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Actualités
Les actualités de DDS (3e trimestre 2008) Le comité de rédaction de DDS Gilles Devers SCP Devers Soula, 22, rue Constantine, 69001 Lyon, France Disponible sur Internet le 21 novembre 2008
Thèmes abordés Droit International 1. La Charte de Tallinn : des systèmes de santé pour la santé et la prospérité 2. Déclaration de Séoul sur la sécurité et la santé au travail 3. Agence européenne du médicament Droits fondamentaux et protection de la personne 4. Fœtus 5. Identification par empreintes génétiques 6. Étranger en situation irrégulière. Risque suicidaire 7. Étranger en situation irrégulière. Risque médical non établi Éthique et bioéthique 8. Importation et exportation des produits du corps humain Politiques publiques et réglementation sanitaires 9. Prise en charge médicale des personnes infectées par le VIH 10. Saturnisme : quelles stratégies de dépistage chez l’enfant ? 11. Rapport annuel 2007 de l’institut de veille sanitaire 12. Référentiel pour l’évaluation des centres de référence maladies rares 13. Jeux de hasard et d’argent. Contextes et addiction 14. Publicité pour le tabac 15. Pour une politique nationale d’éducation thérapeutique du patient 16. Information des patients
Adresse e-mail :
[email protected]. 1629-6583/$ – see front matter doi:10.1016/j.ddes.2008.10.003
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17. Interdiction de la consommation des boissons énergisantes dans les établissements scolaires 18. Comité de lutte contre la grippe 19. Bonnes pratiques de dons de médicaments 20. Lutte contre le trafic de produits dopants Établissements de santé 21. Équilibre financier des établissements de santé 22. Gouvernance de l’hôpital Professions de santé 23. Atlas de la démographie médicale 24. Médecin. Cabinet secondaire 25. Non rémunération des gardes en réquisition 26. Rapport annuel sur l’état de la fonction publique, 2007–2008 27. Formation professionnelle tout au long de la vie dans la fonction publique hospitalière 28. Commissions régionales d’équivalence pour l’accès aux concours de la fonction publique hospitalière 29. Actes professionnels accomplis directement par les pédicures-podologues 30. Injection du vaccin antigrippal par les infirmiers 31. Règles de déontologie propres aux praticiens des armées 32. Statut particulier des praticiens des armées Droits sociaux 33. Les bénéficiaires de l’AME en contact avec le système de soins 34. Accueil familial des femmes victimes de violences au sein du couple 35. Assurance et maladie grave 36. Pour une refondation de notre pacte social de santé 37. Caractère non indemnitaire de l’allocation aux adultes handicapés Responsabilité 38. Chirurgie : absence de faute technique mais mauvaise information 39. Erreur et faute dans le diagnostic 40. Gynéco-obstétrique. Handicap non diagnostiqué 41. Obstétrique. Responsabilité pour faute 42. Faute du père faisant obstacle à la pratique de soin urgent lors d’un accouchement 43. Vaccination obligatoire contre l’hépatite B et SEP 44. Faute infirmière dans l’administration des médicaments 45. Procédure. Nécessité d’une notification régulière 46. Responsabilité sans faute des établissements 47. Cancer. Imputabilité non établie avec l’exposition de la centrale de Tchernobyl 48. Antennes relais. Non-application du principe de précaution Santé mentale 49. Santé mentale en France, surveillance et enjeux 50. Les Franc¸ais et leur sommeil 51. Injonction de soins 52. Responsabilité d’un CHS pour des troubles physiques non décelés 53. Suicide d’un détenu 54. Hospitalisation sur demande d’un tiers. Motivation du certificat de quinzaine 55. Hospitalisation sur demande d’un tiers. Absence de motivation de la décision du directeur
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Droit international 1. La Charte de Tallinn : des systèmes de santé pour la santé et la prospérité OMS, 13 juin 2008 La Charte a pour objet de sceller l’engagement des États membres de la Région européenne de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) à améliorer la santé de la population par un renforcement des systèmes de santé, tout en reconnaissant la diversité sociale, culturelle et économique qui existe dans la Région. Au sein du cadre politique et institutionnel de chaque pays, un système de santé est l’ensemble des organismes, institutions et ressources du secteur public et du secteur privé mandatés pour améliorer, maintenir ou rétablir la santé. Les systèmes de santé englobent à la fois des services aux personnes et des services à la population et des activités visant à influencer les politiques et les actions d’autres secteurs pour agir vis-à-vis des déterminants sociaux, environnementaux et économiques de la santé. Tous les pays de la Région européenne de l’OMS doivent relever des défis sanitaires majeurs dans un contexte de mutation démographique et épidémiologique, de disparités socioéconomiques croissantes, de ressources limitées, de développement technologique et d’attentes grandissantes. Au-delà de sa valeur intrinsèque, l’amélioration de la santé contribue au bien-être social par ses effets sur le développement économique, la compétitivité et la productivité. Des systèmes de santé hautement performants contribuent au développement économique et à la prospérité. Aussi, les États membres s’engagent-ils à : • promouvoir les valeurs partagées de solidarité, d’équité et de participation dans les politiques de la santé, dans l’affectation des moyens et dans d’autres actions, en veillant à ce que les besoins des pauvres et d’autres groupes vulnérables rec¸oivent l’attention nécessaire ; • investir dans les systèmes de santé et favoriser les investissements multisectoriels qui influencent la santé, en se fondant sur les bases factuelles disponibles concernant les liens entre le développement économique et la santé ; • promouvoir la transparence et rendre des comptes quant à la performance des systèmes de santé dans la production de résultats mesurables ; • rendre les systèmes de santé plus réactifs aux besoins, aux préférences et aux attentes des personnes, tout en reconnaissant les droits et responsabilités de celles-ci en ce qui concerne leur propre santé ; • faire participer les groupes concernés à l’élaboration et à la mise en œuvre des politiques ; • favoriser l’apprentissage et la coopération entre pays en matière de conception et de mise en œuvre des réformes des systèmes de santé à l’échelle nationale et infranationale. L’OMS apportera son soutien à ses États membres européens pour développer leurs systèmes de santé et assurera une coordination entre les pays dans la mise en œuvre de la Charte, y compris pour la mesure de la performance et l’échange d’expériences au sujet des engagements énoncés ci-dessus. 2. Déclaration de Séoul sur la sécurité et la santé au travail Bureau international du travail (BIT) et Association internationale de la sécurité sociale (AISS), 29 juin 2008 La Déclaration reconnaît la gravité des conséquences des accidents du travail et des maladies liés au travail, dont 2,3 millions de décès par an dans le monde et des pertes équivalant, selon les estimations du Bureau international du travail, à 4 % du produit intérieur brut (PIB) à l’échelle mondiale, et rappelle que la promotion de la sécurité et de la santé au travail et la prévention des accidents et des maladies en milieu de travail sont des éléments centraux de la mission fondatrice de l’OIT et de l’Agenda du travail. La promotion d’un niveau élevé de sécurité et de santé au travail est de la responsabilité de la société dans son ensemble et que tous les membres de la société doivent contribuer à la réalisation de cet objectif en s’assurant que la priorité est donnée à la sécurité et à la santé au travail dans les programmes nationaux, tout en établissant et en maintenant une culture de prévention nationale en la matière. Une culture de prévention nationale en matière de sécurité et de santé est celle où le droit à un milieu de travail sûr et salubre est respecté à tous les niveaux, où les gouvernements, les employeurs et les travailleurs
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s’emploient activement à assurer un milieu de travail sûr et salubre au moyen d’un système de droits, de responsabilités et d’obligations définis, et où le principe de prévention se voit accorder la plus haute priorité. L’amélioration continue de la sécurité et de la santé au travail devrait être encouragée par l’introduction d’un système de gestion de la sécurité et de la santé au travail et par l’élaboration d’une politique nationale en conformité avec les principes énoncés dans la partie II de la convention (no 155) de l’OIT sur la sécurité et la santé des travailleurs, 1981. La Déclaration se poursuit avec un ensemble de pistes proposées comme directions aux gouvernements. 3. Agence européenne du médicament Décret n o 2008-834 du 22 août 2008 Il s’agit de la mise en œuvre du règlement (CE) n o 726/2004 du Parlement européen et du Conseil du 31 mars 2004 établissant les procédures communautaires pour l’autorisation et la surveillance en ce qui concerne les médicaments à usage humain et à usage vétérinaire et instituant une Agence européenne du médicament. Droits fondamentaux et protection de la personne 4. Fœtus Quatre textes réglementaires tirent les enseignements des arrêts rendus par la Cour de cassation le 6 février 2008 (n o 06-16.498, 06-16.499 et 06-16.500) revenant à l’interprétation stricte de l’article 79-1 alinéa 2 : lorsqu’un enfant est décédé avant que sa naissance ait été déclarée à l’état civil et à défaut de production d’un certificat médical indiquant que l’enfant est né vivant et viable, l’officier de l’état civil établit un acte d’enfant sans vie qui énonce les jour, heure et lieu de l’accouchement ; que cet acte est inscrit à sa date sur les registres de décès. Cet article 79-1, alinéa 2, du Code civil ne subordonne l’établissement d’un acte d’enfant sans vie, ni au poids du fœtus, ni à la durée de la grossesse. Ces arrêts, revenant à lecture littérale du texte, imposaient une réécriture législative pour entériner la solution antérieure, soit la reprise des critères de viabilité de l’OMS, soit l’adoption des mesures réglementaires visant à mettre en œuvre le texte existant. C’est cette seconde solution qui a été choisie, avec quatre textes réglementaires du 20 août 2008. Le système institué est ainsi facultatif, comme une possibilité pour les familles, et il n’est pas sans limites. Celles-ci viennent des annexes du dernier arrêté, qui détermine des modèles de certificats médicaux : la déclaration est possible pour les accouchements spontanés ou provoqués pour raison médicale, y compris les interruptions médicales de grossesse. Elle n’est pas possible pour les interruptions précoces de grossesse, ou fausses couches, ainsi que pour les interruptions volontaires de grossesse. Décret n o 2008-798 du 20 août 2008 modifiant le décret n o 74-449 du 15 mai 1974 relatif au livret de famille Le décret n o 74-449 du 15 mai 1974 modifié relatif au livret de famille et à l’information des futurs époux sur le droit de la famille. Il est rétabli un article 4 aux termes duquel un livret de famille est remis, à leur demande, aux parents qui en sont dépourvus, par l’officier de l’état civil qui a établi l’acte d’enfant sans vie. Il comporte un extrait d’acte de naissance du ou des parents ainsi que l’indication d’enfant sans vie, la date et le lieu de l’accouchement. Décret n o 2008-800 du 20 août 2008 relatif à l’application du second alinéa de l’article 79-1 du Code civil L’acte d’enfant sans vie prévu par le second alinéa de l’article 79-1 du Code civil est dressé par l’officier de l’état civil sur production d’un certificat médical établi dans des conditions définies par arrêté du ministre chargé de la santé et mentionnant les heure, jour et lieu de l’accouchement. Arrêté du 20 août 2008 modifiant l’arrêté du 1er juin 2006 fixant le modèle de livret de famille Le livret de famille peut être délivré à la demande des parents qui en sont dépourvus, à l’occasion de l’établissement d’un acte d’enfant sans vie, afin que soit mentionnée l’indication d’enfants sans vie, date et lieu de l’accouchement.
