Goutte : mise en place et suivi du traitement hypo-uricémiant

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Supplément

Revue du Rhumatisme 78 (2011) S142-S147 Revue du rhumatisme

7es Rencontres d’Experts en Rhumatologie Polyarthrite rhumatoïde Chantilly, 28 et 29 mai 2010

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Numéro réalisé avec le soutien institutionnel du laboratoire Abbott

Janvier 2011 Vol. 78 Supplément n° 1 ISSN 1169-8330

Goutte : mise en place et suivi du traitement hypo-uricémiant Pascal Richette Université Paris Diderot, Sorbonne Paris Cité, Assistance Publique-Hôpitaux de Paris, Hôpital Lariboisière, Fédération de Rhumatologie, 75010 Paris, France

RÉSUMÉ Mots clés : Goutte Hyperuricémie Traitement Allopurinol Fébuxostat

Les traitements hypo-uricémiants ont pour objectif la dissolution des dépôts uratiques pathogènes, et donc la guérison de la goutte. La concentration cible en dessous de laquelle l’uricémie doit être maintenue est de 360 μmol ou 60 mg/l. Les moyens thérapeutiques qui permettent d’abaisser l’uricémie incluent des mesures non pharmacologiques (arrêt d’un médicament hyperuricémiant, modifications des habitudes alimentaires, perte de poids), et les médicaments, dont il existe trois catégories : les inhibiteurs des synthèses puriniques (allopurinol, fébuxostat), les uricosuriques (probénécide, benzbromarone, fénofibrate, losartan) et enfin les uricases. Seuls l’allopurinol et le fébuxostat ont reçu une autorisation française de mise sur le marché pour le traitement de la goutte. © 2011 Société Française de Rhumatologie. Publié par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.

1. Introduction Le traitement hypo-uricémiant dans la goutte a pour objectif de maintenir l’uricémie de façon prolongée en dessous du point de saturation de l’urate de sodium, ce qui permet la dissolution des dépôts uratiques pathogènes, et donc la guérison. Selon les recommandations EULAR [1], la concentration cible en dessous de laquelle l’uricémie doit être maintenue est de 360 μmol/l (60 mg/l). Certains proposent en cas de goutte tophacée d’abaisser plus encore l’uricémie, en dessous de 300 μmol (50 mg/l) pour augmenter la vitesse de dissolution des dépôts [2, 3]. Les moyens thérapeutiques qui permettent d’abaisser l’uricémie incluent les mesures non pharmacologiques, en particulier les régimes, et les médicaments hypo-uricémiants.

un facteur de risque cardiovasculaire indépendant (cf. dans ce numéro le chapitre du Pr Chalès) [4, 5]. Par ailleurs, elle peut se compliquer chez environ 20 % des patients de dépôts uratiques silencieux dans les articulations mais aussi les tendons des membres inférieurs [6, 7].

2.1. Arrêt d’un médicament De façon systématique, chez tout goutteux, il faut rechercher un traitement hyperuricémiant et en particulier un diurétique ou de l’aspirine à petite dose, prescriptions fréquentes, et rediscuter de la légitimé de leur poursuite, voire de leur remplacement si possible.

2.2. Règles hygiéno-diététiques 2.2.1.

2. Traitements non pharmacologiques Ils doivent être proposés à tous les patients goutteux mais aussi aux patients ayant une hyperuricémie non compliquée. En effet, l’hyperuricémie chronique est très vraisemblablement

Perte de poids

Les liens qui existent entre obésité, insulinorésistance, hyperuricémie et risque de goutte [8, 9] font penser qu’une perte de poids chez le sujet goutteux et obèse peut abaisser l’uricémie. De fait, quelques études ont bien démontré que la réduction pondérale diminuait les taux d’acide urique dans

* Correspondance. Adresse e-mail : [email protected] (P. Richette) © 2011 Société Française de Rhumatologie. Publié par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.

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le sang [10, 11], mais le bénéfice est modeste : en effet, une perte de poids de plus de 10 kg diminue l’uricémie d’environ 35 μmol/l [12]. Il faut conseiller une perte de poids progressive, car l’amaigrissement rapide peut générer une cétose et majorer les chiffres d’uricémie [2]. 2.2.2.

