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TRACLI-2841; No. of Pages 6
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ScienceDirect www.sciencedirect.com Transfusion Clinique et Biologique xxx (2015) xxx–xxx
Histoire de la transfusion sanguine
Le don de sang dans la presse franc¸aise des années 1950–1980 Blood donation in the media between 1950 and 1980 J.-J. Lefrère a,b,1 , O. Garraud a,∗,c a
Institut national de la transfusion sanguine, 6, rue Alexandre-Cabanel, 75015 Paris, France b Faculté de médecine, université Paris Descartes, 75005 Paris, France c Faculté de médecine de Saint-Étienne, université de Lyon, 42023 Saint-Étienne, France
Résumé Les anecdotes reprises par la presse et, en particulier, par la presse satyrique visent à apporter des éclairages décalés mais souvent profonds sur divers sujets de société. Celles proposées sur le don de sang et l’entourage transfusionnel dans la presse franc¸aise des années 1950 à 1980 nous donnent de voir le chemin parcouru tout en insistant sur le point des immobilismes ou des idées rec¸ues persistantes. Elles pourraient servir de tremplin pour une réflexion éthique revisitée. © 2015 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. Mots clés : Transfusion ; Don de sang ; Presse ; Média ; Éthique ; Histoire
Abstract Anecdotes, such as found in the media and chiefly the humor journals and magazines aim at bringing revisited insights on society subjects, which can even be the most serious. Anecdotes reported here on blood transfusion and the transfusion environment, that were retrieved from French news released in the media press between the 1950s to 1980s give a view on what has been achieved since then, but also on what is at a standstill by some incapability in moving forward or in changing minds. Those anecdotes would be used to stimulate or refresh debates in transfusion related-ethics. © 2015 Elsevier Masson SAS. All rights reserved. Keywords: Transfusion; Blood donation; Press media; Ethics; History
Si on entend que le don de sang fait partie de la vie d’un pourcentage non négligeable de franc¸ais – à peu près autant que ceux qui ont une pratique religieuse régulière estime-t-on –, alors il est bien normal que lui soit associé son lot d’anecdotes. L’ère du politiquement correct est néanmoins passé par là et la période noire du sang contaminé a stérilisé probablement pour longtemps cet esprit frondeur qui caractérise l’humour à la franc¸aise : les histoires de sang et de transfusion n’amusent plus personne
∗ 1
Auteur correspondant. Adresse e-mail :
[email protected] (O. Garraud). Auteur décédé.
actuellement, sauf à coller à la peau de quelques politiciens auxquels des humoristes qui semblent avoir moins peur du cliché que du souci de se renouveler s’obstinent à accoler leur fonction passée (plutôt d’ailleurs que leur rôle réel) à l’époque concernée. C’est pourquoi cette revue de presse est davantage un dépoussiérage de notes de lectures anciennes qu’un sujet d’actualité. Cela explique aussi pourquoi certaines références seront partielles, ce qui n’est pas très professionnel mais qui au fond va bien avec l’esprit de l’anecdote. On reste ainsi dans le ton. Les anecdotes – une fois encore, anciennes – sont de nature très diverse ; nous avons entrepris de les regrouper en quelques thèmes, faisant le choix de présenter celles-là, et d’en conserver
http://dx.doi.org/10.1016/j.tracli.2015.12.007 1246-7820/© 2015 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
Pour citer cet article : Lefrère J-J, Garraud O. Le don de sang dans la presse franc¸aise des années 1950–1980. Transfusion Clinique et Biologique (2015), http://dx.doi.org/10.1016/j.tracli.2015.12.007
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quelques autres non publiées, car peut-être par trop politiquement incorrectes de nos jours. Certaines références n’ont pas pu être formellement retrouvées par le rédacteur final (O.G.) à partir des archives du rédacteur principal (J.-J.L) ; elles sont indiquées par une astérisque (*) en fin de note. Qu’on veuille bien ne pas nous en tenir rigueur et accepter nos excuses.
