Les connectivites : la place des anticorps antinucl~aires
LES CONNECTIVITES : LA PLACE DES ANTICORPS ANTINUCLI
Editorial
AIRES
Alain Chevailler a
Les maladies regroupees sous le terme de maladies auto-immunes atteignent 5 a 7 % de la population gen6rale et sont donc une cause de morbidite importante. Apres I'etude des marqueurs de I'inflammation, la recherche des auto-anticorps, et plus particulierement des anticorps antinucleaires (AAN), est souvent le deuxieme temps du diagnostic biologique qui permet de conforter I'individualisation precise d'un syndrome clinique flou, permettant une prise en charge therapeutique adaptee. C'est dire I'importance d'une parfake maitrise de la strategie de depistage et d'identification de ces auto-anticorps, qui se dolt d'aller du plus simple (immunofluorescence indirecte [IFI]), au plus complique. Ce numero special a et6 I'occasion de finaliser les seminaires delivr6s dans le cadre de journees de formation affichees au calendrier de Bioforma depuis 1998, qui en six sessions, ont vu la participation de quarante-cinq biologistes. II est avantageusement complet6 par le supplement qui edite les actes du 4 e Colloque du GEAI (Groupe d'etude de I'auto-immunite) du 16 juin 2006 & I'lnstitut Pasteur de Paris, manifestation touchant plus de deux cents biologistes. Dans le domaine difficilement standardisable de I'auto-immunite, o~ la qualite des resultats depend in fine de I'experience du biologiste, I'objectif est de presenter les differentes techniques, par des specialistes exer?ant dans des centres hospitalo-universitaires et particulierement impliques dans le domaine de I'auto-immunite. Le but est d'insister sur I'importance de la parfaite connaissance des differents param~tres (substrats, antiserums, temoins, etc.) des reactions d'lFI, d'immunodiffusion et d'immunoempreintes ou immunodot pour une interpretation valide des resultats obtenus, seule garantie d'une plus-value diagnostique. Plus d'une trentaine d'auto-anticorps circulants diriges contre des constituants normaux du noyau cellulaire ont et6 recenses. Chacun d'eux est specifique d'une proteine ou d'une nucleoprot6ine. Leur pr6sence est un element classique de la signature biologique de nombreuses maladies auto-immunes, dont le lupus 6ryth6mateux diss6mine (LES) est I'exemple le plus typique. La nomenclature des AAN est source de confusion, car les antigenes cibles peuvent ~tre identifies selon differentes modalit6s : par leur Iocalisation cytologique (nucleolaire, centrom~res, Golgi), par leur aspect de fluorescence (homogene, mouchete), par les initiales
a Laboratoire d'immunologie et d'allergologie Centre hospitalier universitaire - H6pital Larrey 4 9 9 3 3 Angers cedex 9 * Correspondance
[email protected] 9 Elsevier SAS. Revue Francophone des Laboratoires, juillet-aos 2006, N~ 384
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du nom du premier patient chez qui ils ont et6 decrits (Sm, Ro, La), par r6f6rence ~. la maladie associee (Scl-70, SS-A, SS-B), par la particule ou I'organite dans lesquels on les retrouve (RNP) ou par la mol6cule cible (ADN, topo-isomerase I). Certains sont m~me couramment design6s par plusieurs acronymes : SS-A/Ro, SS-B/La, topo-isomerase I/Scl-?0. En introduction, Pierre Youinou et collaborateurs redonnent au lymphocyte B toute sa place dans la pathogenie des maladies auto-immunes au vu des resultats de la recherche les plus recents. La recherche des AAN s'effectue en premiere intention par I FI. L'utilisation de differents types de substrats (coupes congelees d'organes de rat desormais supplantees par les cellules HEp-2 [cellules de carcinome larynge humain en culture]) permet la mise en evidence des diff6rents AAN dont on precisera le titre et I'aspect de fluorescence (article de Danielle Degenne et collaborateurs). La qualit6 et la richesse de I'iconographie de Particle soulignent le necessaire apprentissage indispensable au biologiste qui souhaite s'investir dans le diagnostic auto-immunologique. L'int6r~t des cellules H Ep-2 est d'offrir I'avantage de detecter des AAN specifiques d'esp~ce et de mettre en evidence une large gamme d'anticorps diriges non seulement contre des constituants nucleaires, mais aussi contre des constituants cytoplasmiques ou uniquement presents sur les cellules en mitose responsables d'images de fluorescence tout aussi caracteristiques et parfaitement exposees et illustrees dans I'article de Gilles Renier et collaborateurs). La recherche de la specificit6 antigenique de certains auto-anticorps se fait en deuxi~me intention par d'autres techniques (immunodiffusion, Elisa, immunodot ou immunoempreintes, multiplexage), dont les avantages et les inconvenients respectifs sont detaill6s dans les deux articles suivants. Ces auto-anticorps reconnaissent deux grands groupes d'auto-antigenes : les antigenes nucleaires insolubles, comprenant les nucl6osomes, les histones, I'ADN (natif ou denatur6) et les desoxyribonucleoprot6ines (DNP) associees (article de Alain Chevailler et collaborateurs) ; - les antig~nes nucleaires solubles, souvent d~sign6s sous le terme d'ENA (extractable nuclear antigen), formant un groupe tres vaste (article de Alain Chevailler et collaborateurs). -
La caract6risation de la sp6cificit6 peut avoir une importance diagnostique (anticorps antiSm/anti-ADN et lupus, anticorps anti-Scl-70 et sclerodermie gen6ralis6e), evolutive ou pronostique qui est exposee dans I'article de Charles Masson et collaborateurs dans le cadre des rhumatismes inflammatoires chroniques. La parfaite connaissance des methodes diagnostiques utilis6es et le dialogue indispensable avec le clinicien prescripteur pour replacer le resultat dans son contexte clinique sont les conditions sine qua non au rendu d'un r6sultat pertinent. Seule cette demarche est capable de conf6rer une plus-value dans la recherche de ces auto-anticorps en leur apportant un int6r~t diagnostique, 6volutif ou pronostique.
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