Jules Dejerine, André-Thomas et la pathologie du cervelet

Jules Dejerine, André-Thomas et la pathologie du cervelet

S18 revue neurologique ( 2 0 1 7 ) S1–S31 findings, Dejerine can be viewed as a pioneer in showing, for example, that nerve damage in “neuritis” dec...

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revue neurologique

( 2 0 1 7 ) S1–S31

findings, Dejerine can be viewed as a pioneer in showing, for example, that nerve damage in “neuritis” decreased towards the limb roots (later identified as a length-dependant retrograde degeneration (of the axons) described in English as a “lengthdependantdying back” process); he identified and defined what he called “hypertrophic and progressive interstitial neuritis of childhood”, now called Dejerine-Sottas syndrome. In addition, Dejerine (in collaboration with distinguished workers including his wife Augusta Dejerine-Klumpke, Sottas, André-Thomas, and numerous others) described cases of peripheral nervous system involvement that helped define known entities such as compression paralysis, toxic and infectious peripheral neuritis, several observations of “hypertrophic interstitial neuritis”, a case of “rheumatic facial palsy” (or “a frigore” facial palsy), etc. His publications and presentations are collected chronologically and summarized in the interesting “Epreuves de Titres and Travaux” published in 1895 and 1901. Our presentation will recap and discuss the characteristics of what is now called Dejerine-Sottas syndrome (hypertrophic interstitial neuritis), and its links with Charcot-Marie-Tooth (CMT) disease, which strangely was refuted by Dejerine himself, and of its significance and relevance to the current classification of hereditary neuropathies in the molecular biological age. In addition, the electron microscopic studies of Gruner (1960) and Garcin and colleagues (1966) demonstrated that the homogeneous nervous hypertrophy of this condition is more related to a swirling Schwann cell proliferation, referred to as “onion bulbs” around the remaining axons, rather than a simple and marked increase in interstitial connective tissue. The opus of Dejerine in determining, defining, and identifying peripheral nerve diseases along with the force of his clinical and neuropathologic descriptions illustrates the importance of clini-

Figure 1 A. Fourth right lumbar root between the spinal cord and the ganglia. (Dejerine et Thomas, Nouvelle iconographie de La Salpêtrière, 1906, T XIX. B. Electron microscopy. Transverse section of a sural nerve biopsy from a CharcotMarie-Tooth patient. Around myelinated fibers (one is hypomyelinated), there are numerous « onion bulbs » due to the concentric proliferations of abnormally flattened Schwann cell cytoplasms.

cal and pathological correlations. They have been subsequently confirmed and better defined using recent light and electron microscopic techniques.

Disclosure of interest The authors declare that they have no competing interest. Further reading Fardeau M. L’œuvre de Jules Dejerine dans les maladies neuromusculaires. Les Cahiers de Myologie 2010;3:5–10. Dejerine J, Sottas J. Sur la névrite interstitielle hypertrophique et progressive de l’enfant. Comptes Rendus des séances de la Société de Biologie et de ses filiales 1893;5(9):63–96. Dejerine J, Sottas J. Sur la névrite interstitielle hypertrophique et progressive de l’enfance (2e observation suivie d’autopsie), La Nouvelle Iconographie de la Salpêtrière 1906;9(6):477–509. Dejerine J, Goetz T. Note sur un cas de paralysie ascendante, Archives de Physiologie normale et pathologique 1879;3:312–17. 夽 Meeting abstract Jules Dejerine: Bilingual publication (English version).

http://dx.doi.org/10.1016/j.neurol.2016.12.018 CO09-f

Jules Dejerine, André-Thomas et la pathologie du cervelet夽 Emmanuel Broussolle a,b,c a Service de neurologie C, hôpital neurologique Pierre-Wertheimer, hospices civils de Lyon, 59, boulevard Pinel, 69677 Bron, France b Centre de neurosciences cognitive, CNRS UMR5229, Bron, France

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Faculté de médecine Lyon-Sud Charles-Mérieux, université Claude-Bernard Lyon 1, Pierre-Bénite, France Adresse e-mail : [email protected]

ci est insuffisamment reconnue dans les ouvrages de référence,

Jules Joseph Dejerine (1849–1917) publia des travaux dans tous les

contrairement à celles de Babinski et surtout de Holmes.

