Identification des patientes ostéoporotiques par analyse ultrasonore osseuse avec ou sans imagerie

Identification des patientes ostéoporotiques par analyse ultrasonore osseuse avec ou sans imagerie

Revue du Rhumatisme 71 (2004) 801–806 www.elsevier.com/locate/revrhu Article original Identification des patientes ostéoporotiques par analyse ultra...

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Revue du Rhumatisme 71 (2004) 801–806 www.elsevier.com/locate/revrhu

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Identification des patientes ostéoporotiques par analyse ultrasonore osseuse avec ou sans imagerie Discrimination of osteoporotic patients with quantitative ultrasound using imaging or non-imaging device ◊ Géraldine Falgarone a,b, Raphaël Porcher c, Agnès Duché a, Sami Kolta a, Maxime Dougados a, Christian Roux a,* a

Centre d’évaluation des maladies osseuses, institut de rhumatologie, hôpital Cochin, université René-Descartes, 27, rue du Faubourg-Saint-Jacques, 75014 Paris, France b Service de rhumatologie, hôpital Avicenne, UPRES EA-3408, université Paris-Nord, Bobigny, France c Département de biostatistiques et informatique médicale et INSERM-U444, hôpital Saint-Louis, Paris, France Reçu le 28 avril 2003 ; accepté le 8 septembre 2003 Disponible sur internet le 15 janvier 2004

Résumé Objectifs : La mesure quantitative par ultrasons (QUS) s’est révélée un nouvel outil pour l’évaluation du risque fracturaire. Le but de cette étude était de comparer la pertinence clinique des paramètres QUS mesurés par un appareil réalisant une imagerie et un appareil sans imagerie dans l’identification des patientes ostéoporotiques. Méthodes : Nous avons mesuré les paramètres QUS suivants : BUA (dB/MHz) et SOS (m/s). Résultats : Les 106 femmes incluses dans cette étude étaient âgées de 65 ± 8 ans. Utilisant l’absorptiométrie biphotonique (DXA) le T score était ≤ –2,5 au rachis lombaire ou à la hanche chez 59 % des patientes, et 25 % avaient des fractures ostéoporotiques. Les résultats QUS différaient entre appareils et ces différences dépendaient largement de la valeur mesurée. Il y avait un effet similaire de l’âge et de la durée de la ménopause pour tous les paramètres. Pour obtenir une sensibilité de 90 % pour le diagnostic d’ostéoporose, les seuils étaient 50,80 et 71,70 dB/MHz pour le BUA et 1544,80 et 1551,50 m/s pour le SOS, en utilisant l’appareil réalisant une imagerie et l’appareil sans imagerie respectivement. Appartenir au tertile supérieur des valeurs QUS avait une valeur prédictive négative pour l’ostéoporose allant de 59 à 65 %. Dans le tertile inférieur des valeurs QUS, la proportion des femmes ostéoporotiques était entre 73 et 80 %. Tous les paramètres QUS, sauf le BUA mesuré par l’appareil sans imagerie, après ajustement pour l’âge et la DMO de la hanche, étaient capables de distinguer les femmes ménopausées ayant des fractures. Conclusions : Nos données suggèrent qu’un système doté d’imagerie augmente l’utilité des mesures de BUA, mais pas de SOS, pour l’évaluation de l’ostéoporose chez les femmes ménopausées. © 2003 Elsevier SAS. Tous droits réservés. Abstract Objectives: Quantitative ultrasound (QUS) has emerged as a new tool in the assessment of fracture risk. The aim of this study was to compare the clinical utility of QUS parameters measured using an imaging and a non-imaging devices in the discrimination of osteoporotic patients. Methods: QUS (Broadband Ultrasound Attenuation, BUA dB/MHz, and Speed of Sound, SOS m/s) were measured and then statistical analyses were performed. Results: The 106 women included were aged 65 ± 8 years. Using DXA, T score was ≤–2.5 at either lumbar spine or hip in 59% of patients, and 25% had osteoporotic fractures. QUS results were different among devices, and these differences were highly dependent on the measured

* Auteur correspondant. Adresse e-mail : [email protected] (C. Roux). ◊ Pour citer cet article, utiliser ce titre en anglais et sa référence dans le même volume de Joint Bone Spine. © 2003 Elsevier SAS. Tous droits réservés. doi:10.1016/j.rhum.2003.09.019

