Envenimation par une Malmignatte (veuve noire) en France : le latrodectisme

Envenimation par une Malmignatte (veuve noire) en France : le latrodectisme

260 Lettres a` la re´daction / Annales Franc¸aises d’Anesthe´sie et de Re´animation 28 (2009) 253–263 A. Moujahid* J. Laoutid H. Hajbi A. Baite L. S...

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Lettres a` la re´daction / Annales Franc¸aises d’Anesthe´sie et de Re´animation 28 (2009) 253–263

A. Moujahid* J. Laoutid H. Hajbi A. Baite L. Safi Service de re´animation chirurgicale, hoˆpital militaire Mohamed-V, avenue Abderrahim-Bouabid, 10000 Rabat, Maroc *Auteur correspondant. Adresse e-mail : [email protected] (A. Moujahid). Disponible sur Internet le 17 mars 2009 doi:10.1016/j.annfar.2009.01.011

Envenimation par une Malmignatte (veuve noire) en France : le latrodectisme Malmignatte (Black widow spider) envenomation in France: The latrodectism Mots cle´s : Envenimation ; Latrodectisme ; Douleur Keywords: Envenomation; Latrodectism; Pain

L’existence de plus de 40 000 espe`ces d’araigne´es a` la surface du globe est a` l’origine d’une arachnophobie ; cependant, seule une dizaine d’espe`ce est dangereuse, voire mortelle [1]. La Malmignatte (veuve noire) vit principalement dans le sud-est de la France. Elle fre´quente les biotopes chauds et secs des dunes littorales jusqu’a` 800 m d’altitude. Sa morsure ge´ne`re un syndrome peu fre´quent et souvent me´connu : le latrodectisme. Nous rapportons le cas d’une patiente ayant e´te´ envenime´e par une Malmignatte en France. Elle a pre´sente´ une crise de spasmophile brutale motivant l’appel du Samu, avec un e´tat d’agitation psychomotrice majeure (agitation et obnubilation). Une hyperalge´sie non syste´matise´e marquait le tableau avec des douleurs abdominales pre´dominantes e´voluant par spasmes. Elle pre´sentait aussi une contracture ge´ne´ralise´e. Une analge´sie par titration morphinique a permis une ame´lioration du confort de la patiente. Elle a e´te´ transporte´e vers le centre hospitalier ge´ne´ral ` l’hoˆpital, sa fille de cinq ans a rapporte´ la pre´sence de Bastia. A d’une petite araigne´e a` points rouges sur la serviette ou` la patiente e´tait allonge´e, mais aucune sensation de morsure n’e´tait mise en e´vidence a` l’interrogatoire. Cependant, la patiente a de´crit secondairement une sensation de bruˆlure localise´e au creux axillaire droit. Devant l’anamne`se et le faisceau d’arguments du tableau clinique le diagnostic d’envenimation par Malmignatte e´tait e´voque´. L’e´chographie

