Lettres à la rédaction des varices fundiques par Histoacryl® est une technique très efficace et associée à un faible risque de complication.
Références [1] Conférence de consensus. Complications de l’hypertension portale chez l’adulte (Paris, 4 et 5 décembre 2003). Gastroenterol Clin Biol 2004;28:B324-34. [2] Kok K, Bond RP, Duncan IC, Fourie PA, Ziady C, van den Bogaerde JB, et al. Distal embolization and local vessel wall ulceration after gastric variceal obliteration with N-butyl-2cyanoacrylate: a case report and review of the literature. Endoscopy 2004;36:442—6. [3] Seewald S, Ang TL, Imazu H, Naga M, Omar S, Groth S, et al. A standardized injection technique and regimen ensures success and safety of N-butyl-2-cyanoacrylate injection for the treatment of gastric fundal varices (with videos). Gastrointest Endosc 2008;68:447—54. [4] Marion-Audibert AM, Schoeffler M, Wallet F, Duperret S, Mabrut JY, Bancel B, et al. Acute fatal pulmonary embolism during cyanoacrylate injection in gastric varices. Gastroenterol Clin Biol 2008;32:926—30. [5] Roesch W, Rexroth G. Pulmonary, cerebral and coronary emboli during bucrylate injection of bleeding fundic varices. Endoscopy 1998;30:S89—90. [6] Noophun P, Kongkam P, Gonlachanvit S, Rerknimitr R. Bleeding gastric varices: results of endoscopic injection with cyanoacrylate at King Chulalongkorn Memorial Hospital. World J Gastroenterol 2005;11:7531—5. [7] Turler A, Wolff M, Dorlars D, Hirner A. Embolic and septic complications after sclerotherapy of fundic varices with cyanoacrylate. Gastrointest Endosc 2001;53:228—30.
C. Amouroux a J.-P. Cervoni a,∗ E. Delabrousse b S. Koch c T. Thevenot a V. Di Martino a a Service d’hépatologie, hôpital universitaire Jean-Minjoz, 2, boulevard Fleming, 25030 Besanc¸on cedex, France b Service de radiologie, hôpital universitaire Jean-Minjoz, 25030 Besanc¸on cedex, France c Service de gastroentérologie, hôpital universitaire Jean-Minjoz, 25030 Besanc¸on cedex, France ∗ Auteur correspondant. Adresse e-mail :
[email protected] (J.-P. Cervoni).
Disponible sur Internet le 23 f´ evrier 2009 doi:10.1016/j.gcb.2009.01.006
La porphyrie aiguë intermittente : une urgence métabolique Intermittent acute porphyria: A metabolic emergency Nous rapportons le cas d’une patiente hospitalisée pour porphyrie aiguë intermittente dont le diagnostic a été porté tardivement, après plusieurs prises en charge thérapeutiques inappropriées.
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Observation Une patiente de 32 ans, sans antécédent personnel et sans antécédent familial connus, était hospitalisée en janvier 2005 pour crises douloureuses abdominales intenses répétées, s’accompagnant de constipation, nausées et vomissements. Cette patiente avait déjà présenté trois crises douloureuses similaires depuis février 2004. Le diagnostic de volvulus intermittent du coecum était évoqué après constatation d’une dilatation colique droite au scanner et d’un angle colique droit mobile lors d’une cœlioscopie. Étant donné les nombreuses récidives des crises retentissant sur l’état général de la patiente avec une perte de poids de 14 kg, il était décidé de pratiquer une hémicolectomie droite avec anastomose iléocolique sous cœlioscopie. Les suites postopératoires étaient marquées par l’apparition d’un syndrome confusionnel associé à d’intenses douleurs abdominales justifiant une reprise chirurgicale. Il était alors trouvé une péritonite diffuse avec un liquide péritonéal trouble, sans cause évidente, en particulier sans lâchage des sutures anastomotiques. Une toilette péritonéale et une iléostomie de décharge en amont de l’anastomose étaient réalisées. La persistance d’importants troubles de la vigilance et d’une grande agitation liée à un syndrome hyperalgique justifiait le transfert de la patiente en service de réanimation après réalisation d’une tomodensitométrie cérébrale normale. La patiente était côtée 9 (Y4M4V1) sur l’échelle de Glasgow. Elle