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value. There was a similar effect of age and duration of menopause for all parameters. To obtain 90% of sensitivity for the diagnosis of osteoporosis, the thresholds were 50.80 and 71.70 dB/MHz for BUA and 1544.80 and 1551.50 m/s for SOS, using imaging and non-imaging devices, respectively. Belonging to the highest tertile of QUS had a negative predictive value for osteoporosis ranging from 59% to 65%. In the lowest tertile of QUS, the proportion of osteoporotic women was between 73% and 80%. All QUS parameters, except BUA measured with the non-imaging device, were able to discriminate post menopausal women with fractures after adjustment for age and hip BMD. Conclusions: Our data suggest that an imaging system improves the utility of BUA measurement, but not SOS, for post menopausal osteoporosis assessment. © 2003 Elsevier SAS. Tous droits réservés. Mots clés : Analyse ultasonore osseuse ; Ostéoporose post ménopausique ; Densitométrie ; Fractures ostéporotiques Keywords: Quantitative ultrasound; Post menopausal osteoporosis; Densitometry; Osteoporotic fractures

1. Introduction La mesure quantitative par ultrasons a été étudiée pour l’évaluation du risque de fracture en utilisant de petits appareils portables à faible coût [1,2]. Des études prospectives [3–9] ont montré un gradient de risque entre la baisse des paramètres ultrasonores (QUS) au calcanéus et l’augmentation de l’incidence des fractures ostéoporotiques. Les patientes ostéoporotiques ont des valeurs QUS plus basses que les sujets témoins malgré une grand chevauchement des valeurs [10–13]. La plupart des études ont été effectuées au calcanéus en utilisant des appareils avec un transducteur dont la position est fixe par rapport à la plateforme. Chez les individus, les différents appareils QUS donnent des valeurs absolues différentes parce que leur calcul des paramètres et leur conception sont différents [14]. Les différences de taille et de forme du calcanéus entre les individus peuvent également conduire à des différences de surface de l’os mesuré [15]. Cet os est principalement trabéculaire mais il est hétérogène dans sa structure et dans ses propriétés acoustiques [16–18]. Donc, les différences de site de mesure expliquent en partie les différences de résultats. La technique de mesure quantitative par ultrasons avec imagerie a été développée afin d’éviter ce problème ; avec cette approche la région à mesurer peut être soigneusement choisie et identique entre individus [19]. Il a été suggéré que la mesure quantitative par ultrasons avec imagerie peut améliorer la précision et la valeur diagnostique des mesures [15,20]. Le but de cette étude était de comparer l’intérêt clinique d’un appareil effectuant une mesure quantitative par ultrasons doté d’imagerie à celle d’un appareil sans imagerie pour l’évaluation de l’ostéoporose postménopausique.

Tableau 1 Caractéristiques de la population ˆ ge (années) A Années depuis la ménopause Poids (kg) Taille (cm) DMO (g/cm2) Rachis lombaire Hanche T Score Rachis lombaire Hanche BUA (dB/MHz) DTU-one Sahara SOS (m/s) DTU-one Sahara

Moyenne ± ET 65,4 ± 8,5 16,4 ± 9,9 58,9 ± 9,3 157 ± 7

Min 47 0 41 145

Max 85 41 88 175

0,822 ± 0,159 0,763 ± 0,128

0,561 0,388

1,330 1,017

–2,33 ± 1,34 –2,04 ± 1,08

–4,57 –4,90

1,64 0,17

44,5 ± 7,42 56,84 ± 16,09

26,24 25,80

62,66 100,50

1536,68 ± 9,84 1511,52 1524,39 ± 29,92 1473,60

1556,22 1621,60

anti-ostéoporotique et les antécédents de fracture. Il s’agissait de patientes consécutives mais les patientes atteintes d’un cancer ou d’une endocrinopathie, et les patientes ayant des œdèmes ou d’anciennes fractures du calcanéus ont été exclues de l’étude. Tous les sujets ont donné un consentement oral et informé. Les caractéristiques des patientes sont présentées dans le Tableau 1 ; 62 patientes (59 %) avaient une ostéoporose, définie par un T score ≤ –2,5 au rachis lombaire ou à la hanche. Vingt-six patientes avaient des antécédents fracturaires (11 aux vertèbres, 1 à la hanche, 10 au radius, 3 multiples, 1 autre), et 47 suivaient un traitement hormonal substitutif ou prenaient un bisphosphonate au moment des mesures. 2.2. Techniques de mesure