1. Donner son sang : un bienfait n’est jamais perdu 1.1. « M. Barrachin a subi une transfusion de son propre sang. . . (donné à la “banque” d’Asnières) » L’état de santé de M. Edmond Barrachin, blessé au cours d’un accident sur l’autoroute de l’Ouest, est aujourd’hui satisfaisant. Le ministre d’État a subi, détail curieux, une transfusion. . . de son propre sang. À l’hôpital de Saint-Cloud, en effet, où le blessé avait été transporté d’urgence, un chirurgien ordonna une transfusion. En recherchant les fiches de la banque du sang à Asnières pour retrouver les réserves du groupe sanguin nécessaire, on retrouve une réserve de sang de M. Barrachin lui-même. C’est grâce à cette transfusion que le ministre fut sauvé. M. Barrachin avait offert son sang l’an dernier, à l’occasion de l’inauguration de la banque de sang d’Asnières. [France-Soir du 11 juin 1954)
1.2. « Elle est sauvée par son propre sang » Sydney, 15 août (Reuter). — Mme Audrey Young doit la vie à une transfusion. . . de son propre sang. En précision de son opération, elle avait donné son sang, il y a trois semaines au même hôpital de Sydney où elle a été opérée avec succès lundi. Huit personnes au monde seulement constituent ce groupe sanguin (A négatif) dont Mme Young et sa sœur miss Doreen Parfitt. C’est miss Parfitt qui, la semaine dernière, en réponse à un appel venu de France, avait donné son sang pour une Parisienne gravement malade. [France-Soir, 16 août 1961]
2.2. « Le plus jeune donneur de sang de France » Au cours de « journées du sang » organisées à Aulnoy, dans le Nord, ce jeune garc¸on, Christian Levent, âgé de cinq ans à peine, est venu tendre courageusement son petit bras aux infirmiers. Stupéfaits, ceux-ci ont consenti à prélever le sang de Christian qui devient ainsi le plus jeune « donneur » franc¸ais. Puisse ce bel exemple de civisme inciter beaucoup d’hésitants à devenir, à leur tour, donneurs de sang.* 2.3. « Médaille d’or des donneurs de sang : un Toulousain a fourni trente litres en onze ans » Toulouse, 6 novembre (Correspondance du Figaro). — Un chauffeur de Toulouse, M. Antoine Calve, 40 ans, vient de recevoir la médaille d’or à deux étoiles des donneurs de sang, qui est une récompense extrêmement rare. Le généreux donneur a offert cent dix fois son sang bénévolement depuis 1956, ce qui correspond à trente litres, chaque prise étant de l’ordre de 250 à 300 g. M. Clave, qui habite 8, chemin de Bagatelle, est père de quatre enfants. 2.4. « 67 ans séparent les deux donneurs de sang » Gérardmer (de notre correspondant). — À la « Journée du Sang », hier, à Gérardmer, les Géromois se sont présentés plus nombreux que l’an dernier. Ils étaient 213 à tendre le bras à l’aiguille. Dans l’échelle très étendue des donneurs de sang, signalons le petit Jean-Louis, qui n’a que six ans, et le doyen, M. Camille Guyot, portant, cette fois, 73 ans.* 2.5. « Entre la messe et le banquet, les jeunes mariés offrent leur sang à Laxou » Nancy, 17 février (dépêche France-Soir). — Noces de sang à Laxou (M.-et-M.). Les infirmières recevaient les donneurs volontaires, à la mairie, où le centre de transfusion de Nancy avait organisé, samedi, une journée du sang, quand surgit une noce entière. Soixante-dix personnes au total. Dont les jeunes mariés, M. et Mme Ott fermaient le cortège. Ils allaient tous offrir leur sang, y compris le prêtre. Ainsi le traditionnel réconfort réservé aux donneurs servit de horsd’œuvre au banquet nuptial.
