Épidémiologie du tabagisme

Épidémiologie du tabagisme

Cours du GOLF 2005 Épidémiologie du tabagisme A.-L. Le Faou1,2, O. Scemama2,3 Résumé Introduction L’objectif de cette revue générale est de faire l...

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Cours du GOLF 2005

Épidémiologie du tabagisme

A.-L. Le Faou1,2, O. Scemama2,3

Résumé Introduction L’objectif de cette revue générale est de faire le point sur la consommation tabagique en France et sur la mortalité et la morbidité attribuables au tabac. État des connaissances A la suite de l’augmentation des prix du tabac en 2002-2003, la prévalence du tabagisme était de 30 % en France en 2004. Le tabagisme est à l’origine de 66 000 décès par an en France : 59 000 chez les hommes et 7 000 chez les femmes. Il est associé à la survenue de trois grands groupes de pathologies : les cancers, les maladies cardio-vasculaires et les pathologies respiratoires chroniques. Une relation a été retrouvée avec des complications gravidiques ou ostéoporotiques. Le tabagisme passif est aussi à l’origine d’un grand nombre de pathologies dont le cancer du poumon, les maladies coronariennes et les accidents vasculaires cérébraux.

Perspectives L’arrêt de la consommation de tabac entraîne une réduction progressive du risque de morbidité. Il permet une amélioration fonctionnelle en cas d’atteinte respiratoire chronique.

Conclusion L’existence de thérapeutiques efficaces d’aide au sevrage doit inciter à une prise en charge systématique de l’arrêt du tabac.

Mots-clés : Tabagisme • Épidémiologie • Morbidité • Mortalité • Risque.

Unité 537, Centre de Recherche en Économie et Gestion Appliquées à la Santé, INSERM, Paris, France. 2 Centre de tabacologie, Hôpital Européen Georges Pompidou, Assistance Publique - Hôpitaux de Paris, France. 3 Département de Santé Publique, Université Paris – Descartes, Faculté de médecine, Paris, France. 1

Correspondance : A.-L. Le Faou Département de Santé Publique, Faculté de médecine, Université Paris - Descartes, 15 rue de l’École de Médecine, 75270 Paris cedex 06. [email protected]

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Introduction Epidemiology of tobacco smoking A.-L. Le Faou, O. Scemama

Summary Introduction The aim of this review is to give an overview on tobacco consumption in France and to describe the mortality and the morbidity related to smoking. State of art Following the increase of tobacco prices in 2002-2003, the prevalence of smoking was estimated to 30% in 2004 in France. Tobacco smoking leads to 66 000 deaths annually in France: 59 000 among men and 7 000 among women. Three groups of diseases are linked with smoking : cancers, cardio-vascular diseases and chronic lung diseases. A relation was also established with gravidic or osteoporotic complications. Passive smoking is also involved in numerous diseases such as lung cancer, coronary diseases and strokes.

Perspectives Smoking cessation conducts to a progressive decrease in morbidity risk. A functional improvement is obtained for patients suffering from chronic lung diseases.

Conclusions Effective smoking cessation treatments are available and should be systematically offered to smokers. Key-words: Smoking • Epidemiology • Morbidity • Mortality • Risk.

Depuis les premiers travaux épidémiologiques en 1950 évoquant la nocivité du tabac, la liste des pathologies associées au tabagisme n’a cessé de s’étendre. L’objectif de cette revue générale est de faire le point sur les ventes de tabac et la consommation tabagique en France, la mortalité attribuable au tabac ainsi que l’ensemble des pathologies pour lesquelles un lien de causalité avec le tabac a été établi. Une recherche bibliographique systématique sur Medline portant sur les travaux les plus récents (période 2000-2005) a complété les données de référence.