suivait du regard sans répondre aux ordres simples. Elle ne présentait ni déficit focalisé, ni signe méningé. Sa tension artérielle était conservée avec une tachycardie à 120/minute. Elle était apyrétique, polypnéique avec une saturation en oxygène à 92 % sous 15 litres d’oxygène. La fonction rénale était conservée. À l’auscultation, on notait des ronchi dans les deux champs pulmonaires. Sur la radiographie pulmonaire, on relevait un syndrome alvéolaire interstitiel bilatéral. À l’échographie cardiaque, la fonction ventriculaire gauche était bonne mais il existait une dilatation des cavités droites. Il n’existait pas de thrombose veineuse à l’échodoppler veineux des membres inférieurs. Devant la persistance de l’agitation et de l’hypoxie, la patiente était intubée et ventilée. L’apparition d’une instabilité hémodynamique justifiait le recours, pendant 48 heures, à de petites doses de noradrénaline. La patiente était fébrile et les contrôles tomodensitométriques mettaient en évidence plusieurs abcès péritonéaux et rétro-utérin nécessitant des drainages radiologiques et la mise en place d’un traitement par imipenem durant huit jours, relayé par l’association amoxicilline/acide clavulanique et amphothéricine B. L’analyse cytobactériologique et biochimique du liquide céphalorachidien était toujours normale ainsi que les différents scanners cérébraux. À l’électroencéphalogramme, il n’existait pas d’éléments d’allure comitiale. La constatation d’urines foncées conduisait à un dosage urinaire des porphyrines en urgence. Les uroporphyrines urinaires étaient à 875 mol/L (normale < 50 mol/L) et les coproporphyrines urinaires à 537 mol/L (normale < 200 mol/L). L’acide aminolévulinique était à 85 mol/L (normale < 38 mol/L), soit 57 mol/mmol de créatinine urinaire
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Lettres à la rédaction
porphobilinogène /créatinine urinaire (µmol/mmol) Crise aiguë 250 200 150
Crise aiguë 100 50
Jours post-diagnostic
J0 J3
J5 J9 J1 0 J1 2 J1 6 J1 7 J2 0 J2 4 J2 6 J3 2 J3 7 J3 8 J4 0 J4 4 J4 5
0 Chaque flèche verticale correspond à une cure d’hémine humaine (Normosang R)
Figure 1 Évolution du rapport porphobilinogène/créatinine urinaire (mol/mmol) à partir du diagnostic (j0). Chaque flèche verticale correspond à une cure d’hémine humaine (Normosang® ).
(normale < 3 mol/mmol). Le porphobilinogène était à 352 mol/L (normale < 9 mol/L), soit 235 mol/mmol de créatinine urinaire (normale < 1 mol/mmol). Les taux très élevés de porphobilinogène urinaire faisaient poser le diagnostic de porphyrie aiguë hépatique, puis à distance, le déficit d’environ 50 % de la porphobilinogène déaminase permettait le diagnostic de porphyrie aiguë intermittente. Une délétion de trois nucléotides et l’insertion d’un nucléotide à l’état hétérozygote dans l’exon 12 du gène hydroxymethylbilane synthase responsables d’un décalage de lecture caractérisé par l’apparition d’un codon stop prématuré était mis en évidence. À partir de j8, et jusqu’à j12, quatre ampoules contenant chacune 250 mg de hémine humaine (Normosang® ) étaient administrées. Ce traitement était complété par l’utilisation de glucides. À j9, la patiente retrouvait un état de conscience quasi normal. Du fait de la tétraparésie lors de la levée de la sédation en lien avec la neuropathie motrice s’intégrant dans la porphyrie aiguë intermittente, la patiente ne pouvait être extubée qu’à j13 de réanimation. Les taux de porphobilinogène diminuaient significativement après une nouvelle cure de quatres ampoules d’hémine humaine administrée entre j19 et j23 mais remontaient à partir de j24 pour atteindre 107 mol/mmol de créatinine urinaire (Fig. 1). Il était alors décidé d’administrer une demie ampoule d’hémine humaine tous les trois jours entre j29 et j38 puis une ampoule tous les trois jours entre j38 et j51. L’état clinique de la patiente s’améliorait et elle gardait principalement un déficit proximal aux membres supérieurs.
