Les compartiments intracanalaires rachidiens : anatomie, séméiologie et pathologie

Les compartiments intracanalaires rachidiens : anatomie, séméiologie et pathologie

Feuillets de Radiologie, 2005, 45, n° 1, 37-48 © Masson, Paris 2005 Mise au point Système nerveux Les compartiments intracanalaires rachidiens : ana...

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Feuillets de Radiologie, 2005, 45, n° 1, 37-48 © Masson, Paris 2005

Mise au point

Système nerveux Les compartiments intracanalaires rachidiens : anatomie, séméiologie et pathologie L. HAURET, C. GRAEF, R. BELLAICHE, A.-M. DION, Y. GEFFROY, B. BOURCIER, P. MARION, G. KOUTO, B. BOYER

Summary: Spinal canal spaces: anatomy, clinical presentation and pathology. Spinal dura et leptomeninges divide the spinal canal into 4 compartments: epidural, subdural, subarachnoid and intramedullary spaces. MR imaging is the best tool to recognize these spaces, localize lesions and establish preoperative diagnosis. Key words: MRI. Spine. Meninges.

Résumé La dure-mère rachidienne et les leptoméninges divisent le canal rachidien en 4 compartiments : épidural, sous-dural, sous-arachnoïdien et intra-médullaire. L’IRM est le meilleur outil pour reconnaître ces espaces, localiser les processus lésionnels et établir un diagnostic préopératoire. Mots clés : IRM. Rachis. Méninges.

Devant la découverte d’un processus intracanalaire rachidien, la localisation par rapport aux méninges, confrontée au contexte clinique et biologique est une étape essentielle du diagnostic étiologique. Elle repose sur l’IRM qui, à partir d’une bonne connaissance anatomique des espaces rachidiens et des éléments séméiologiques propres à chaque compartiment, permet cette localisation spatiale. La pathologie intra-médullaire ne sera pas abordée, ainsi que les cadres traumatique et pédiatrique. ANATOMIE Les méninges rachidiennes On oppose la méninge dure ou dure-mère ou pachyméninge aux méninges molles ou leptoméninges (fig. 1) [1]. Épaisse, résistante et nacrée, la pachyméninge vertébrale correspond au feuillet interne de la pachyméninge Service de Radiologie, HIA Bégin, 69, avenue de Paris, 94160 Saint-Mandé. Correspondance : L. Hauret, à l’adresse ci-dessus.

endocrânienne. Toutefois, à l’opposé de la disposition intracrânienne où le périoste des os du crâne constitue le feuillet externe de la dure-mère, en relation intime avec le feuillet interne, la dure-mère spinale est ici nettement séparée du périoste vertébral par l’espace vasculograisseux épidural. Largement évasée en entonnoir à la jonction cranio-vertébrale, elle est en continuité avec la duremère intracrânienne et présente de très fortes attaches ostéopériostées sur le pourtour du foramen magnum et sur la face postérieure de l’axis, avec deux orifices latéraux pour la pénétration des artères vertébrales. En bas, le sac dural s’effile progressivement et donne naissance au ligament coccygien qui entoure le filum terminal et s’insère sur la face postérieure du canal sacré entre S1 et S4. Latéralement, la dure-mère s’engage dans les foramens intervertébraux et forme un manchon radiculaire autour de l’origine des nerfs spinaux. Selon ce concept, la leptoméninge correspond à l’ensemble pie-mère et arachnoïde. Son feuillet externe ou arachnoïde est constitué de simples tractus fibreux. Il prend en dedans une structure alvéolaire et réticulaire contenant le LCS. Le feuillet interne, fin, mou, lâche, peu résistant s’épaissit au

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Il est possible de parler d’un espace épidural antérieur pré-ligamentaire et d’un espace épidural antérieur rétro-ligamentaire. L’ESPACE SOUS-DURAL C’est l’espace anatomique le plus discuté. Classiquement envisagé comme un espace virtuel entre la dure-mère et l’arachnoïde ou feuillet externe de la leptoméninge, il ne serait en fait que le fruit d’une dissection artificielle des fibres dure-mériennes les plus profondes et les plus lâches.

Moelle

Espace épidural

Pie-mère

Dure-mère Arachnoïde

L’ESPACE SOUS-ARACHNOÏDIEN

Espaces sous-arachnoïdiens LCS

Il contient le liquide cérébro-spinal. Il est limité par le feuillet externe de la leptoméninge en dehors et la pie-mère en dedans.

Fig. 1. — Les méninges.