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Arrêté du 20 août 2008 relatif au modèle de certificat médical d’accouchement en vue d’une demande d’établissement d’un acte d’enfant sans vie. Le certificat médical d’accouchement prévu à l’article 1er du décret susvisé est établi conformément au modèle annexé au présent arrêté. Le praticien signataire du certificat est soit celui qui a effectué l’accouchement, soit celui qui dispose des éléments cliniques permettant d’en affirmer l’existence. 5. Identification par empreintes génétiques Cour de cassation, 1re Civ., 2 avril 2008, n o 06-10256 et 07-11639 L’article 16-11 du Code civil, dans sa rédaction issue de la loi n o 2004-800 du 6 août 2004, selon lequel, sauf accord exprès de la personne manifesté de son vivant, aucune identification par empreintes génétiques ne peut être réalisée après sa mort, est immédiatement applicable aux situations en cours. Dès lors, une cour d’appel, saisie d’une action en recherche de paternité, qui relève que la preuve du consentement du père recherché, décédé en 2001, à ce que des échantillons de sperme déposés auprès du CECOS dans le but d’autoconservation puissent servir à son identification par empreintes génétiques, n’était pas rapportée, et que celui-ci n’avait pas exprimé de son vivant son accord pour une expertise génétique quels qu’en soient le procédé et la forme, n’a pu qu’en déduire que le demande, tendant à voir ordonner une telle expertise postmortem, devait être écartée. 6. Étranger en situation irrégulière. Risque suicidaire CAA Lyon, 9 juillet 2008, no 08LY00594 Une femme est entrée en France irrégulièrement et n’est titulaire d’aucun titre de séjour, de telle sorte que le préfet pouvait décider d’ordonner sa reconduite à la frontière. Il ressort des pièces du dossier et notamment d’un certificat de vie maritale établi le 9 février 2007 que cette femme vivait, depuis au moins un an à la date de la décision en litige, avec un ressortissant franc¸ais. Par ailleurs, selon des certificats médicaux précis et concordants, établis en juin 2006, octobre 2007 et février 2008, elle souffrait de troubles psychologiques graves, qui l’avaient déjà conduite à une tentative de suicide. Dans ces conditions, en prenant une mesure de reconduite à la frontière ayant pour effet d’interrompre brutalement sa vie maritale, le préfet du Rhône a apprécié de manière manifestement erronée les conséquences qu’une mesure d’éloignement pouvait avoir sur sa situation personnelle. Dès lors, l’arrêté est entaché d’illégalité. 7. Étranger en situation irrégulière. Risque médical non établi CAA Bordeaux, 1◦ juillet 2008, n o 08BX00187 Le médecin inspecteur de la santé a, par avis du 3 août 2007, estimé que si l’état de santé de M. X. nécessitait une prise en charge médicale, il pouvait bénéficier d’un traitement approprié dans son pays d’origine et, en outre, qu’un défaut de prise en charge n’entraînerait pas des conséquences d’une exceptionnelle gravité. Le certificat médical du 20 juillet 2007 produit par le requérant faisant état de problèmes de lombalgies nécessitant un traitement médical ne permet par d’infirmer cette appréciation. L’intéressé produit pour la première fois en appel un certificat établi par un psychiatre le 30 novembre 2007 indiquant qu’il souffre d’un syndrome traumatique nécessitant une prise en charge médicamenteuse et psychologique et étant susceptible d’être aggravé par son retour en Turquie. La seule production de ce certificat médical ne permet pas d’établir la réalité d’un risque d’aggravation majeure de son état de santé en cas de retour dans son pays d’origine. Il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet se serait abstenu de procéder à un examen particulier des risques encourus par M. X. en cas de retour dans son pays d’origine. Éthique et bioéthique 8. Importation et exportation des produits du corps humain Décret n o 2008-891 du 2 septembre 2008
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Il s’agit de la mise en œuvre de la directive 2004/23/CE du Parlement européen et du Conseil du 31 mars 2004 relative à l’établissement de normes de qualité et de sécurité pour le don, l’obtention, le contrôle, la transformation, la conservation, le stockage et la distribution des tissus et cellules humains, et de la directive 2006/86/CE de la Commission du 24 octobre 2006 relative aux exigences de trac¸abilité, la notification des réactions et incidents indésirables graves, ainsi que certaines exigences techniques relatives à la codification, à la transformation, à la conservation, au stockage et à la distribution des tissus et cellules d’origine humaine. Politiques publiques et réglementations sanitaires 9. Prise en charge médicale des personnes infectées par le VIH Rapport au ministre de la Santé, Pr Patrick Yeni, septembre 2008 Environ 85 000 personnes disposent aujourd’hui d’une prise en charge au titre de l’infection par le VIH, et ce nombre s’accroît annuellement. Six mille trois cent personnes ont découvert leur séropositivité en 2006. L’épidémie reste donc active et la recrudescence des IST depuis 2001, notamment la syphilis, témoigne d’un relâchement des mesures de prévention de la transmission sexuelle du VIH en particulier chez les hommes homosexuels. L’intérêt de renforcer les messages de prévention, et d’améliorer les stratégies de dépistage, à la fois plus larges et mieux ciblées, est largement exprimé dans un chapitre du rapport consacré à cette réflexion. Dépister plus précocement les personnes infectées est d’autant plus nécessaire qu’un tiers des patients n’accèdent à une prise en charge qu’au stade tardif de Sida. Ce retard est d’autant plus dommageable que nous profitons aujourd’hui pleinement des progrès thérapeutiques spectaculaires qui ont été accomplis ces dernières années avec la mise à disposition de nouveaux médicaments y compris dans des classes thérapeutiques nouvelles. Les traitements ne sont pas seulement plus nombreux, ils sont devenus plus simples à prendre et mieux tolérés par les patients, également plus actifs sur les virus résistants. Aujourd’hui, plus de 80 % des patients pris en charge rec¸oivent une trithérapie et au moins les trois-quarts d’entre eux ont une charge virale indétectable dans le plasma. La conséquence en est la diminution constante du nombre de nouveaux cas de Sida, et l’infection par le VIH est passée du statut de maladie rapidement mortelle à celui d’une affection chronique. Malheureusement, les progrès sont moins marquants en ce qui concerne la reconstitution immunitaire, souvent seulement partielle lorsque le traitement est commencé tardivement. Cela est un argument supplémentaire qui, associé aux arguments d’efficacité et de tolérance des nouveaux médicaments, conduit à recommander d’initier le traitement encore plus tôt dans la maladie qu’on le recommandait en 2006. Parvenir à un dépistage large des sujets en phase précoce de l’infection est donc un objectif essentiel pour pouvoir traiter plus tôt et permettre au traitement de remplir non seulement son objectif virologique (une charge virale indétectable) mais aussi son objectif immunologique. L’utilisation de tests rapides de sérologie VIH pourrait faciliter les nouvelles stratégies de dépistage ; du fait de leur simplicité et de l’obtention quasi immédiate des résultats, ils permettraient d’atteindre plus facilement les populations les plus concernées. Si l’évolution de l’infection par le VIH est mieux contrôlée chez les patients traités, la demande de soins reste importante en 2008. En effet, alors que les pathologies infectieuses et tumorales graves compliquant l’infection et définissant le Sida sont devenues, pour la plupart, moins fréquentes, d’autres affections ont vu leur incidence se maintenir, voire augmenter. Au total, si la mortalité et l’incidence des hospitalisations ont diminué, la morbidité s’est diversifiée. Cela souligne la nécessité d’une prise en charge de plus en plus souvent multidisciplinaire, ne se limitant plus simplement aux paramètres immunovirologiques. Cet aspect multidisciplinaire contribue à la complexité de la prise en charge de l’infection par le VIH, qui associe, à côté du médecin référent VIH et du médecin généraliste, un grand nombre de médecins spécialistes d’autres disciplines, de professionnels de santé prenant en charge l’éducation thérapeutique et les aspects sociaux, psychologiques, diététiques, et les associations de patients. Cette complexité nécessite, en particulier, une adaptation de la prise en charge à plusieurs niveaux : dans le domaine social, il est important de veiller à ce que les difficultés éventuelles (multiples dans le cadre de cette infection) ne mettent pas en péril le maintien du succès thérapeutique à long terme. Dans le domaine
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de l’organisation des soins, l’hôpital public peine à valoriser la prise en charge de l’infection par le VIH dans le cadre de la tarification à l’activité, en raison de son caractère multidisciplinaire et des contraintes sociales. Ainsi, les durées d’hospitalisation parfois excessives en service aigu traduisent souvent l’absence de fluidité de la filière de prise en charge en aval, malgré sa diversité. Les coordinations régionales de lutte contre le VIH (COREVIH), nouvellement installées et dont un premier bilan est tiré dans ce rapport, contribueront à une meilleure connaissance des difficultés régionales constatées dans le maillage de la prise en charge VIH. 10. Saturnisme : quelles stratégies de dépistage chez l’enfant ? Rapport Inserm et de l’InVS, 17 juillet 2008 Mise en évidence à la fin des années 1980, l’intoxication des enfants par le plomb figure depuis 1999 parmi la liste des maladies à déclaration obligatoire. Quelque 500 cas de saturnisme infantile sont déclarés chaque année en France. À la demande de la DGS, une expertise opérationnelle a été confiée à l’Inserm et à l’InVS pour analyser les stratégies de dépistage du saturnisme. Des enquêtes locales témoignent d’une baisse de l’imprégnation de fond des populations infantiles. La réhabilitation de l’habitat ancien, la suppression des carburants plombés, le traitement des eaux de distribution publique, la diminution des concentrations en plomb des aliments ont sans doute contribué à cette évolution. Néanmoins, des sources d’intoxication sont encore présentes dans l’environnement des enfants. Les peintures au plomb de l’habitat ancien restent de loin la première source des intoxications signalées. L’inclusion dans le carnet de santé en 2006 d’une question sur le risque de saturnisme constitue une mesure forte d’incitation, pour tous les médecins, à effectuer une évaluation systématique par questionnaire, lors des bilans de santé, du risque d’exposition au plomb chez tout enfant âgé de neuf mois à six ans. 11. Rapport annuel 2007 de l’institut de veille sanitaire Après un éditorial du docteur Franc¸oise Weber, directrice générale de l’institut de veille sanitaire « Continuer à tirer les enseignements des crises et se préparer à affronter de nouveaux défis », le rapport traite des sujets suivants : les maladies infectieuses émergentes et réémergentes ; santé et travail : connaître les expositions et évaluer les risques ; santé et environnement : apporter des réponses scientifiques aux préoccupations de la population ; les syndromes psychosociogéniques et/ou des bâtiments malsains : un diagnostic difficile à faire partager ; maladies chroniques et traumatismes : des enquêtes en population ; la coopération européenne et internationale. 12. Référentiel pour l’évaluation des centres de référence maladies rares Étude HAS, juillet 2008 Les maladies rares ont été retenues comme l’une des cinq grandes priorités inscrites dans la loi de santé publique du 9 août 2004. Cela a conduit à la mise en œuvre d’un plan national maladies rares qui prévoit, notamment, la mise en place de centres de référence labellisés. La labellisation est une démarche de reconnaissance de l’excellence scientifique et médicale de centres hautement spécialisés dans la prise en charge des maladies rares. Elle s’appuie sur une procédure d’appel à projets auprès des centres hospitaliers universitaires et sur une expertise indépendante par un Comité national consultatif de labellisation, associant des professionnels de santé experts des maladies rares, des représentants des associations de patients, des sociétés savantes et des institutionnels. La labellisation est prononcée par le ministre de la Santé pour une durée de cinq ans. Le centre réalise une autoévaluation trois ans après la date de sa labellisation, et fait l’objet d’une évaluation externe cinq ans après. Cette évaluation conditionne le renouvellement de la labellisation. L’autoévaluation et l’évaluation externe sont réalisées avec un référentiel élaboré par la HAS. Dans une première partie, Le référentiel aborde la présentation du centre, son activité et ses évolutions depuis la labellisation. Dans une seconde partie, il développe les thèmes suivants : expertise, recours, recherche, surveillance épidémiologique, prise en charge sanitaire et médicosociale.