2. Patients et méthodes 2.1. Sujets Un total de 106 femmes ménopausées adressées à notre service de rhumatologie pour l’évaluation de la densité osseuse constituent la base de cette étude. Les données recueillies pendant la visite comprenaient l’âge, le nombre d’années de ménopause, la taille, le poids, le traitement

Les mesures quantitatives par ultrasons ont été effectuées au calcanéus droit avec deux appareils. Les paramètres QUS calculés automatiquement par les deux appareils étaient l’atténuation d’ultrasons à large bande (BUA, dB/MHz), la vitesse de propagation du son (SOS, m/s). L’appareil DTU-one (Osteometer, Rodovre, Danemark) utilise deux transducteurs focalisés de chaque côté d’un bain d’eau qui contient un surfactant pour disperser l’air. Une image paramétrique de

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BUA est obtenue par balayage. La durée totale d’acquisition est de trois minutes. Ensuite, la surface mesurée est contrôlée avant de calculer les paramètres QUS dans une zone avec une atténuation locale minimum, au niveau de la tubérosité postérieure du calcanéus. La température ambiante et celle de l’eau ont été vérifiées avant de prendre des mesures afin de s’assurer que le logiciel de l’appareil était adapté à ces températures. Le deuxième appareil était un Sahara (Hologic, Bedford, MA, États-Unis) utilisant des transducteurs non focalisés montés coaxialement sur un étrier motorisé. Les transducteurs sont appliqués à la peau avec un gel de couplage. La durée d’acquisition est d’une minute. La cheville est maintenue à un angle de flexion de 90° par un dispositif en plastique pour que les mesures soient effectuées au bon endroit. Cet appareil mesure le BUA et le SOS sur une zone d’intérêt fixe. La mesure d’un fantôme approprié a été réalisée avant d’utiliser chaque appareil. La précision in vivo a été estimée d’après des mesures dupliquées avec repositionnement chez 50 patientes ; le coefficient de variation était de 2,03 et 8,17 % pour le BUA sur DTU-one et Sahara, et de 0,08 et 0,27 % pour le SOS sur ces deux appareils respectivement. Il n’y a pas eu d’ordre prédéterminé pour les mesures prises par ces deux appareils. La densité minérale osseuse a été mesurée par absorptiométrie biphotonique (DXA) utilisant un appareil QDR 4500 (Hologic, Bedford, MA, ÉtatsUnis) au rachis lombaire et à la hanche totale. 2.3. Méthodes statistiques Une analyse de régression linéaire a été effectuée pour examiner le rapport entre des paramètres QUS et l’âge, le nombre d’années depuis la ménopause et les valeurs de DMO. Les comparaisons des variances des mesures QUS par paires ont été faites par des tests de rapport de probabilité de modèle Gaussien bivarié. Les valeurs QUS obtenues par les deux appareils (BUA et SOS) ont été comparées en utilisant l’analyse de régression linéaire et la méthode de Bland et Altman [21]. Bien que le coefficient de corrélation de Pearson, ou la régression linéaire, ne soient pas appropriés pour comparer deux méthodes de mesure [22], nous rapportons de telles analyses afin de permettre la comparaison des résultats avec des données publiées préalablement. L’approche graphique de Bland et Altman a été employée pour comparer les deux appareils. Cette méthode étudie la différence entre des paires de mesures (une venant de chaque appareil) tracées point par point en fonction de la moyenne des deux résultats. L’ostéoporose a été définie par un T score ≤ –2,5 au rachis lombaire ou à la hanche [23]. Nous avons calculé pour chaque QUS le seuil indiquant une sensibilité de mesure à 90 %. Le test de Mc Nemar a été utilisé pour comparer la spécificité à cette sensibilité fixe entre appareils. Les valeurs discriminantes de BUA et SOS pour des patientes ostéoporotiques et pour des patientes ayant des fractures ont été évaluées en regardant la surface en dessous de la courbe ROC (receiver operating characteristic). Les surfaces en dessous de la courbe ont été comparées selon Delong et al. [24]. La

