Mddecine et Maladies Infectieuses.
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La m connaissance des leplospiroses dans la pathologie inteclieuse* par M. MAILLOUX** Les leptospiroses, zoonoses polymorphes et universellement r~pandues, aHectent les diverses esp$ces animales et l'homme. Elles sant dues au Leptospire, microorganisme appartenant it l'ordre des Spirochetales. Depuis la d~couverte, en ~rtovembre de 1914, de Ryockichi Inada, Y. Ido, R. Hoki, R. Kaneko et M. Ito, de nombreux leptospires ont ~t$ diagnostiqu~s. I1 en existe aujourd'hui 128 s~rotypes classes en 22 s~rogroupes. Les cor~naissances et conceptions au sujet des leptospiroses ont $volu$ : darts t~t premier temps, on consid~ra que chaque leptospire avait un r$servoir unique : rat, chien, bceuf. Actuellement, les esp~ces animales porteuses de leptospiroses se r$v~lent de plus en plus nombreuses et chaque animal, comme l'homme, peat ~tre atteint par tout s~rotype pathoggne. II n'est done plus question d'autonomiser urge leptospirose murine, canine ou bovine. Dans sa forme grave, maladie de Mathieu et Well, la lepto'spirose est une hSpato-n6phrite, avec rSaction m6ning6e et sa rechute elassique. Ma~s, dans l'immense majorit6 des eas, l'ict$re manque ; les formes frnstes et atypiques, pseudogrippales, m6ning$es, douloureuses, les infections inapparentes sont 16gions. Cependant, quelque soit le ~6rotype en cause, la leptospirose associe, ~ des degr6s variables, les manifestations suivantes : 1) un syndrome f$brile correspondant an stade septicSmique de la maladie. 2) un ~yndrome algique pendant 4 ~ 7 jours, douleurs musculaires, articulaires .... 3) un syndrome m6ning6 d'intens~t$ variable avec perturbation du L.C.R. 4) une atteinte rSnale constante avec oligurie, prot6inurie, voire h6maturie. Le tanx de l'urSe sanguine est s ouvent 61ev6. 5) un ,syndrome circulatoire : alt6ra¢ion du r y t h m e et vaso-dilatation nette au niveau des conjonct[ves. 6) un exanthbme ou rash survenant vers la fin du cycle f6brile. Enfin l'6volution est en gSn6ral biphasique. A c e s signes fondamentaux peuvent s'ajou~er : role h6pato-n$phrite, p l u s fr6qnente dans les. leptospiroses ~ L. icterrohaemorrhagiae, L. bataviae et L. automnalis ; un syndrome h6morragique, fr6quent en Asie ; un syndrome respiratoire. * Manuscrit resu le 25 avril 1975. ** Service des Leptospires, Institut Pasteur, 25, rue du Dr Roux, 75015 Paris.
Cette symptoma~ologie indique suffisamment les difficuhSs dn diagnostic des affections leptospirosiques non ict6riques. Le diagnostic diff6rentiel se pose avec la plupart des affections f6briles : 1) les syndromes infectieux peu nets : (c affections grippales )) ; viroses ; brucelloses ; mononucl6o~se infeetieuse ; rhumatisme ; affection~. ent6rique~ ; paludisme ; syndrome abdominal aigu. 2) les m6ningites ~ liqu~de clair, dites lymphocytaires aigu~s, d'origine virale (poliomy61ite, grippe, herpes) ou bact6rienne (Rickettsia, Brucelia). 3) les Rickettsioses h fibvre Q et scrub Typhus. 4) les ietbres f6briles : hSpatites: infeetieuses, parasitaire, hSpato-nSphrite toxique. 5) des parasitoses : amibiases. 7) selon les rSgions : borr61ioses ou fi~vre r~currente, fi~vre b[lieuse h6moglobinurique, fibvre jaune en AmSrique et Afrique intertropicale. Enfin toute pyrexie d'origine ind6termin6e. Devant cette diver~it$ elinique des leptospiroses, il est n6cessaire de chercher quelques caractbres cliniques communs : le syndrome infectieux aigu septicSmique, le syndrome m6ningo-algique et le syndrome r6nal sont pratiquement toujours pr$sent~ ~ des degr6s variables.. L'ictbre manque clans 80 % des ea,s de leptospiroses.