Modifications des habitudes alimentaires

Les conseils alimentaires sont un des aspects fondamentaux de la prise en charge non pharmacologique du patient. On connaît en effet mieux depuis quelques années les liens entre alimentation et goutte. L’ingestion d’alcools forts, de bière avec ou sans alcool, de sodas riches en fructose augmente, parfois de façon importante, l’uricémie. De même, les aliments riches en purines animales, mais pas végétales, sont hyperuricémiants [13-19]. Il est bien sûr illusoire d’espérer une bonne observance à un régime trop strict qui consisterait en l’éviction de tout apport purinique alimentaire, ce qui est en pratique d’ailleurs difficilement réalisable. Il faut donc garder une certaine souplesse tout en insistant sur les mesures hygiéno-diététiques suivantes : interdire la bière, les sodas sucrés ainsi que les alcools forts. Limiter la viande et les abats, les poissons gras et les crustacés, qui sont riches en purines. En revanche, il faut encourager la prise de laitages maigres dont on sait qu’ils diminuent l’uricémie [20], ce que font aussi le café [21,22], la vitamine C [23] et les cerises [24]. 2.2.3.

Impacts des mesures hygiéno-diététiques

Ces mesures seront surtout efficaces chez les patients ayant des apports alimentaires excessifs en purines, et/ou une surcharge pondérale. Elles contribueront aussi au contrôle des facteurs cardio-vasculaires associés comme l’hypertension artérielle et la dyslipidémie. Cependant, les modifications de style de vie n’ont qu’un faible impact sur l’uricémie (60 μmol) [25], et c’est la raison pour laquelle un traitement médicamenteux est habituellement nécessaire dans la goutte sévère.

3. Les traitements pharmacologiques

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un premier accès aigu goutteux, 40 % des patients n’en referont pas dans l’année. En revanche, 80 % d’entre eux feront un nouvel accès dans les trois années qui suivent [26]. Enfin, insistons sur le fait qu’à ce jour, il n’est pas recommandé de traiter pharmacologiquement les hyperuricémies asymptomatiques, compte tenu d’une balance bénéfice-risque incertaine. En effet, seuls 10 % environ des patients hyperuricémiques ont une goutte. De plus, l’hyperuricémie est un facteur de risque de goutte, dont on sait qu’il varie selon l’importance de l’uricémie : le risque annuel de goutte est de 0,5 % pour une uricémie comprise entre 420 et 540 μmol/l (70 et 90 mg/l). Il est en revanche d’environ 5 % pour une hyperuricémie d’au moins 540 μmol/l (90 mg/l). Enfin, à 5 ans, seuls 22 % des patients ayant une hyperuricémie de plus de 540 μmol (90 mg/l) feront une goutte [27]. Lorsqu’il est débuté, le traitement doit être poursuivi à vie, car à l’arrêt de l’hypo-uricémiant, l’uricémie remonte, les dépôts cristallins se reforment ; et les accès peuvent récidiver [28].

3.2. Comment introduire un traitement hypo-uricémiant ? L’abaissement de l’uricémie déstabilise les dépôts uratiques et augmente le risque de crise de goutte au début du traitement, ce qui peut par la suite être à l’origine d’une mauvaise observance thérapeutique. C’est pourquoi un traitement préventif de ces accès par une petite dose quotidienne de colchicine (0,5 à 1 mg/j selon fonction rénale) ou d’AINS est recommandé pendant 6 mois, voire plus pour certains, jusqu’à la disparition des tophus [1,2]. Cette prophylaxie par la colchicine réduit la fréquence et la sévérité des crises aiguës [29]. Il convient de ne jamais débuter le traitement hypo-uricémiant pendant une crise mais 2 à 4 semaines après sa sédation. Par ailleurs, le risque de déclenchement d’un accès semblant corrélé à l’importance de la diminution de l’uricémie, il est important de commencer l’hypo-uricémiant à faible dose, puis d’augmenter sa posologie progressivement jusqu’à obtenir l’uricémie cible c’est à dire 360 μmol/l ou 60 mg/l. Il est fondamental de bien expliquer au patient la nécessité ne pas arrêter l’hypo-uricémiant en cas de crise, qui par ailleurs doit être traitée précocement. L’éducation du patient est ici fondamentale, car l’incompréhension des buts du traitement et la faible adhésion thérapeutique sont les principales causes d’échec du traitement de la goutte.