2. Les donneurs de sang sont « formidables » ! 2.6. « Champion du monde des donneurs de sang » 2.1. « Un donneur de sang âgé de huit ans » Montpellier, 26 mai (P.-J.). — Un petit garc¸on de huit ans, Georges Montclus, s’est présenté avec trois cents donneurs de sang à l’hôpital de Narbonne, à l’appel du centre de transfusion sanguine de Montpellier. Les médecins ont accepté de procéder à la piqûre intraveineuse et au prélèvement de sang auxquels l’enfant s’est prêté avec beaucoup de cran. Georges Montclus est le fils de M. Michel Montclus, gardien de la paix à Narbonne et lui-même donneur de sang.*
M. Joseph Almaleh en était hier à son 655e don ! Encore en 1979, son nom était inscrit dans le livre des records mondiaux. Pour cet homme, donner son sang était devenu une véritable habitude. « Depuis l’âge de 18 ans que je donne du sang. Toutefois, au début j’en donnais par petites quantités mais souvent. . . C’est mon truc !. . . » Marseillais d’origine, M. Elmaleh a pu donner de son sang partout à travers le monde. Il a même sauvé la vie de huit enfants. Très jeune, il donnait du sang au moins vingt quatre fois par année. Aujourd’hui, à 65 ans, il doit ralentir et n’en donne que trois fois par an. « Dieu m’a donné une force
Pour citer cet article : Lefrère J-J, Garraud O. Le don de sang dans la presse franc¸aise des années 1950–1980. Transfusion Clinique et Biologique (2015), http://dx.doi.org/10.1016/j.tracli.2015.12.007
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et je m’en sers. Je ne cherche nullement la publicité en posant ce geste », de conclure M. Elmaleh (1980).*
3. Un peu de pipolisation pour la promotion ? 3.1. « Au Palais-Bourbon, les députés ont donné leur sang. Mais le ministre de la Santé n’avait pas. . . de veines ». Un service de prélèvement sanguin vient d’être aménagé dans la salle de gymnastique du Palais-Bourbon. Dès hier latin, à l’appel de leurs noms par les questeurs du Palais-Bourbon, de nombreux députés ont donné leur sang. M. Mendès-France fut le premier à donner le bon exemple, suivi par MM. Joseph Dumas et Triboulet. Le ministre de la Santé publique, M. Paul Ribeyre, député de l’Ardèche, tint également à donner son sang. Mes docteurs Bodin et Vandenbrouck ne purent effectuer le moindre prélèvement sur l’Excellence ministérielle. - Vous n’avez pas de veines, monsieur le ministre, conclurent les praticiens fort désappointés.* 3.2. « L’ex-fiancée de Johnny Hallyday : “Donnez-moi votre sang” » La fiancée délaissée de Johnny Halliday, Patricia Viterbo, ne sait plus qu’inventer pour refaire ami-ami avec son Johnny. Après avoir essayé de l’apitoyer en versant son propre sang — elle s’était tailladée les veines — elle va maintenant tenter de l’attendrir en demandant le sang des autres. Elle vient de signer un contrat pour tourner un documentaire où elle aura, si l’on peut dire, Varel et Bailly pour partenaire : il s’agit de la « Tournée du sang ». Patronnée par l’État, cette initiative d’intérêt public aura pour centre d’attraction une roulotte sanitaire itinérante et un énorme autocar. La caravane démarrera en juillet pour faire le tour de toutes les grandes villes franc¸aises, de préférence celles où se trouvent des comédiens ou des célébrités. Ces derniers seront utilisés pour haranguer les foules afin qu’elles donnent leur sang. [Paris-Jour, 8 mars 1963]