DIAGNOSTIC Or le diagnostic biologique permet de confirmer la clinique. Le choix des m6thodes est d6ter. min6 par la physio-pathologie des leptospiroses ; on peut distinguer trois phas,es : 440
1) la phase septic~mique, j u s q u ' a u 8 ¢ jonr, le germe est recherch6 dans le sang, le L.C.R. par culture sur milieux sp6cianx ou inoculation l'animal, 2) ttrte phase silencieuse, dite ~ m u e t t e ~, du 9 ~ au 10 ~ j o u r , 3) la phase immunitaire ~ parti~ du 10 ~ - 11 ¢ jour : les anticorps sont d6celables, p a r le s6rodiagnostic r$~rospectif ; le germe peut 6tre rechereh~ dans les urines du 15 ~ au 25 e j o u r par inoculation h l ' a n i m a l . Si lz r6action microscopique d'agglutination et l y s e est de r6alisation d61icate, difficile, demandant un l a b o r a t o i r e 6quip6 poss6dant et entretenant une batterie de souches, des r6actions de d6pistage (soit macroscopique d'agglutination avec antigSnes tu6s, soit de fixation du compl6ment ou d ' h 6 m a g g l u t i n a t i o n ) ~ l ' a i d e d ' u n antig~ne unique, peuvent ~tre r6ali's6es dans certains laboratoires, qui peuvent ensuite adres~er le sSrum positif ou douteux h un centre p o u r dStermination du s6rotype en cause.
paient un tribut ~ la maladie. Les leptospiroses survivent p a r f a i t e m e n t dans la nature quand les conditions de p H , t e m p 6 r a t u r e , salinit6, o m b r a g e lenr eont favorables. Le rSservoir de v;rus est repr6sent6 par les animaux, surtout les m a m m i f ~ r e s sauvages et en particulier les rongeurs qni h 6 b e r g e m et 61imi~aent les leptospiroses, par le~- urines. Ces urines virulentes sont dilu6es dans l'eau, la bone : elles sont alors h a u t e m e n t contaminantes p o u r l ' h o m m e . La transmission se fait p a r vole eutan6e ou muqneuse : oro-nasale, conjonctivale. Les possibilit6s de contamination .sont donc nombreuses.
TRAITEMENT
Or la ieptospirose est fr6quente et r6pandue : --20 % des habitants de villages du Za~re proche~ des grands lacs ont une s6~o-r6action pcrsitive. Ces habitants btaient pris au hasard. - - une 6tude du N A M R U n o 2 portant sur des US marines op6rant dans la r6gion de QuangTri, Danang, Chu-Lai, a montr6 que sur 793 cas de FUO (fi~vre d ' o r i g i n e inconnue), 20 % des cas 6taient dus ~ la Leptospirose, 11,5 % au scrub-Typhus!, 6,8 % ~ l'enc6phalite japonaise. 1 m a l a d e sur 5 f6briles 6taient donc atteint par le~s leptospi, res (6tude portant sur les ann6es 1967-1969). --A Tahiti, Segonne et Mailloux ont montr$ que la leptospirose Stait l ' u n e des principales cause d'hospitalisation, avant l ' h 6 p a t i t e infectieuse. --enfin le~ leptospiroses ont une incidence 6conomique non n6gligcable : avortements, diminution de la lactation chez les bovins aux U.S.A., elle vient au 3 ° rang des maladies par i m p o r t a n c e 6conomiqale. --dans les rizi~res d'Ita~lie et d ' E s p a g n e , 10 ~t 20 % des ouvriers sont a n n u e l l e m e u t atteints p a r les leptospiro~,es.