3.1. Quand introduire un traitement hypo-uricémiant ? 3.3. Médicaments hypo-uricémiants Selon les recommandations européennes et anglaises [1, 2], un traitement hypo-uricémiant doit être initié puis maintenu à vie chez tous les patients ayant une goutte sévère, c’est-à-dire compliquée de tophus, d’une atteinte rénale (lithiase ou néphropathie urique) ou d’une arthropathie uratique. Ces complications doivent donc être recherchées systématiquement à l’aide d’un examen clinique soigneux, de radiographies standard, en particulier des pieds, et d’une échographie des reins et des voies excrétrices car la lithiase urique est radio transparente. En l’absence de ces complications, la répétition des accès aigus est une indication à un traitement hypo-uricémiant, mais le nombre de ces accès n’a jamais été clairement défini. C’est dans ce cas qu’il faut discuter avec le patient des bénéfices et des risques des traitements hypouricémiants au long cours. Il faut savoir par exemple qu’après

Il existe trois catégories d’hypo-uricémiants : les inhibiteurs de la synthèse d’acide urique (allopurinol, fébuxostat), les uricosuriques (probénécide, benzbromarone, fénofibrate, losartan) et enfin les uricases. Seuls l’allopurinol et le fébuxostat ont reçu une autorisation française de mise sur le marché (AMM) pour le traitement de la goutte. Le probénicide est actuellement le seul uricosurique ayant une AMM dans la goutte.

3.4. L’allopurinol Cet inhibiteur non spécifique de la xanthine oxydase est l’hypo-uricémiant de référence. Un premier passage hépatique le convertit en oxypurinol, qui est le métabolite actif excrété par voie rénale. Son efficacité est dose-dépendante : il faut le

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débuter à une posologie initiale de 100 mg/j, qui sera progressivement augmentée toutes les deux semaines jusqu’à atteindre la dose qui permettra le maintient de l’uricémie en dessous de 360 μmol/l. La grande majorité des patients en Europe et en Amérique du nord reçoivent une posologie d’allopurinol inférieure à 300 mg/j [30], dont on sait qu’elle permet actuellement d’atteindre l’uricémie cible chez moins d’un patient sur deux [31]. Cependant, en cas de fonction rénale normale, la posologie de l’allopurinol peut être augmentée jusqu’à 600 voire 800 mg/j [32], ce qui contrôle dans ce cas l’hyperuricémie de la majorité des patients goutteux [25, 31], mais avec sans doute une augmentation du risque de réaction allergique [31]. L’insuffisance rénale est un obstacle important à l’obtention d’une uricémie basse avec l’allopurinol, car sa posologie doit être réduite et adaptée à la clairance de la créatinine [33] (cf. résumé des caractéristiques du produit), et très souvent les posologies autorisées ne permettent pas un contrôle satisfaisant de l’uricémie chez ces patients [32]. Il faut noter cependant qu’aucune étude n’a démontré de diminution du risque allergique avec les adaptations de doses selon la fonction rénale [34]. Les réactions allergiques cutanées sont la principale complication de ce traitement et surviendraient dans un peu moins de 5 % des cas. Le plus souvent, ce sont des éruptions prurigineuses, érythémateuses, papuleuses, vésiculeuses ou bulleuses, mais parfois il peut s’agir d’éruptions cutanées graves telles que des syndromes de Lyell ou Stevens-Johnson. Les délais d'apparition sont habituellement inférieurs à 1 mois mais peuvent être exceptionnellement longs, parfois de plusieurs années. Lorsqu’une réaction allergique est observée, le traitement doit être impérativement arrêté mais surtout sa reprise est formellement contre-indiquée, compte tenu du risque de syndrome d'hypersensibilité généralisée (DRESS), de syndrome de Stevens Jonhson, rare mais fatal chez 20 % des patients. Le DRESS associe à divers degrés fièvre, atteinte de l'état général, éruption cutanée, polyadénopathie, atteinte hépatique et de la fonction rénale, hyperéosinophilie. Il peut survenir à n'importe quel moment du traitement mais le plus souvent dans les 4 premières semaines. Il surviendrait principalement chez les sujets âgés et insuffisants rénaux, ainsi que chez les patients recevant des thiazidiques [32]. Il a été récemment démontré que ce syndrome était lié à une hyper activation lymphocytaire T, vraisemblablement réactionnelle à une réponse contre les virus herpétiques [35]. Les précautions d’emplois avec l’allopurinol sont les interactions médicamenteuses, notamment avec les anticoagulants oraux et la théophylline dont les effets peuvent être augmentés par diminution de leur métabolisme hépatique. Enfin, l’allopurinol ne doit pas être co-prescrit avec l’azathioprine, compte tenu du risque d’insuffisance médullaire grave, liée à l’accumulation de 6 mercaptopurine, métabolite hépatique de l’azathioprine et dégradée par la xanthine oxydase.