L’ESPACE SOUS-PIAL contact du névraxe où il forme une lame porte-vaisseaux, ex pie-mère.

C’est un espace virtuel situé entre la moelle et la pie-mère. Il est rarement concerné par les processus pathologiques en raison de la forte adhérence de la pie-mère à la moelle d’une part et de la fragilité pie-mérienne d’autre part.

Les espaces rachidiens LA MOELLE L’ESPACE ÉPIDURAL Il est limité en dehors par le périoste des structures osseuses et par le ligament jaune en arrière. L’espace épidural antérieur (fig. 2) est constitué d’avant en arrière par le périoste, le surtout fibro-vasculaire, le ligament longitudinal postérieur, et la dure-mère. Il existe des attaches sagittales : — le septum médian d’insertion du ligament longitudinal postérieur qui sépare l’espace épidural antérieur en deux espaces droit et gauche. Ce septum est présent à hauteur du corps vertébral. En arrière du disque, il existe une intrication étroite des fibres du ligament longitudinal postérieur et de celles de l’annulus externe. La présence de ce fort septum médian rend compte de l’aspect bilobé de l’envahissement épidural antérieur à partir d’un processus évolutif spondylien ; — les ligaments antérieurs de la dure-mère ou de Hoffman qui joignent la dure-mère à la partie postérieure du ligament longitudinal postérieur.

Surtout fibro-vasculaire

Septum

Corps vertébral

Ligament longitudinal postérieur

Ligaments de Hoffman Fig. 2. — L’espace épidural antérieur.

Dure-mère Arachnoïde

Elle constitue le dernier espace où peuvent se développer les processus pathologiques.

SÉMÉIOLOGIE IRM Siège de la lésion En pratique, l’IRM permet de définir le siège de la lésion. À partir de cette localisation, des gammes diagnostiques peuvent être proposées. Elle nécessite une technique sans faille [2] : — étude de l’ensemble du rachis ; — réalisation d’au moins deux plans de coupe afin de déterminer au mieux le siège de la lésion. Les plans de coupe sagittal et axial sont les plus contributifs mais il faut savoir utiliser les coupes frontales pour l’étude des processus sous-arachnoïdiens ; — des séquences pondérées T1 et T2 ; — l’injection de contraste est dans la majorité des cas indispensable. L’analyse séméiologique de la lésion en IRM doit préciser : — le siège en hauteur (cervical, thoracique ou lombaire) ; — le siège dans le canal (épidural, sous-dural, sousarachnoïdien ou intra-médullaire). C’est l’étape fondamentale ; — la taille en hauteur ; — le nombre de lésions ; — en cas de processus épidural, topographie axiale, coulée d’une seule tenue ou existence de plusieurs foyers, origine osseuse, origine extra-vertébrale, origine épidurale pure, retentissement sur la moelle ; — en cas de processus sous-arachnoïdien, topographie axiale, extension foraminale ou extra-vertébrale, existence d’une base d’implantation méningée, existence d’une distribution le long du trajet d’une racine, images linéaires ou

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Fig. 3. — Processus épidural.

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Fig. 5. — Processus sous-arachnoïdien.

Fig. 4. — Processus sous-dural.

Fig. 6. — Processus intra-médullaire.

nodulaires disséminées le long de l’axe médullaire ou des racines de la queue de cheval, composants macroscopiques (charnu, kystique, nécrotique, hémorragique, calcifications), retentissement sur la moelle.

supérieur et inférieur de la lésion. Il refoule la moelle et peut donc l’élargir dans au moins un plan frontal ou sagittal (fig. 5). Un processus intra-médullaire est à l’origine dans la majorité des cas d’un élargissement médullaire ainsi que d’un amincissement des espaces sous-arachnoïdiens dans tous les plans (fig. 6).

Quels sont les éléments qui permettent de préciser le siège dans le canal ? Un processus épidural peut être antérieur ou postérieur ou occuper tout l’espace épidural, engainant le sac dural. Ce processus efface ou ampute la graisse de l’espace épidural. Il refoule la dure-mère et amincit les espaces sous-arachnoïdiens dans tous les plans. La moelle peut être élargie dans au moins un plan frontal ou sagittal (fig. 3). Un processus sous-dural respecte la graisse épidurale sans l’infiltrer. Il présente une solution de continuité avec les structures osseuses. Il est limité en dehors par la duremère. Il existe une compression des espaces sous-arachnoïdiens et de la moelle (fig. 4). Un processus sous-arachnoïdien élargit les mêmes espaces sous-arachnoïdiens dans au moins un plan au pôle

PATHOLOGIE [3, 5] Les pathologies épidurales Une lésion épidurale peut être primitive, secondaire à une lésion rachidienne, ou enfin, secondaire à une lésion para-vertébrale. LA PATHOLOGIE TUMORALE Elle regroupe trois entités avec en premier lieu les métastases vertébrales ou épidurales.