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3.4. « Il n’est pas le gigolo qu’on disait, Théo a donné son sang pour Piaf » Les médecins sortirent précipitamment de la chambre. « Il n’y a pas une minute à perdre, dirent-ils. Il faut faire de toute urgence une transfusion sanguine complète à Edith Piaf, sinon, elle est perdue. Ils venaient de découvrir qu’Edith Piaf n’avait plus qu’un million neuf cent mille globules rouges, alors qu’un adulte normal en a normalement quatre millions. Aussitôt, Théo Sarapo, son mari, qui attendait dans le couloir avec Loulou Barrier, son impresario, s’avanc¸a. - S’il faut du sang pour Edith, dit-il, prenez le mien. Nous appartenons au même groupe sanguin : « A, positif ». On conduisit Théo Sarapo à l’infirmerie et il tendit son bras garrotté à l’aiguille. En même temps, on appela d’urgence d’autres donneurs de sang pour le relayer et permettre cette transfusion totale qui allait sauver Edith Piaf. Le mot n’est pas trop fort, en donnant son sang à sa femme, Théo Sarapo a contribué à la tirer de l’abîme. [. . .] Jean Noli [France-Dimanche] 3.5. « Piques et piques et anagrammes » Une photo de presse a montré l’épouse du président de la République allongée et tendant le bras dans un centre de transfusion sanguine. En mélangeant les lettres de : Anne-Aymone Giscard d’Estaing, on obtient : Y’a cinéma de sang donné gratis. (Le Canard enchaîné) 4. Bénévole, oui, mais pourquoi pas un petit bonus ? 4.1. « Du globule au ballon rond. . . » À Rome, quiconque donne son sang pour les transfusions rec¸oit des invitations pour les plus importants matches de football se déroulant au stade olympique. [L’Équipe, 27 mars 1981] 4.2. « Pas de B.B. pas de sang : les détenus de Glasgow récupèrent les photos de la vedette en échange du don de leur sang »
3.3. « Les Potins de la commère, par Carmen Tessier » Comme plusieurs de ses collègues, M. Mendès-France, député radical-socialiste de l’Eure, a donné son sang dans la salle d’escrime du Palais-Bourbon. Après qu’on l’eût vidé d’une partie de son contenu, un infirmier demanda : « Avez-vous été vacciné ? — Oui, répondit M. Mendès-France, il y a huit jours, contre la variole. — Alors, dit l’infirmer, votre sang n’est pas bon. » Et il le jeta dans le lavabo. En le regardant tristement disparaître, le député de l’Eure dit : « Vous auriez pu me questionner avant et me le laisser. » [France-Soir, 5 avril 1952]
Glasgow, 2 août (A.P.). — « Pas de Bardot, pas de sang ! » Cet étrange slogan a retenti dans les murs de la sombre prison de Barlinnie, à Glasgow. La direction ayant interdit aux prisonniers de coller des photos d’actrices sur les murs de leurs cellules, une délégation de détenus s’est présentée au bureau de la direction quelques heures avant l’arrivée d’une équipe médicale qui devait recueillir des donations de sang. « Si vous ne nous permettez pas de garder nos photos de Brigitte Bardot, dit le porte-parole, notre sang restera où il est. » L’interdiction a été levée.
Pour citer cet article : Lefrère J-J, Garraud O. Le don de sang dans la presse franc¸aise des années 1950–1980. Transfusion Clinique et Biologique (2015), http://dx.doi.org/10.1016/j.tracli.2015.12.007
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4.3. « Et la subvention ? » Fraîchement installé, c’était bien la première fois que je maudissais les appels de nuit. Depuis, mon répertoire s’est bien enrichi. Malgré ma fatigue, le colloque entamé avec la voix issue des ténèbres ne laissait pas d’échappatoire : le test-esquive « estce que c¸a saigne ? » s’était révélé brutalement inefficace. C¸a pissait. . . Le temps de passer à l’hosteau, d’embarquer ma donneuse universelle, Sœur Angèle, cornette posée à la diable, et je fonc¸ais à la ferme éloignée. Dans une encoignure, la femme gisait inerte, les pupilles dilatées, trous noirs dans un visage de cire. Sous la couche, une à une, des gouttes achevaient de tomber lentement, comme à regret. La religieuse s’était déjà allongée contre la moribonde ; la transfusion de bras à bras expédiée, un curage rapide avait fermé le robinet. La femme gémit à peine, vaguement recolorée. Il aurait fallu encore un peu de sang. J’avais maintenant le temps de voir le mari, demeuré à l’écart : un bon rougeaud. D’autorité, je recherchai son groupe. C¸a collait. Il s’allongea à son tour et je recommenc¸ai à infuser la liqueur de vie. . . Cette fois, la femme sourit, remercia faiblement de ses lèvres moins pâles. L’homme demeurait muet, trop ému. Je lui tendis une main qui lui permettait de libérer par une vigoureuse étreinte sa gratitude éperdue. . .Alors seulement, il s’enhardit : « Des fouès, Môssieu le Docteur, j’aurais-t’y pas drouet à une petite subventieunn pour avouère donné mon sang ? » (Dr. Cornu, Tonus, mai 1964) 5. Fausses bonnes idées ? 