w2 w1 , w2 ] = [w1 , w2 ]w2∗ , [w1 , w2 ]w2 = [w1 w2 , w2 ] = w2∗ [w1 , w2 ],     w1 , [w1 , w2 ] = w1 − w1∗ [w1 , w2 ] = −[w1 , w2 ](w1 − w1∗ ,     w2 , [w1 , w2 ] = w2 − w2∗ [w1 , w2 ] = −[w1 , w2 ] w2 − w2∗ ,

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Il résulte de ces formules qu’il existe une application A0 -linéaire ξ de A0 ∧A0 dans A01 , le sous A0 -module de A0 engendré par 1, a et b, telle que, pour tout couple (w1 , w2 ) d’éléments de A0 , on ait [w1 , w2 ] = ξ(w1 ∧ w2 )[a, b].

(1)

Les images de 1 ∧ w, a ∧ b, a ∧ [a, b] et b ∧ [a, b] par ξ sont respectivement 0, 1, a − a∗ et b − b∗ . On a donc  δ[w1 , w2 ] = δ ξ(w1 ∧ w2 ) δ[a, b].

(2)

 Il résulte aussi de ces formules que τ (a[a, b]) = τ (b[a, b]) = 0. On en déduit, puisqu’en outre τ [a, b]2 = −2δ([a, b]), que, pour tout w ∈ A0 , le polynôme τ (w[a, b]) est divisible par δ([a, b]). L’identité (1) est celle à laquelle il est fait allusion dans l’introduction. Nous allons donner une autre forme de son corollaire (2). T HÉORÈME 1. – Si w1 et w2 sont dans A0 , on a δ[w1 , w2 ] =

det

(1, w1 , w2 , w1 w2 )δ[a, b].

{1,a,b,ab}

˙ et z˙ = τ (a˙ b). ˙ ˙ [a, b]} pour base de A0 et posons u˙ = δ(a), ˙ v˙ = δ(b) Démonstration. – Prenons {1, a, ˙ b, 0 0 ˙ Dans ces conditions, un élément w de A s’écrit w = p + q a˙ + rb + s[a, b], où p, q, r et s sont dans A et l’on a τ (w) = 2p et w∗ = p − q a˙ − rb˙ − s[a, b]. Si w1 et w2 sont deux éléments de A0 , on a 1 1 w1 w2 = p1 p2 + p2 w˙ 1 + p1 w˙ 2 + (w˙ 1 w˙ 2 + w˙ 2 w˙ 1 ) + [w1 , w2 ] 2 2 1 = p1 p2 − ϕ(w˙ 1 , w˙ 2 ) + p2 w˙ 1 + p1 w˙ 2 + [w1 , w2 ], 2 où ϕ est la forme A0 -bilinéaire et symétrique ainsi définie sur ker τ , ˙ 1 q2 + vr ˙ 1 r2 − ϕ(w˙ 1 , w˙ 2 ) = uq

 1 z(q ˙ 1 r2 + q2 r1 ) + 4u˙ v˙ − z˙ 2 s1 s2 . 2

On a donc  1 τ (p + w)(p ˙ − w) ˙ = p2 + ϕ(w, ˙ w). ˙ 2    ˙ a˙ et a˙ ∧ b, ˙ a˙ ∧ [a, b], b˙ ∧ [a, b] comme bases de A0 , ker τ et ker τ ∧ ker τ Prenons 1, a, ˙ b˙ , [a, b], −b, 1 respectivement. La matrice de δ ◦ ξ est δ(w) =



1 0 0 2 0 0

 0 1 00 0 2

0 u˙ − 21 z˙

 1 0 − 21 z˙   0 v˙ 0

On a det

(1, w1 , w2 , w1 w2 ) =

{1,a,b,ab}

  0 0 1 2 0 = 0 0 2 0

0 4u˙ −2z˙

 0 −2z˙  . 4v˙

  1 1, w1 , w2 , [w1 , w2 ] . {1,a,b,ab} 2 det

˙ [a, b]) = 2, ce qui donne ˙ b, En particulier, det{1,a,b,ab} (1, a, det

(1, w1 , w2 , w1 w2 ) =

{1,a,b,ab}

det

˙ {a, ˙ b,[a,b]}

 w˙ 1 , w˙ 2 , [w1 , w2 ] .