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régression logistique a été utilisée pour estimer les rapports de probabilité, après ajustement pour l’âge, et pour l’âge et la DMO de la hanche. Enfin, nous avons divisé les résultats QUS en tertiles et estimé la valeur prédictive des tertiles inférieur et supérieur pour l’ostéoporose. L’accord entre appareils selon la classification des patientes du même tertile QUS a été évalué par la mesure du coefficient kappa. 3. Résultats Les valeurs de base des paramètres QUS sont données dans le Tableau 1. Les variances sont différentes pour les deux paramètres (p < 10–8). Les équations des modèles de régression linéaire entre les deux appareils sont : BUA (Sahara) = 1,62 BUA (DTU-one) – 15,74 (R2 = 0,56), et SOS (Sahara) = 2,24 SOS (DTU-one) – 1918,16 (R2 = 0,55). Selon la méthode de Bland et Altman, les différences des résultats QUS entre appareils dépendent largement de la valeur mesurée, pour le BUA ainsi que pour le SOS, qui est donné comme exemple (Fig. 1). Nous avons observé de plus grands écart et variance pour les paramètres QUS mesurés par Sahara que pour ceux mesurés par DTU-one, ce qui nous incite à ne pas comparer les performances techniques. Il y a une baisse liée à l’âge des paramètres QUS : r = – 0,28, p = 0,005, et r = –0,25, p = 0,01 pour BUA utilisant DTU-one et Sahara respectivement, et r = –0,21, p = 0,03, et r = –0,30, p = 0,002 pour le SOS. Des résultats similaires sont obtenus pour l’effet de la durée de la ménopause (données non rapportées), sauf pour le BUA mesuré par Sahara (p = 0,16). Les corrélations entre les paramètres QUS et DMO se trouvent dans le Tableau 2. Bien que faibles, toutes sont statistiquement significatives et légèrement plus pour le BUA mesuré par DTU-one que pour les autres paramètres QUS. Afin d’obtenir une sensibilité de 90 % pour le diagnostic d’ostéoporose (T-score ≤ –2,5 au rachis lombaire ou à la

Fig. 1. Graphique de Bland et Altman : différence entre les résultats QUS (SOS) obtenus par les deux appareils (Sahara, DTU-one) en fonction de la moyenne de ces mêmes résultats. La ligne continue représente la différence moyenne et la ligne discontinue représente les limites de l’accord, définies comme la différence moyenne ± 2 ET.

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Tableau 2 Coefficients de corrélation (r) entre DMO et QUS avec un IC (intervalle de confiance) de 95 % BUA DTU-one 0,40 a (0,23–0,55) 0,45 a (0,28–0,59) 0,46 a (0,29–0,60)

DMO Rachis lombaire Col fémoral Hanche totale a b

SOS DTU-one 0,33 a (0,15–0,49) 0,28b (0,09–0,45) 0,30b (0,11–0,46)

Sahara 0,34 a (0,16–0,50) 0,35 a (0,17–0,51) 0,41 a (0,24–0,56)

Sahara 0,37 a (0,19–0,52) 0,33 a (0,15–0,49) 0,42 a (0,25–0,57)

p < 0,001. p < 0,01.

hanche) les seuils sont de 50,80 et 71,70 dB/MHz pour le BUA, et 1544,80 et 1551,50 m/s pour le SOS, utilisant les appareils DTU-one et Sahara respectivement. Avec une telle sensibilité, les spécificités sont de 35,7 vs 28,6 % (p = 0,10) pour le BUA utilisant DTU-one et Sahara, et 40,5 vs 28,6 % (p = 0,058) pour le SOS. La capacité discriminante de QUS et des mesures DMO au rachis lombaire est rapportée dans le Tableau 3 pour les patientes atteintes d’ostéoporose. Parmi les paramètres QUS, les meilleurs valeurs numériques sont obtenues pour le BUA mesuré par DTU-one et le SOS mesuré par Sahara. La capacité discriminante des ultrasons pour les fractures est décrite dans le Tableau 4. Même après ajustement pour l’âge et la DMO à la hanche, les paramètres QUS (sauf le BUA mesuré par Sahara) demeurent discriminants. La surface sous les courbes ROC n’est pas significativement différente. L’accord entre les appareils pour une classification dans le même tertile est de 0,56 pour le BUA et 0,68 pour le SOS (scores kappa). Une mauvaise classification flagrante est observée chez trois patientes avec le BUA (qui étaient dans le tertile le plus élevé pour Sahara et le plus bas pour DTU-one) et chez une patiente pour le SOS. Appartenir au tertile supérieur des valeurs QUS a une valeur prédictive négative pour Tableau 3 Capacité discriminante de l’analyse ultrasonore osseuse et de la DMO pour le diagnostic d’ostéoporose (T score ≤ –2,5 au rachis lombaire ou à la hanche)