5.1. « Impôt sur le sang ? » Impôt sur le sang pour les garc¸ons et les filles de 20 ans : c’est la suggestion que vient de faire, devant le Conseil général de la Seine, Mme Monique Hubert qui suggère que les jeunes donnent — en plusieurs fois — un litre de sang à leur majorité.* 5.2. « Bolivie. L’amende du sang » Les médecins de la ville de Bogota ont suggéré de faire payer les amendes encourues par les automobilistes contrevenant au code de la route avec du sang. Les réserves de sang des hôpitaux sont en effet insuffisantes.*
l’amende habituelle et le don d’une pinte de leur sang au centre de transfusion de la Croix-Rouge. [5 juin 1962] 5.4. « Un vœu des médecins du Tour : bracelet avec le groupe sanguin » Grenoble. — Suite au grave accident de l’Espagnol Juan Sanchez (qui dut subir une transfusion de sang) au cours de l’étape Saint-Flour-Saint-Étienne, les médecins du Tour — qui avaient perdu une heure à rechercher le groupe sanguin de Sanchez — ont demandé aux organisateurs de prévoir, pour l’année prochaine, le port par les coureurs d’un bracelet indiquant leur groupe sanguin. Si un cas comme celui de l’Espagnol devait, hélas, se reproduire, on voit l’utilité de cette initiative. (L’Équipe, 9 juillet 1963) 5.5. « Une carte d’identité de premier secours collée sur le tableau de bord de la voiture » Cette carte d’identité de premier secours, dont l’initiative revient à la fédération des grands invalides de guerre, peut, dès demain, vous sauver la vie. Outre vos nom et adresse, elle indique votre groupe sanguin, votre numéro de sécurité sociale et la présence de votre photographie évite toute méprise. Appliquée sur le tableau de bord ou sur le pare-soleil qui restent miraculeusement intacts quelle que soit la collision, le sauveteur qui la trouvera pourra l’utiliser sur-le-champ. Rappelons, en effet, que seuls gendarmes et policiers sont habilités à fouiller les blessés ? Pompiers ou ambulanciers n’en ont strictement pas le droit. Ainsi le veut la loi. [. . .] Cette carte, de l’avis des spécialistes interrogés, faciliterait sans contestation possible la tâche de ceux qui luttent de vitesse contre la mort et qui sont trop souvent gênés dans leur action après des règlements ou des lois archaïques qui, si leur utilité ne peut être discutée, retarde bien souvent le sauvetage. (Le Figaro) 5.6. « Groupe sanguin exact » Pour éviter toutes les erreurs possibles dans l’attribution du groupe sanguin, le professeur Pierre Al Marachy a réalisé cet appareil qui permet d’obtenir des photographies d’identité comportant automatiquement à leur partie inférieure l’indication du groupe sanguin. Le sang est prélevé avant la photo sur le médius, toutes les autres opérations sont automatiques. Durée : 10 min. Coût : 30 F. 6. Petites économies mal comprises. . . et pénibles règlements
5.3. « Stationnement et journée du sang » 6.1. « Le prix du sang » Dans le district de Moorfield (Virginie), le maire a favorablement accueilli une suggestion que lui faisait le président de la banque du sang, à l’occasion de la traditionnelle « journée du sang ». Il a décidé que, ce jour-là, les automobilistes condamnés pour stationnement abusif auront le choix entre le paiement de
C’est un vrai scandale. Je suis chauffeur à la Croix-Rouge franc¸aise et dans le courant de décembre 61 on m’a chargé d’aller chercher au centre de l’hôpital Saint-Antoine à Paris quatre flacons de sang de 250 g chacun.