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A BC

Fig. 7. — Épidurite carcinomateuse secondaire à une néoplasie de prostate. Coupes sagittales T2 (A), T1 après gadolinium (B) et coupe axiale T1 après gadolinium (C). Infiltration de l’espace épidural antérieur par un processus en hypersignal en pondération T2 et se rehaussant après gadolinium qui amincit les espaces sous-arachnoïdiens dans tous les plans. Cette lésion est secondaire à l’envahissement osseux de la vertèbre adjacente comme en témoigne les anomalies de signal de cette dernière. Il existe d’autres vertèbres envahies. Il existe sur la coupe axiale une image en embrase de rideau en rapport avec la présence du septum médian d’insertion.

Les métastases

Les lymphomes

Elles sont les tumeurs osseuses rachidiennes les plus fréquentes et sont la principale cause des compressions médullaires. Ce sont surtout des métastases de cancers bronchiques, du sein, du rein et de la prostate (fig. 7) chez l’adulte. L’atteinte de l’espace épidural est exceptionnellement isolée et très souvent secondaire à l’envahissement osseux de voisinage, même si les lésions osseuses sont discrètes. Sans franchir la dure-mère la lésion tissulaire tumorale comprime les espaces sous-arachnoïdiens, la moelle et les racines.

Ils peuvent aussi s’étendre de proche en proche au canal rachidien par les trous de conjugaison constituant une tumeur à origine para-vertébrale étendue en épidural avec respect du rachis osseux (fig. 8).

Les tumeurs osseuses primitives Elles sont représentées chez le sujet jeune par les tumeurs bénignes et le sarcome d’Ewing. Les lésions limitées à l’arc postérieur doivent faire évoquer un ostéome ostéoïde surtout si elles sont lytiques et condensantes, un ostéoblastome ou un kyste anévrysmal surtout si elle sont soufflantes. Chez un sujet âgé, on évoquera le sarcome, et essentiellement le myélome (surtout en cas de lésions lytique et de lyse corticale). Le chordome présente deux pics de fréquence chez le jeune et la personne âgée. Cette tumeur embryonnaire, développée à partie de résidus de la notochorde, se localise aux deux extrémités du rachis clivus et sacrum. Elle est à l’origine de phénomènes d’ostéolyse importants mais une ostéocondensation de voisinage est possible. L’angiome agressif, à la différence du très fréquent angiome simple, peut développer une extension para-vertébrale, voire épidurale et compressive.

LA PATHOLOGIE DÉGÉNÉRATIVE Elle concerne les hernies discales et les kystes synoviaux. La hernie discale (fig. 9) peut comprimer la moelle et les racines de la queue de cheval. Elle peut être cervicale, dorsale ou lombaire. L’IRM permet dans la plupart des cas la visualisation du LLP sur les coupes axiales ou sagittales sous forme d’une ligne d’hyposignal sur toutes les séquences. La capacité à préciser les rapports exacts du débord discal et du LLP et à distinguer LLP et dure-mère reste imparfaite. Il faut par contre s’attacher à préciser une éventuelle migration et surtout individualiser un fragment discal exclu (fig. 10) en sachant s’aider d’une injection de produit de contraste. Les kystes synoviaux articulaires postérieurs sont surtout découverts en lombaire et responsables de sciatiques ou cruralgies. Ils peuvent plus rarement être découverts dans d’autres localisations, en cervical et en particulier en C1. LES HÉMATOMES ÉPIDURAUX NON TRAUMATIQUES (fig. 11) Ils surviennent parfois chez des patients sous anticoagulants mais il existe des cas idiopathiques. Les circonstances

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A BC

Fig. 8. — Lymphome. Coupes sagittales T2 (A), T1 après gadolinium (B) et coupe axiale T1 après gadolinium (C). Infiltration de l’espace épidural latéral gauche par un processus en hypersignal en pondération T2 et se rehaussant après gadolinium. Il amincit les espaces sous-arachnoïdiens dans tous les plans. L’atteinte épidurale est secondaire à une localisation para-vertébrale gauche qui s’insinue par le foramen dans l’espace épidural. Le septum médian d’insertion du ligament longitudinal postérieur est intègre et interdit une extension contro-latérale dans l’espace épidural antérieur.