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13. Jeux de hasard et d’argent. Contextes et addiction Rapport, Inserm, 22 juillet 2008 D’après l’Insee, en 2006, près de 30 millions de personnes ont tenté leur chance au moins une fois dans l’année à un jeu de hasard et d’argent en France. Depuis 1975, le montant des enjeux a doublé et le chiffre d’affaires des jeux autorisés est passé de 98 millions d’euros en 1960 à 37 milliards en 2006. Parallèlement, les jeux vidéo et les jeux sur Internet se sont fortement développés au cours des dernières années. Chez certains joueurs, ce type de jeu peut devenir préjudiciable et générer des dommages individuels, familiaux, sociaux et professionnels, voire, prendre la dimension d’une réelle conduite addictive. On ne connaît pas la prévalence du jeu problématique et du jeu pathologique en France. Cependant, il y a tout lieu de penser qu’elle n’est pas différente de celle estimée dans d’autres pays (1 à 2 % de la population) soit entre 400 000 et 800 000 personnes en France. Rendus plus visibles par l’augmentation de l’offre, le jeu problématique et le jeu pathologique sont devenus une préoccupation des pouvoirs publics. Le plan de prise en charge et de prévention des addictions (2007–2011) du ministère de la Santé a intégré la problématique du jeu. Dans cette perspective, la Direction générale de la santé (DGS) a sollicité l’Inserm pour mener une expertise collective afin de disposer de données scientifiques validées dans les disciplines qui se sont intéressées aux jeux de hasard et d’argent, pour mieux cerner les différents aspects du problème et adopter une politique de prévention et de soin adaptée au contexte franc¸ais. 14. Publicité pour le tabac Cour de cassation, chambre criminelle, 14 mai 2008, n o 07-87128 L’exception de retransmission des compétitions de sport mécanique de l’article L. 3511-5 du Code de la santé publique se limite à la possibilité de diffuser ces compétitions, pour satisfaire aux nécessités de l’information, en temps réel ou dans des situations proches de celui-ci, sans s’étendre aux rediffusions d’images intervenant plusieurs heures ou plusieurs jours après l’épreuve. 15. Pour une politique nationale d’éducation thérapeutique du patient Rapport, Dr Roland Cecchi-Tenerini, Inspecteur général des affaires sociales L’éducation thérapeutique du patient (ETP) s’entend comme un processus de renforcement des capacités du malade et/ou de son entourage à prendre en charge l’affection qui le touche, sur la base d’actions intégrées au projet de soins. Elle vise à rendre le malade plus autonome par l’appropriation de savoirs et de compétences afin qu’il devienne l’acteur de son changement de comportement, à l’occasion d’évènements majeurs de la prise en charge (initiation du traitement, modification du traitement, événement intercurrents. . .) mais aussi plus généralement tout au long du projet de soins, avec l’objectif de disposer d’une qualité de vie acceptable par lui. Ainsi, l’éducation thérapeutique stricto sensu se distingue de l’accompagnement du malade, défini comme un processus externe veillant à soutenir le patient et son entourage, y compris dans le cas d’un accompagnement pour une bonne observance des traitements. L’éducation thérapeutique du patient devra être reconnue dans la loi pour toute personne atteinte d’une maladie chronique et dont l’état le nécessite. Cette éducation thérapeutique du patient devra être intégrée dans un plan de soins coordonnés. Un patient est en droit de ne pas accepter un programme d’éducation thérapeutique qui lui serait proposé. Le refus par le patient d’un programme d’ETP ne pourra conduire à une sanction et ne peut donc amener les assureurs à prononcer des sanctions financières à son encontre. La mise en œuvre d’une politique nationale d’ETP ne peut être que progressive. Certaines pathologies devront être choisies comme prioritaires dans la première phase de cette mise en œuvre. Ce choix pourrait être fait par décret du ministre. Dans l’état actuel des expériences en France et de la validation de l’ETP au niveau scientifique, les membres de la mission proposent que les pathologies prioritaires soient le diabète, les pathologies cardiovasculaires, l’asthme et le VIH.
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Afin d’assurer le suivi du plan de soins personnalisés et le programme d’éducation thérapeutique du patient, le médecin traitant, les professionnels de santé impliqués et le patient doivent pouvoir disposer des informations concernant la consommation de soins du malade. Ses informations sont collectées par les organismes d’assurance maladie du régime obligatoire. La pratique de l’éducation thérapeutique du patient devra s’appuyer sur des compétences nouvelles, à acquérir par un professionnel de santé. L’éducation thérapeutique du patient nécessite une formation spécifique et agréée, pour tout professionnel de santé qui souhaiterait l’exercer. Un enseignement spécifique de l’éducation thérapeutique concernant la problématique, la méthodologie et les spécificités selon les différentes pathologies chroniques devra être dispensé à tous les futurs médecins dans le cadre de leur cursus de formation initiale. Cet enseignement devra être proposé à tous les professionnels de santé en formation initiale, selon des modalités spécifiques à chacune des formations. 16. Information des patients Brochure HAS, juin 2008 La Haute Autorité de santé publie une fiche pratique afin d’aider les organisations professionnelles, sociétés savantes, associations d’usagers ou de patients qui souhaitent produire et diffuser une information écrite aux patients et aux usagers en s’appuyant sur les recommandations de bonnes pratiques existantes. Cette fiche rappelle les principales étapes pour élaborer une brochure d’information de qualité : définir l’objectif de la brochure, préparer le travail en impliquant les différents acteurs, concevoir la brochure, la tester et la diffuser et évaluer l’impact de la brochure. Cette fiche est complémentaire du guide méthodologique « Élaboration d’un document d’information à l’intention des patients et des usagers du système de santé » élaboré et diffusé par la HAS en 2005 et actualisé en 2008. Ce guide présente la méthode détaillée, propose des exemples de plan de brochure, des conseils pour la rédaction et la présentation des informations, un exemple de guide d’entretien pour tester la compréhension et la présentation de la brochure avant sa finalisation, des questions pour évaluer la qualité de la construction de la brochure et la qualité de son contenu. 17. Interdiction de la consommation des boissons énergisantes dans les établissements scolaires Circulaire interministérielle GS/EA3/DGESCO/B3 no 2008-229, 11 juillet 2008 Dans le contexte de la commercialisation de nouvelles boissons énergisantes, le ministère chargé de la santé a formulé, en collaboration avec l’Agence franc¸aise de sécurité sanitaire des aliments, des recommandations en matière de consommation de boissons énergisantes. Ces boissons, populaires auprès des jeunes, vendues dans les bars, les discothèques ou lors des manifestations sportives, et présentées comme des stimulants de l’effort physique ou intellectuel, sont essentiellement des excitants du système nerveux. Elles masquent la fatigue et peuvent inciter à diminuer le temps de sommeil. De fait, elles contiennent des substances comme la caféine, à fortes doses, associée au guarana (plante contenant de la caféine), à l’arginine, à la taurine, au ginseng, à la glucurunolactone (dérivé du glucose). Elles ne présentent aucun intérêt sur le plan nutritionnel car, d’une part, leur apport énergétique est négligeable et, d’autre part, leurs formulations ne correspondent pas aux besoins des sujets engagés dans une activité intense. Elles ne doivent pas être confondues avec les boissons dites « énergétiques » qui répondent, en principe, aux besoins spécifiques des sportifs. Toute vente et tout usage de ces boissons sont désormais interdits dans les établissements scolaires. Il appartient, en conséquence, aux chefs d’établissement de s’assurer qu’aucun de ces produits n’est mis à disposition des élèves (distributeur, cafétéria, foyer, restauration scolaire. . .), et de veiller à ce que ceuxci n’en fassent aucune consommation dans l’établissement scolaire. Cette interdiction doit s’accompagner d’une information des élèves et des personnels sur les dangers de ces produits. 18. Comité de lutte contre la grippe Décret n o 2008-733 du 25 juillet 2008
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Il est constitué auprès du ministre chargé de la santé, pour une durée de cinq ans, un Comité de lutte contre la grippe. Le Comité apporte au ministre chargé de la santé une expertise sur l’ensemble des mesures à mettre en œuvre pour contrôler et réduire l’impact d’une épidémie de grippe ou d’une pandémie grippale. En période interpandémique ou prépandémique, le Comité de lutte contre la grippe est chargé d’émettre des recommandations, d’assurer une veille scientifique sur les évolutions et les perspectives en matière de vaccin contre la grippe (interpandémique, prépandémique et pandémique) et d’élaborer des recommandations de stratégie de vaccination en fonction de l’évolution des données. 19. Bonnes pratiques de dons de médicaments Arrêté du 18 août 2008 Les bonnes pratiques de dons de médicaments s’appliquent aux distributeurs en gros à vocation humanitaire mentionnés au 8◦ de l’article R. 5124-2 du Code de la santé publique, exportant des médicaments issus de dons, dans le cadre de programmes d’aide médicale. Les distributeurs en gros à vocation humanitaire respectent les conditions d’attribution des donations de médicaments suivantes, qui sont conformes aux « Principes directeurs applicables aux dons de médicaments » édités par l’Organisation mondiale de la santé (OMS). Les distributeurs en gros à vocation humanitaire veillent à ce que les médicaments issus de dons qu’ils exportent tiennent compte des besoins exprimés et soient adaptés au profil épidémiologique du pays destinataire. Les médicaments ne sont pas exportés sans demande préalable du bénéficiaire. L’utilisation des médicaments offerts, ou de leurs équivalents génériques, doit être approuvée dans le pays destinataire. Ces médicaments figurent sur la liste nationale des médicaments essentiels ou, à défaut de liste nationale, sur la liste modèle OMS des médicaments essentiels, sauf demande contraire du bénéficiaire. Les distributeurs en gros à vocation humanitaire veillent à ce qu’aucun don ne soit effectué pour la prise en charge des trois grandes endémies, qui bénéficient de programmes spécifiques en lien avec des financements internationaux, à savoir le paludisme, la tuberculose et le VIH/sida. Les médicaments faisant l’objet de dons proviennent de sources fiables et sont conformes aux normes de qualité du pays donateur et du pays destinataire. La présentation, le dosage et la forme pharmaceutique des médicaments offerts sont, dans la mesure du possible, analogues à ceux des médicaments utilisés généralement dans le pays destinataire. Les distributeurs en gros à vocation humanitaire s’assurent de la bonne utilisation des dons de médicaments. 20. Lutte contre le trafic de produits dopants Loi n o 2008-650 du 3 juillet 2008 La loi modifie les articles L. 232-9 et suivants du Code du sport dans le sens d’une sévérité accrue. Les agents relevant du ministre chargé des sports et les personnes agréées peuvent saisir des objets ou documents se rapportant aux infractions en cause, sur autorisation judiciaire donnée par ordonnance du président du tribunal de grande instance dans le ressort duquel sont situés les éléments à saisir. L’ordonnance est notifiée sur place, au moment de l’accès dans les lieux ou de la saisie, au responsable des lieux ou à son représentant, qui en rec¸oit copie. En l’absence du responsable des lieux ou de son représentant, l’ordonnance lui est notifiée, après la visite, par lettre recommandée avec demande d’avis de réception. La notification est réputée faite à la date de réception figurant sur l’avis. Cette ordonnance n’est susceptible que d’un pourvoi en cassation. Ce pourvoi n’est pas suspensif. Les éléments saisis sont immédiatement inventoriés, en présence du responsable des lieux ou locaux, ou de son représentant. Les agents agréés (Article L. 232-11) constatent les infractions par des procès-verbaux qui font foi jusqu’à preuve contraire.
