Histoire des laits fermentés

Histoire des laits fermentés

probiotiques et santé Introduction HISTOIRE DES LAITS FERMENTÉS Pierre Bourlioux L’histoire des laits fermentés, qu’il s’agisse de fromages ou de ...

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probiotiques et santé

Introduction

HISTOIRE DES LAITS FERMENTÉS

Pierre Bourlioux

L’histoire des laits fermentés, qu’il s’agisse de fromages ou de produits liquides comme le yaourt, est étroitement liée à celle de la consommation par l’homme du lait provenant d’animaux domestiqués. Il est donc logique de commencer cette longue histoire par celle de la domestication d’un certain nombre d’animaux par l’homme.

Quelques repères historiques... Les écrits hébraïques les plus anciens font référence à l’utilisation très répandue du lait dès les premiers temps de la vie. En outre, l’Ancien Testament fait référence une vingtaine de fois à un pays qui « sent bon le lait et le miel ». Quant à la Bible, elle cite une cinquantaine de fois le lait et les produits laitiers. Les historiens situent généralement le début de la consommation de lait animal (donc de la domestication) en même temps que l’apparition de la culture des céréales, il y a environ 10 000 ans, car il est vraisemblable que les animaux ont été attirés par les cultures de céréales des premiers cultivateurs et qu’ils ont dévasté cette abondante fourniture de nourriture [1]. Cependant, si l’on en croit Ron Schmidt [2], l’utilisation de clôtures pour enfermer et élever des antilopes pour leur lait remonte à environ 30 000 ans. La plus ancienne preuve connue, montrant des animaux rassemblés en troupeau et subissant la traite, ainsi que la fabrication de fromage figure sur une série de peintures rupestres (datées entre 5 000 et 6 000 ans avant J.-C.) découvertes dans des grottes en Lybie. Des fresques murales provenant de tombes sumériennes datant de 3 500 ans avant J.-C. et de tombes égyptiennes datant de 2 000 ans avant J.-C. montrent la fabrication de beurre et de fromage. Sur d’autres fresques, on peut voir le stockage du lait dans des outres de peau suspendues à des perches démontrant ainsi qu’à cette époque, on avait une certaine maîtrise du lait et de ses dérivés : fromages et laits fermentés [1]. Département de Microbiologie, Faculté de Pharmacie, 5, rue Jean-BaptisteClément, 92296 Châtenay-Malabry cedex. Adresse mail : [email protected]

Cah. Nutr. Diét., 42, Hors-série 2, 2007

Un magnifique bas-relief sculpté datant des années 29002460 avant J.-C. a été découvert à Tell Ubaid au MoyenOrient dans le territoire de l’ancienne Babylone. Une photo de ce bas-relief est publiée en page 31 dans un article de Kurmann [3]. Il montre successivement la traite et la récolte du lait dans un récipient en faïence, la filtration du lait et la fabrication du beurre dans un grand pot en faïence en position inclinée de manière à permettre l’agitation nécessaire à la fabrication du beurre. À partir de là, on peut en déduire que le surissement du lait servait à la fabrication du beurre et aussi probablement à la consommation de lait aigri [3]. Une autre représentation de la domestication des animaux laitiers (élevage et traite des vaches) datant des années 900 avant J.-C. figure sur une roche sculptée en Lybie [4]. L’histoire du lait mérite qu’on s’y attarde un instant. Le lait est produit par les femelles des mammifères et il est destiné à passer directement (si je puis dire) du producteur au consommateur. C’est un produit éminemment périssable dont la conservation est de courte durée et qui se transforme rapidement en un produit aigre ou suri dont la consommation peut être désagréable au goût et, à la limite, dangereuse si le lait a été contaminé par un germe pathogène. Très rapidement, l’homme s’est rendu compte, après avoir capturé et commencé à domestiquer certaines espèces animales, qu’il pouvait utiliser le lait de ces animaux et l’on peut dire que ce fait correspond à la contribution la plus significative des populations du néolithique au régime alimentaire de l’homme. Au travers des siècles, de très nombreuses espèces animales ont été utilisées pour leur lait dans pratiquement tous les continents. On peut citer : antilopes, rennes, brebis, chamelles, chèvres, bufflesses, juments, ânesses, bisons, yacks, zébus et vaches. La seule exception majeure est le porc [5]. 2S9

