EDITORIAL
M4d Mal Infect. 1995;25, 1106
Les id6es reques en pathologie infectieuse P. D E L L A M O N I C A *
I 1 n' est pas question de proposer, ici, des voies futuristes, mais simplement de rappeler certaines donn6es bien document6es qui n' arrivent pas h s'int6grer dans la progression des id6es et des connaissances. Le chemin est encombr6 de "faqons d'&re" et "de faire" ressass6es, ce qui les rend rassurantes. Par exemple, l'6valuation des antibiotiques dans l'angine, malgr6 les efforts de certains, n'a pas avanc6 depuis de nombreuses ann6es. Beaucoup ont compris que l'efficacit6 du traitement ne s'6valuait pas sur l'effet clinique h court terme, car l'extr~me majorit6 des angines gu6rit spontan6ment, mais plus sfirement sur la fr6quence des r6cidives. Si des essais ont 6t6 con~us pour raccourcir les dur6es de traitement, 6valuant de nouveaux antibiotiques, pourquoi n'ont-ils jamais pris en compte le traitement dit de r6f6rence "la p6nicilline V pendant 10 jours" ? Le r61e de l'industrie pharmaceutique dans la conception des essais peut atre, en d6finitive, restricteur par la peur de voir le nouveau traitement test6 moins efficace que le traitement de r6f6rence. La confusion r~gne dans l'rvaluation des traitements des pneumopathies communautaires, faute de pouvoir documenter l'6tiologie dans environ 50 % des cas. Si l'on part d'un diagnostic clinique, 6tay6 par l'imagerie, l'rvaluation doit se faire sur la rapidit6 de la disparition des paramrtres d6finissant la pathologie h l'inclusion et la mortalit6. Ces param&res d6terminant de l'6volution sont le plus souvent, non pas le traitement, mais ceux drfinissant la gravit6 du patient en drbut de traitement. La documentation microbiologique ne devrait permettre que d'exclure de l'indication octroyre, certaines 6tiologies (pneumocystose, tuberculose...) ou certains patients prrsentant des facteurs de risque tr~s particuliers. La prescription de 1' antibiotique n'a r6ellement h ce j our, 6t6 considrrre qu'h titre individuel dans l'optique de la gurrison, mais ses cons6quences 6cologiques n'ont pas 6t6 prises en compte. L'rtude du pouvoir srlectionnant est rralisable non seulement in vitro, mais aussi in vivo. I1 est inquirtant que ce param&re, qu'il est urgent de prendre en compte, ait 6t6 occult6 pendant des ann6es. La drmarche des leaders d'opinion a toujours 6t6 vers l'espoir que de nouveaux antibiotiques allaient rrgler les probl6mes de rrsistance cr66s par l'utilisation anarchique des prrc6dents. A l'heure oil les nouvelles molrcules apportant un gain d'activit6 se font rares, au moment oO le cofit de la prescription est pris en compte, les infectiologues devraient rrflrchir pour une politique de la prescription de l'antibiotique, incluant le risque 6cologique. L' antibiotique est un mrdicament paradoxal qui a dans le public la rrputation de "fatiguer", mais qui est inrluctablement rrclam6 pour "gurrir plus vite". Le public est-il toujours sous influence rralisre par l'industrie pharmaceutique, ou est-ce seulement les mrdecins qui se d6chargent de leurs angoisses par cette prescription ? De plus, tout le monde sait parfaitement que dans la majorit6 des cas, l'observance va ~tre m6diocre et que la moiti6 de la quantit6 recommandre et achet6e sera utilisre. Ces antibiotiques non utilisrs vont enrichir la "pharmacie" familiale, source d'automrdication ultrrieure dont les risques ont 6t6 jusqu'alors mal identifirs. A l'h6pital, le probl~me est de m~me ordre. L'antibiotique a besoin de retrouver un statut de mrdicament h son haut niveau. Si avec les infections nosocomiales, l'accent est mis sur l'hygirne pour 6viter la diffusion de souches srlectionnres rrsistantes, la justification de la prescription permettrait de limiter la pression de srlection, facteur sfirement aussi important que l'hygi~ne. * CHU, H6pital de l'Archet, Maladies Infectieuses,Route de Saint-Antoinede Ginestibre,BP 79 - F-06202 Nice Cedex 3. 4'41'4'
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