Disponible en ligne sur www.sciencedirect.com
La Revue de médecine interne 29 (2008) 122–128
Idées et débats
Les non-maladies : un autre domaine de l’interniste Non-diseases: Another field for the specialist of internal medicine P. Carli ∗ , B. Graffin, O. Gisserot, C. Landais, J.-F. Paris Service de médecine interne, HIA Sainte-Anne, 83800 Toulon-Armées, France Disponible sur Internet le 12 septembre 2007
Résumé Propos. – Les non-maladies représentent un ensemble hétérogène de symptômes, de préoccupations ou de phénomènes ressentis ou interprétés à tort comme pathologiques et donc justiciables d’une intervention médicale. La plupart des médecins reconnaissent aisément les états subjectifs qui ne requièrent aucun acte médical, mais peuvent en revanche, à la suite d’une erreur de raisonnement ou d’interprétation médicale, retenir de bonne foi des diagnostics erronés, et ainsi créer des non-maladies, qui risquent de faire l’objet de traitements inappropriés. Points forts. – Cette revue (non exhaustive) propose de recenser, sur la base d’exemples de la littérature, les non-maladies anatomiques, cliniques, de laboratoire, de l’imagerie, iatrogéniques, psychiatriques et collectives. L’éducation de la population, la formation médicale des professions de santé et le contrôle de la publicité pharmaceutique paraissent utiles pour limiter la médicalisation de problèmes non pathologiques, qui sollicitent excessivement les médecins. Conclusion. – Le spécialiste de médecine interne, par sa connaissance éclectique et transversale des spécialités médicales, devrait être capable de reconnaître et d’enseigner les pièges fréquemment posés par les non-maladies. © 2007 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. Abstract Purpose. – Non-diseases are a heterogeneous group of symptoms, preoccupations or phenomenon that are felt or interpreted as pathological and so justifiable of medical intervention. Most doctors easily recognize illnesses that require no medical act. However, as a result of a medical misinterpretation or wrong reasoning, physicians may diagnose a non-disease and prescribe a non adapted treatment. Key points. – This non exhaustive literature review, gives examples of anatomical, clinical, investigational, iatrogenic, psychiatric and collective non-diseases. Health education of the population, initial and continuing education of general and specialist practitioners and continuous assessment of advertising by the pharmaceutical industry are probably useful to limit the provision of medical care of non-pathological problems, which excessively request the physicians. Conclusion. – The specialist of internal medicine, because of a wide knowledge of the medical specialities, has to recognize and learn the frequent traps of non-diseases. © 2007 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. Mots clés : Non-maladies ; Médecine interne ; Démarche diagnostique ; Société Keywords: Non-diseases; Internal medicine; Diagnostic process; Society
Aborder le concept de « non-maladie » peut paraître anecdotique, déplacé ou provocateur dans une revue médicale. Ce sujet, exceptionnellement étudié ou publié comme tel, mérite pourtant une mise au point et une réflexion basée sur sa réalité dans toutes les disciplines médicales, son impact sur notre activité
∗
Auteur correspondant. Adresse e-mail :
[email protected] (P. Carli).
0248-8663/$ – see front matter © 2007 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. doi:10.1016/j.revmed.2007.08.010
médicale et sur l’information au patient, enfin ses conséquences pour l’économie de la santé. Définir les contours d’une « maladie » est déjà une entreprise difficile, sujette à controverses, remarquablement analysée par les vocables anglais [1] : disease est la maladie objective, que l’on peut diagnostiquer et traiter en référence aux ouvrages de médecine. Illness est la sensation subjective d’être malade et inclut les conséquences sur la santé de l’interprétation donnée à ses troubles par le patient. Enfin, sickness
P. Carli et al. / La Revue de médecine interne 29 (2008) 122–128
123
représente le regard porté par la société sur divers états pathologiques : celle-ci reconnaît la réalité de telle affection et le patient est incité à jouer le rôle du malade, c’est-à-dire à rester au lit et à limiter ses activités. Dans cet article, nous proposons d’analyser les mécanismes qui génèrent des « non-maladies » (non-diseases), c’est-à-dire des états ou des situations qui ne devraient pas faire l’objet d’une prise en charge médicale. Nous en préciserons les limites (qui varient entre l’opinion subjective des patients et les notions objectives des médecins) avant de proposer une classification basée sur la littérature et des exemples choisis dans la pratique médicale quotidienne. Nous souhaitons enfin plaider pour un enseignement de ce vaste sujet aux étudiants et aux internes en médecine et développer l’idée qu’une meilleure connaissance des non-maladies et de leurs pièges par les praticiens serait probablement un facteur de réduction des dépenses de santé. Pour toutes ces raisons, le rôle de l’interniste devrait être ici déterminant.