abdominopelvienne et le scanner abdominal ne retrouvaient aucune anomalie, e´liminant une urgence chirurgicale aigue¨ [2]. Les examens biologiques sont reste´s normaux. Le traitement a consiste´ en l’association de gluconate de calcium (6 ampoules/24 heures a` la seringue autopropulse´e) associe´ a` une analge´sie. Vingt-quatre heures apre`s son admission l’ensemble des symptoˆmes s’est amende´, l’examen clinique e´tait normal, il persistait tout de meˆme une importante asthe´nie. La patiente sortait de l’hoˆpital deux jours apre`s son admission avec comme traitement des sels de calcium ainsi que des antalgiques de niveau 1. Le tableau clinique lorsqu’il est complet est assez caracte´ristique, mais il est souvent ne´cessaire d’e´liminer une urgence vitale comme une pathologie vasculaire ou la rupture d’un organe creux devant un tableau clinique d’abdomen chirurgical [2–4]. L’anamne`se et la symptomatologie clinique nous permettent d’affirmer qu’il s’agissait bien de latrodectisme. La Malmignatte est le seul arthropode franc¸ais susceptible d’entraıˆner de tels symptoˆmes. La morsure n’est pas douloureuse et peu passer inaperc¸ue. Les manifestations cliniques apparaissent dans les heures suivant l’envenimation. Principalement, on retrouve des douleurs sourdes qui s’e´tendent progressivement de la morsure a` tout le membre mordu, puis a` tout le corps avec des contractures abdominales intole´rables (mimant un abdomen aigu chirurgical). Sur le plan neurologique, des ce´phale´es, des paresthe´sies des extre´mite´s, un lumbago, un syndrome confusionnel, une agitation, une anxie´te´ tournant parfois a` la sensation d’oppression, a` l’angoisse, a` la peur profonde et irraisonne´e de mourir, des mouvements cloniques [5]. Tous ces signes re´gressent et disparaissent, en une a` trois semaines, laissant la personne tre`s affaiblie et fatigue´e pendant encore plusieurs semaines. Les cas mortels sont rares et touchent principalement les enfants en bas aˆge et les personnes aˆge´es. Le traitement est base´ sur l’injection d’un sel de calcium, qui supprime les contractions musculaires associe´es a` une analge´sie multimodale. Le se´rum antilatrodecte est a` re´server aux sujets fragiles. En l’absence de ce se´rum, les me´decins peuvent utiliser le dantrole`ne. Cette envenimation, bien que rare, doit eˆtre connue car elle peut entraıˆner des actes the´rapeutiques inutiles (intervention chirurgicale) et meˆme eˆtre potentiellement mortelle pour les populations aux aˆges extreˆmes de la vie. Re´fe´rences [1] Verneau N. Les araigne´es de Corse : la famille des Eresidae. Bull Soc Sci Histoire Nat Corse 1999;688:111–9. [2] Paolini M, Szapiro J, Demontera AM, Javaudin G, Lambert J. La piquˆre de la veuve noire entraıˆne une symptomatologie qui peut simuler une urgence me´dicale ou chirurgicale. Rev Prat 1998;408:28–9. [3] Mack RB. Will the defendant please rise? Black widow spider poisoning. N C Med J 1994;55:86–8. [4] Dı´ez Garcı´a F, Laynez Bretones F, Ga´lvez Contreras MC, Mohd H, Collado Romacho A, Ye´lamos Rodrı´guez F. Black widow spider (Latrodectus tredecimguttatus) bite. Presentation of 12 cases. Med Clin (Barc) 1996;106: 344–6. [5] Paolini M, Szapiro J, Demontera AM, Javaudin G, Pruneta RM. Piquˆres de veuves noires. Trois observations. Ann Med Intern 1997;148:511–3.

Lettres a` la re´daction / Annales Franc¸aises d’Anesthe´sie et de Re´animation 28 (2009) 253–263

F. Guaussiata,b A.-C. Astolfib P. Mercuryc A. Bredena V. Minvillea,* a De´partement d’anesthe´sie et de re´animation, CHU de Toulouse, universite´ Paul-Sabatier, GRCB 48, IFR 31, 1, avenue Jean-Poulhe`s, 31400 Toulouse, France b Samu de la Haute-Corse, centre hospitalier ge´ne´ral de Bastia, route Royale, 20600 Bastia, France c Re´animation polyvalente, centre hospitalier ge´ne´ral de Bastia, route Royale, 20600 Bastia, France *Auteur correspondant. Adresse e-mail : [email protected] (V. Minville). Disponible sur Internet le 19 mars 2009 doi:10.1016/j.annfar.2009.01.012

Retard de re´veil anesthe´sique attribue´ a` une hypernatre´mie au cours de la chirurgie pour kyste hydatique du foie Failure to recover after anaesthesia for a surgery of a liver hydatic cysts assigned to an hypernatraemia Mots cle´s : Complications ; Retard de re´veil ; Hypernatre´mie ; Hydatidose Keywords: Complications; Delayed recovery; Hypernataemia; Hydatid cysts

L’atteinte he´patique est fre´quente au cours de l’hydatidose. La chirurgie constitue actuellement la seule the´rapeutique radicale. Elle fait appel, au de´but du temps ope´ratoire, a` l’injection de produits scolicides a` l’inte´rieur du kyste pour e´viter l’inse´mination de la cavite´ abdominale. Parmi les produits les plus utilise´s, le se´rum sale´ hypertonique (SSH) est re´pute´ pour eˆtre le moins toxique sur le foie et les voies biliaires. Cependant, il n’est pas de´nue´ de risque et expose a` certains accidents, tels que l’hypernatre´mie iatroge`ne. Nous rapportons le cas d’une jeune fille aˆge´e de 24 ans, sans ante´ce´dent particulier, qui consulte pour douleur de l’hypocondre droit sans fie`vre. Les explorations radiologiques (e´chographie et scanner abdominaux) ont conclu a` la pre´sence de neuf kystes hydatiques e´parpille´s dans les diffe´rents segments du foie. L’indication ope´ratoire e´tait pose´e chez une patiente de classe ASA 1 avec un examen clinique sans particularite´ et un bilan biologique normal, en particulier une natre´mie pre´ope´ratoire a` 137 mmol/l. L’induction anesthe´sique e´tait faite par propofol, re´mifentanil et cisatracurium et l’entretien e´tait assure´ par propofol et re´mifentanil en perfusion continue. L’acte ope´ratoire consistait a` la re´section du doˆme saillant des neuf kystes avec