Établissements de santé 21. Équilibre financier des établissements de santé Circulaire DHOS/F2 n o 2008-233 du 16 juillet 2008
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L’équilibre financier des établissements de santé constitue un objectif majeur au service duquel les responsables d’établissement et les ARH doivent mobiliser l’ensemble des moyens à leur disposition. Le constat de situations déficitaires dans un certain nombre d’établissements de santé a conduit le Président de la République à rappeler, lors de l’installation de la commission présidée par le sénateur Larcher, que le passage à la T2A à 100 % devait s’accompagner d’un retour à l’équilibre des comptes. Le Parlement a exprimé la même volonté en amendant, à l’occasion du débat sur la loi de financement de la sécurité sociale pour 2008, les dispositions du Code de la santé publique relatives au redressement des établissements en difficulté. Le décret n o 2008-621 du 27 juin 2008 pris en application de ces dispositions vient d’être publié. La présente instruction a pour but de rappeler les principes à respecter et les procédures à suivre par les responsables des établissements et leur autorité de tutelle, afin d’atteindre cet objectif. 22. Gouvernance de l’hôpital Mission d’évaluation et de contrôle de la sécurité sociale, rapport d’information de MM. Alain Vasselle et Bernard Cazeau, 18 juin 2008 Parce qu’il mobilise près de la moitié des dépenses de l’Ondam, l’hôpital ne peut être absent de l’indispensable processus de réforme de l’assurance maladie. La commission des affaires sociales a souhaité apporter son propre éclairage sur la situation actuelle des établissements de santé. Elle a porté son regard sur certains aspects essentiels : la fixation des tarifs, l’équilibre financier des structures et la question de l’emploi hospitalier. Elle est en effet convaincue qu’aucune réforme ne pourra faire l’économie d’une avancée sensible sur chacun de ces sujets. Or l’analyse montre de fac¸on manifeste des défaillances dans le pilotage de la politique hospitalière, tant au niveau national qu’au niveau régional, et cela depuis trop longtemps. L’hôpital est un élément central pour garantir et préserver la santé de nos concitoyens. Proposant un service performant dans un cadre accessible et humain, il est un point d’ancrage sur le territoire. Il doit le rester. Les constats faits par les rapporteurs de la mission d’évaluation et de contrôle de la sécurité sociale sont sévères mais ils se veulent aussi objectifs et surtout constructifs pour permettre à l’hôpital de continuer à progresser sur le chemin de l’excellence. Professions de santé 23. Atlas de la démographie médicale Ordre des médecins, septembre 2008 Le Conseil national de l’Ordre des médecins a publié la deuxième édition de son « Atlas de la démographie médicale », réalisé à partir des chiffres du tableau de l’Ordre. Les points saillants apparus cette année sont : • l’accélération des disparités régionales, de la région PACA, pour la première fois plus attractive que l’Île-de-France, à la Picardie dont la densité médicale est égale à la moyenne des années 1970 ; • l’accentuation des spécialités en crise ; • la féminisation de la profession : pour la première fois 54 % des médecins en activité sont des femmes ; • l’attractivité croissante de l’exercice salarié au détriment de l’exercice libéral exclusif (66 % contre 10 % des nouveaux inscrits). Le nombre des médecins en activité a augmenté en France métropolitaine de 1,2 % et le nombre de médecins retraités de 3,4 %, ce qui confirme que les « sorties » sont supérieures aux « entrées ». Les nouveaux inscrits au tableau de l’Ordre ne s’installent pas dans les zones dites désertifiées mais dans les grandes villes et à proximité des centres hospitalo-universitaires, en dépit de l’octroi d’aides à l’installation. De même, les médecins retraités autorisés grâce au décret du 19 avril 2007 à garder une activité sont concentrés autour de la Méditerranée et en Île-de-France, régions où la densité médicale est la plus forte. 24. Médecin. Cabinet secondaire Conseil d’État, 9 juin 2008, n o 299843
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M. A., médecin spécialiste en chirurgie orthopédique à Béziers, a demandé l’autorisation d’exercer sa spécialité, deux demi-journées par semaine, en alternance avec son confrère M. D., sur un site distinct de sa résidence professionnelle, situé à Agde. Un seul chirurgien orthopédiste est installé sur le territoire de cette commune et la densité de médecins exerc¸ant cette spécialité est sensiblement inférieure à celle constatée au niveau national. Enfin, une partie de la clientèle, à mobilité réduite, est obligée de se rendre à Béziers, distante de 25 kilomètres. Dans ces conditions, eu égard aux caractéristiques de la discipline en cause, l’offre de soins dans ce domaine doit être regardée, au sens de l’article R. 4127-85 du Code de la santé publique, comme présentant une insuffisance au regard des besoins de la population et de la nécessité de la permanence des soins. Dès lors, le Conseil national de l’ordre des médecins aurait dû donner l’autorisation d’ouverture. 25. Non rémunération des gardes en réquisition Conseil d’État, 7 mai 2008, no 07MA01709 À deux reprises, le préfet du Var a réquisitionné un médecin généraliste exerc¸ant à Draguignan, pour assurer des services de garde dans le secteur géographique de Draguignan-Trans. Ce médecin demande à l’État de lui verser une somme de 1166 euros au titre de ses honoraires. Aux termes de l’article L. 2215-1 du Code général des collectivités territoriales : « La police municipale est assurée par le maire, toutefois : (. . .) 4◦ . En cas d’urgence, lorsque l’atteinte au bon ordre, à la salubrité, à la tranquillité et à la sécurité publiques l’exige et que les moyens dont dispose le préfet ne permettent plus de poursuivre les objectifs pour lesquels il détient des pouvoirs de police, celui-ci peut, par arrêté motivé, pour toutes les communes du département ou plusieurs ou une seule d’entre elles, réquisitionner tout bien et service, requérir toute personne nécessaire au fonctionnement de ce service ou à l’usage de ce bien et prescrire toute mesure utile jusqu’à ce que l’atteinte à l’ordre public ait pris fin (. . .) ». Le médecin entend se prévaloir d’un droit à rémunération des heures de permanence au cours desquelles il a dû, conformément aux dispositions de l’article 78 du Code de déontologie médicale, dans sa rédaction issue du décret susvisé du 6 septembre 1995, « prendre toutes dispositions pour être joint au plus vite ». Toutefois, aucune disposition législative ou réglementaire ne prévoit une telle rétribution, qui ne correspond à aucun travail effectif. Il n’établit pas avoir supporté des frais matériels, directs et certains, alors, au demeurant, qu’il n’a fait que respecter une obligation déontologique fondamentale découlant notamment de l’article 77 du Code de déontologie médicale dans sa rédaction alors applicable. Il n’est, dès lors, pas fondé à demander la condamnation de l’État à lui verser la somme qu’il demande au titre des astreintes litigieuses. 26. Rapport annuel sur l’état de la fonction publique, 2007–2008 Les trois fonctions publiques emploient 5,2 millions de personnes au 31 décembre 2006 soit 21,3 % de l’emploi total (salarié et non salarié) en France. L’emploi public ralentit nettement en 2006 : + 0,3 % (hors emplois aidés), contre + 1,4 % en moyenne annuelle sur la décennie. Sur un an, l’emploi salarié total a, quant à lui, augmenté de 1 %, contre + 1,2 % en moyenne annuelle depuis dix ans. Seuls les effectifs de la fonction publique territoriale (FPT) augmentent entre 2005 et 2006 : + 3,1 % (+ 2,8 % en moyenne annuelle sur dix ans). Dans le même temps, ceux de la fonction publique de l’État (FPE) baissent de 1,2 % (contre + 0,5 % en moyenne annuelle sur dix ans) et ceux de la fonction publique hospitalière (FPH) restent quasiment stables avec −0,1 % (contre + 1,7 % en moyenne annuelle au cours de la dernière décennie). La hausse modérée dans les établissements publics administratifs ne compense plus la réduction des effectifs dans les ministères (−1,8 %). La fonction publique compte (hors emplois aidés) 777 600 non titulaires fin 2006. Après avoir augmenté de 2 % par an depuis 1996, les effectifs de non titulaires ralentissent fortement en 2006 : + 0,1 % sur un an. Tandis que la fonction publique territoriale emploie davantage de non titulaires (+ 6,5 %) qu’en 2005, l’hospitalière (−1,4 %) et surtout l’État (−5,8 %) voient les effectifs de non titulaires reculer en 2006. 27. Formation professionnelle tout au long de la vie dans la fonction publique hospitalière Décret n o 2008-824 du 21 août 2008
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La formation professionnelle tout au long de la vie des agents titulaires et non titulaires de la fonction publique hospitalière a pour but de leur permettre d’exercer efficacement leurs fonctions durant l’ensemble de leur carrière, d’améliorer la qualité du service public hospitalier, de favoriser leur développement professionnel et personnel et leur mobilité. Elle contribue à créer les conditions d’un égal accès aux différents grades et emplois entre les hommes et les femmes. Le décret liste les buts de cette formation : 1◦ . Donner aux personnes sans qualification professionnelle accédant à un emploi, une formation professionnelle initiale théorique et pratique afin de les préparer à occuper cet emploi ; 2◦ . Garantir de maintenir ou de parfaire les connaissances et la compétence des agents ; 3◦ . Proposer aux agents des actions de préparation aux examens et concours et autres procédures de promotion interne ; 4◦ . Permettre aux agents de suivre des études favorisant la promotion professionnelle, débouchant sur les diplômes ou certificats du secteur sanitaire et social dont la liste est fixée par arrêté du ministre chargé de la santé ; 5◦ . Proposer aux agents des actions de conversion leur permettant d’accéder à des emplois exigeant une qualification nouvelle ou à de nouvelles activités professionnelles ; 6◦ . Permettre aux agents de parfaire leur formation en vue de réaliser des projets personnels et professionnels, grâce notamment au congé de formation professionnelle ; 7◦ . Proposer aux agents un bilan de compétences ; 8◦ . Préparer les agents à la validation des acquis de l’expérience. Un document appelé passeport de formation est remis à chaque agent par l’établissement. Les actions de formation auxquelles l’agent a participé comme bénéficiaire ou comme formateur y sont mentionnées. 28. Commissions régionales d’équivalence pour l’accès aux concours de la fonction publique hospitalière Instruction DHOS/P3 n o 2008-235 du 16 juillet 2008 Le décret n o 2007-196 du 13 février 2007 relatif aux équivalences de diplômes requises pour se présenter aux concours d’accès aux corps de la fonction publique hospitalière fixe le dispositif au niveau des directions régionales des affaires sanitaires et sociales par le biais d’une commission régionale d’équivalence dont les modalités de saisine et de fonctionnement sont précisées dans l’arrêté du 21 septembre 2007. Ce dispositif permet aux candidats à certains concours de la fonction publique hospitalière d’obtenir une décision d’équivalence de leur diplôme et de leur expérience professionnelle pour se présenter à un concours de la fonction publique hospitalière. Plusieurs candidats sont restés à ce jour sans réponse, ce qui crée de fait une situation de carence juridique entraînant une perte de chance, et cette instruction vise à préciser les processus. 29. Actes professionnels accomplis directement par les pédicures-podologues Décret n o 2008-768 du 30 juillet 2008 L’article R. 4322-1 est précisé s’agissant des signes de perte de sensibilité du pied, la prescription et la pose de pansements. Un arrêté du 30 juillet 2008 fixe la liste des topiques à usage externe pouvant être prescrits et appliqués par les pédicures-podologues et la liste des pansements pouvant être prescrits et posés par les pédicures-podologues. L’article 1 liste les topiques à usage externe pouvant être prescrits et appliqués par les pédicurespodologues et l’article 2 celle des pansements pouvant être prescrits et posés par les pédicures-podologues. Le texte détaille les pansements utilisés pour la prise en charge des patients diabétiques. 30. Injection du vaccin antigrippal par les infirmiers Décret n o 2008-877 du 29 août 2008 Il est institué dans le CSP un article R. 4311-5-1, ainsi rédigé : « L’infirmier ou l’infirmière est habilité à pratiquer l’injection du vaccin antigrippal, à l’exception de la première injection, dans les conditions définies à l’article R. 4311-3 et conformément au résumé des