introduction Il faut considérer que la domestication du bétail a apporté à l’homme un ensemble de bénéfices importants qu’il s’agisse de l’apport de viande, de lait, de cuir, ou de fumier auxquels il faut ajouter l’aide aux travaux des champs. S’agissant du lait, compte tenu de sa mauvaise conservation, de la température ambiante, des bactéries présentes dans l’environnement, il va rapidement cailler et donner naissance, soit à un produit aigre et suri désagréable au goût, soit à un produit rafraîchissant et plaisant. C’est la raison pour laquelle, tout au long de l’histoire, le lait a été le plus souvent utilisé sous l’une ou l’autre de sa forme surie ou fermentée [6]. Si, de nos jours, la majorité des produits fermentés est à base de lait de vache, de chèvre, ou de brebis, il faut savoir qu’il existe néanmoins encore à notre époque des préparations en quantité importante de produits à base de lait de bufflesse en Inde, de jument et de chamelle en Asie centrale et en Russie et de zébu au Kenya. En ce qui concerne le zébu, un article japonais de Mathara et al traitant de « Production of traditional fermented milk in Kenya: a review. » est disponible sur le site suivant : http://sizcol.u-shizuoka-ken.ac.jp Au cours de fouilles d’habitations lacustres au bord du lac de Neuchâtel, des archéologues ont trouvé des poteries percées de trous qui datent d’au moins 6 000 ans avant J.-C. Ils en concluent qu’il s’agit d’une sorte de passoire destinée à séparer le caillé du petit lait. Par contre, on ignore quel type de lait était utilisé à cette époque. On trouve dans la Bible de nombreuses références ayant trait aux produits laitiers démontrant ainsi que les hommes de cette époque possédaient les qualités et les compétences pour fabriquer, à partir du lait, soit des fromages frais, soit des produits fermentés comme le yaourt. Citons trois exemples : Pour honorer les envoyés de Yahvé, Abraham « courut au troupeau et prit un veau tendre et bon ; il le donna au serviteur qui se hâta de le préparer. Il prit du caillé, du lait, le veau qu’il avait apprêté et plaça le tout devant eux » (La Genèse 18, viii). On peut situer cette scène aux environs de 2000 ans avant J.-C. Les méthodes utilisées à cette époque sont celles qui figurent sur le bas-relief sumérien de Tell Ubaïd et que nous avons décrites précédemment [3]. Quand David eut traversé le Jourdain, il arriva à Mahanayim. « Shobi..., Makir..., et Barzillaï... lui offrirent... du miel, du lait caillé et des fromages, des moutons et des bœufs » (2 Samuel 17 : 29). Avant le combat de David contre Goliath, son père Jessé lui dit « ...quant à ces dix morceaux de fromage, tu les offriras au chef des mille » (1 Samuel 17 : 18). En outre, des documents d’archives font état de l’existence autrefois d’un lieu situé près de Jérusalem appelé « la vallée des producteurs de fromages ». Homère, aux environs de 1 184 avant J.-C., fait référence dans ses poèmes épiques à du fromage qui était fabriqué dans des grottes des montagnes de Grèce à partir du lait de chèvre et de brebis. En fait, une de ces variétés appelée « Cynthos » était vendue par les Grecs aux Romains. Il s’agit vraisemblablement de la féta que l’on connaît aujourd’hui. Aristote (entre 384 et 322 avant J.-C.), dans son « Histoire des animaux », observe que chèvres, brebis et vaches produisent naturellement plus de lait qu’il n’en faut pour nourrir leur progéniture. C’était donc les sources de lait les plus utilisées par les Grecs et les Romains, bien que soient également utilisés les laits d’ânesses et de juments. Le lait de chacune de ces espèces pouvait être utilisé comme ingrédient dans la composition du « Kikeon », 2S10

boisson médicinale magique ! [7]. Aristote fait aussi référence au lait de chamelle qui mérite d’être cité, car il est toujours utilisé en quantité importante, soit sous forme de lait, soit sous forme de produit fermenté (essentiellement fromage) [8]. Varro, vers 127 avant J.-C., dans son « Rerum rusticarum de agri cultura » a noté les différences existant entre les différents fromages en fonction du lieu de fabrication. À cette époque, l’utilisation de la présure était devenue habituelle permettant un meilleur contrôle dans la fabrication et une fabrication quasi-commerciale de ces produits.