domaines de la neurologie, dont la pathologie du cervelet, grâce

L’atrophie olivo-ponto-cérébelleuse (Dejerine et André-Thomas, 1900): En

notamment à la collaboration de l’un de ses plus brillants élèves,

1900, Dejerine et André-Thomas rapportèrent, à propos de deux

André-Thomas (1867–1963) (Fig. 1). Ce dernier réalisa l’ensemble

cas cliniques dont un anatomique, un nouveau syndrome qu’ils

Thomas à l’étude du cervelet mérite d’être rappelée, car, bien que citée par Holmes dans ses « Croonian Lectures » en 1922 [5], celle-

de sa carrière médicale à Paris [1]. Nommé interne en 1892, il

dénommèrent l’atrophie olivo-ponto-cérébelleuse (AOPC) [2]. Le

resta sous la direction de son mentor Dejerine pendant trois ans,

début survenait à l’âge mûr par une démarche titubante et

à Bicêtre puis à la Salpêtrière. À partir de 1911, André-Thomas

l’évolution se faisait sur plusieurs années. Les principales lésions

poursuivit son activité clinique à l’hôpital Saint-Joseph. Il assura

anatomiques comportaient une atrophie du cervelet (avec perte

en parallèle la direction du laboratoire de Dejerine à la Salpêtrière

des cellules de Purkinje), et des olives inférieures, des pédon-

jusqu’à la mort de son maître en 1917. La plus importante contri-

cules cérébelleux moyens et du pont. Dejerine et André-Thomas

bution scientifique d’André-Thomas porta sur l’étude du cervelet.

apportèrent des arguments pour distinguer ce syndrome de

Cet exposé rappelle les progrès effectués dans la description du

l’ataxie de Friedreich, de l’hérédo-ataxie cérébelleuse de Pierre

syndrome cérébelleux au tournant des 19e et 20e siècle, en soulig-

Marie, également de la forme familiale d’AOPC de Menkes du fait

nant l’apport personnel d’André-Thomas. Il présente ensuite la

de l’absence de cas familiaux et de lésion des cordons postérieurs

description princeps en 1900 par Dejerine et André-Thomas de

de la moëlle. Le rapport autopsique ne mentionnait pas d’étude du

l’atrophie olivo-ponto-cérébelleuse (AOPC) [2], et l’évolution des

Locus niger (substance noire) et des noyaux gris centraux. D’autres

idées sur cette nouvelle entité au cours du 20 siècle.

cas cliniques et anatomiques d’AOPC furent décrits ultérieure-

Les travaux pionniers sur les fonctions du cervelet et la contribu-

ment avec des signes associés possibles, notamment un syndrome

tion d’André-Thomas: Historiquement, les premières approches des

extrapyramidal.

e

fonctions du cervelet furent réalisées au 19 siècle par des études

L’AOPC sporadique fut définitivement reconnue par Critchley

expérimentales lésionnelles notamment chez les oiseaux et les

et Greenfield en 1948 [6]. Lors d’une conférence internationale

chiens [3]. Citons particulièrement la révélation en 1824 à Paris par

des années 1980, une classification des différentes formes d’AOPC

Marie-Jean-Pierre Flourens (1794–1867) du rôle du cervelet dans la

sporadiques et familiales fut proposée [7]. Parallèlement, deux

coordination des mouvements, et la description en 1891 à Florence

autres syndromes dégénératifs sporadiques comportant parfois

en Italie par Luigi Luciani (1840–1919) de la triade asthénie, atonie

des points communs avec l’AOPC furent décrits dans les années

et astasie, c’est-à-dire troubles du maintien de la force du mou-

1960, le syndrome de Shy-Dragger (avec une hypotension orthosta-

vement, hypotonie et ataxie. André-Thomas fut inspiré par les

tique), et la dégénérescence striato-nigrique d’Adams-Van Bogaert

travaux pionniers de ces savants et incité par son maître Dejerine

(avec un syndrome parkinsonien sévère et une atrophie du noyau

à entreprendre des recherches sur le cervelet à la fois expérimen-

caudé et du putamen). Des chevauchements entre ces deux syn-

tales chez l’animal et clinico-pathologiques chez l’homme. Après

dromes et l’AOPC sporadique furent soulignés par la suite. À

sa thèse de médecine de 370 pages sur le cervelet en 1897 [3],

la fin des années 1980, des données histopathologiques nou-

André-Thomas réalisa pendant les décennies suivantes une œuvre

velles montrèrent que ces trois entités avaient en commun des

majeure sur la clinique et la pathologie du cervelet.