Discussion Les porphyries sont des maladies héréditaires monogéniques pour la plupart de transmission autosomique dominante, caractérisées par l’accumulation et l’excrétion accrue de porphyrines et de leurs précurseurs : acide deltaaminolévulinique et porphobilinogène. Chacune de ces porphyries est la conséquence d’un déficit d’une des enzymes intervenant dans la chaîne de biosynthèse de
l’hème. Selon le tissu où prédomine le déficit, on distingue les porphyries hépatiques et les porphyries érythropoiétiques. Parmi les porphyries hépatiques, trois peuvent donner des crises aiguës neuroviscérales : la porphyrie aiguë intermittente, la coproporphyrie héréditaire et la porphyrie variegata, causées chacune par un déficit en enzyme responsable d’une étape dans la synthèse de l’hème. La porphyrie aiguë intermittente est liée à un déficit en porphobilinogène déaminase, troisième enzyme de la chaîne de biosynthèse de l’hème. Sa pénétrance est faible (inférieure à 10 %). Elle est trouvée dans tous les pays en Europe avec une prévalence d’environ un pour 100 000 habitants et comporte une symptomalogie très polymorphe liée à l’atteinte globale du système nerveux autonome, périphérique et centrale. Le déficit est fréquent comme en témoigne une étude menée en France chez des donneurs de sang révélant une diminution significative en activité porphobilinogène déaminase chez plus de un donneur sur 1600 [1]. Chez une jeune femme, devant la persistance de douleurs abdominales répétées et pour lesquelles aucun diagnostic probable n’a pu être posé, l’évocation d’une étiologie métabolique devrait être légitime. Dans notre cas, il a existé un retard conséquent dans le diagnostic, une chirurgie lourde et inutile et une aggravation probable liée à l’administration de substances connues pour leur propriété porphyrinogène (érythromycine, hydroxyzine et kétamine). La porphyrie aiguë intermittente associe trois grands syndromes qui peuvent exister isolément : douleurs abdominales pseudochirurgicales sans localisation précise, troubles neurologiques et/ou troubles psychiques. Les douleurs sont généralisées à l’abdomen et irradient le plus souvent vers les lombes, les fesses et les cuisses. Elles sont associées à des signes d’atteinte du système nerveux autonome : tachycardie, hypertension, iléus partiel pouvant donner des niveaux liquides à la radio de l’abdomen sans préparation. L’hyponatrémie est très fréquente, secondaire à une sécrétion inappropriée d’hormone antidiurétique. Les manifestations neurologiques peuvent faire évoquer souvent un syndrome de Guillain-Barré. Cette neuropathie s’accompagne en général de troubles du comportement, de confusion, d’agitation et d’hallucinations [2]. L’aspect foncé des urines dans la conduite diagnostique est peu sensible et n’est pas un signe constant dans la porphyrie aiguë intermittente. L’élévation franche des concentrations urinaires en acide delta-aminolévulinique, et surtout en porphobilinogène, est pathognomonique d’une crise aiguë de porphyrie. Ils ont pu ici être réalisés en urgence sur échantillon d’urines fraîches conservées à l’abri de la lumière (Centre franc ¸ais de porphyrie). Ces précurseurs peuvent être parfois trouvés modérément augmentés dans les urines en dehors de tout contexte de porphyrie chez les patients présentant une cytolyse hépatique. Il existe une grande hétérogénéité allélique dans la porphyrie aiguë intermittente puisque plus de 200 mutations ont été identifiées sur le gène de la porphobilinogène déaminase. Chez notre patiente, la mutation nulle résultant de la délétion du gène hydroxyméthylbilane a déjà été décrite. Même si la relation entre génotype et phénotype n’a pas été établie dans la porphyrie aiguë intermittente, il est admis que la gravité clinique est majorée pour ce type de mutation puisqu’elle conduit à une absence complète de synthèse de
Lettres à la rédaction l’enzyme [3]. Le diagnostic a permis de réaliser une enquête familiale en proposant aux autres membres de la famille un dépistage du déficit en porphobilinogène déaminase. Le déficit enzymatique en porphobilinogène déaminase a été mis en évidence chez quatre autres membres de la famille asymptomatiques. La détection de sujets asymptomatiques déficitaires ou présymptomatiques contribue à limiter chez ces patients la survenue de facteurs précipitant la maladie : • • • • • • • •
certains médicaments ; l’alcool ; l’alimentation ; certaines hormones ; le tabac ; le jeûne ; le stress ; les maladies infectieuses [4].