Qu’en est-il des laits fermentés ? On a coutume, dans nos pays occidentaux, de nommer les produits fermentés sous le terme de yaourt ou yogourt ou yoghourt. C’est en 1925 que les mots « yaourt » ou « yoghourt » ont fait leur entrée officielle dans le Petit Larousse. Le premier est d’origine grecque, le second d’origine turque (yoghourt). En fait, sous cette appellation, ne peut figurer qu’un seul type de produit fermenté : celui du lait fermenté par la symbiose de deux bactéries lactiques : Lactobacillus bulgaricus et Streptococcus thermophilus. Il existe une multitude de noms différents (plusieurs centaines) correspondant à des produits fabriqués avec des laits de différentes espèces animales dans différents pays. Pour ceux qui sont intéressés, le site suivant donne non seulement l’origine, mais aussi des détails sur la fabrication et la composition des produits : http://www.fao.org/documents/. À titre d’exemple, le lait de vache fermenté en Asie centrale s’appelle « Aïran » ou « Kéfir » en Russe. Le « Shubat » au Kasakhstan, le « Chal » et « Dorian » au Turkménistan, le « Khoormog » en Mongolie sont des laits de chamelle fermentés. Le Koumis est le lait fermenté de jument. Le lait de yak fermenté est dénommé « Kourout » au Kirghizistian, etc. Le lait caillé a certainement été consommé par de nombreuses populations dès le néolithique, mais il n’existe pratiquement pas de preuves directes de ce type de consommation. Il était certainement consommé en Mésopotamie, en Palestine et aussi en Égypte. Plus tard, Pline fait mention de leur production par les tribus barbares « qui savent épaissir le lait en une matière d’une agréable acidité ». Il cite le yaourt « comme étant d’essence divine et comme remède à de nombreux maux » [9]. Faut-il voir là une référence aux légendes du Caucase ? Les caillés peuvent présenter une texture fine ou grossière. La texture fine a permis d’obtenir progressivement un produit acide et crémeux tel que le yaourt des Balkans, le Taetta en Scandinavie ou le Dahi en Inde. La texture la plus grossière, une fois égouttée, a donné naissance au fromage frais non acide [6]. Le yaourt est actuellement, pour la plupart des gens, une invention des Bulgares d’Asie centrale. Pourtant, c’est un des produits laitiers fermentés dont les origines sont probablement multiples. Il est facile d’imaginer comment, quelque part en Asie centrale, une fermentation involontaire du lait a produit quelque chose comme le yaourt et que les hommes ont observé qu’il pouvait se conserver plus longtemps que le lait frais tout en ayant un goût agréable. C’est ce produit qui est cité en Turquie au e VIII siècle avant J.-C. et qui nous est parvenu via les Cah. Nutr. Diét., 42, Hors-série 2, 2007

probiotiques et santé Balkans [3]. Le terme yaourt provient du mot turc yogurt dérivant du verbe yogurtmak qui signifie « mélanger ». On trouve mention du « Laben », produit très voisin, dans un ouvrage médical arabe datant de 633 avant J.-C. [10]. Le yaourt a évolué dans différents pays en fonction du lait utilisé, des ferments provenant d’espèces animales différentes et réutilisés au hasard des pratiques, du mode de fermentation (sous la cendre ou au soleil) et du refroidissement assujetti aux humeurs du temps. Le yaourt est resté primitivement une nourriture de l’Inde sous le nom de Dahi, d’Égypte sous le nom de Leben, d’Asie centrale sous le nom de Mayzoom, du Moyen-Orient (Levant) sous le nom de Mast, d’Europe du Sud-Est, et d’Europe centrale sous le nom de Koumiss, jusqu’à ce qu’un biologiste russe nommé Élie Metchnikoff émit la théorie selon laquelle la consommation de yaourt était responsable d’une durée de vie inhabituelle du peuple bulgare. Chaque société s’est approprié le lait caillé selon son environnement, ses contraintes et sa culture. Ainsi change-t-il de nom et de recette selon les régions du monde. La notion de nomadisme est très importante, car c’est par l’intermédiaire de ces populations que nous sont parvenus ces différents produits qui ont été analysés et décrits par Jean Froc dans son article sur « l’aperçu historique et géographique des produits fermentés ». Pour lui, la production des nombreux laits fermentés est segmentée en deux groupes : « Le premier s’applique au lait de tous les animaux, sauf à celui de jument. Ces laits donnent le tarag coagulé avec une flore de Lactobacillus jugurti, L. bulgaricus, Streptococcus thermophilus. Le lait est partiellement écrémé et ensemencé d’un levain, puis il est chauffé. Après quelques heures, il devient épais, homogène, avec peu de fermentation alcoolique secondaire due au L. fermenti et à des levures. Le levain est préparé à partir de tarag égoutté en sac de toile et conservé sous la yourte. Un lait proche du tarag est fermenté deux fois, la deuxième étant alcoolique à fort développement de levures présentes dans les récipients réservés à cette fin (outre en peau ou seau de bois). Après quelques jours et de nombreuses agitations, une mousse blanche apparaît. Ce lait est très acide (plus de 200 °D) et contient 2 à 2,5 % d’alcool. Il peut servir à la distillation et produire l’arkhi, l’alcool mongol proche de la vodka russe ou être consommé en l’état, ou coupé à l’eau. Cependant, le lait fermenté le plus consommé, à forte valeur symbolique, reste l’airag fait avec le seul lait de jument. Il est appelé koumis par les Russes qui le fabriquent aussi dans les Républiques voisines, mais ce mot n’est pas slave, il dérive de qimiz en turc. Il est stocké en continu dans une outre de peau durant toute la saison. L’apport de lait frais qui compense les prélèvements entretient le cycle garantissant la qualité du levain dont les colonies sont des L. casei, L. bulgaricus et autres, mais aussi des levures Saccharomyces lactis et S. cartilaginosus. Ainsi, la boisson est fraîche, acide, alcoolisée et pétillante grâce à cette double fermentation. Chez les Turkmènes, de la même façon, on produit le « chal » à base de lait de chamelle. À la frontière de l’Europe, dans le Caucase, les bergers ont depuis très longtemps fabriqué un lait similaire à partir de la flore sauvage entretenue dans une peau de chèvre qui n’est jamais nettoyée, c’est « l’ayran ». Avec le temps, les micro-organismes ont fini par donner des grains capables d’acidifier et d’alcooliser fortement le lait à faible température tout en produisant beaucoup de gaz Cah. Nutr. Diét., 42, Hors-série 2, 2007