Pour citer cet article : Lefrère J-J, Garraud O. Le don de sang dans la presse franc¸aise des années 1950–1980. Transfusion Clinique et Biologique (2015), http://dx.doi.org/10.1016/j.tracli.2015.12.007
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Quelle ne fut pas ma stupeur de m’entendre réclamer la somme de 140 NF, soit quatorze mille anciens francs. Je sais bien qu’il y a des frais de manutention, d’emballage, de stockage, mais tout de même : 3500 francs pour 250 g de sang, c’est salé ! Surtout que la marchandise ne coûte rien ou presque. Puisque les donneurs de sang sont tous des bénévoles. Ce n’est tout de même pas le minable casse-croûte et le ticket de métro qu’on leur donne qui peuvent entrer en ligne de compte ! Sous le couvert d’une bonne action, certains ne feraient-ils pas une bonne opération commerciale. M.G.R., Boulogne. [France-Dimanche, 15 février 1962] 6.2. « À Nice, le pilote refuse de prendre 8 flacons de sang attendus à Bastia : le colis n’était pas conforme au règlement » Nice, 26 septembre (dépêche France-Soir). — Le colis n’était pas conforme au règlement. Voilà pourquoi huit flacons de sang destinés à des malades de Bastia, qui devaient subir une opération urgente, sont restés seize heures en souffrance à l’aéroport de Nice. Le chef de bord de l’avion postal, à bord duquel la caisse isotherme devait être embarquée, avait refusé de la prendre pour ne pas enfreindre les règles des P.T.T. Heureusement, les malades n’ont pas eu à souffrir de ce retard. La caisse a été finalement acheminée par l’avion régulier Nice-Bastia. Mais le docteur Jacques Donat, directeur du centre de transfusion sanguine de Nice, à qui l’hôpital civil de Bastia et une clinique avaient demandé le sang, a protesté dans un communiqué contre « le manque de compréhension du personnel navigant qui a refusé de prendre en charge un colis dont le poids n’excédait pas cinq kilos ! » 7. Mieux vaut en sourire ! 7.1. « Un Américain utilise du sang humain comme engrais » Washington (Indiana), 22 octobre (AP). — Le shérif du village de Washington, dans l’Indiana, n’a pu trouver dans le code aucun texte qui lui permette d’empêcher un habitant du village, M. Freeman Kemp, de continuer à utiliser du sang humain comme engrais dans son jardin. M. Kemp, employé à l’hôpital de la ville voisine, a reconnu qu’il utilisait comme engrais des flacons de sang trop vieux pour être utilisé pour des transfusions. Ce sont des enfants qui, en jouant, ont découvert de le pot aux roses — en l’espèce 516 flacons d’un demi-litre de sang chacun que M. Kemp avait stockés dans son jardin. La direction de l’hôpital a fait savoir que l’emploi du sang comme engrais était couramment pratiqué par les employés depuis longtemps.