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caractéristiques du produit annexé à l’autorisation de mise sur le marché du vaccin injecté, sur certaines personnes dont les conditions d’âge et les pathologies dont elles peuvent souffrir sont précisées par arrêté du ministre chargé de la santé. » « L’infirmier ou l’infirmière indique dans le dossier de soins infirmiers l’identité du patient, la date de réalisation du vaccin ainsi que le numéro de lot du vaccin lors de l’injection. Il ou elle déclare au centre de pharmacovigilance les effets indésirables portés à sa connaissance susceptibles d’être dus au vaccin. » 31. Règles de déontologie propres aux praticiens des armées Décret n o 2008-967 du 16 septembre 2008 Les dispositions de ce décret s’imposent aux praticiens des armées, et aux élèves médecins, pharmaciens, vétérinaires et chirurgiens-dentistes des écoles du service de santé des armées. Le praticien des armées est placé dans une situation statutaire fixée par le livre Ier de la partie 4 du Code de la défense et du décret du 12 septembre 2008. Il est soumis aux devoirs et obligations fixés par ce même code ainsi qu’aux stipulations des conventions internationales ratifiées par la France, en particulier des conventions de Genève du 19 août 1949. Il doit se comporter en toutes circonstances avec l’honneur, la probité et la dignité qu’exige de lui son état d’officier. Il s’abstient, même en des circonstances étrangères au service, de toute décision et de tout acte de nature à déconsidérer cet état et sa profession. Le praticien des armées n’est, en position d’activité, inscrit au tableau d’aucun ordre professionnel. Néanmoins, sa qualité d’interne, de médecin, de pharmacien, de vétérinaire ou de chirurgien-dentiste lui impose d’adopter une conduite conforme aux principes généraux gouvernant l’exercice de sa profession. Le praticien exerc¸ant en qualité de praticien des armées au titre d’un engagement à servir dans la réserve opérationnelle ou au titre de la disponibilité reste inscrit au tableau de son Ordre professionnel mais n’est plus soumis à sa juridiction pour les actes commis du fait ou à l’occasion de cette activité. Ces règles sont très proches des dispositions déontologiques communes. Aux termes de l’article 4, le praticien des armées exerce sa mission dans le respect de la vie, de la personne et de sa dignité. Il ne doit en aucun cas participer, même passivement, à des actions cruelles, inhumaines ou dégradantes. Il écoute, examine, conseille ou soigne avec la même conscience et le même dévouement toute personne, quels que soient son origine, sa condition, ses mœurs, son appartenance ou non à une ethnie, une nation ou une religion déterminée ou les sentiments qu’elle lui inspire. 32. Statut particulier des praticiens des armées Décret n o 2008-933 du 12 septembre 2008 Les praticiens des armées sont constitués en cinq corps d’officiers de carrière comprenant les internes des hôpitaux des armées, les médecins des armées, les pharmaciens des armées, les vétérinaires des armées et les chirurgiens-dentistes des armées. Les praticiens des armées assurent, au sein des armées et formations rattachées, la conception, la direction, la mise en œuvre, l’évaluation et l’inspection des activités relevant du domaine de la santé. Les médecins des armées, conseillers permanents du commandement, assurent la direction et le fonctionnement du service de santé des armées et commandent les formations qui en dépendent, avec la collaboration, dans les emplois correspondant à leur spécialisation, des pharmaciens, des vétérinaires, des chirurgiens-dentistes des armées et des internes des hôpitaux des armées. Les internes des hôpitaux des armées, praticiens en formation spécialisée, exercent des fonctions de prévention, de diagnostic et de soins, par délégation et sous la responsabilité des médecins auprès desquels ils sont placés. Les médecins des armées occupent les emplois de direction générale du service de santé des armées et assurent, pour l’exercice des attributions de ce dernier, la conception, la direction, la mise en
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œuvre, l’évaluation et l’inspection en matière de médecine de prévention, de diagnostic et de soins, d’expertise et d’aptitude médicales et de recherche scientifique, de formation professionnelle et d’éducation sanitaire. Le décret n o 2008-937 du 12 septembre 2008 fixe certaines dispositions applicables aux élèves médecins, pharmaciens, vétérinaires et chirurgiens-dentistes des écoles du service de santé des armées, qui sont des élèves officiers de carrière. Ils sont, sous réserve des dispositions du présent décret, soumis aux dispositions réglementaires applicables aux militaires engagés. Droits sociaux 33. Les bénéficiaires de l’AME en contact avec le système de soins Étude de la DRESS, juillet 2008 L’enquête effectuée au premier trimestre 2007 en Île-de-France fournit des éléments de connaissance sur les conditions d’existence, l’état de santé et le recours aux soins des bénéficiaires de l’aide médicale de l’État (AME) en contact avec le système de soins. Il s’agit d’une population composée à 70 % de jeunes adultes âgés de 20 à 39 ans, ayant un niveau scolaire élevé et dont la majorité réside en France depuis moins de cinq ans. Soumis à des conditions d’existence précaires, les bénéficiaires de l’AME sont nombreux à percevoir leur état de santé comme dégradé. Leur renoncement à des soins de base pour des raisons financières et le refus des professionnels de santé témoignent des obstacles qu’ils ont dû affronter avant d’accéder aux soins. Ces difficultés surmontées, les bénéficiaires de l’AME entrés dans le dispositif semblent bénéficier d’une continuité de suivi. Toutefois, 15 % des patients vus en consultation et la moitié des patients hospitalisés avaient, selon les médecins, un besoin de soins urgents. 34. Accueil familial des femmes victimes de violences au sein du couple Circulaire interministérielle DGAS/SDFE/1A/DPS n o 2008-238, 18 juillet 2008 Le plan global (2008–2010) de lutte contre les violences faites aux femmes met l’accent sur l’importance des réponses offertes aux femmes victimes de violences au sein du couple en matière d’hébergement et de logement, sachant qu’elles ont une incidence directe sur leur parcours et se révèlent fondamentales pour un retour vers l’autonomie. Il apparaît en effet essentiel d’élargir la palette des réponses offertes aux femmes en matière d’hébergement et de diversifier ces possibilités, afin qu’elles correspondent mieux aux attentes et aux besoins de chacune d’entre elles. La recherche de solution adaptée à chaque situation justifie que l’expérimentation d’accueil familial pour les femmes victimes de violences soit poursuivie, selon des modalités actualisées. L’objectif est de développer à titre expérimental ce mode d’accueil complémentaire en familles dans chaque département, afin d’évaluer la pertinence de sa généralisation et, si nécessaire, d’envisager une adaptation de la réglementation. Le cahier des charges fixe les principes et les exigences fondant le développement de ce nouveau dispositif, en référence notamment à l’accueil familial des personnes âgées et handicapées. Sont ainsi précisés les modalités de développement de ce nouveau mode d’accueil, qui s’appuie notamment sur une procédure d’agrément des familles d’accueil, confiée au conseil général, en charge également de leur formation initiale et une institution « support », en charge d’une part du recrutement, de l’emploi et du suivi des familles d’accueil salariées, et d’autre part du suivi social et médicosocial des femmes accueillies. 35. Assurance et maladie grave Rapport au nom de la commission des Affaires Sociales, Marie-Thérèse Hermange, 23 juillet 2008 Un peu plus d’un an après l’entrée en vigueur de la convention s’Assurer et Emprunter avec un Risque Aggravé de Santé (Aeras), dont les principes ont été consacrés dans la loi du 31 janvier 2007, des avancées majeures ont été enregistrées : la convention est désormais mieux connue tant par le public concerné que par les professionnels ; les instances de suivi et de médiation ont d’ores et déjà obtenu des résultats.
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Toutefois, des progrès sont encore nécessaires, notamment pour que les découvertes médicales et le risque d’invalidité soient réellement pris en compte par les assureurs et pour que les banques acceptent la mise en place de garanties alternatives. La commission des Affaires Sociales continuera à exercer un contrôle vigilant sur la bonne application de cette convention. 36. Pour une refondation de notre pacte social de santé Libre blanc du CISS (Collectif interassociatif sur la santé). Juillet 2008 Un long travail de concertation au sein des 32 associations membres du CISS a permis la publication de ce livre blanc construit autour de 40 fiches réparties en chapitres : financer la santé et la maintenir accessible ; mieux organiser la santé ; garantir la qualité des soins ; poursuivre la démocratie sanitaire ; conforter les droits individuels des patients et la santé de demain. Le CIIS insiste en particulier sur la nécessité que les réformes en préparation interviennent sur les deux tableaux complémentaires que sont le financement et l’organisation de la santé. Ces réformes doivent impérativement être menées dans le profond respect des droits des usagers de la santé : au niveau individuel en garantissant leur renforcement, mais aussi au niveau collectif par la poursuite de la démocratie sanitaire. En effet, aucune réforme en profondeur de notre système de santé ne pourra aujourd’hui être menée et acceptée sans que soient associés, en première ligne, les usagers et leurs représentants. Parmi les focus que proposé, le CISS estime que certaines problématiques méritent une attention toute particulière : celle de la qualité des soins, celles en relation avec l’amélioration de la prise en charge de certaines populations dont on sait les difficultés grandissantes d’accès. 37. Caractère non indemnitaire de l’allocation aux adultes handicapés Cour de cassation, 2e Civ, 10 juillet 2008, n o de pourvoi : 07-17424 Un homme contaminé par le virus d’immunodéficience humaine (VIH) a été indemnisé le 3 juin 1992 par le Fonds d’indemnisation des transfusés et hémophiles contaminés par le VIH, du préjudice spécifique de contamination qu’il avait subi. En avril 2006, il a demandé à l’Oniam, substitué au Fonds par l’article 119 de la loi du 9 août 2004, l’indemnisation de son préjudice économique. Refusant l’offre de l’Oniam, il a saisi la cour d’appel de Paris. Servie en exécution d’une obligation nationale en vue d’assurer aux bénéficiaires la garantie d’un minimum de ressources, l’allocation aux adultes handicapés dont l’attribution est subsidiaire par rapport à d’autres avantages de vieillesse ou d’invalidité ou d’accident du travail, perc¸us au titre d’un régime de sécurité sociale et qui est subordonnée à un plafond de ressources de l’intéressé, variant selon que le bénéficiaire est marié ou vit maritalement ou est lié par un pacte civil de solidarité et a une ou plusieurs personnes à charge, constitue essentiellement une prestation d’assistance dépourvue de caractère indemnitaire, dont la charge incombe à l’État. De telle sorte, l’allocation aux adultes handicapés ne devait pas être déduite de son préjudice économique. Responsabilité 38. Chirurgie : absence de faute technique mais mauvaise information CAA Bordeaux, 1 juillet 2008, n o 07BX00334 Une patiente a été opérée le 28 novembre 2000 et le 4 janvier 2001 dans le service de chirurgie orthopédique du centre hospitalier de Dax, sous endoscopie, pour un syndrome du canal carpien de la main droite. Elle a été victime d’une lésion de quatre fascicules du nerf médian droit, dont deux ont été sectionnés. Il en est résulté une perte de sensibilité de quatre doigts, et que ces troubles se sont compliqués d’un syndrome algodystrophique affectant le poignet droit, dont la patiente réclame indemnisation. Sur la technique chirurgicale Il ne résulte pas de l’instruction que le choix de la technique endoscopique aurait été contre-indiqué dans le cas de Mme X., dont la main ne présentait pas de particularité anatomique ; que, par ailleurs, s’il ressort
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du rapport de l’expert désigné par les premiers juges que les instruments utilisés en chirurgie endoscopique sont à l’origine de la section de deux fascicules du nerf médian et de contusions de deux autres fascicules, il n’est pas établi que le chirurgien aurait, lors de la première intervention, manipulé ces instruments en méconnaissance des règles de l’art médical. Nonobstant l’aggravation des lésions de la patiente constatée à l’issue de la seconde intervention, l’expert n’a pas relevé de faute médicale. Si l’algodystrophie constatée en mai 2001 est en relation avec les dommages subis par la patiente, cette complication est survenue en dehors de toute faute. Dans ces conditions, c’est à bon droit que le tribunal n’a pas retenu de faute médicale à l’encontre de l’établissement hospitalier. Sur l’information Mme X. soutient que si elle avait été correctement informée des risques présentés par la technique endoscopique, elle aurait choisi l’autre technique opératoire, dite à ciel ouvert. Il résulte de l’instruction, et notamment d’une étude de l’Agence nationale d’accréditation et d’évaluation en santé sur la comparaison de ces deux techniques chirurgicales, que si celles-ci présentent globalement la même efficacité et la même sécurité d’utilisation, la chirurgie sous endoscopie présente un risque spécifique de section du nerf médian. Ce risque, en l’absence d’urgence rendant impossible l’information préalable, devait être porté à la connaissance de la patiente. L’hôpital n’ayant pas établi avoir informé Mme X., ce manquement est de nature à engager sa responsabilité. La faute commise a entraîné pour Mme X. une perte de chance de se soustraire au risque qui s’est réalisé. La réparation du dommage résultant de cette perte de chance doit être fixée à une fraction des différents chefs de préjudice subis. Compte tenu du rapprochement entre, d’une part, les risques de section du nerf médian inhérents à l’intervention par voie endoscopique et d’autre part, les risques encourus en cas d’opération à ciel ouvert, cette fraction doit être fixée à la moitié. 39. Erreur et faute dans le diagnostic Conseil d’État, 8 août 2008, n o 272033 Entre le 12 août 1994 et le 28 février 1995, le jeune Lucas B. a suivi à l’hôpital un traitement consistant en une chimiothérapie suivie d’une radiothérapie, destiné à soigner une tumeur cérébrale initialement diagnostiquée comme maligne, qui s’est ultérieurement révélée être une tumeur bénigne. Le traitement a provoqué chez l’enfant des lésions irréversibles à l’origine d’importants troubles neurologiques. Le traitement, dont le potentiel agressif était connu, a été mis en œuvre sans tenir compte des discordances qui existaient entre le diagnostic de tumeur maligne obtenu par interprétation d’une biopsie et d’autres éléments, tel que l’examen clinique, et le diagnostic de tumeur maligne n’a pas été reconsidéré avant que ne commence la radiothérapie, malgré l’amélioration de l’état de l’enfant. En admettant même que l’erreur initiale de diagnostic soit excusable en l’état des connaissances médicales de l’époque, la persistance dans le choix thérapeutique initial constituait une faute de nature à engager la responsabilité. 40. Gynéco-obstétrique. Handicap non diagnostiqué Cour de cassation, 1◦ Civ., 8 juillet 2008, n o 07-12159 Dans le courant du mois de mai 1993, une femme a débuté une grossesse gémellaire. Il est apparu que l’un des jumeaux était atteint d’une anencéphalie et non viable. M. Y., gynécologue obstétricien qui la suivait, a réalisé des échographies en vue de détecter une éventuelle malformation du second fœtus et a demandé à M. Z., radiologue, des examens iconographiques complémentaires, lesquels n’ont pas révélé d’anomalies. M. Y. n’a pas demandé d’autres examens. La femme a poursuivi sa grossesse jusqu’à son terme. Le 3 février 1994, le jumeau anencéphale est décédé à la naissance et il s’est avéré que Yoann, l’autre jumeau, était atteint d’une malformation cérébrale complexe et majeure. Diverses expertises ont été diligentées et par acte du 21 janvier 1999, les parents ont assigné au fond M. Z., et son assureur. L’examen IRM ne suffisait pas à poser le diagnostic. M. Z. n’avait pas demandé l’avis d’un radiologue plus confirmé que lui dans cet examen et n’avait pas pratiqué d’échomorphologie. Sans lui conseiller d’y recourir, il avait rassuré son confrère.