Sa demi-vie est d’environ 6 heures et son métabolisme est essentiellement hépatique. L’efficacité du fébuxostat versus allopurinol a été démontrée dans deux études de phase 3 (APEX et FACT) menées chez 1832 patients. Au cours de ces études, le fébuxostat à la posologie de 80 ou 120 mg/j était significativement plus efficace que l’allopurinol (100 à 300 mg/j, selon la fonction rénale) pour diminuer l’uricémie [36, 37]. L’effet hypouricémiant était obtenu en 15 jours et persistait tout au long de l’administration du produit (études entre 6 et 12 mois). Un avantage important du fébuxostat est la possibilité de l’utiliser chez les patients avec insuffisance rénale modérée, c’est à dire lorsque la clairance de la créatinine est altérée mais supérieure à 30 ml/min, et cela sans adaptation de sa posologie. La dose quotidienne initialement recommandée de fébuxostat est de 80 mg/j. Son action est suffisamment rapide pour permettre un nouveau dosage de l’uricémie après deux semaines de traitement. Si l’uricémie reste supérieure à 360 μmol/l après 2 à 4 semaines de traitement, la posologie peut être augmentée à 120 mg/j. Les événements indésirables liés au fébuxostat les plus fréquemment rapportés ont été des anomalies du bilan hépatique et notamment des élévations des transaminases (5,0 %), des diarrhées (2,7 %), des nausées (1,3 %), des céphalées (1,2 %), et des éruptions cutanés (1,2 %). Effets indésirables recueillis en notification spontanée : de rares cas d’éruptions cutanées graves, d’éruptions cutanées généralisées et de réactions sévères d’hypersensibilité ont été rapportés après la commercialisation. Dans la plupart des cas, ces réactions sont survenues durant le premier mois de traitement par fébuxostat. Pour certains de ces patients, mais pas tous, il a été rapporté un antécédent de réaction d’hypersensibilité à l’allopurinol. Comparativement au groupe allopurinol, il a été observé dans le groupe fébuxostat une incidence un peu plus élevée d’événements cardiovasculaires au cours des études APEX et FACT (1,3 événements par 100 patientsannées vs. 0,3) et de la phase d’extension en ouvert (1,2 vs. 0,6 événements par 100 patients-années) [36-38]. Cependant, la différence observée n’atteignait pas la signification statistique et pourrait être liée au hasard, dans une population atteinte de goutte sévère comorbide, très exposée aux accidents cardiovasculaires. Ce signal cardiovasculaire observé lors des études pivots n’a pas été retrouvé dans l’étude CONFIRMS [39]. Cependant, le résumé des caractéristiques du produit comporte tout de même une précaution d’emploi visant à limiter la prescription du fébuxostat en cas de cardiopathie ischémique ou d’insuffisance cardiaque congestive. L’administration du fébuxostat n’est pas recommandée chez les patients traités par azathioprine et doit être faite avec prudence chez les patients traités par théophylline, pour les mêmes raisons que celles évoquées avec l’allopurinol. La réalisation d’un bilan hépatique est recommandée avant l’instauration du traitement par fébuxostat et périodiquement par la suite. Enfin, une augmentation du taux de TSH ayant été observée chez 5 % des patients traités au long cours par fébuxostat, il doit être prescrit avec prudence chez les patients présentant une dysthyroïdie.