Évolution des ventes et de la consommation de tabac en France Après le second conflit mondial, les ventes de tabac ont augmenté en France jusqu’en 1976, date de la loi Veil, puis elles ont diminué régulièrement, avec un infléchissement net à partir de la publication de la loi Evin en 1991 [1] (fig. 1). L’augmentation importante des taxes sur les ventes de tabac (+ 42 %) en 2002 et 2003 a abouti à une baisse rapide des ventes de cigarettes (-13,5 % sur la période 2002-2003). Cependant, la chute des ventes de cigarettes a été compensée partiellement par l’augmentation des ventes de cigarillos et surtout de « scaferlati » pour la fabrication de cigarettes roulées, respectivement de + 8 % et + 12 % entre 2002 et 2004. Par ailleurs, la contrebande se développe, dans une proportion par définition impossible à déterminer (estimée à 3 % en 2001 en multipliant par 10 les quantités saisies, selon la Mission Interministérielle de Lutte contre la Drogue et la Toxicomanie). En outre, les achats transfrontaliers ont explosé, comme le montre la baisse très importante des ventes et des chiffres d’affaires des buralistes dans tous les départements frontaliers.

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Fig. 1.

Ventes et prix du tabac en France entre 1875 et 2001

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En 2004, le Baromètre santé a montré une diminution de la prévalence du tabagisme en France avec 29,9 % de fumeurs occasionnels ou quotidiens chez les 12-75 ans : 33,4 % des hommes et 26,6 % des femmes [2]. Ainsi le nombre de fumeurs est estimé à 13,8 millions actuellement en France, ce qui représente une baisse de 10 % en 5 ans. Une même tendance à la baisse de la consommation de tabac est retrouvée chez les adolescents. Ainsi selon les résultats de l’Enquête sur la Santé et les Consommations lors de l’Appel de Préparation A la Défense (ESCAPAD), le tabagisme quotidien a diminué chez les garçons comme chez les filles de 12 à 18 ans : à 17 ans, il concerne 38,1 % des garçons et 37,2 % des filles [3]. Cependant, la forte diminution de la consommation de tabac est à nuancer par les données de consommation de cannabis déclarées par les jeunes au cours de l’enquête ESCAPAD. Si, en 2000, cette consommation concernait 50,1 % des garçons et 40,1 % des filles à 17 ans, elle s’était élevée à 53,3 % et 47,2 % respectivement en 2003 [3].

mortalité prématurée, notamment chez les hommes : dans la population âgée de 35 à 69 ans, un décès sur trois est attribuable au tabac chez les hommes et un sur 16 chez les femmes. Il existe toujours une différence importante entre la mortalité attribuable à la consommation de tabac chez les hommes et chez les femmes. En effet, l’épidémie liée au tabagisme n’a pas encore atteint son point culminant chez les femmes en France. Or il existe un décalage d’environ 30 ans entre le moment où le tabagisme commence à se répandre dans la population et le moment où les conséquences pour la santé se font sentir [5]. On peut donc s’attendre à retrouver des chiffres de mortalité chez les femmes proches de ceux que l’on observe actuellement aux Etats-Unis d’ici 30 ans. Ainsi, en 2025, on estime que le nombre de décès par cancer broncho-pulmonaire chez les femmes devrait approcher celui des décès par cancer du sein.

Morbidité liée au tabagisme Cancers

Mortalité liée au tabagisme En 2000, le tabagisme a été à l’origine de 4 200 000 décès dans le monde, dont la moitié est survenue dans les pays en voie de développement. On considère que près de 100 millions de personnes sont décédées en raison de leur consommation de tabac sur l’ensemble du XXe siècle. Les projections de l’Organisation Mondiale de la Santé évoquent dix fois plus de décès au cours du XXIe siècle. Ainsi, dix millions de décès liés au tabagisme sont attendus pour les années 2025-2030. En France, le nombre de décès attribuables à la consommation de tabac a été estimé, en 1999, à 66 000 dont 59 000 chez les hommes et 7 400 chez les femmes (tableau I) [4]. Le tabac est ainsi responsable actuellement de plus d’un décès sur neuf (un décès sur cinq chez les hommes et un décès sur 35 chez les femmes). Il est à l’origine d’une part importante de la