DTU-one Sahara

Ajusté pour l’âge SDC (%) RP (95 % IC) 71,2 2,16 (1,34–3,45) 70,3 2,04 (1,26–3,13) 69,7 1,82 (1,16–2,85) 73,5 2,51 (1,45–4,33)

BUA SOS BUA SOS

p 0,0012 0,0039 0,0087 0,0010

SDC (surfaces en dessous de la courbe) sont exprimées en pourcentages. Les odds ratio sont donnés avec IC (intervalle de confiance) de 95 %.

l’ostéoporose (définie par un T-score ≤ –2,5 au rachis lombaire ou à la hanche) de 64,7 % pour le BUA et le SOS mesurés par DTU-one, et de 58,8 et 64,7 % pour les mêmes paramètres mesurés par Sahara. En revanche, la proportion de femmes ostéoporotiques dans le tertile inférieur de QUS va de 73,5 % (BUA et SOS sur DTU-one) à 79,4 % (SOS Sahara).

4. Discussion Ces données confirment que les paramètres QUS sont capables de distinguer les femmes ménopausées ostéoporotiques des sujets témoins. Les différents appareils donnent des valeurs différentes pour une patiente donnée et la valeur discriminante varie selon les paramètres mesurés et les appareils de technologie différente. La diversité est une caractéristique de la technologie par ultrasons. Les modes d’acquisition des données et d’analyse varient beaucoup entre instruments et cela doit être considéré avant toute comparaison directe de résultats [25,26]. L’emplacement de la région à mesurer est l’un des facteurs qui agissent sur la valeur du paramètre QUS [27]. Nous avons démontré [15] qu’avec les transducteurs fixes des régions différentes du calcanéus sont mesurées selon les individus, comprenant parfois les corticales, ce qui entraîne une dispersion des résultats. La taille et la longueur du pied ont un effet considérable sur les résultats QUS et la zone d’intérêt devrait être adaptée selon la taille du pied [17]. La valeur discriminante de la mesure, évaluée par la surface située en dessous de la courbe ROC, est plus fiable avec une région d’intérêt variable plutôt qu’avec une région fixe [19]. Dans la technologie de l’appareil DTU-one, la région d’intérêt est calculée comme étant celle ayant l’atténuation la plus basse. Un exposé des grandes lignes de l’effet de l’hétérogénéité spa-

Tableau 4 Capacité discriminante de l’analyse ultrasonore osseuse pour les fractures ostéoporotiques SDC (%) DTU-one BUA SOS Sahara BUA SOS

RP Ajusté pour l’âge

p

RP Ajusté pour l’âge et DMO de la hanche

p

77,4 74,0

2,79 (1,47–5,30) 2,33 (1,34–4,05)

0,0017 0,028

2,49 (1,28–4,83) 2,09 (1,19–3,70)

0,0072 0,011

65,5 74,2

1,58 (0,90–2,75) 2,28 (1,19–4,39)

0,11 0,013

1,43 (0,79–2,56) 2,02 (1,03–3,98)

0,24 0,041

SDC (surfaces en dessous de la courbe) exprimées en pourcentages. Les odds ratio sont donnés avec IC (intervalle de confiance) de 95 %.