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Dès lors que la faute commise par un médecin dans l’exécution de son contrat avec sa patiente empêche celle-ci d’exercer son choix d’interrompre sa grossesse afin d’éviter la naissance d’un enfant atteint d’un handicap, les parents et l’enfant peuvent, lorsque l’article L. 114-5 du Code de l’action sociale et des familles n’est pas applicable à l’action exercée, demander la réparation du préjudice résultant de ce handicap et causé par la faute retenue. Pour déclarer M. Z. responsable du préjudice à raison de 50 % au titre de la perte de chance, la cour d’appel a énoncé que la faute commise par M. Z., qui n’avait pas demandé l’avis d’un radiologue plus confirmé que lui dans cet examen, n’avait pas pratiqué d’échographie morphologique, ni conseillé à M. Y. d’en faire et avait rassuré son confrère, avait fait perdre aux parents une chance de découvrir le handicap de l’enfant et de demander une interruption de grossesse pour motif médical. En statuant ainsi, quand une telle faute, n’ayant pas permis à la mère qui avait manifesté son intention d’effectuer une interruption de grossesse pour motif médical, de faire à cet égard un choix éclairé, est en relation directe avec l’intégralité du préjudice en résultant, lequel n’est pas constitué par une perte de chance. Si une personne peut être privée d’un droit de créance en réparation d’une action en responsabilité, c’est à la condition que soit respecté le juste équilibre entre les exigences de l’intérêt général et les impératifs de sauvegarde du droit au respect des biens. La loi du 4 mars 2002 ne répond pas à cette exigence dès lors qu’il prohibe l’action de l’enfant né handicapé et exclut du préjudice des parents les charges particulières qui en découlent tout au long de sa vie, instituant seulement un mécanisme de compensation forfaitaire du handicap sans rapport raisonnable avec une créance de réparation intégrale, tandis que les intéressés pouvaient, en l’état de la jurisprudence applicable avant l’entrée en vigueur de cette loi, légitimement espérer que leur préjudice inclurait toutes les charges particulières invoquées, s’agissant d’un dommage survenu antérieurement à l’entrée en vigueur de la loi susvisée, indépendamment de la date de l’introduction de la demande en justice. Pour débouter les consorts X de leur demande à l’encontre de M. Y., la cour d’appel a énoncé, d’une part, que dès lors que les demandeurs n’ont pas formulé de recours contre lui avant l’entrée en vigueur de la loi du 4 mars 2002, puisque leur première demande de condamnation solidaire des deux médecins est du 27 juin 2003, c’est la loi nouvelle qui s’applique, et d’autre part, qu’il ne peut lui être fait reproche, alors qu’il avait confié le suivi de la patiente à plus compétent que lui en matière d’imagerie médicale, de ne pas avoir fait pratiquer un examen que ce spécialiste n’avait pas jugé utile de faire. 41. Obstétrique. Responsabilité pour faute CAA Paris, 4 juillet 2008, n o 04PA02523 Une enfant née en état de mort apparente le 2 octobre 1991 est décédée sept jours plus tard, au centre hospitalier. L’évolution fatale a été causée par une souffrance fœtale n’ayant pas été reconnue comme justifiant une extraction rapide de l’enfant, et la gravité de la situation n’a pas été appréciée par le médecin accoucheur, lequel n’avait pas été prévenu suffisamment à temps, l’établissement hospitalier ne s’étant pas donné, dans ces circonstances, tous les moyens d’intervention rapide. Le fait de ne pas avoir rapidement reconvoqué la mère dans les 24 heures d’une première visite, et l’absence de déclenchement immédiat d’une naissance par césarienne dès les premiers signes d’une souffrance fœtale ont abouti à une perte de chance de survie de l’enfant, alors qu’aucune anomalie morphologique de l’enfant à naître n’avait jusque-là été décelée. Les délais ainsi apportés pour effectuer le contrôle et l’intervention d’urgence, qui auraient été de nature à réduire les risques encourus par la mère et son enfant à naître, les ont privées des garanties médicales que l’on est en droit d’attendre du service public hospitalier. Un tel défaut dans l’organisation et le fonctionnement du service est de nature à engager la responsabilité du centre hospitalier. 42. Faute du père faisant obstacle à la pratique de soin urgent lors d’un accouchement CAA Lyon, 10 juin 2008, n o 05LY01218 Le 8 novembre 1998, une femme a été admise à 5 h 40 à la maternité d’un centre hospitalier pour accoucher, au terme d’une grossesse normale, de son quatrième enfant. L’expulsion de l’enfant s’est déroulée dans des
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conditions difficiles, l’enfant étant alors victime d’une dystocie des épaules, à l’origine d’une anoxie fœtale, dont il a conservé de graves séquelles neurologiques. La mère, qui a accouché de ses trois premiers enfants par voie basse, ne présentait à son entrée à l’hôpital aucun symptôme justifiant d’emblée l’intervention d’un médecin et le choix d’une césarienne. Il résulte de l’instruction, et notamment du rapport d’expertise et des témoignages du personnel alors en service, que, dès les premiers épisodes de bradycardie fœtale apparus vers 9 h 40, la sage femme a appelé l’interne de garde et, qu’invoquant ses convictions religieuses, le mari s’est, jusqu’à 10 h 10, physiquement opposé à toute présence masculine dans la salle d’accouchement, notamment des médecins obstétriciens et anesthésistes et de l’interne de garde, malgré les demandes instantes de ces derniers. Lorsque vers 10 h 10, après négociation, le mari ne s’est plus opposé à l’intervention des médecins masculins, il était trop tard pour commencer une césarienne et l’extraction de l’enfant a dû être effectuée par application de forceps. Le mari a ainsi fait obstacle aux examens nécessaires qui, malgré le caractère totalement imprévisible de la dystocie des épaules, auraient permis de constater la survenue d’une anoxie fœtale et de prévenir, par une césarienne prophylactique, les graves complications neurologiques dont a été victime le jeune enfant. En ne faisant pas appel immédiatement aux forces de police pour expulser le mari, l’hôpital n’a pas commis de faute de nature à engager sa responsabilité. Ainsi, l’état de l’enfant est totalement imputable à l’attitude du père. 43. Vaccination obligatoire contre l’hépatite B et SEP La jurisprudence administrative s’affirme peu à peu sur le terrain de la responsabilité sans faute, par l’établissement du lien de causalité. Cette preuve peut résulter d’indices courants, mais tout est ensuite affaire d’espèce. • Imputabilité reconnue (1) Conseil d’État, 4 juillet 2008, n o 299832 Mme A. a recherché, sur le fondement de l’article L. 3111-9 du Code de la santé publique dans sa rédaction alors applicable, la responsabilité de l’État à raison de la sclérose en plaques dont elle est atteinte et qu’elle impute à la vaccination obligatoire contre l’hépatite B qu’elle a rec¸ue à raison de sa qualité de secrétaire médicale au centre hospitalier régional universitaire de Lille. Le ministre chargé de la santé, après avoir recueilli l’avis d’une commission de règlement amiable des accidents vaccinaux, laquelle a considéré que l’état de santé de Mme A. pouvait être imputable à cette vaccination, a proposé à l’intéressée, par une décision du 30 août 2004, une rente viagère annuelle indexée de 15 000 euros. Estimant cette somme insuffisante, Mme A. a saisi le tribunal administratif de Lille, lequel, par un jugement du 24 mai 2005, a condamné l’État au versement d’indemnités en réparation des préjudices résultant de la sclérose en plaques dont elle est atteinte. Mme A. a rec¸u les 23 octobre 1992, 3 décembre 1992, 12 février 1993 et 22 novembre 1993 quatre injections du vaccin contre l’hépatite B, que les premiers symptômes d’une sclérose en plaques diagnostiquée le 25 juin 1993 sont apparus en janvier 1993 et que l’intéressée ne souffrait pas de cette maladie avant la vaccination. De telles circonstances doivent être regardées comme établissant l’existence d’un lien de causalité direct entre la vaccination obligatoire et la sclérose en plaques, de nature à engager la responsabilité de l’État sur le fondement des dispositions de l’article L. 3111-9 du Code de la santé publique dans leur rédaction alors en vigueur. • Imputabilité reconnue (2) Conseil d’État, 11 juillet 2008, n o 289763 Une femme qui exerc¸ait la profession d’infirmière et était à ce titre tenue de se faire vacciner contre l’hépatite B, a rec¸u ce vaccin par trois injections entre octobre 1992 et janvier 1993, ainsi qu’une injection de rappel en janvier 1994. Ayant développé une sclérose latérale amyotrophique postérieurement aux trois premières injections, elle a recherché la responsabilité de l’État sur le fondement des dispositions de l’article L. 3111-9 du Code de la santé publique alors en vigueur. Le ministre de la Santé, après avoir recueilli l’avis
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d’une commission de règlement amiable des accidents vaccinaux, a rejeté sa demande d’indemnisation par une décision du 29 octobre 2001. Mme A. a alors saisi d’une demande d’indemnité le tribunal administratif de Marseille, qui, par jugement du 30 mars 2004, a jugé l’État responsable. Pour juger établi un lien de causalité direct entre la vaccination obligatoire contre l’hépatite B rec¸ue par Mme A. et l’apparition chez cette dernière d’une sclérose latérale amyotrophique, la cour s’est fondée sur les constatations de l’expertise médicale réalisée dans le cadre de l’examen de la demande indemnitaire de Mme A. par la commission de règlement amiable des accidents vaccinaux selon lesquelles l’intéressée, qui ne souffrait pas de cette maladie préalablement à sa vaccination, en avait éprouvé les premiers symptômes dans un bref délai à la suite de l’injection du vaccin ; qu’en se fondant sur ces motifs, la cour, qui n’a pas dénaturé les pièces du dossier qui lui était soumis, a exactement qualifié les faits de l’espèce. Dès lors qu’elle jugeait ainsi que la maladie était directement imputable à la vaccination obligatoire, la cour n’a pas commis d’erreur de droit en écartant le recours. • Imputabilité non reconnue (1) Conseil d’État 11 juillet 2008, n o 305685 Mme A., alors infirmière scolaire, a été vaccinée contre l’hépatite B les 26 août 1996, 26 septembre 1996 et 3 mars 1997. Elle impute à ces vaccinations la pathologie dont elle est atteinte et a recherché, sur le fondement de l’article L. 3111-9 du Code de la santé publique, la responsabilité de l’État du fait des vaccinations obligatoires. Elle se pourvoit en cassation contre l’arrêt du 15 mars 2007 par lequel la cour administrative d’appel de Marseille a confirmé le jugement du tribunal administratif de cette ville du 13 septembre 2005 rejetant ses conclusions indemnitaires. Mme A. souffrait d’une pathologie protéiforme dont il n’était pas établi qu’elle trouve son origine dans les vaccinations qu’elle avait subies, même si l’expert avait estimé que ces vaccinations pouvaient avoir joué un rôle dans l’état actuel de Mme A. En se fondant ainsi sur le caractère atypique et non identifié de la pathologie de la requérante, finalement diagnostiquée par défaut comme une fibromyalgie, pour considérer que le lien entre les vaccinations subies par l’intéressée et son état n’était pas direct, la cour n’a ni commis d’erreur de droit, ni inexactement qualifié les faits. • Imputabilité non reconnue (2) CAA Bordeaux, 1 juillet 2008, n o 07BX00660 Mme X., qui exerce la profession d’aide-soignante, fait appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande tendant à la condamnation de l’État à l’indemniser des préjudices résultant de la sclérose en plaques dont elle est affectée et qu’elle estime imputable à la vaccination obligatoire contre l’hépatite B dont elle a fait l’objet dans le cadre de son activité professionnelle. Il résulte de l’instruction, et notamment du rapport de l’expert, que les premiers symptômes de la sclérose en plaques dont est atteinte Mme X. n’ont été médicalement constatés, lors d’un examen qui a mis en évidence des lésions démyélinisantes, qu’au cours de l’année 1999, soit plus de deux ans après le rappel de vaccin effectué le 21 janvier 1996. Par suite, et alors même que le rapport d’expertise n’a pas exclu l’existence d’un lien de causalité entre la vaccination et l’affection et que Mme X. n’a présenté, antérieurement aux injections, aucun signe précurseur de la pathologie, le délai ayant séparé la dernière injection qu’elle a rec¸ue et le développement des premiers symptômes de la sclérose en plaques ne permet pas de regarder comme établie l’existence d’un lien direct entre la vaccination et l’affection. • Imputabilité non reconnue (3) CAA Lyon, 10 juillet 2008, n o 05LY00842 Mlle X., qui a dû se soumettre, dans le cadre des activités professionnelles d’agent hospitalier à l’hôpital de Bourbon-Lancy qu’elle exerc¸ait alors, à une vaccination obligatoire contre l’hépatite B, consistant en trois injections effectuées les 29 avril 1991, 24 mai 1991 et 29 juin 1991 et un rappel réalisé le 19 novembre 1992, a été atteinte d’une sclérose en plaques, diagnostiquée en juin 1994, qu’elle impute à ces vaccinations.