Chacun de ces patients déficitaires possède sur lui une carte spécifique (Centre franc ¸ais des porphyries). Les médicaments et les variations hormonales au cours du cycle menstruel sont considérés comme les facteurs précipitants les plus fréquents [4]. L’apparition d’une symptomatologie aiguë est cinq fois plus fréquente chez la femme et est exceptionnelle avant la puberté. Le traitement d’une crise aiguë de porphyrie repose sur la suppression des facteurs déclanchants, le traitement de l’agitation et de la douleur par la chlorpromazine (largactil), la morphine, ou la péthidine, la supplémentation en glucides (200 à 300 g/j à moduler en fonction de la natrémie) et la perfusion d’hémine humaine [5,6]. Le traitement par hémine humaine mis en route devant les concentrations urinaires très élevées en acide delta-aminolévulinique et porphobilinogène, permet de réprimer l’activité de l’acide delta-aminolévulinique synthase hépatique. Cette activité en cas de crise aiguë est emballée et est responsable de l’accumulation de l’acide delta-aminolévulinique et du porphobilinogène en amont du déficit en porphobilinogène déaminase. Lors du passage de la porphyrie aiguë intermittente en mode chronique, les concentrations urinaires en acide delta-aminolévulinique et porphobilinogène ne sont que peu corrélées avec l’intensité des crises aiguës. La perfusion d’hémine humaine est alors décidée sur des arguments essentiellement cliniques (douleurs abdominales). Les douleurs abdominales isolées et le syndrome psychiatrique sont généralement sensibles à l’action de l’hémine humaine. En revanche, l’efficacité directe de l’hémine humaine vis-àvis de l’atteinte neurologique motrice n’a pas été prouvée. Celle-ci peut toutefois régresser, voire disparaître après des mois de rééducation. La transplantation hépatique est réservée actuellement aux formes graves et chroniques associées ou non à une inefficacité progressive de l’hémine humaine [7]. C’est la seule solution thérapeutique permettant de corriger le
209 déficit hépatique en porphobilinogène déaminase avec ses conséquences métaboliques (emballement de l’acide deltaaminolévulinique synthase, première enzyme de la chaîne) et cliniques sur le système nerveux. Les documents, recommandations et listes de médicaments interdits ou autorisés dans les porphyries peuvent être consultés dans différents sites : www.porphyrie.net, www.porphyria-europe.org et www.drugs-porphyria.org.
Conflits d’intérêts Aucun.
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G. Beaune ∗ Laboratoire de biochimie, centre hospitalier de la région d’Annecy, 1, avenue de l’Hôpital, Metz Tessy BP 90074, 74374 Pringy cedex, France J.-C. Deybach Centre franc¸ais des porphyries, hôpital Louis-Mourier, Colombes cedex, France H. Puy Centre franc¸ais des porphyries, hôpital Louis-Mourier, Colombes cedex, France M. Sirodot Service de réanimation, centre hospitalier de la région d’Annecy, 74374 Pringy cedex, France ∗ Auteur correspondant. Adresse e-mail :
[email protected] (G. Beaune).
Disponible sur Internet le 23 f´ evrier 2009 doi:10.1016/j.gcb.2009.01.007