inclusions oligodendrogliales avec des distributions anatomiques

e

L’essentiel des descriptions cliniques du syndrome cérébelleux fut effectué au cours des années 1890–1920. Les plus importants

différentes. C’est pourquoi les trois syndromes furent regroupés sous un même vocable, l’atrophie multi-systématisée (AMS) [8].

contributeurs furent Joseph Babinski (1857–1932) et André-

De nos jours, le concept d’AMS est adopté internationalement,

Thomas à Paris, et Gordon Holmes (1876–1966) à Queen Square

avec deux formes principales, l’AMSp (syndrome parkinsonien

à Londres [4]. Chacun d’eux fit une exploration approfondie de

au premier plan), et l’AMSc–c’est-à-dire l’AOPC sporadique (syn-

l’ataxie cérébelleuse y compris le tremblement et apporta en

drome cérébelleux prédominant), avec atteinte inconstante de

outre une contribution propre ou une interprétation particulière.

la substance noire et des noyaux gris centraux. Des cas d’AOPC

Ainsi, Babinski préféra au terme d’ataxie celui d’asynergie, dissoci-

sporadique sont toujours rencontrés en pratique clinique. L’IRM

ation des mouvements de différents segments du corps impliqués

cérébrale montre souvent une atrophie cérébelleuse et du pont

dans un acte simple (passage de la position allongée à la posi-

rappelant les illustrations anatomiques décrites par Dejerine et

tion assise ; démarrage de la marche), décrivit l’hypermétrie et

André-Thomas en 1900 (Fig. 1).

l’adiadochocinésie, difficulté de réalisation de mouvements alternatifs rapides successifs (pro-supination du poignet). André-Thomas ajouta la dysmétrie, la dyschronométrie (bien étudiée en cas de lésion cérébelleuse unilatérale) et la passivité avec le réflexe pendulaire (longtemps interprétée par l’auteur comme une diminution du réflexe myotatique, et rattachée tardivement à l’hypotonie). Holmes établit de fac¸on définitive l’hypotonie avec le phénomène de rebond (manoeuvre de Stewart-Holmes), traduisant une réponse retardée à l’étirement du muscle antagoniste. Il décrivit le retard à l’initiation et à l’arrêt du mouvement, analysa le tremblement d’action, et identifia le tremblement rubro-thalamique (appelé aujourd’hui tremblement d’Holmes). Pour conclure, la contribution d’André-

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spent three years with his mentor Dejerine, first at Bicêtre, and then at Salpêtrière hospitals. André-Thomas pursued after 1911 his clinical work at Saint Joseph Hospital. In parallel, he was chief of Dejerine laboratory at the Salpêtrière until the death of his master in 1917. André-Thomas’ most important research focused on the cerebellum. This essay brings to mind the advances in the delineation of the cerebellar syndrome at the turn of the 19th and 20th centuries with special accent on André-Thomas own contribution. It also emphasizes the seminal description by Dejerine and André-Thomas in

Figure 1 À gauche portrait photographique d’André-Thomas (BIM). Au milieu : coupe anatomique post-mortem du pont du Cas no 1 de la publication de Dejerine et André-Thomas en 1900 sur l’AOPC, montrant l’atrophie du pont et des pédoncules cérébelleux moyens [1]. À droite : image IRM en T2 en coupe axiale du pont chez un patient ayant une AOPC illustrant l’atrophie du pont, notamment des fibres transverses et des pédoncules cérébelleux moyens (collection personnelle de l’auteur).

1900 of olivo-ponto-cerebellar atrophy (OPCA) [2] and the evolution of ideas on this new syndrome during the 20th century. Pioneering work on the functions of the cerebellum and André-Thomas’ own contribution: On an historical point of view [3], the first investigations on the functions of the cerebellum were made during the 19th century by lesion experiments in animals notably in birds and dogs. Particular contribution should be credited in Paris to MarieJean-Pierre Flourens (1794–1867) who revealed in 1824 the role of the cerebellum in the coordination of movements and in Florence,