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Si Mlle X. a signalé en février 1992 des douleurs des membres inférieurs, une fatigue intense et une hypotension, apparues selon elle au mois d’août 1991, a présenté des dorsalgies aiguës en décembre 1991 et a décrit en janvier 1993 une crise d’asthme survenue en décembre 1992, le certificat médical établi à son bénéfice le 25 février 2002 par le médecin du travail ne suffit pas à démontrer que ces troubles, rapportés plusieurs mois après leur manifestation, constitueraient les premiers signes d’une sclérose en plaques, alors qu’il résulte de l’instruction et notamment des rapports d’expertise que la première manifestation de son affection démyélinisante est l’apparition d’une névrite optique rétrobulbaire gauche en avril 1994 ; qu’eu égard au délai d’au moins 17 mois entre le dernier rappel de vaccination et le premier symptôme neurologique évoquant une sclérose en plaques, le lien de causalité direct entre la vaccination de Mlle X., dont il ne résulte pas de l’instruction qu’elle était prédisposée au développement d’une affection démyélinisante, et l’apparition de la pathologie dont elle est atteinte n’est pas établi. Ainsi, la responsabilité de l’État n’est pas engagée. 44. Faute infirmière dans l’administration des médicaments Conseil d’État, 6 août 2008, n o 292748 Par une décision du 7 octobre 2005, le directeur général d’un centre hospitalier a révoqué une infirmière pour avoir commis une erreur de dispensation de traitement, constitutive d’une faute disciplinaire grave. Aucune des sanctions proposées n’avait recueilli l’accord de la majorité des membres présents du conseil de discipline lors de sa séance du 5 octobre 2005. L’infirmière a saisi la commission des recours qui a, dans un avis du 8 mars 2006, estimé que la sanction infligée par le directeur devait être remplacée par une exclusion temporaire de fonctions d’une durée de deux ans assortie d’un sursis de 18 mois. L’infirmière a confondu l’identité de deux patients inscrite sur les supports du traitement médicamenteux. Elle a interverti les médicaments de nature différente devant être remis à ces deux patients et il s’en est suivi l’admission en service de réanimation de l’un d’entre eux. Cette infirmière avait déjà fait l’objet, le 17 mai 2004, après avis du conseil de discipline, d’une sanction d’exclusion temporaire de fonctions pour une durée maximale de 15 jours avec sursis, à la suite d’une erreur de dispensation d’un traitement le 26 janvier 2004 ayant entraîné le décès d’un patient le surlendemain des faits. Eu égard à la réitération et l’extrême gravité des faits ainsi commis par l’intéressée, qui étaient de nature à compromettre gravement la santé et la sécurité des patients, la commission des recours a entaché son avis d’une erreur manifeste d’appréciation en estimant qu’ils ne justifiaient que le prononcé d’une exclusion temporaire de fonctions d’une durée de deux ans assortie d’un sursis de 18 mois. 45. Procédure. Nécessité d’une notification régulière Conseil d’État, 28 mars 2008, n o 304107 Un chirurgien-dentiste se pourvoit en cassation contre la décision du 8 février 2007 par laquelle la section disciplinaire du Conseil national de l’Ordre des chirurgiens-dentistes a rejeté son appel dirigé contre la décision du conseil régional de l’Ordre de Languedoc-Roussillon du 19 novembre 2005 lui infligeant la sanction de l’interdiction d’exercer l’art dentaire pendant une année, au motif que cet appel, enregistré le 22 février 2006, avait été formé après l’expiration du délai de 30 jours fixé par les dispositions de l’article 22 du décret du 26 octobre 1948, qui avait couru à compter de la date du 18 janvier 2006 à laquelle l’intéressé avait rec¸u notification de la décision attaquée. Ce médecin a signé le 18 janvier 2006 une attestation aux termes de laquelle il a reconnu avoir rec¸u en mains propres du président du conseil départemental de l’Ordre des chirurgiens dentistes de l’Hérault la notification du « délibéré de l’audience publique du 19 novembre 2005 » relatif à l’affaire le concernant examinée par le Conseil régional de l’Ordre des chirurgiens-dentistes de LanguedocRoussillon. Une telle mention n’établit pas que la décision prise par le Conseil régional de l’Ordre lui avait été notifiée dans son intégralité et ne pouvait avoir pour effet de faire courir les délais d’appel. 46. Responsabilité sans faute des établissements Conseil d’État, 11 juillet 2008, n o 291016
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M. Emmanuel A, alors âgé de 23 ans, a été opéré le 7 avril 1995 à l’hôpital Pradel afin de traiter une grave insuffisance cardiaque compliquée d’une endocardite infectieuse. Au décours de cette opération, qui imposait la mise en place d’une circulation sanguine extracorporelle, le décrochement accidentel de la canule située dans l’aorte a provoqué une embolie gazeuse et une interruption de la circulation sanguine à la suite desquelles le patient a été plongé dans un coma irréversible. Les hospices civils de Lyon se pourvoient en cassation contre l’arrêt par lequel la cour administrative de Lyon les a condamnés à réparer, sur le fondement de la responsabilité sans faute, les conséquences dommageables de cet accident. Il ressort des pièces du dossier soumis que si « le risque opératoire de l’intervention (. . .) vu les lésions en cause était très élevé (indépendamment de l’accident en cause) l’embolie gazeuse est une complication rare (1/1000 interventions) l’étiologie de l’accident en cause – la dissection accidentelle au site de la canulation aortique – est, elle aussi, très rare et difficilement rattrapable (. . .) car elle impose un arrêt intempestif de la circulation extracorporelle » et que « le coma consécutif à l’intervention chirurgicale, nécessitée de manière absolue par l’état de l’intéressé, est une complication exceptionnelle ». La cour a considéré que l’accident trouvait sa cause dans la mise en œuvre d’une technique complexe qui présente un risque dont l’existence est connue mais la réalisation exceptionnelle, dont aucune raison ne permettait de penser que M. A. y ait été particulièrement exposé et dont la réalisation avait été la cause de dommages d’une extrême gravité sans rapport avec son état initial comme avec l’évolution prévisible de celui-ci, a suffisamment motivé sa décision. Elle n’a pas dénaturé les faits en jugeant que le risque d’embolie gazeuse présentait un caractère exceptionnel. 47. Cancer. Imputabilité non établie avec l’exposition de la centrale de Tchernobyl CAA Paris 19 mars 2008 n o 06PA02185 Une femme déclare souffrir d’un cancer de la thyroïde pour lequel elle a subi une thyroïdectomie subtotale en 1996. Elle impute cette pathologie aux retombées du nuage radioactif résultant de l’explosion de la centrale nucléaire de Tchernobyl auxquelles elle aurait été exposée alors qu’elle habitait en 1986 à Evreux. Estimant que l’État franc¸ais a commis une faute en n’informant pas pleinement les populations de la réalité de la situation et en ne prenant pas les mesures sanitaires qui s’imposaient de ce fait, cette femme sollicite l’indemnisation du préjudice résultant de l’affection dont elle est atteinte et qu’elle impute aux conséquences de son exposition aux retombées radioactives. La responsabilité de l’État franc¸ais ne pourrait être engagée que s’il était établi, d’une part, que la pathologie à l’origine du préjudice dont cette femme demande réparation résulte directement de son exposition aux retombées radioactives provenant de l’explosion de la centrale de Tchernobyl, et que, d’autre part, l’État a commis une faute de nature à engager sa responsabilité ayant privé l’intéressée d’une perte de chance sérieuse d’échapper à l’affection dont elle est atteinte. Il résulte de l’instruction et, notamment, des indications non contestées apportées par le ministre de l’Économie, des Finances et de l’Emploi et issues des rapports de l’Institut national de veille sanitaire, que les doses efficaces de rayonnement alors rec¸ues par la population adulte en France, y compris celles constatées dans l’Est de la France, qui étaient supérieures à celles auxquelles la requérante alors âgée de 38 ans a pu être soumise à Evreux en 1986, sont restées très inférieures à celles qui sont susceptibles de favoriser une augmentation significative de la survenue de pathologies thyroïdiennes. Ainsi, le lien de causalité direct entre l’apparition de la pathologie dont la requérante est atteinte et son exposition aux retombées radioactives de l’explosion de la centrale nucléaire de Tchernobyl ne peut être regardé comme établi. Dès lors, à supposer même que les autorités administratives franc¸aises auraient commis, dans la gestion de la crise sanitaire résultant du passage sur la France en 1986 du nuage radioactif provenant de l’explosion de la centrale nucléaire de Tchernobyl, une faute de nature à engager la responsabilité de l’État, la requête ne peut qu’être rejetée. 48. Antennes relais. Non-application du principe de précaution Conseil d’État, 2 juillet 2008, n o 310548 Le maire de Créteil avait, invoquant le principe de précaution, imposé des conditions à l’installation d’antennes relais dans un périmètre de 100 mètres autour de certains établissements.