carbonique. Les colonies bactériennes sont des L. brevis, L. plantarum, L. bulgaricus, des Leuconostocs et la levure Saccharomyces kefir, d’où son nom de « kéfir ». Dans les steppes d’Asie, on rencontre aussi ces laits alcoolisés du nom de unda, khormög... En Iran, c’est le mast à base de lait de chèvre ou de brebis. Plus près de nous, en Bulgarie, on rencontre un lait fortement levuré par le genre Torula, le brano mlyako. Dans le Nord, en Laponie suédoise (mais aussi en Norvège), le lait de vache donne des laits filants riches en bactéries Lactobacillus helveticus et brevis et en Leuconostocs. Autre exemple, après l’acidification par cette flore, la coagulation traditionnelle est faite par une enzyme végétale issue d’une plante carnivore des zones humides et froides, la grassette (Pinguiculla vulgaris) qui porte aussi le nom de « caille ». Avec ce cocktail, on fabrique le yaourt filant du nom de tâttmjôlk qui veut dire lait de grassette. » Avec ces quelques exemples du monde nomade ou seminomade, nous percevons ce qui le caractérise : une base alimentaire à dominante animale, une forte consommation de produits laitiers acides et alcoolisés nécessitée par des besoins de conservation et de stockage et une grande diversité des flores microbiennes provenant des milieux ambiants. Pour mieux comprendre les différents mouvements des peuples d’Asie centrale et du Moyen-Orient, je recommande la lecture de l’article suivant : l’Antiquité, le MoyenOrient, les Kurdes par l’anthropologue Élisabeth Marescot sur le site suivant : http://www.kurdishinstitute.be Il existe plusieurs légendes à propos de la naissance des laits fermentés. Il y a d’abord l’histoire de ce voyageur nomade dans le désert de Turquie. La légende raconte qu’il avait emporté avec lui du lait dans un sac fabriqué avec de la peau de chèvre et pendu à la selle de son chameau. Après avoir voyagé sous un soleil brûlant et après avoir subi une agitation constante, le lait s’était transformé en une crème piquante. Toutes les conditions étaient réunies pour faire le premier lait fermenté. Il y a ensuite l’histoire de Genghis Khan. Nous sommes au e XII siècle et la légende dit que des villageois mécontents, suite à la prise de leur village par le conquérant, placèrent du lait dans sa gourde dans l’espoir de l’empoisonner et qu’au lieu de produire un lait suri, le lait donna naissance à un délicieux produit crémeux qui lui conféra encore plus de force pour la suite de ses conquêtes. Une autre légende a trait à un messager de Genghis Khan avec la même histoire. Il faut cependant admettre que l’on possède des écrits sur ce conquérant qui confirment que son armée vivait de lait fermenté. En 1206, toute la Mongolie était réunie sous sa bannière. En 1215, les Mongols avaient conquis le Turkistan, l’Afghanistan, et une grande partie de la Chine. On dit, dans ces écrits, que ce sont les chevaux qui ont gardé les Mongols en bonne santé et leur ont permis d’être victorieux. Mais il faut savoir que non seulement leurs petits chevaux leur permettaient d’être particulièrement mobiles et agiles, mais aussi les juments leur fournissaient un lait riche qu’ils savaient faire fermenter et que l’on connaît encore sous le nom de Kumiss que tous les guerriers consommaient, depuis Genghis Khan jusqu’au plus humble soldat, d’autant plus que ce produit renferme une quantité non négligeable d’alcool : 6 g/l dans le produit frais pouvant aller jusqu’à 24 g/l après 96 heures de conservation [11]. À l’occasion de la découverte sur un marché forain d’une bouteille de Kumiss provenant d’une fabrication française 2S11