Le diagnostic est donc raremen~ fait d~s la p r e m i e r e semaine de la maladie. Le t r a i t e m e n t n'est pas appliqu6 pr6cocSment. Or si le traitem e n t s y m p t o m a t i q u e doit toujours ~tre mi~s en oeuvre, le t r a i t e m e n t 6tiologique, l'antibioth6rapie, agit sur la s~v6rit6 de l'atteinte h6patorSnale, 6conrte l'$volutiort et Svite les complications. La mortalit6, en effet, n ' e s t pas n6gligeable : en Prance elle atte~nt 12 % environ des cas et s'61~ve h 25 % h F i l e de la R6union. MECONNAISSANCE DES LEPTOSPIROSES M a l h e u r e u s e m e n t les leptospiroses sont trop souvent ignorSes en pathologic infectieuse et les leptospires sont trop r a p i d e m e n t enscign6s en Microbiologie : ~ Ce n ' e s t pas une m a l a d i e fr6quente, elle n ' e s t pas grave, son diagnostic biologique n ' e s t pas au point ~, sont les, p r i n c i p a u x arguments. En r6alit$ il peut s'agir d ' u n e maladie gra,ve et son diagnostic biologique, chronologiquement conduit, est p a r f a i t e m e n t au point. Enfir~ cette maladic existe souvent plus fr6quemmenlt q u ' o n ne le soupgonne. L'6pid6miologie nous enseigne que la contamination se fait ,rarement par voie directe, surtout par voie indirecte : le rble de l'eau, de la boue, des vases, est p r i m o r d i a l . Certains ont d6fini la leptospirose c o m m e une maladie hydrique. Si les baignade~s dans les cours d ' e a u , les 6tangs, sont ~ l'orig~ne de certains cas, de n o m b r e u x travaux agricoles : rizi~res, champs~ de canne sucre, r6coltes, peuvent ~tre incrimin6s. De m~me p~cheurs ou 6gouttiers, travailleurs d ' a b a t t o i r s 441
Malheureusement le diagnostic est rarement pos~ : - - ainsi ]a cause de ~ Fort-Bragg fever ~ ou ~¢ Pre-tibial fever ~ qui s6vissait dans un camp de l ' E s t am6rieain en 1943-1944 n ' a 6t6 d6termin6e q u ' e n 1952 au Walter Reed, Washington, quand G o c h e n o u r a d6montr6 s6rologiquement la positlvit6 de ces s6rums vis-A-vis de L. autumnalis.
CONCLUSION Les lcptospiroses sont des affections cosmopolites ; u n s6rotype ne peut 6tre localis6 ni ~ une esp~ce, ni ~t une zone d6termin6e. Ce~ zoonoses m6ritent d'6tre recherch6es plus attentivement. P o u r en faire le diagnostic il faut, certes, y penser, mais ,surtout mettre en oeuvre les possibilit6s du laboratoire.
RESUME
Mots-clef :
Les leptospiroses sont des zoonoses tr~s r6pandues, ~ symptomatologie polymorphe. Leur diagnostic clinique peut et doit 6tre r a p i d e m e n t confirm6 p~r les examens de laboratoire : culture du germe lors de la premiere semaine, p~is d6tection des anticorps ensui,t:e. Ces possihilit6s devraient permettre de dia~nostiquer souvent les leptospirosee. Comme le prouvent les 6tudes approfondies et complStes, ces infections sont bien plu,s frSquentes et bien plus nombreuses que les cas jusqu'ici signal6s officiellement. L e p t o s p i r o s e s - Diagnostic , Tran~smission - Epid6miologie. Lep~ospiroses are world-wide zoonoses w i t h p o l y m o r p h o u s symptomato~ogy. Con]irmation o] clir~cal diagnosis can - and m u s t - be provided at early stage by laboratory tests : culture o~ the organism during the ~irst w e e k , then demonstration o] antibodies. This should facilitate diagnosis o~ Leptospiroses. It has bee~ revealed by thorough ~rtvestigations that thv$e infections are most # e q u e n t and more numerous t h a n the n u m b e r o~ cases o]]icially recorded. Key-words : LeFtospiroses - Zoonoses - Diagnosis . Transmission . Epidemiology.