A BC

Fig. 9. — Hernie discale. Coupes sagittales T2 (A), T1 (B) et coupe axiale en pondération T2 (C). Processus épidural antérieur en continuité avec le disque C3-C4 et de même signal que ce dernier. Ce processus amincit les espaces sous-arachnoïdiens dans tous les plans. À hauteur du disque, il existe une intrication étroite entre l’annulus externe et le ligament longitudinal postérieur. En dehors des critères prédictifs basés sur l’extension de la hernie en hauteur et dans le plan axial déjà appliqués en scanner, l’IRM ne permet pas de différencier une hernie rétro-ligamentaire d’une hernie trans-ligamentaire. L’hypersignal médullaire en pondération T2 témoigne de la souffrance médullaire.

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A BC

Fig. 10. — Fragment discal. Coupes sagittales T2 (A), T1 avec gadolinium (B), coupe axiale en pondération T1 avec gadolinium (C). Discopathies dégénératives L4L5 et L5S1 avec débords discaux postérieurs. Processus arrondi en hypersignal en pondération T2 adjacent à la partie caudale du disque L4L5. Après gadolinium, ce processus est entouré d’un liseré continu de signal rehaussé identifiable dans tous les plans. Cet aspect témoigne d’un fragment discal exclu migré caudalement.

A BC

Fig. 11. — Hématome épidural. Coupes sagittales T2 (A), T1 (B) et coupe axiale en pondération T2 (C). Patiente sous anticoagulant. Processus en hypersignal en pondération T2 et isosignal en pondération T1 par rapport à la moelle, enchâssé dans l’espace épidural postérieur dont la graisse est effacée. Les espaces sous-arachnoïdiens sont comprimés dans tous les plans. La dure-mère fortement insérée sur le foramen magnum est refoulée mais limite l’extension du processus hémorragique au canal rachidien. L’hypersignal médullaire en pondération T2 témoigne de la souffrance médullaire.

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A BC D

Fig. 12. — Abcès épidural. Coupes sagittales T2 (A), T1 sans (B) et avec gadolinium (C), coupes axiales en pondération T2 (D). Formation épidurale postérieure en hypersignal T2, en isosignal T1par rapport à la moelle avec coque périphérique se rehaussant après injection. Cet aspect témoigne d’une collection infectieuse type abcès épidural. On retrouve par ailleurs l’ensemble des éléments d’une spondylodiscite classique sur le rachis avec atteinte spondylienne, discale et phlegmons des parties molles antérieures et de l’espace épidural antérieur. Devant cet abcès épidural postérieur sans relation avec les lésions antérieures , il est licite de discuter une origine strictement hématogène et non pas une simple contamination par contiguïté à partir des lésions rachidiennes antérieures.

A BC

Fig. 13. — Schwannome d’une racine de la queue de cheval. Coupes sagittales T2 (A), T1 avec gadolinium (B) et coupe axiale en pondération T1 avec gadolinium (C). Processus ovalaire lombaire refoulant les racines de la queue de cheval en arrière et élargissant les espaces sous-arachnoïdiens dans tous les plans. Il est donc en situation sous-arachnoïdienne. Il est en isosignal à la moelle en pondération T1 et en hypersignal en pondération T2. Il existe une prise de contraste hétérogène avec portion kystique centrale.

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A BC D E

Fig. 14. — Neurofibromatose de type II. Coupes sagittales en pondération T2 (A), T1 avec gadolinium (B et C) et coupes axiales en pondération T1 avec gadolinium (D et E). Il existe deux lésions. Premièrement, formation intra-médullaire élargissant la moelle dans tous les plans comportant une portion tissulaire charnue en hypersignal hétérogène en pondération T2 et se rehaussant après gadolinium. Cette formation tissulaire est surmontée d’une lésion kystique dont les parois ne se rehaussent pas après gadolinium en faveur d’un kyste satellite. Il n’existe pas de cavité hydrosyryngomyélique sus-jacente. Devant cette lésion, on évoque en premier lieu un épendymome. Deuxièmement, formation à contours réguliers se rehaussant de façon homogène à l’origine d’un élargissement du foramen droit et d’un scalloping vertébral. Cette lésion semble disposée le long d’une racine nerveuse. Cet aspect fait proposer en premier lieu un schwannome. L’association de ces deux lésions doit faire évoquer une neurofibromatose de type II.