3.5. Le Fébuxostat

3.6. Autres hypo-uricémiants : les uricosuriques

Un nouvel hypo-uricémiant, le fébuxostat, est commercialisé depuis mars 2010 en France. Le fébuxostat est un inhibiteur sélectif non purinique de la xanthine oxydase.

Les uricosuriques diminuent l’uricémie en augmentant l’excrétion urinaire de l’acide urique. Tous induisent un risque de lithiase urique, qu’il faut prévenir par des apports

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hydriques abondants et par le contrôle du pH urinaire, que l’on doit maintenir au-dessus de 6, en alcalinisant si besoin les urines (bicarbonate de soude, eau de vichy, jus de citron…). Ils ne peuvent être utilisés que chez les goutteux sans antécédent lithiasique et dont l’uricurie est normale. 3.6.1.

Probénicide et benzbromarone

Depuis la commercialisation du fébuxostat, l’intérêt des anciens uricosuriques disponibles est très en retrait, car ceux-ci étaient surtout utilisés chez les patients intolérants ou non répondeurs à l’allopurinol, sujet qui a été traité en détail dans un article de Thomas Bardin et auquel nous renvoyons le lecteur [40]. Brièvement, ce sont le probénicide, qui doit être débuté à une posologie de 250 mg deux fois par jour, et qui peut être augmentée progressivement toutes les deux semaines jusqu’à un maximum de 2 g/j ; et la benzbromarone, uricosurique plus puissant, qui peut administrée en une prise de 100 à 300 mg/j. A la différence du probénicide, la benzbromarone garde son efficacité en cas d’insuffisance rénale modérée. En revanche, elle a une toxicité hépatique qui l’a fait retirer du marché Européen. Elle reste disponible après une demande d’autorisation temporaire d’utilisation auprès de l’AFSSAPS, pour les patients intolérants à l’allopurinol et dont l’uricémie est non contrôlée par le probénicide. 3.6.2.

Fénofibrate et Losartan

Ces deux médicaments, qui sont respectivement un hypolipémiant et un antihypertenseur, sont aussi uricosuriques. Bien que leur effet hypo-uricémiant soit faible par comparaison à celui de l’allopurinol ou du fébuxostat, ils peuvent être utilisés avantageusement chez les goutteux lorsqu’ils sont prescrits dans leurs indications [41, 42].

3.7. L’uricase Chez la plupart des mammifères, l’urate est transformé en allantoïne, composé beaucoup plus soluble, par l’urate oxydase. En revanche, chez l’Homme et les grands singes, le gène codant cette enzyme a été inactivé [43], ce qui explique des concentrations physiologiques d’urate proches du seuil de solubilité chez l’Homme [5]. Une uricase recombinante aspergillaire est commercialisée en France depuis 2001. Il s’agit de la rasburicase, dont le libellé d’AMM limite l’utilisation à la prévention de l’hyperuricémie aiguë des lyses tumorales sous chimiothérapie. Un effet hypouricémiant puissant de cette enzyme a été rapporté dans cette courte série de patients [44]. Cependant, sa demi-vie brève (moins de 24h), la fréquence des réactions allergiques, la possibilité de méthémoglobinémie chez les patients ayant un déficit en G6PD ainsi que le probable développement d’anticorps dirigés contre la molécule et associés à une diminution de l’efficacité de l’enzyme, limitent fortement l’usage de cette molécule [45]. Aux Etats Unis, la commercialisation d’une nouvelle urate oxydase a récemment été approuvée par la Food and Drug Administration pour le traitement des gouttes réfractaires aux hypo-uricémiants conventionnels. Il s’agit d’une uricase