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Tableau 1 Bilan biologique pre´- et postope´ratoire imme´diat. Biologie

Perope´ratoire

Postope´ratoire

Sodium (mmol/l) Potassium (mmol/l) Chlore (mmol/l) Bicarbonate (mmol/l) Cre´atinine (mmol/l) Ure´e (mmol) Glucose (mmol)

137 4,1 101 28 89 3,4 5,1

174 3,1 125 14,9 116 4 9,2

ste´rilisation de ces derniers par 2000 ml de SSH a` 30 %, en comple´ment de l’utilisation de compresses imbibe´es au SSH pour prote´ger le champ ope´ratoire. L’acte a dure´ six heures et le remplissage perope´ratoire e´tait de 6000 ml de cristalloı¨des. Durant l’intervention, aucun incident n’est survenu, notamment ` l’issue de l’intervention, on he´modynamique ou ventilatoire. A constatait un retard de re´veil avec un examen neurologique qui montrait un score de Glasgow a` 7/15, il n’y avait pas de signes pyramidaux ni d’autres signes de localisation. La tempe´rature e´tait a` 36,8 8C. La gazome´trie arte´rielle e´tait normale. Les re´sultats des autres examens biologiques sont repre´sente´s dans le Tableau 1. L’osmolarite´ plasmatique calcule´e ([Na + x 2] + glyce´mie + ure´e) e´tait a` 361,2 mOsm/l. La patiente a e´te´ transfe´re´e dans le service de re´animation chirurgicale, avec poursuite du propofol et du re´mifentanil. Elle a eu une re´hydratation par solute´s glucose´s hypotoniques a` 2,5 % a` raison de 200 ml/h durant les premie`res 24 heures et 100 ml/h durant les 48 heures suivantes. Le volume total de liquide administre´ durant les 72 heures e´tait de 9600 ml. L’hyperglyce´mie a e´te´ traite´e par administration de l’insuline humaine en i.v. continue. Les controˆles des ionogrammes sanguins montraient une normalisation comple`te des chiffres de natre´mie au bout de 36 heures. Le re´veil complet e´tait obtenu au bout de 24 heures, avec un e´tat de conscience normal sans de´ficit moteur permettant l’extubation de la patiente. Elle a e´te´ transfe´re´e au service de chirurgie visce´rale apre`s 72 heures. Quatre mois apre`s l’incident, l’examen neurologique e´tait parfaitement normal. L’absence de re´veil chez cette patiente pouvait eˆtre due a` d’autres causes me´taboliques, ventilatoires, home´ostatiques ou encore des le´sions ce´re´brales ische´miques ou he´morragiques. Au cours de cette chirurgie, l’utilisation du SSH peut provoquer une hypernatre´mie pouvant interfe´rer avec le re´veil ce qui e´tait le cas pour cette patiente. Les autres e´tiologies sont peu probables ou ont e´te´ e´limine´es. Il s’agit donc d’une hypernatre´mie (174 mmol/l) responsable d’un retard de re´veil favorise´e par la diffusion transpe´ritone´ale du SSH. Dans la litte´rature, des cas similaires ont e´te´ rapporte´s [1,2]. Cette diffusion du sodium a e´te´ favorise´e par une dure´e d’intervention longue de´passant les six heures. Le traitement de cette hypernatre´mie est symptomatique. L’administration de solute´s glucose´s hypotoniques par voie intraveineuse a e´te´ efficace. La quantite´ de liquide a` administrer est difficile a` appre´cier. Elle doit eˆtre adapte´e en fonction des bilans cliniques et biologiques effectue´s re´gulie`rement [3]. La vitesse de correction de l’hypernatre´mie doit se faire