introduction de la fin du XIXe siècle, une publication récente [11] fait le point sur « le Kumiss hier et aujourd’hui ». Ses auteurs retracent l’historique suivant : « Le Kumiss, (ou encore koumis, koumiss, koumys, et même krumis) est consommé depuis des siècles par les populations d’origine turque d’Asie centrale en raison de ses propriétés nutritives et excitantes [12]. L’étymologie semble provenir du nom des Coumans, peuple nomade et guerrier dont l’origine remonte à la plus haute Antiquité, et qui venant des confins du Tibet et de la Boukharie, s’établit, entre la mer Caspienne et la mer Noire, sur les bords de la rivière Kouma. Vaincus par les Tatars, beaucoup de leurs coutumes (dont l’usage du Koumys) sont passées dans les mœurs de leurs envahisseurs. Dès le XIIIe siècle, Jean du Plan Carpin et Benoît de Pologne, légats du Pape Innocent IV chez les Tatars, (1245-1246), indiquent la place du lait de jument dans leur alimentation [13]. Guillaume de Rubroek, envoyé en 1253 par Saint-Louis auprès de Genghis Khan, donne dans ses relations de voyage une description détaillée du Koumys qu’il nomme « comos » et de sa fabrication [14]. Le Koumys est également signalé quelques années plus tard par Marco Polo [15]. Après les Coumans et les Tatars, l’usage du koumys s’est répandu chez d’autres groupes de race mongole, Kirghizes, Kalmouks, et Baschkirs [16] ainsi que chez la plupart des peuples nomades de l’Asie, même jusque dans l’extrême Nord chez les Tongouses, les Bouriates et les Yakoutes » Pour ceux que cela intéresse, la fabrication du Kumiss nous est relatée dans « tableau historique, politique et moderne de l’Empire ottoman » [17]. Une illustration de la célèbre amphore de Koumys de Certomlyk, unique en son genre, est publiée en page 31 dans un article de Kurmann [3]. « Elle a été trouvée à Certomlyk (à 20 km au nord-ouest de Nikopol près de la mer Noire) dans une chambre funéraire appartenant au peuple nomade des Scythes. Les Scythes étaient à la fois un peuple guerrier nomade et éleveur de bétail. Le lait et les produits laitiers jouaient un rôle important dans leur régime alimentaire. L’amphore a probablement été sculptée par un artiste grec et date du e IV siècle avant J.-C. Ses décorations argentées et dorées en relief, dans la partie supérieure montrent une scène de la vie journalière du peuple scythe, à savoir le soin apporté aux chevaux. Dans la partie basse, on peut voir quatre becs en forme de tête d’animaux. On trouve un filtre à l’intérieur de chaque bec ainsi qu’au niveau du col de l’amphore ». En 1298, Marco Polo écrivit que Genghis Khan gardait dans ses étables 10 000 chevaux pour produire le Kumiss nécessaire à son armée. Actuellement, 230 000 chevaux sont encore utilisés pour la production exclusive de Kumiss en Russie. La place des alcools provenant de laitage (Aïrag ou Aïran et Arkhi) pratiquement équivalents au Kumiss dans la société mongole est bien expliquée dans l’article écrit par Isabelle Blanquis, ethnologue de l’Université de Strasbourg, intitulé : « Les alcools de lait en Mongolie : Rites, croyances et lien social ». Cet article est accessible sur le site suivant : http://www.lemangeur-ocha.com Une autre variété de lait fermenté intéressante est le Kéfir. Dans la légende du Caucase, il est raconté que les « grains de Kéfir » furent un don de Mahomet au peuple orthodoxe. Mahomet leur apprit à se servir des grains pour 2S12