Le cancer broncho-pulmonaire est l’une des premières maladies pour lesquelles un lien causal avec la consommation de tabac a été montré. Les fumeurs ont un risque de développer un cancer du poumon 20 fois plus élevé que les nonfumeurs. Le tabac est ainsi responsable de près de 90 % des cancers du poumon. Trois facteurs importants liés au tabagisme sont associés au risque de survenue d’un cancer broncho-pulmonaire : la durée du tabagisme, le nombre de cigarettes fumées quotidiennement et l’âge de début du tabagisme. Selon le modèle développé par Doll et Peto, un triplement du nombre de cigarettes fumées par jour multiplie par trois le risque de cancer, alors qu’un triplement de la durée du tabagisme multiplie par 100 le risque de développer un cancer du poumon [6]. Enfin, le risque augmente en fonction de la précocité de l’âge de début de la consommation de tabac : les personnes qui commencent à

Tableau I.

Nombre total des décès et fraction attribuable au tabac, par sexe, en France en 1999. D’après [4].

Causes de décès Cancers Poumon

Nombre de décès

Hommes Fraction attribuable au tabac

Nombre de décès

Femmes Fraction attribuable au tabac

86 903

36 %

56 946

4%

20 867

91 %

4329

44 %

Bouche, pharynx, larynx et œsophage

9 621

61 %

1 588

18 %

Autre

56 415

12 %

51 029

1%

Maladies cardio-vasculaires

76 075

14 %

88 844

2%

Maladies de l’appareil respiratoire

22 425

37 %

21 416

10 %

Autres maladies

89 361

9%

95 489

1%

Toutes causes

274 764

21 %

262 695

3%

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fumer à un âge précoce ont un risque plus important de développer un cancer broncho-pulmonaire et ceci, à des âges moins élevés que les fumeurs ayant débuté plus tardivement. D’un point de vue épidémiologique, les cancers des voies aéro-digestives supérieures (cavité buccale et pharynx, larynx et œsophage) partagent les mêmes facteurs de risque, la consommation d’alcool et de tabac dont les effets sont synergiques : ainsi par rapport à une personne n’ayant jamais fumé ni bu d’alcool, le risque de cancer de l’œsophage est 4 fois plus élevé chez le fumeur de moins de huit cigarettes par jour buvant moins de 25 g d’alcool par jour et 50 fois plus élevé chez le fumeur de 25 cigarettes et plus par jour buvant plus de 150 g d’alcool par jour [7]. Toutefois, les niveaux de risque lié à la consommation de tabac varient fortement selon la localisation du cancer. Ainsi, le risque relatif de cancer du larynx associé au tabagisme atteint le chiffre de 10 alors qu’en ce qui concerne les cancers de la cavité buccale et du pharynx, le risque relatif est compris entre 4 et 5 et qu’il varie entre 2 et 5 pour le cancer de l’œsophage [8]. Le tabac est un facteur de risque bien établi de cancer de la vessie. Le risque de survenue de cancer augmente en fonction du nombre de cigarettes fumées et de la durée de tabagisme et décroît après l’arrêt de la consommation de tabac [9]. Les fumeurs ont un risque multiplié par 2,5 à 3 de cancer de la vessie [8]. En ce qui concerne le cancer du rein, une méta-analyse publiée en 2005 et portant sur 24 études a permis de conclure que le tabac était clairement impliqué dans la survenue du carcinome rénal [10]. Ainsi le risque relatif de cancer du rein chez un fumeur par rapport à une personne n’ayant jamais fumé est de 1,38. L’implication du tabac dans le développement d’un nombre croissant de cancers a été mise en évidence ou est actuellement suspectée : cancer du col de l’utérus, du pancréas, de l’estomac, du foie, leucémie myéloïde aiguë et cancer du sein.