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7.2. « Un scoubidou fait de tubes à transfusion a permis au colosse guadeloupéen de s’évader » Le Havre, 7 mars (dépêche France-Soir). — Le Havre est en alerte. Toute la nuit des patrouilles ont sillonné les rues. Elles recherchent un dangereux évadé, Yvon Bellanger, 37 ans, que trois détails devraient pourtant empêcher de courir longtemps : son teint (il est Guadeloupéen), sa taille (1 m 90) et le fait qu’il est seulement vêtu d’un pyjama et d’une robe de chambre. Il aurait été aperc¸u ce matin lundi du côté d’Yvetot, à 40 km du Havre. Avant de partir, il a dérobé un rasoir-couteau à un malade. C’est dans la nuit de samedi à dimanche que Bellanger a réussi à s’échapper de l’hôpital du Havre où l’idée de la « belle » ne cessait de le hanter. Il a confectionné avec les tubes servant aux transfusions sanguines. . . un scoubidou géant. En le prolongeant avec ses draps, en attachant le tout à la barre d’appui de la fenêtre, il n’eut plus qu’à se laisser glisser dans le jardin de l’hôpital. Aucun gardien ne se rendit compte de son absence avant le matin. 7.3. « Venu retirer un certificat de naissance : on lui fait une prise de sang et il passe une visite médicale en règle » Domfront, 19 juin. Une désopilante aventure est survenue ce matin, à Domfront, à un homme qui était venu à la mairie pour y retirer un certificat de naissance. Sa démarche coïncidait avec la « Journée du sang » pour laquelle les volontaires viennent en foule, et il s’était présenté devant une table où siégeaient deux secrétaires. À la demande de ceux-ci, il déclina son identité, puis on le pria de passer dans une pièce voisine où une infirmière lui prit la main et lui fit une légère incision au bout de doigt. De là l’homme, qui ne disait toujours rien, fut envoyé dans un autre local où il se déshabilla, comme on le lui demandait et subit une minutieuse visite médicale. Ce n’est qu’au moment où une deuxième infirmière s’apprêtait à le faire s’allonger sur un lit qu’il posa cette question : « Il faut tout cela pour obtenir une pièce d’état civil ? » Ce patient citoyen voulait tout simplement retirer le bulletin de naissance de son dernier-né. . . 8. Plus jamais cela ! 8.1. « La ségrégation du sang » Nouvelle-Orléans, 4 septembre (United Press International [UPI]). — Un petit enfant de trois ans, aux yeux bleus, pâle et émacié, risque de ne pouvoir être soigné parce qu’à la NouvelleOrléans on pratique même la « ségrégation du sang ». La loi exige que le sang destiné aux transfusions soit étiqueté « blanc » ou « noir ». Or, en raison de cette loi raciale, la Croix-Rouge refuse d’envoyer des réserves de sang en Louisiane. 9. Conclusions Nuls mieux que les humoristes savent que leur art permet de dire l’indicible, passé, présent et à venir. Chacune
Pour citer cet article : Lefrère J-J, Garraud O. Le don de sang dans la presse franc¸aise des années 1950–1980. Transfusion Clinique et Biologique (2015), http://dx.doi.org/10.1016/j.tracli.2015.12.007
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des anecdotes rapportées ici disent quelque chose d’hier à l’homme d’aujourd’hui, sur l’intemporalité de la générosité et de l’altruisme – qui n’empêche pas le côté râleur et moqueur bien franc¸ais. Elles montrent aussi combien nous avons fait – ou tout simplement vu – les mentalités évoluer, le concept de l’éthique appliquée au don de sang, la sécurité et la sécurité, etc. Elles nous apprennent enfin la distance qui s’impose entre le politique et le journalistique (le second rapportant en général le premier) en matière de don de sang et de transfusion : la bonne idée du moment n’est pas nécessairement conforme à l’éthique, la qualité et la sécurité, quand bien même il l’apparaîtrait en premier abord. La transfusion a payé – au travers des premières victimes, les malades – un prix exorbitant (qui n’est pas encore totalement
soldé) aux compromis. L’humour des choses graves est aussi là semble-t-il pour nous vacciner contre de mauvaises tentations. Déclaration de liens d’intérêts Les auteurs déclarent ne pas avoir de liens d’intérêts. Remerciements O.G. souhaite remercier tout particulièrement les docteurs Syria Laperche et Franc¸ois Lefrère ainsi que le professeur JeanDaniel Tissot pour leur relecture critique de cet article et leur avis quant au choix des pastilles et de leur présentation.
Pour citer cet article : Lefrère J-J, Garraud O. Le don de sang dans la presse franc¸aise des années 1950–1980. Transfusion Clinique et Biologique (2015), http://dx.doi.org/10.1016/j.tracli.2015.12.007