produire, à partir du lait, une boisson agréable acidulée et effervescente et, en même temps, il leur interdit de diffuser le secret de la préparation des grains à d’autres peuples ou de leur donner des grains sous peine de perdre leur « force magique ». Cette légende explique pourquoi les grains de Kéfir et leur mode de préparation ont été entourés de mystère pendant si longtemps, car ils étaient considérés comme une richesse familiale et/ou tribale et passaient de génération en génération sans diffuser ailleurs. C’est ainsi que pendant des siècles, les populations du nord du Caucase ont bénéficié de cette nourriture sans jamais la partager avec d’autres peuples. Cependant, certaines populations eurent vent de contes étranges qui circulaient à propos d’un breuvage doté de propriétés magiques. Marco Polo cite le nom de Kéfir dans les chroniques de ses voyages dans les pays de l’Est. Puis, pendant plusieurs siècles, le Kéfir fut oublié et laissé aux familles du Caucase jusqu’au jour où il fut fait état de l’activité de ce produit dans la « Maladie de poitrine » (autrement dit : la tuberculose) et dans les désordres gastro-intestinaux suite à des travaux médicaux publiés à la fin du XIXe siècle. Les médecins russes souhaitèrent pouvoir obtenir du Kéfir en quantité suffisante pour pouvoir traiter leurs patients. Mais il était extrêmement difficile de se procurer le produit. Il devenait donc important de se procurer les grains de kéfir pour envisager une production sinon industrielle, au moins suffisante pour traiter les tuberculeux. Pour cela, les médecins russes s’adressèrent aux frères Blandov qui possédaient la laiterie de Moscou et qui possédaient également d’autres établissements notamment une usine de fabrication de fromage à Kislovodsk afin qu’ils se procurent les fameux grains de Kéfir et qu’ils en assurent la fabrication industrielle. L’histoire des frères Blandov mérite d’être racontée. Nicolaï Blandov envoya une jeune et belle employée, Irina Sakharova, à la cour d’un prince caucasien local, Bek-Mirza Barchorov, avec comme instruction de charmer le prince, et de le persuader de lui donner quelques grains de Kéfir. Malheureusement, rien ne se passa comme prévu. Le prince craignant un châtiment pour avoir violé une loi religieuse, refusa de donner les « grains du prophète ». D’un autre côté, la jeune Irina lui plaisait bien et il ne voulait pas la perdre. Voyant qu’elle n’obtiendrait rien, Irina décida de repartir pour Kislovodsk. Mais au cours de son voyage de retour, elle fut kidnappée par les membres d’une tribu montagnarde et ramenée au prince. Comme il s’agissait d’une coutume locale de « voler » la mariée, la jeune Irina fut considérée comme la future épouse du prince. C’est une expédition audacieuse de sauvetage organisée par son employeur qui évita à Irina un mariage forcé. Le malheureux prince fut traîné devant le tsar qui exigea qu’il remette à Irina dix livres de grains de Kéfir pour la dédommager des insultes qu’elle avait endurées. Les grains de Kéfir furent donnés à l’usine de Moscou et, en septembre 1908, les premières bouteilles de Kéfir furent mises sur le marché. En 1973, Irina alors âgée de 85 ans, reçut une lettre du ministre de l’Industrie agroalimentaire d’Union soviétique pour la remercier d’avoir permis la production de Kéfir pour le peuple russe. À quoi correspondent les grains de Kéfir ? [18] « Les grains de Kéfir se présentent sous l’apparence de petites masses dures mamelonnées jaunâtres ou brunâtres dont la taille moyenne est celle d’une noisette. Ils sont constitués d’une flore complexe en état de latence Cah. Nutr. Diét., 42, Hors-série 2, 2007