Maladies cardio-vasculaires Le tabagisme est impliqué dans la survenue d’un grand nombre de pathologies cardio-vasculaires : coronaropathie, artériopathie oblitérante des membres inférieurs et accidents vasculaires cérébraux (AVC) principalement mais aussi mort subite, insuffisance cardiaque et anévrysme de l’aorte abdominale. Ainsi, le taux d’infarctus du myocarde non fatals est cinq fois plus élevé chez les fumeurs que chez les non fumeurs dans la tranche d’âge 30-49 ans [11]. De même, dans l’étude de Framingham, les fumeurs développaient deux à trois fois plus souvent des symptômes d’artérite des membres inférieurs que les non-fumeurs [12]. Le tabagisme est aussi un facteur de risque de la maladie de Buerger, artériopathie distale non athéromateuse, qui touche de façon prédominante l’homme jeune. L’effet du tabagisme sur l’incidence des AVC a été obtenu par le suivi d’une cohorte de plus de 22 000 médecins pendant 10 ans [13]. 8S30

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Les résultats de l’étude ont mis en évidence que le RR ajusté sur l’âge de survenue d’un AVC chez les fumeurs de 1 à 19 cigarettes par jour était de 2,02 et s’élevait à 2,52 pour une consommation de 20 cigarettes et plus par jour [13]. Le fumeur a un risque de mort subite plus élevé que le non-fumeur. Au cours de l’étude de Framingham, les fumeurs avaient un RR de mort subite de 2,5 par rapport aux nonfumeurs [14]. Le tabagisme a été retrouvé comme un facteur de risque indépendant de développement d’une insuffisance cardiaque congestive avec un RR égal à 1,6, dans le cadre de la National Health and Nutrition Examination Survey I [15]. Enfin, durant les quarante années de suivi de la cohorte des médecins britanniques, le risque de décès par anévrysme de l’aorte abdominale était augmenté de quatre fois chez les fumeurs par rapport aux non-fumeurs et de deux fois chez les fumeurs par rapport aux anciens fumeurs [9].

Maladies respiratoires En terme de morbidité, les broncho-pneumopathies chroniques constituent la complication respiratoire la plus fréquente du tabagisme. Le tabagisme est, de loin, le principal facteur de risque des broncho-pneumopathies chroniques. Ainsi, Thun et coll. ont évalué, à partir des résultats des études CPSI et CPS-II, le pourcentage de décès par BPCO attribuables au tabac : plus de 90 % des décès par BPCO étaient liés à la consommation de cigarettes [16]. Les plus récentes investigations épidémiologiques continuent de fournir des preuves solides du lien causal entre tabagisme et BPCO. Ainsi dans la Nurses Health Study, le risque relatif de bronchite chronique parmi les fumeuses par rapport aux femmes n’ayant jamais fumé a été estimé à 2,85 [17]. Si les résultats des études ayant examiné l’association entre tabac et asthme chez l’adulte sont contradictoires, il a été démontré de façon convaincante que le tabagisme influençait de façon négative le contrôle et la sévérité de l’asthme. Ainsi dans le cadre de la Copenhagen City Heart Study, Prescott et coll. ont montré que le risque d’hospitalisation pour asthme était 20 % plus élevé chez les fumeurs actuels ou anciens par rapport aux personnes n’ayant jamais fumé [18]. Enfin, chez les personnes indemnes de pathologies respiratoires chroniques, plusieurs études ont mis en évidence un lien entre la consommation de tabac et la survenue d’infections respiratoires basses. Ainsi 23 % des cas de pneumonies communautaires étaient attribuables à un tabagisme passé ou actuel dans une étude cas-témoins menée par Almirall et coll. [19].

Autres pathologies associées au tabagisme Le tabagisme est un facteur de risque reconnu de survenue d’un grand nombre d’autres pathologies. Il a ainsi des conséquences délétères sur de nombreux aspects de la reproduction : diminution de la fertilité, complications au cours de la grossesse (grossesse extra-utérine, fausses-couches spontanées,

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placenta praevia, hématome rétro-placentaire, accouchement prématuré, retard de croissance intra-utérin et petit poids de naissance), effets sur le développement embryonnaire et sur le nourrisson (malformations congénitales à type de fentes faciales principalement, mort subite du nourrisson, troubles du comportement chez l’enfant). La consommation de tabac est également un facteur de risque d’ostéoporose et de fracture de la hanche chez les femmes ménopausées, de parodontite, de dysfonction érectile, de cataracte et de dégénérescence maculaire liée à l’âge, d’ulcère gastro-duodénal, notamment en cas d’infection à Helicobacter pylori.