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Or det{a, (w˙ 1 , w˙ 2 , [w1 , w2 ]) = γ(w˙ 1 ∧ w˙ 2 , [w1 , w2 ]), où γ est la forme bilinéaire dont la matrice par ˙ ˙ b,[a,b]} rapport aux bases choisies est la matrice unité. Ainsi, det

 (1, w1 , w2 , w1 w2 ) = γ w˙ 1 ∧ w˙ 2 , R[a,b] ξ(w˙ 1 ∧ w˙ 2 ) ,

{1,a,b,ab}

où R[a,b] désigne l’opérateur de multiplication à droite par [a, b]. Mais, on vérifie facilement que la matrice de R[a,b] par rapport aux bases choisies est 

1 0 0

0 2u˙ −z˙

 0 −z˙  , 2v˙

(w˙ 1 , w˙ 2 , [w1 , w2 ]), quadratique par rapport à w˙ 1 ∧ w˙ 2 , a même d’où l’on déduit que la forme det{a, ˙ ˙ b,[a,b]} matrice que δ ◦ ξ. Autrement dit, nous avons démontré la relation annoncée. 3. Morphismes Soit σ un Z-endomorphisme unifère de l’algèbre A tel que 1, σ(a), σ(b) et σ(ab) soient A-indépendants. Comme x, y, z, u et v sont dans le centre de A, il en est de même de leurs images  par σ. Des relations a2 − xa+ u = 0 et σ(a)2 − τ (σ(a))σ(a)+ δ(σ(a)) = 0, on déduit σ(x)− τ (σ(a)) σ(a) = σ(u)− δ(σ(a)), d’où σ(x) = τ (σ(a)) et σ(u) = δ(σ(a)). On calcule de même σ(y), σ(z) et σ(v).  Si l’on pose Φσ (x, y, z, u, v) = τ (σ(a)), τ (σ(b)), τ (σ(ab)), δ(σ(a)), δ(σ(b)) , on a, pour w = p + qa + rb + sab, σ(w) = p ◦ Φσ + q ◦ Φσ σ(a) + r ◦ Φσ σ(b) + s ◦ Φσ σ(ab). Nous écrirons indifféremment σ(p) ou p ◦ Φσ . Pour un Z-endomorphisme σ de A, on définit un élément χσ du A-module engendré par 1, a et b par l’égalité [σ(a), σ(b)] = χσ [a, b]. On a alors σ1 ◦ σ2 ([a, b]) = σ1 (χσ2 [a, b]) = σ1 (χσ2 )χσ1 [a, b], d’où χσ1 ◦σ2 = σ1 (χσ2 )χσ1 . Dans le cas où σ provient d’un endomorphisme de Γha,bi (alors u = v = 1), Φσ et δ(χσ ) ne sont autres que l’application Φσ et le polynôme Qσ définis dans l’introduction. Remarque 1. – On sait ([3] et [5]) qu’un endomorphisme σ de Γha,bi est un automorphisme si et seulement si Qσ = 1. Y a-t-il un résultat similaire pour δ(χσ ) ? Ei et Ito [1] ont montré par des arguments combinatoires qu’un endomorphisme σ de Γha,bi est un automorphisme si et seulement si σ(aba−1 b−1 ) est conjugué à aba−1 b−1 ou à bab−1 a−1 . Voici une autre preuve : si σ(aba−1 b−1 ) est conjugué à aba−1 b−1 ou à bab−1 a−1 , on a Qσ = 1, comme le montre la formule τ (uvu−1 v −1 ) = 2 − δ([u, v]), valide pour tous u et v dans Γha,bi . Références bibliographiques [1] Ei H., Ito S., Decomposition theorem on invertible substitutions, Osaka J. Math. 35 (1998) 821–834. [2] Horowitz R.D., Characters of free groups represented in the two-dimensional special linear group, Commun. Pure and Appl. Math. 25 (1972) 635–649. [3] Horowitz R.D., Induced automorphisms on Fricke characters of free groups, Trans. Amer. Math. Soc. 208 (1975) 41–50. [4] Magnus W., Rings of Fricke characters and automorphisms group of free groups, Math. Z. 170 (1980) 91–103. [5] Peyrière J., Wen Z.-X., Wen Z.-Y., Polynômes associés aux endomorphismes de groupes libres, L’Ens. Math. 2ème série 39 (1993) 153–175. [6] Procesi C., The invariant theory of n × n matrices, Adv. in Math. 19 (1976) 306–381. [7] Razmyslov Ju.P., Trace identities of full matrix algebras over a field of characteristic zero, Izv. Acad. Nauk SSSR ser. Mat. 38 (4) (1974) (in Russian). English translation: Math. USSR Izv. 8 (1974) 727–760.

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