probiotiques et santé et d’un polysaccharide spécifique (le Kéfiran) à base de glucose et galactose. Cette flore protégée par une gaine de caséine desséchée peut se conserver environ un an. Elle est toujours constituée de diverses espèces de bactéries lactiques (streptocoques, lactocoques, lactobacilles) et de levures appartenant notamment au genre Saccharomyces... Mis seuls dans du lait, ils donnent une boisson mousseuse acido-alcoolique. On conditionne le mélange dans des bouteilles fortement bouchées à 16-20 °C. La fermentation à 16-20 °C se poursuit pendant 1 à 4 jours selon que l’on désire une boisson plus ou moins acide gazeuse et alcoolisée. On distingue ainsi : – le Kéfir faible ou jeune qui est un liquide crémeux, très légèrement mousseux, de consistance homogène de saveur douce, peu acide et peu alcoolisé ; – le Kéfir moyen, crémeux, mousseux, avec un goût de crème acidifiée ; – le Kéfir fort, très aromatique, riche en CO2 et donc très mousseux, très acide et alcoolisé. En moyenne, l’acidité du Kéfir correspond à un pH compris entre 4,2 et 4,5 et le Kéfir fort peut contenir 2,5 % d’alcool ». Un document très intéressant concernant ce produit a été édité par Danone et comporte de nombreuses références [19]. Le Kéfir diffère du yaourt que l’on connaît par le fait qu’il referme du CO2 (il est effervescent), une petite quantité d’alcool et des substances aromatiques particulières [19].

Les laits fermentés en France Nous avons vu que les Romains connaissaient les laits fermentés suite aux nombreuses conquêtes qu’ils avaient faites dans les pays méditerranéens. Mais on ignore s’ils en étaient consommateurs et s’ils ont transmis cette habitude aux pays colonisés. En France, on connaît le lait ribot qui est dit être un lait fermenté gaulois (en réalité breton), mais dont on ignore l’origine. Le lait ribot, dont l’étymologie est la ribote, nom primitif de la baratte, est à l’origine le résidu de la fabrication du beurre ou babeurre. Hier, aliment des pauvres, le lait ribot ou lait fermenté est aujourd’hui élaboré industriellement à partir de lait écrémé. Son goût est aigrelet, et il est très utilisé en Bretagne pour accompagner ou participer à la confection de nombreux plats. Liliane Plouvier, dans son livre « L’Europe se met à table » [20], cite l’existence de laits fermentés chez les Mérovingiens appelés « Melca et Oxygala ». L’oxygala est d’origine grecque et, selon Pline, l’oxygala comme la melca était simplement la partie caillée du lait à laquelle on ajoutait un peu de sel, ou encore un peu de lait aigre qu’on ajoutait au lait récent pour le faire aigrir. Il contient Lactococcus, Lactobacilus, Leuconostoc et Enterrococcus. La Grèce produit traditionnellement des laits fermentés connus depuis l’Antiquité (hygiartos des anciens grecs) : le yaourt égoutté (strangismeno yaourti-tzatziki), le lait fermenté par des levains non spécifiques (xynogalo ou oxygala), enfin, les trahana doux ou acides (amitas, trahanas, hondron, traganon). En 1542, François Ier étant tombé malade sans que ses médecins parviennent à le guérir, l’ambassadeur de France auprès du Sublime dépêche auprès de son roi un médecin juif de Constantinople qui, en administrant à ses patients des doses de fromage de brebis préparé selon Cah. Nutr. Diét., 42, Hors-série 2, 2007

une méthode mystérieuse, faisait des miracles. Le fait est qu’il guérit François Ier, mais refusa de livrer son secret de préparation. Il faut ensuite attendre presque 400 ans et la naissance de la microbiologie avant de retrouver trace de ces aliments laitiers autres que les fromages dont la fabrication et la commercialisation se sont, entre-temps, beaucoup développés en France souvent par l’intermédiaire des moines et il y a là toute une autre histoire à raconter. Dans le sillage des découvertes de Pasteur sur la fermentation, nombreux sont les chercheurs qui s’attachent à isoler les micro-organismes du lait fermenté. En 1902, deux médecins français, Rist et Khoury, isolent pour la première fois les bactéries présentes dans le leban égyptien. À Genève, un certain Grigoroff, travaille sur du « yahourth » provenant d’une région turque de Bulgarie réputée pour la longévité de ses habitants. Élie Metchnikoff, élève de Pasteur, reçoit ces échantillons à Paris, les fait analyser et isole, en 1904, la bactérie spécifique du yaourt, le « bacille bulgare » (Lactobacillus bulgaricus), excellent producteur d’acide lactique, associée, pour des raisons de goût, à un autre micro-organisme, Streptococcus thermophilus. Il sera lauréat du prix Nobel de médecine en 1908. Les deux ferments traditionnels du yaourt sont alors mis en évidence et cultivés. Ce sont ces mêmes ferments qui garantissent aujourd’hui qu’un lait fermenté est bien un yaourt. À ce savant d’origine russe revient ainsi le double mérite d’avoir analysé l’action acidifiante du lait caillé, et suggéré une méthode de production sûre et régulière. En 1912, un jeune commerçant du nom de Charles de Raymond écrit un article dans un magazine édité par la Chambre de commerce de France à Istanbul : « les Turcs fabriquent du lait caillé fermenté et le consomment par kilos. On le trouve sur toutes les tables et à tous les repas. Il est utilisé dans la cuisine, il sert de remède, stimule les capacités sexuelles et facilite la digestion. Les Turcs le mangent nature ou salé, mais je le préfère sucré... ». Il explique aussi le mode de fabrication du yaourt en donnant des détails. En 1917, à Barcelone, Isaac Carasso décide de produire du yaourt selon des procédés industriels et lance la marque « Danone ». Celui-ci est vendu exclusivement en pharmacie ; les médecins le prescrivent en effet pour soigner les problèmes intestinaux des bébés. L’ère industrielle du yaourt est commencée et, en 1929, son fils Daniel (d’où vient le nom de Danone) lance le produit en France. On sait aujourd’hui comment cette entreprise a su prospérer.