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tiale du calcanéus a déjà été fait. La DMO mesurée par DXA est sensiblement plus basse sur la partie antérieure du calcanéus. En revanche, les résultats pour les parties postérieures et médianes chez les femmes ménopausées varient de moins de 7 % [28]. En utilisant la technologie de l’imagerie par résonance magnétique, Lin et al. ont trouvé jusqu’à 40 % de variation de structure entre les parties du calcanéus [18]. Cependant les différences des paramètres de structure, évaluées par IRM, entre patientes ostéoporotiques et nonostéoporotiques sont similaires dans les différentes zones du calcanéus [29]. Les différences entre transducteurs (focalisés ou non focalisés) et de la distance entre transducteurs (mesures de contact ou en immersion) peuvent avoir un effet sur la diffraction et entraîner des différences entre les valeurs mesurées [30,31]. Un intérêt potentiel des transducteurs focalisés est d’avoir un faisceau ultrasonore plus étroit et d’ainsi réduire le phénomène d’annulation de phase observé avec des grands transducteurs non focalisés. In vitro, des résultats QUS obtenus par des appareils ayant de larges ouvertures de réception ne sont pas sérieusement affectés par l’annulation de phase, la moyenne ou la dispersion [32]. Nous avons observé que les différences entre les deux appareils dépendaient des valeurs mesurées : une déviation a été observée sur la courbe Bland et Altman pour le BUA et le SOS. L’annulation de phase peut varier selon les caractéristiques de l’os (paramètres densité et de structure). Dans les appareils fonctionnant dans l’eau comme le DTU-one, les paramètres QUS sont mesurés en supposant que tous les sujets ont la même largeur de talon, contrairement aux systèmes à sec. Cette largeur de talon supposée diffère d’un système à immersion à l’autre. Pour le Sahara, la vélocité du talon est mesurée de peau à peau, ce qui représente la vraie largeur du talon. Ces différences ont un effet significatif sur les résultats de propagation [33]. Des différences dans l’algorithme qui mesure le BUA peuvent également être anticipées et les détails sur la largeur de bande de fréquence utilisée pour le calcul font toujours l’objet d’une confidentialité industrielle. De plus, pour une zone anatomique donnée et un paramètre mesuré, les appareils ne sont pas en accord sur la définition des paramètres. Donc, la valeur moyenne du paramètre et la variation biologique ne sont pas les mêmes. Nous avons observé que la variation biologique (variance) du BUA obtenu par les deux appareils est différente. Il est possible que le résultat donné soit dérivé de la vraie valeur, c’est-à-dire après une transformation linéaire pour diminuer la variance et améliorer la précision. Les coefficients de corrélation entre les paramètres QUS et DMO sont modérés [34,35]. Plusieurs raisons peuvent expliquer ces résultats, principalement la différence des sites mesurés. Des erreurs de précision et d’exactitude propres à ces différentes techniques y contribuent également. Dans notre étude, humidifier le talon pour la prise des mesures avec DTU-one a pu affecter les mesures Sahara ultérieures [14]. Les mesures QUS (sauf BUA pour le Sahara) étaient capable d’identifier des femmes ménopausées ayant des frac-

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tures. La petite taille de notre échantillon limite notre possibilité de détecter des différences de valeur discriminante entre les deux appareils. Les OR ajustés pour l’âge étaient entre 2,28 et 2,79 ; ces données sont très comparables aux résultats des études prospectives utilisant l’analyse ultrasonore osseuse [5], bien que le nombre de sujets traités dans notre population empêche une comparaison rigoureuse. D’une manière intéressante, les OR demeurent très significatifs après ajustement pour la DMO de la hanche (Tableau 4). Ce résultat indique que les deux zones osseuses peuvent révéler des informations complémentaires sur le statut de l’os. Que les paramètres QUS fournissent des informations différentes sur le statut de l’os indépendamment de la densité osseuse est un point fortement débattu ; en utilisant une comparaison directe des paramètres de la même région d’intérêt du calcanéus, il ressort que les paramètres ultrasonores sont essentiellement expliquées par la DMO [36]. Il est nécessaire de faire des études complémentaires pour savoir si la combinaison des mesures faites à la hanche ou au calcanéus conduit à un meilleur diagnostic qu’une seule des deux mesures. Les scores kappa indiquent que l’accord pour la classification des patientes en tertiles à partir des valeurs ultrasonores est moyen. Une mauvaise classification flagrante a été observée chez moins de 1 % des patientes pour le SOS. Ce résultat illustre la comparaison des machines par la méthode de Bland et Altman. Quel que soit l’appareil, appartenir au tertile supérieur avait une valeur prédictive négative modérée pour l’ostéoporose. En revanche, 73 à 80 % des femmes ostéoporotiques avait des résultats ultrasonores dans le tertile inférieur. Ces données suggèrent que dans une population avec une incidence élevée d’ostéoporose, les patientes ayant des valeurs QUS élevées ne peuvent pas être exemptées d’autres examens. Des conclusions différentes pourraient être tirées d’études de population. En conclusion, un système d’imagerie améliore l’utilité des mesures de BUA mais pas de SOS pour la distinction des femmes ménopausées ayant des fractures. Nos résultats ne s’appliquent qu’aux deux appareils étudiés qui ne sont pas forcément représentatifs des autres appareils QUS avec ou sans imagerie.

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