Le tabagisme passif Une revue complète de la littérature a été effectuée en France en 2001 dans le cadre d’un rapport au Directeur Général de la Santé sur le thème du tabagisme passif [20]. Parmi les pathologies pour lesquelles un lien avec le tabagisme passif a été prouvé, on peut citer : les cancers du poumon et de la sphère ORL, les pathologies coronariennes et les AVC, les infections respiratoires basses, les otites et l’aggravation de l’asthme chez l’enfant. En ce qui concerne la mortalité liée au tabagisme passif, le rapport présenté à l’Académie de Médecine en 1997 estimait à 2 500 à 3 000 le nombre de décès par maladies cardio-vasculaires, à plus de 100 le nombre de décès liés au cancer du poumon, à 100 les décès par infections chez l’enfant et à 60 000 à 100 000 les cas d’infections chez l’enfant [21]. Une estimation du nombre des décès attribuables au tabagisme passif chez les adultes a été effectuée au Royaume-Uni avec 11 500 décès annuels [22]. Une donnée intéressante porte sur le tabagisme en milieu de travail, qui conduirait à un décès sur cinq par tabagisme passif dans la population des 20-64 ans. La moitié de ces décès concernerait le personnel des hôpitaux.

Perspectives Si le tabagisme est associé à un nombre important de pathologies, l’arrêt du tabac entraîne de façon constante une diminution des risques de survenue ou d’aggravation de ces pathologies. Les résultats d’une méta-analyse portant sur l’effet du sevrage tabagique sur la mortalité après la survenue d’un infarctus du myocarde ont mis en évidence une réduction du risque relatif de décès s’échelonnant de 15 % à 61 % en fonction des études [23]. Pour les antécédents pulmonaires, les données de la littérature ont montré que le sevrage tabagique améliore les résultats des explorations fonctionnelles chez les bronchitiques chroniques. Ainsi, pour la Lung Health Study, les patients atteints de BPCO d’intensité faible ou modérée ayant bénéficié d’une intervention d’aide au sevrage tabagique présentaient une amélioration fonctionnelle respiratoire dans l’année suivant l’arrêt du tabac [24].

Enfin, le risque de survenue d’un cancer broncho-pulmonaire diminue après arrêt du tabac. Ainsi, par rapport aux non-fumeurs, le risque relatif de cancer du poumon est égal à 16 en cas d’arrêt inférieur à 5 ans, 5 en cas d’arrêt datant de 10 à 19 ans et 1,5 au-delà de 40 ans. De même Peto et coll. ont estimé le risque cumulé de cancer broncho-pulmonaire (jusqu’à l’âge de 75 ans) chez des sujets ayant continué à fumer régulièrement et chez des sujets ayant arrêté, en fonction de l’âge à l’arrêt : il était de 16 % chez les sujets ayant continué à fumer, 10 % chez les sujets ayant arrêté à 60 ans, 6 % chez ceux ayant arrêté à 50 ans et 2 % chez les sujets ayant arrêté à 30 ans [5]. Pour autant, l’application des recommandations de sevrage tabagique chez les malades est encore largement insuffisante. Ainsi, les études Euro Heart Survey on Secondary and Primary Prevention of Coronary Heart Disease (EUROASPIRE) I (1995-1996) et EUROPASPIRE II (1999-2000) ont montré que la fréquence du tabagisme restait stable (19,5 % en 1995-1996 et 20,8 % en 1999-2000) chez des patients ayant été hospitalisés pour une pathologie coronarienne et interrogés six mois après leur sortie de l’hôpital [25].

Conclusion Le tabagisme est un facteur de risque majeur de mortalité et de morbidité. Il est à l’origine d’un décès sur neuf en France, notamment par cancer du poumon, maladies cardio-vasculaires et atteinte de l’appareil respiratoire. Ainsi, 90 % des cancers du poumon sont attribuables à la consommation de tabac. Il faut souligner le bénéfice lié à l’arrêt du tabac, d’autant qu’il existe des thérapeutiques efficaces d’aide au sevrage tabagique. Remerciements Nous tenons à remercier Madame Danielle Bouton pour son aide précieuse dans la mise en forme des références bibliographiques.

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