Les vertus du yaourt... On ne peut pas terminer cet article sans parler des bienfaits que l’on peut retirer de la consommation de ces produits, surtout quand on se rappelle que depuis toujours, on a attribué des vertus de longévité au yaourt... Le yaourt est alors le symbole de vie éternelle. Cette idée est perpétuée dans plusieurs civilisations. Au cours des siècles, de nouvelles hypothèses viennent enrichir la légende. Élie Metchnikoff aurait remarqué que les montagnards du Caucase, grands amateurs de lait caillé, vivaient plus longtemps que les autres. En réalité, la longévité de ces populations centenaires aurait plutôt acquis sa réputation grâce à l’absence d’état civil ! 2S13

introduction Néanmoins, le mythe du centenaire bulgare fait son chemin. En 1904, Metchnikoff persiste et signe : il suggère de vaincre la vieillesse qu’il décrit comme « l’un des plus grands malheurs de l’humanité » en poursuivant ses recherches sur les laits fermentés. La question de la longévité le mobilisera jusqu’à la fin de sa vie. Sa recherche et ses travaux seront à l’origine de la création d’une toute nouvelle discipline : la gérontologie. Quoi qu’il en soit, le yaourt est toujours et doit rester un aliment sain qui apporte à l’organisme de nombreux bénéfices et je terminerai ce mémoire en citant une phrase tirée du « Voyage de Sparte » de Maurice Barrès : « Je vais manger ce soir un excellent yoghourt, cadeau d’Arméniens que nous avons réussi à placer en ville comme restaurateurs. Quand remangerons-nous ensemble de toutes ces bonnes choses ? ».

Résumé L’histoire des laits fermentés est étroitement liée à la consommation du lait et à sa conservation. Elle est également liée au nomadisme et aux habitudes alimentaires des différentes régions du monde. Les produits eux-mêmes sont très différents d’un pays à l’autre et en dehors des produits classiques, proches de ceux que nous consommons, on peut trouver des produits pétillants, très acides ou encore plus ou moins alcoolisés. Si, dans certains pays, on trouve des produits « régionaux », car fabriqués à partir de laits provenant d’animaux localement présents, car économiquement importants (jument, chamelle, bufflesse, yak, zébu...), dans la plupart des autres pays, c’est à partir du lait de vache que sont préparés ces produits fermentés. La nature des ferments diffère également d’un produit à un autre, car dépendant de la manière dont les premiers produits ont été préparés. Enfin, la notion « santé » de ces produits est très ancienne. Elle est liée à la consommation du Kéfir par les habitants du Caucase et à celle du Kumiss par les armées de Genghis Khan. Mots-clés : Laits fermentés – Historique.

Abstract The history of fermented milk products is closely related to milk consumption and storage. It is also linked to nomadism and dietary habits in different parts of the world. The products themselves vary widely from country to country and apart from traditional products similar to those that we consume, there are sparkling products, very acidic products or even products which are more or less alcoholic. In some countries there are “regional” products as they are made from products available locally as the animals are economically important (horses, camels, buffalo, yak and zebu). In most other countries, these fermented products are made of cows’milk. The type of ferments also differ

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from one product to the next as it depends on how the original products were prepared. Finally the health notion surrounding these products is very old. It is linked to Kefir consumption by inhabitants of Caucasia and Kumiss consumption by Genghis Khan’s armies. Key-words: Fermented milks – History.

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Cah. Nutr. Diét., 42, Hors-série 2, 2007