Tableau I. — Caractéristiques des deux principales tumeurs sousarachnoïdiennes. Schwannome 50 % TSA

Méningiome 40 % TSA

40 ans

Femme 50 ans

Lombaire

Thoracique

Scalloping

Oui

Non

Insertion méningée

Non

Oui

Signal en T2

Hyper

Iso ou hypo

Extra-dural ou mixte

20 %

10 %

Saignement/kystisation

Oui

Non

Calcification

Non

Oui

Âge Localisation

du diagnostic sont l’association de douleurs brutales avec l’apparition rapide d’une paraplégie flasque. La topographie la plus fréquente est cervicale. La localisation de l’hématome dans le canal est quasiment toujours postérieure. Il ampute la graisse de l’espace épidural et la remplace. Son signal varie avec le temps comme tout hématome. Au stade aigu, l’hypersignal en pondération T1 n’existe pas mais l’hématome sera toujours hétérogène avec présence de plages hypointenses en pondération T2 et en écho de gradient. LA PATHOLOGIE INFECTIEUSE L’infection épidurale est secondaire dans 80 % des cas à l’extension d’une infection rachidienne. L’infection épidurale primitive par diffusion hématogène des germes ou plus rarement par ensemencement iatrogène représente actuelle-

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A BC

Fig. 15. — Méningiome. Coupes sagittales T2 (A), T1 après gadolinium (B) et coupe axiale en pondération T1 avec gadolinium (C). Processus ovalaire dorsal chez une femme de 52 ans bien limité élargissant les espaces sous-arachnoïdiens dans tous les plans et donc de situation sousarachnoïdiennes. Il refoule la moelle. Il est en isosignal à la moelle en pondération T1 et T2 et se rehausse de façon homogène après contraste. Il existe une base d’implantation méningée avec existence d’un rehaussement en queue d’aronde dans le plan sagittal.

A B ▲

Fig. 16. — Métastases leptoméningées de néoplasie du sein. Coupes sagittales en pondération T2 (A) et T1 après gadolinium (B). Mise en évidence de plusieurs nodules se rehaussant après gadolinium disséminés autour de la moelle et des racines de la queue de cheval en situation sous-arachnoïdiennes. Ces lésions sont, parfois, difficilement identifiables en contraste spontané d’où l’importance de l’injection de gadolinium dans un contexte néoplasique connu.

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A BC D E

Fig. 17. — Épendymome myxopapillaire. Coupes sagittales T2 (A), T1 sans (B) et après gadolinium (C), coupes axiales T2 (D) et T1 après gadolinium (E). Processus oblongue à grand axe vertical situé à hauteur de la queue de cheval de localisation sous-arachnoïdienne. Il est en hypersignal hétérogène en pondération T2, en hyposignal en pondération T1 par rapport à la moelle et il se rehausse fortement après contraste de façon discrètement hétérogène. Il existe une prise de contraste des méninges adjacentes à la tumeur.

ment 20 % des cas d’infection épidurale (fig. 12). Dans les deux cas, on reconnaît deux stades évolutifs : un stade de phlegmon avec un tissu inflammatoire et un stade de collection purulente entourée d’une coque inflammatoire et granulomateuse. L’injection intra-veineuse de gadolinium permet de distinguer les deux stades. Au stade de cellulite ou de phlegmon, le rehaussement est global et plutôt homogène. Au stade de collection, une coque épaisse se rehausse après injection et cerne la collection. LA PATHOLOGIE « GRAISSEUSE » Elle est principalement représentée par la lipomatose épidurale qui consiste en un dépôt excessif de graisse dans l’espace épidural, plus souvent dorsal que lombaire. La masse graisseuse est sans capsule. Elle réduit le dia-

mètre canalaire, efface les espaces sous-arachnoïdiens et peut comprimer la moelle. La masse a un aspect pathognomonique en imagerie avec hypersignal intense en pondération T1 annulé avec les techniques de suppression de la graisse. Les pathologies sous-durales Cet espace est rarement concerné par les processus hémorragiques ou infectieux et il ne l’est quasiment jamais par les processus tumoraux. L’hématome sous-dural, beaucoup plus rare que l’hématome épidural, présente un aspect lobulé et effilé qui refoule la graisse épidurale par ailleurs respectée. L’abcès sous-dural est exceptionnel puisque seulement 45 cas ont été rapportés.