Déclaration de liens d’intérêts L’auteur déclare ne pas avoir de liens d’intérêts. Références [1] Anonymous. André Thomas (1867–1963). Rev Neurol (Paris) 1963;109:5–12. [2] Dejerine J, Thomas A. L’atrophie olivo-ponto-cérébelleuse. Nouvelle Iconographie de la Salpêtrière 1900;13:330–70. [3] Thomas A. Le cervelet, étude anatomique, clinique et physiologique. Paris: G. Steinheil; 1897. [4] Garcin R. The ataxias. In: Vinken P, Bruyn G, editors. Handbook of clinical neurology, 42. Amsterdam: North Holland; 1969. p. 309–55. [5] Holmes G. Clinical symptoms of cerebellar disease and their interpretation. Croonian Lectures. Lancet 1922;202:142–7 [148–53]. [6] Critchley M, Greenfield JG. Olivo-ponto-cerebellar atrophy. Brain 1948;71:343–64. [7] Duvoisin RC, Plaitakis A. The olivopontocerebellar atrophies. Advances in Neurology, Vol. 41. New York: Raven Press; 1984. [8] Quinn NP. Multiple system atrophy. The nature of the beast. J Neurol Neurosurg Psychiatry 1989;32:78–89. 夽

Italy, to Luigi Luciani (1840–1919) who described in 1891 the triade asthenia, atonia and astasia. These signs were later considered as, respectively, impaired strength, hypotonia and ataxia. Undoubtedly, André-Thomas was inspired by the work of these researchers and encouraged by his mentor Dejerine to investigate the cerebellar dysfunction both with experiments in animals and clinical pathological studies in humans. His medical thesis on the cerebellum in 1897 is a masterpiece of 370 pages [3]. During the following decades, André-Thomas did several original reports and books on cerebellar dysfunction. The clinical description of the cerebellar syndrome took place between 1890 and 1920. Among many authors, Joseph Babinski (1857–1932) and André-Thomas in Paris and Gordon Holmes (1876–1966) at Queen Square in London were the most important contributors [4]. Each of these authors explored all components of cerebellar ataxia including tremor and made original contributions or special interpretations. Indeed, Babinski reported asynergia, he differentiated from ataxia (dissociation of movements of different body segments which are associated in a single act, as when passing from a recumbent to a sitting position or during initiation of gait), hypermetria and adiadochokinesia (impairment in performing rapid successions of alternating movements such

Abstract de colloque Jules Dejerine : publication bilingue (version franc¸aise).

as pronation and supination of the hand). André-Thomas added

http://dx.doi.org/10.1016/j.neurol.2016.12.019

bellar lesions) and passivité with the pendular reflex (considered for

dysmetria, dyschronometria (studied in cases with unilateral cerea long time by him as resulting from a diminished myotatic reflex

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before accepting its link to hypotonia). Gordon Holmes definitely

Jules Dejerine, André-Thomas and the pathology of the cerebellum夽

anchored the concept of hypotonia with the rebound phenomenon (Stewart-Holmes maneuver), resulting from a delayed response to

Emmanuel a Service de neurologie C, hôpital neurologique Pierre-Wertheimer, hospices civils de Lyon, 59, boulevard Pinel, 69677 Bron, France b Centre de neurosciences cognitive, CNRS UMR5229, Bron, France c Faculté de médecine Lyon Sud Charles-Mérieux, université Claude-Bernard Lyon 1, Pierre-Bénite, France Adresse e-mail : [email protected]

stretching of antagonist muscle. He also described delayed initiation

Jules Joseph Dejerine (1849–1917) did numerous publications in all

Olivopontocerebellar atrophy (Dejerine and André-Thomas, 1900): In

fields of neurology including on cerebellar pathology thanks to his

1900 Dejerine and André-Thomas described a new syndrome

successful collaboration with André-Thomas (1867–1963) (Fig. 1),

they named olivo-ponto-cerebellar atrophy (OPCA) about two

one of his most skilled pupils. André-Thomas made his entire

patients including one autopsied case [2]. This degenerative dis-

medical career in Paris [1]. He was appointed intern in 1892, and

ease occurred at middle or elderly age. The first signs were

Broussolle a,b,c

or arrest of movement, explored action tremor and identified rubral or thalamic tremor (today Holmes tremor). In conclusion, it is important to recall the contribution of André-Thomas to the study of the cerebellum, since, although cited by Gordon Holmes in his Croonian Lectures in 1922 [5], it is often ignored in master books in contrary to that of Joseph Babinski and especially Gordon Holmes.