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porcine recombinate pégylée -PEG uricase- (pégloticase) administrée par voie intra veineuse toutes les 2 semaines. En France, cette uricase n’est pas commercialisée. L’addition de polyéthylène glycol (PEG) à l’uricase a pour objectif de prolonger sa demi-vie et de réduire son antigénicité afin de diminuer la production d’anticorps anti-uricase [46, 47]. Dans une étude de pharmacocinétique, il a été démontré qu’une administration intraveineuse unique de 4 mg à 12 mg de pégloticase assurait pendant 21 jours une activité uricase importante dans le serum des patients, ce qui diminuait de façon spectaculaire l’uricémie dans les 24 à 72 h après la perfusion [48]. Un essai de phase 2, conduit en ouvert chez 41 patients ayant des gouttes sévères et réfractaires a permis de mieux préciser l’efficacité et la tolérance de la pégloticase. Ces patients ont reçu la pégloticase par voie intraveineuse à la posologie de 4 mg tous les 15 j ou 8 mg toutes les 2 ou 4 semaines ou 12 mg toutes les 4 semaines, pendant 12 à 14 semaines. Dans cette étude, l’uricémie moyenne chutait en dessous de 360 μmol/l dans les 6 h pour toutes les doses, et la dose optimale était de 8 mg toutes les 2 semaines. Des anticorps anti-pégloticase étaient observés chez 31 des 41 patients, et leur présence était associée chez certains patients à une diminution de la demi-vie de la molécule [47, 49-52]. La pégloticase déclenchait des accès aigus goutteux chez la majorité des sujets inclus dans cet essai (88 %).Deux études de phase 3 d’une durée de 6 mois ont randomisé en 3 bras parallèles - pégloticase 8 mg toutes les 2 ou 4 semaines ou placebo- 212 patients ayant une goutte réfractaire [53]. Tous les patients recevaient avant la perfusion de la cortisone et/ou de la colchicine afin de limiter les réactions allergiques et les accès aigus goutteux. Le critère principal d’efficacité était le pourcentage de répondeurs définis comme les patients ayant une uricémie < 360 μmol/l durant 80 % des 3 derniers mois de l’étude. Dans les deux essais, le taux de répondeurs chez les patients ayant reçu 8 mg de pégloticase était respectivement de 47 % et 38 % versus 0 % dans le groupe placébo. La disparition totale d’au moins un tophus était observée chez 45 %, 26 % et 8 % des patients ayant reçu la pégloticase respectivement toutes les 2 semaines, toutes les 4 semaines et le placébo. Durant les 3 premiers mois de traitement, le pourcentage de patients ayant fait un accès aigu goutteux était de 53 % dans le groupe placébo, et de 75 % et 81 % chez les patients ayant reçu une dose bimensuelle ou mensuelle d’uricase. En revanche, durant les 3 deniers mois de l’étude, la fréquence des accès était plus faible dans les bras pégloticase (41 % et 57 %) par comparaison au bras placebo (67 %). Des effets indésirables graves étaient rapportés chez 23,5 % et 22,6 % des patients ayant reçu les deux doses de pégloticase et chez 11,6 % des patients ayant reçu le placébo. Ces événements étaient essentiellement des réactions allergiques, des événements cardiovasculaires et des accès aigus goutteux. Bien que suspecté, le faible nombre de patients exposés à la pégloticase, et d’événements cardiovasculaires observés (4,7 % et 3,6 % dans les bras pégloticase et aucun dans le groupe placébo) ne permet pas d’établir un lien de causalité entre l’administration de cette uricase et le déclenchement d’événements cardiovasculaires (arythmie, insuffisance cardiaque,

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infarctus). Des taux élevés d’anticorps dirigés contre l’uricase était observés chez 59 % des patients. Ces anticorps étaient associés à l’apparition de réactions allergiques, parfois sévères, qui succédaient le plus souvent une perte d’efficacité de la pégloticase, qui se traduisait par une perte du maintien de l’uricémie en dessous de 360 μmol. En pratique, l’administration de pégloticase, qui est contre indiquée chez les patients ayant un déficit en G6PD, nécessite une surveillance rigoureuse des patients compte tenu de ses effets secondaires allergiques. Enfin, elle doit être utilisée très prudemment chez les patients aux antécédents cardiovasculaires.

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3.8. Cas particulier : la goutte des transplantés d’organe Dans le cas très particulier de la goutte du transplanté, il faut discuter de l’introduction du mycophénolate mofétil, immunosuppresseur non hyperuricémiant, qui peut remplacer la ciclosporine ou le tacrolimus, le souvent à l’origine de l’hyperuricémie, ou pour éviter l’utilisation de l’azathioprine, ce qui permet l’introduction de l’allopurinol ou du fébuxostat [40].

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Déclarations d’intérêts [23]

Interventions ponctuelles : activités de conseil (Ipsen, Menarini, Savient) ; Conférences : invitations en qualité d’intervenant (Ipsen, Menarini, Novartis).

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