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Eu égard à l’intérêt public qui s’attache à la couverture du territoire national par le réseau de téléphonie mobile tant GSM qu’UMTS ainsi qu’aux intérêts propres de la Société SFR, qui a pris des engagements à ce titre envers l’État dans son cahier des charges, et en l’absence d’éléments de nature à accréditer l’hypothèse, en l’état des connaissances scientifiques, de risques pour la santé publique pouvant résulter de l’exposition du public aux champs électromagnétiques émis par les antennes de relais de téléphonie mobile sur le territoire communal, l’urgence justifiait la suspension de cet arrêté municipal. Santé mentale 49. Santé mentale en France, surveillance et enjeux Bulletin épidémiologique hebdomadaire, numéro thématique, 23 septembre 2008 Une récente campagne de l’Institut national de prévention et d’éducation pour la santé (Inpes) a informé le grand public sur les troubles dépressifs. Les données de prévalences utilisées reposent sur des enquêtes épidémiologiques en population générale. Cet article explicite ce dont il est question en matière de « dépression » dans une enquête épidémiologique et présente les prévalences des troubles ainsi caractérisés obtenues à partir du Baromètre santé 2005 de l’Inpes. A été étudié l’épisode dépressif majeur (EDM). La prévalence des symptômes dépressifs subsyndromiques s’élève à 19 % ; 7,8 % des personnes ont présenté un EDM, dont 4,2 % un EDM d’intensité moyenne et 3,2 % un EDM sévère. Quarante-huit pour cent des personnes qui ont présenté un tel épisode au cours des 12 derniers mois en ont eu au moins deux. Quinze pour cent présentent un trouble chronique. Au regard notamment de ces résultats et des conséquences particulièrement délétères des troubles dépressifs caractérisés, tout particulièrement sévères, ces analyses confirment la problématique de santé publique qu’ils représentent et l’intérêt d’une campagne nationale d’information. La dépression, par ses cadres conceptuels et/ou étiologiques, constitue une maladie emblématique des nouvelles approches développées en épidémiologie sociale : l’épidémiologie biographique et l’épidémiologie contextuelle. Apporter des hypothèses de compréhension de cette maladie à partir de la complémentarité de ces deux approches est l’objectif de cette étude. Son but est de rechercher une association entre les évènements de vie potentiellement traumatiques dans l’enfance et la survenue d’un état dépressif à l’âge adulte. 50. Les Franc¸ais et leur sommeil Rapport de l’Inpes, mars 2008 Il s’agit de la première étude intégralement consacrée au sommeil réalisée par les pouvoirs publics. L’enquête sur les représentations, les attitudes, les connaissances et les pratiques du sommeil des jeunes adultes en France s’inscrit dans le cadre du programme d’actions sur le sommeil initié par le ministère de la Santé en janvier 2007. Le sommeil n’est pas simplement de l’ordre du bien-être. Étroitement lié aux modes de vie, il a un impact très important sur le quotidien. Pourtant, les bonnes pratiques, les mauvaises habitudes, les conséquences du bien et du mal dormir restent encore méconnues de la plupart du grand public, comme de nombreux professionnels de santé. L’Inpes a donc mené cette étude pour identifier les leviers et les freins d’un comportement – le sommeil – dans une population cible – les jeunes adultes (25 à 45 ans). Parmi les personnes interrogées, 45 % considèrent ne pas dormir assez. Les raisons incriminées sont nombreuses : le travail (52,5 %), les facteurs psychologiques comme le stress ou l’anxiété (40 %), les enfants (27 %), les loisirs (21 %) et le temps de transport (17 %). Qu’il ait un sommeil de courte ou de longue durée, un adulte a besoin de six à dix heures de sommeil par nuit. Les personnes interrogées semblent avoir intégré cette donnée. Les conséquences d’un mauvais sommeil sont nombreuses : impacts sur les mécanismes d’apprentissage et de mémorisation, sur la régulation de l’humeur et du stress mais aussi de la glycémie. . . Les trois quarts des personnes interrogées ont identifié la dépression (79 %) et les problèmes de mémoire (74 %) comme des conséquences possibles d’un manque régulier de sommeil. Mais moins du tiers savent qu’il peut favoriser la prise de poids et moins de la moitié qu’il peut entraîner de l’hypertension artérielle.
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Les données de cette enquête vont permettre à l’Inpes de poursuivre la mise en place d’actions de communication en santé publique, qui devraient promouvoir, dans la plupart des cas, des mesures simples pour assurer un meilleur sommeil. 51. Injonction de soins Circulaire DGS/MC4 no 2008-213, 18 juin 2008 Cette circulaire a pour objet d’informer, d’une part, des modifications apportées par la loi n o 2008-174 du 25 février 2008 relative à la rétention de sûreté et à la déclaration d’irresponsabilité pénale pour cause de trouble mental au dispositif de l’injonction de soins, et, d’autre part, des modalités d’application de l’arrêté du 24 janvier 2008 pris pour l’application des articles R. 3711-8 et R. 3711-11 du Code de la santé publique relatif aux médecins coordonnateurs, ainsi que du statut de ces médecins au regard des cotisations sociales (décret et arrêté du 18 mars 2008). L’article 6 de la loi du 25 février 2008 a modifié à la marge les dispositions du Code de la santé publique relatives à l’injonction de soins (art. L. 3711-1 à L. 3711-5). Ces modifications consistent à compléter les missions des médecins coordonnateurs pour y intégrer la coopération de ces médecins à la réalisation d’études sur l’injonction de soins et à des actions de formation, et à aménager une transmission d’informations, à l’article L. 3711-2, entre les médecins dispensant des soins pendant la détention et les médecins intervenant dans l’injonction de soins. Le dispositif encadrant la prescription de médicaments entraînant une diminution de la libido est simplifié. Seuls les psychologues ayant cinq ans d’expérience ont le droit d’être psychologue traitant d’une personne soumise à une injonction de soins. Par ailleurs, la loi du 25 février 2008 modifie le champ de l’injonction en créant, dans le Code de procédure pénale, une nouvelle mesure de sûreté (la surveillance de sûreté) pouvant comprendre une injonction de soins. 52. Responsabilité d’un CHS pour des troubles physiques non décelés Conseil d’État, 11 juillet 2008, n o 278279 À la suite d’une première chute survenue dans son atelier le 2 janvier 1992, puis d’une seconde chute survenue à son domicile le 8 janvier 1992, un artisan, s’est plaint de vives douleurs à la cuisse droite et a présenté un hématome dans cette région. Il a été pris en charge le 9 janvier 1992 au service des urgences du centre hospitalier général à la demande de son médecin traitant qui, constatant qu’il présentait « une algie à type de contracture périphérique », souhaitait « éliminer une pathologie radiculaire centrale ou neurologique ». Il a subi dans cet hôpital, dans la journée du 9 janvier un électrocardiogramme et un bilan sanguin puis a été adressé par l’urgentiste au centre hospitalier spécialisé afin d’être examiné par un médecin psychiatre. Il a été placé sous observation dans cet établissement du 9 au 11 janvier suivant après réalisation d’un électromyogramme et d’un électroencéphalogramme. Le 5 mars 1992, un bilan radiologique prescrit par un médecin de ville, a révélé que ce patient était atteint d’une fracture de l’extrémité du fémur droit remontant à au moins deux mois qui a nécessité une opération et la mise en place d’une prothèse. Il souffre de graves difficultés de déplacement. La cour a écarté la faute du centre hospitalier général à ne pas avoir diagnostiqué la fracture du col du fémur dont souffrait M. A. lors de son admission aux urgences et à ne pas avoir prescrit une radiographie de la hanche, se fondant sur le rapport de l’expert et de son sapiteur. Ces derniers après avoir rappelé que les fractures du col du fémur sont des fractures très fréquentes qui touchent les personnes âgées et s’accompagnent généralement d’une impotence complète, ont indiqué que le patient, qui était alors âgé de 49 ans, ne présentait pas la déformation caractéristique de ce type de fracture lorsqu’il a été admis aux urgences, qu’il pouvait se déplacer et que tous les examens prescrits l’avaient été de manière pertinente. Eu égard à la personnalité de l’intéressé qui n’avait pas fait état de ses chutes des jours précédents et aux termes de la lettre de son médecin traitant, le centre hospitalier avait pu orienter le diagnostic vers une pathologie neurologique ou psychiatrique et adresser le patient au centre hospitalier spécialisé. Aucune faute dans sa prise en charge, son examen et son orientation ne pouvait être reprochée au service des urgences du centre hospitalier général. En revanche, lors de son hospitalisation au centre hospitalier spécialisé pendant plus de 48 heures, le patient a continué de se plaindre de vives douleurs à la jambe et a présenté des difficultés à se maintenir
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debout. Il a été renvoyé à son domicile avec une prescription de valium. La cour en écartant toute faute de cet établissement, au motif que celui-ci n’était pas équipé d’un service radiologique alors que la persistance de vives douleurs et l’aggravation de l’état fonctionnel du patient devait conduire les médecins qui l’avaient examiné dans cet établissement à prescrire des examens complémentaires, a inexactement qualifié les faits. Il convient de retenir la responsabilité du centre hospitalier spécialisé. 53. Suicide d’un détenu CAA Bordeaux, 15 juillet 2008, n o 07BX01562 Un homme, mis en examen pour assassinat avec préméditation, a été placé en détention provisoire le 4 décembre 2000 à la maison d’arrêt de Saint-Pierre et Miquelon. L’intéressé, qui avait fait état de son intention de mettre fin à ses jours et qui avait fait une tentative de suicide dans la nuit du 5 au 6 mars 2001, souffrait d’un syndrome dépressif pour lequel il bénéficiait d’un traitement médical. Cette situation a donné lieu à un signalement pour qu’une surveillance particulière soit exercée à son égard, à des consultations régulières auprès d’un médecin et d’un psychologue, ainsi qu’à la délivrance au profit de ses proches de nombreux permis de visite. Cet homme, qui était alors le seul détenu à la maison d’arrêt, s’est donné la mort le 30 juillet au matin en absorbant une quantité importante de médicaments. Le détenu s’est procuré auprès d’autres détenus incarcérés provisoirement, pendant une période qui s’est étendue du mois d’août 2001 au mois de juin 2002, des comprimés de huit médicaments différents, auxquels se sont ajoutés les nombreux comprimés qui lui étaient prescrits et qu’il n’ingérait pas. Il a entreposé ces médicaments dans sa cellule, en les dissimulant dans un sachet plastique. Le directeur de l’établissement pénitentiaire et le juge d’instruction, qui effectuaient la collecte des effets personnels du défunt en vue de les remettre à sa mère, ont aisément découvert, sur une étagère, le sachet plastique qui contenait les médicaments entreposés par la victime, ainsi que deux lames neuves de cutter, au fond d’une poche de valise. Ainsi, l’administration pénitentiaire, qui connaissait l’intention de se suicider du détenu, ne s’est pas assurée par une fouille approfondie de la cellule que celui-ci n’avait pas en sa possession des substances facilitant le passage à l’acte. En outre, le 30 juillet 2002, alors que le détenu se levait habituellement à 8 heures chaque matin, le surveillant ne s’est pas alerté avant 9 h 25 de ce que l’intéressé ne s’était pas éveillé. Dans ces conditions, l’administration pénitentiaire a commis des fautes qui sont de nature à engager la responsabilité de l’État à l’égard des ayants droit de la victime. 54. Hospitalisation sur demande d’un tiers. Motivation du certificat de quinzaine CAA Marseille, 7 juillet 2008, n o 07MA00708 En matière d’hospitalisation sur demande d’un tiers, le certificat médical de quinzaine doit renseigner clairement sur l’existence et la nature des troubles qui font obstacle à ce que la personne soumise à hospitalisation sur la demande d’un tiers donne son consentement à la poursuite de celle-ci sous surveillance médicale constante. Or le certificat médical établi le 21 avril 1999 s’en tient à faire état de troubles à caractère psychiatrique pour justifier la poursuite d’un traitement en service hospitalier, mais ne comporte aucune précision sur l’évolution de la maladie à l’origine de l’hospitalisation initiale le 7 avril 1999 ni, surtout, sur les éléments qui faisaient alors obstacle au consentement du patient ainsi qu’à la délivrance du traitement approprié en dehors de l’hospitalisation. Par suite, la décision subséquente du directeur du centre hospitalier prise le 21 avril 1999 de maintenir le patient en service hospitalier est irrégulière, et doit être annulée. 55. Hospitalisation sur demande d’un tiers. Absence de motivation de la décision du directeur CAA Marseille, 7 juillet 2008, n o 07MA00782 La décision d’admission que le directeur de l’établissement auquel est présentée une demande d’hospitalisation à la demande d’un tiers ou de prolongation de celle-ci, est tenu de prendre, n’a pas à être formalisée par écrit ni, par suite, à être motivée, dès lors que l’auteur de la décision a vérifié le respect de la procédure sus-décrite et qu’il s’est, comme en l’espèce, assuré de la présence au dossier de toutes les pièces exigées et mentionnées au bulletin d’entrée. Il suit de là que les moyens tirés d’une méconnaissance des dispositions de la loi du 11 juillet 1979, laquelle ne trouve pas à s’appliquer en l’espèce, et du défaut de motivation des deux décisions des 7 et 8 avril 1999 doivent être écartés.