SUMMARY'
ANALYSE
DE L I V R E
Nouvelles conceptions en mati re de stalisliques sanitaires Rapport de la Deuxi6me Conf6rence internationale des Commissions nationales des stalistiques d6mographiques et sanitaires, Organisation Mondiale de la Sant6, S6rie des Rapports techniques, 1974, no 559, 43 p.
La Seconde Conf6rence Internationale s:'est tenue 20 ans apr~s la premiere. Les 155 p a r t i c i p a n t s provenaient de 59 pays, des Nations-Unies, de I'OMS, du CIRC, et de plusieurs organisations non gouvernementales. S'il y a eu pendant ee temps, selon le rapport, des am~liorationsl dans la collecte de certains types de statistiques sanitaires, le progr~s a 6t5 trSs lent dans le domaine des statistiques d6mographiq~tes. PrOs des~ deux tier~ de la population mondiale (les quatre cinqui~mes en Afrique et en Asie) ne possbdent pas de syst~me d'enreglstrement correct des naissances. Celui de~ d6cSs offre un tableau tout aussi sombre, et celui de la, mortalit$ infantile est mSme encore pire. Le rapport 6tudie les nouveaux types de statistiques aujot~rd'hui n$cessaires et les nouvelles m6thodes utilis6es par les statis~ticiens ~nnitaires. Les administrateurs sanitaires s'int6res,sent & pr6sent ~ la prospective et c h e r c h e m tt comparer les diff6rente~ strat6gies possibles dans l'avenir du point de vue de leur rapport cofit/efficacit6 ; cet exercice comporte l'ntilisation de modSles et de techniques statistiques de projection. Si les Statisticiens connaissent bien ces m6thodes, a u moins dans le domaine 6conomique, le rapport fait ressortir qne les, administrateurs sanitaires ont besoiu d'aide pour interprSter les r6suhats et p o u r les appliquer ~ leur propre politique de la sant6. La pattie peut-6tre la plus imporltante du rapport traite de la communication entre les usagers des statistiques sanitaires et les statisticiens ; les
derniers ne pouvant jouer leur r61e ~ fond en vue d'am61iorer la distribution des soins que dans la mesure o~t ils se font comp,rendre et inspirent confiance. Le rapport souligne que lesi sta,ti'sticiens doivent 6tre associ6s ~ la prise de d6cision, sans que pour autant il leur appartienne de trancher. C'est 1"~ le r61e de l'utilisateur, qu'il soit administrateur ou clinicien. Le rapport in~siste 6galement sur la n6cessit6 de modifier les .,~yst~mes statistiques actuels, examine l'organisaltion des services de statistique et souligne l'importance de donnfes uniformes ct comparables. Les moyens techniques de r6pondre aux besoins ~voqu6s on.t 6galement 6t6 discut~. "~ la Conf6rence en m6me temps que les besoins en mati~re d'enseignement et de formation dans ce domaine. Le rapport souligne le r61e des Commissions Nationales de Sta~stiques D6mographiques et Sanitaires pour faire face aux besoins r f c e m m c n t d6finis, /i savoir que ces Commis,sions Nationales, outre leur r61e fondamental de coordination el de conseil, doivent devenir des forums efficaces de communication et de compr6hension entre producteurs et utiHsateurs de l'information stati.stique. Dan~ le cadre d'une telle cooperation im:erdisciplinaire, les Commissions Nationales ont la responsabilit6 d'6tre /~ la pointe du mouvement, de d6terminer les secteurs qui r6clament des statistiques et de recommander les moyens prfcis de r f p o n d r e aux bes'oins. 442