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Les pathologies sous-arachnoïdiennes extra-médullaires LES TUMEURS PRINCIPALES Les schwannomes (fig. 13 et 14), développés à partir des racines dans leur trajet intra-dural, et les méningiomes (fig. 15), développés à partir de l’arachnoïde, représentent 90 % des tumeurs de cet espace. Leurs principales caractéristiques sont regroupées dans le tableau I. Les neurinomes ou schwannomes sont des tumeurs encapsulées, bien circonscrites et excentrées relativement à leur nerf d’origine. Les neurofibromes n’ont pas de capsule, sont mal limités et infiltrent le nerf. En cas de neurofibromatose, les lésions tumorales sont multiples et les différents types associés. LES AUTRES TUMEURS Les 10 % des tumeurs restantes correspondent aux métastases leptoméningées sûrement sous-évaluées, aux lipomes, aux myélolipomes, à des tumeurs rares comme l’épendymome myxopapillaire du filum terminale et aux processus expansifs d’origine dysembryoplasique. Les métastases leptoméningées (fig. 16) peuvent être secondaires à une dissémination par voie sous-arachnoïdienne de cellules tumorales à partir d’une lésion encéphalique. Elles sont également de plus en plus fréquemment décrites au cours de cancers bronchiques, mammaires et mélaniques ainsi qu’au cours des hémopathies. Elles sont facilement mises en évidence, après injection de gadolinium en IRM en raison de leur rehaussement intense, sous formes de plaques, nodules ou petites masses étendues le long de la moelle ou des racines de la queue de cheval. L’épendymome

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myxopapillaire (fig. 17) est toujours localisé en dessous de T9. Un signal plus élevé que la moelle épinière en pondération T1 traduisant le dépôt de mucus intra-tumoral est très évocateur. LES PATHOLOGIES NON TUMORALES Elles sont représentées par les hémorragies sous-arachnoïdiennes principalement d’origine cérébrale et les processus inflammatoires type arachnoïdite. CONCLUSION En cas de suspicion de pathologie rachidienne intra-canalaire, sur des signes d’appel neurologiques, l’IRM est l’examen d’imagerie à réaliser d’emblée. La reconnaissance des différents espaces méningés permet le plus souvent de suspecter le diagnostic étiologique des lésions et d’apprécier leur extension.

Références 1. Cosnard G, Duprez T, Lecouvet F, Mathurin P. Espaces méningés rachidiens : applications séméiologiques. Feuillets de Radiologie 1998; 38: 483-95. 2. Cosnard G, Manelfe C, Duprez T. Tumeurs et compressions médullaires. In: Deramond H, Pruvo JP. Syllabus de Neuroradiologie, Paris SFR 1997, p. 129-38. 3. Manelfe C. Imagerie du rachis et de la moelle. Vigot éditeur, Paris, 1989, 801 pages. 4. Halimi P. Imagerie du rachis et de la moelle. Médecine-Sciences Flammarion, Paris, 1992, 436 pages. 5. Cosnard G, Lecouvet F. Imagerie du rachis, des méninges et de la moelle épinière. Masson, Paris, 2001, 259 pages.

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TEST DE FORMATION MÉDICALE CONTINUE Les compartiments intracanalaires rachidiens : anatomie, séméiologie et pathologie

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Qu’avez-vous retenu de cet article ? Testez si vous avez assimilé les points importants de l’article en répondant à ce questionnaire sous forme de QCM. 1.Quels sont les deux espaces les moins souvent concernés par des processus pathologiques ? A : L’espace épidural ; B : L’espace sous-dural ; C : L’espace sous-arachnoïdien ; D : L’espace sous-pial ; E : L’espace intra-médullaire. Réponse(s) : 2. Quels sont les composants de l’espace épidural antérieur ? A : Périoste ; B : Surtout fibro-vasculaire ; C : Ligament longitudinal postérieur ; D : Dure-mère ; E : Septum médian d’insertion. Réponse(s) :

Réponses : p. 68

3. Au cours d’une épidurite carcinomateuse, quel est la structure anatomique responsable de l’image en embrase de rideau ? A : Septum médian d’insertion ; B : Ligaments de Hoffman ; C : Surtout fibro-vasculaire ; D : Dure-mère ; E : Ligament jaune. Réponse(s) : 4. Quels sont les deux pathologies tumorales sousarachnoïdiennes les plus fréquentes ? A : Schwannome ; B : Méningiome ; C : Métastases leptoméningées ; D : Ependymome myxopapillaire ; E : Myélolipomes. Réponse(s) :