par ailleurs un risque d’erreur dont les deux types ont été bien identifiés par Scheff [4] :
1. Genèse des non-maladies
Il découle de ces deux types d’erreur de diagnostic qu’il est plus fréquent (car moins risqué) de diagnostiquer une nonmaladie que de passer à côté d’une maladie authentique. Selon l’aphorisme de Karl Kraus, « la maladie la plus fréquente est le diagnostic » [3]. C’est ainsi que naissent les non-maladies, à la fois du fait des médecins qui répondent à un besoin de diagnostic, point d’appui de leur traitement et surveillance, et du fait de certains patients qui utilisent les avantages durables d’une étiquette diagnostique pour améliorer leur existence. Il existe enfin une troisième manière de créer des non-maladies, dénoncée récemment dans cette revue [5] : il s’agit de l’impact considérable de la publicité pharmaceutique, directement adressée au grand public, sur la notion de maladie. La dramatisation et la médicalisation de certains états (tristesse, intestin irritable, ostéopénie, insuffisance érectile. . .) conduit tout naturellement à créer des pathologies justiciables de thérapeutiques ciblées, et salvatrices, dont le praticien devient le prescripteur obligé, pressé par la population des bien portants qui se croient malades [6,7].
L’établissement d’un diagnostic est le premier temps de la démarche médicale, telle qu’elle est enseignée dans les facultés de médecine. Le diagnostic est le plus souvent retenu par la reconnaissance rapide d’un signe ou syndrome, par l’interrogatoire et l’examen clinique ou par la méthode hypothéticodéductive basée sur l’âge et le sexe du patient, son histoire, la spécialité du praticien et la probabilité de rencontre d’une maladie donnée. L’intérêt du diagnostic comme première étape de l’acte médical est évident : d’une part, la plupart des médecins admettent que la décision et le succès thérapeutique dépendent d’un bon diagnostic. D’autre part, il existe un « besoin de diagnostic » chez les patients dont l’évolution de la maladie peut être singulièrement influencée par l’attribution d’une « étiquette ». L’étude de Thomas réalisée en 1987 en consultation de médecine générale est à ce titre édifiante, car il a apporté la preuve qu’une consultation « positive » (diagnostic ferme et précis) conduisait à améliorer 64 % des patients, alors qu’une consultation « négative » (diagnostic flou et hésitant) n’améliorait que 39 % d’entre eux, sans aucune influence de la thérapeutique prescrite [2]. Poser un diagnostic est donc un acte grave et responsable, car il permet d’expliquer au patient la cause et la nature de ses troubles, de formuler un pronostic (prédire la guérison, la chronicité ou la mort) et d’organiser la prise en charge thérapeutique. Cependant l’étiquette diagnostique – surtout lorsqu’il s’agit de maladie chronique – va conduire le patient à « jouer le rôle de malade » et ainsi en tirer éventuellement des avantages : manipuler son environnement familial ou professionnel, se soustraire à diverses obligations et parfois obtenir des réparations ou une pension. Cela conduit de nombreux individus à consulter des médecins, non pour aller mieux, mais pour rester malade. En définitive, l’étiquette pathologique devient précieuse, malheur au médecin qui tente de l’arracher [3] ! C’est là le premier effet « indésirable » de poser un diagnostic. Tout diagnostic comporte
• L’erreur de type 1 consiste à poser un diagnostic en l’absence de maladie (par exemple, une fausse appendicite), c’est-àdire à créer une non-maladie (non-disease). Pour le patient, les conséquences sont un traitement inutile, (comportant parfois une intervention chirurgicale) et une incitation à devenir « malade » (sickness). Mais le praticien a peu de risque d’être inquiété ou poursuivi en justice et ce type d’erreur est difficile à corriger. • L’erreur de type 2 est le fait de manquer le diagnostic d’une maladie bien réelle, (par exemple, une maladie de Horton débutante). Cela est sévèrement sanctionné dans nos centres hospitalo-universitaires, conduit à l’opprobre et à une condamnation morale de la part des collègues, et volontiers de nos jours à une action en justice pour négligence. L’erreur est facilement corrigée lorsque les symptômes de la maladie ont progressé et que celle-ci devient plus facile à identifier.
2. Limites du sujet et classification Les comportements de simulation et les pathomimies (syndrome de Munchausen) ne seront pas envisagés, car il s’agit là de pathologies authentiques autoprovoquées pour tromper le médecin, et pouvant même mettre en jeu le pronostic vital. Les manifestations somatiques de la conversion hystérique peuvent prendre des formes très impressionnantes (cécité, paraplégie. . .) mais il ne s’agit pas de simulation, ni de non-maladies, car les diverses formes d’hystérie sont des affections psychiatriques répertoriées. Il est donc possible de distinguer deux variétés de nonmaladies : • « Des phénomènes ou problèmes humains que certains ont définis comme des états médicaux, mais dont ceux qui en sont atteints pourraient trouver une meilleure solution si le
124
P. Carli et al. / La Revue de médecine interne 29 (2008) 122–128
Tableau 1 Le « Top 20 » des non-maladies : résultats de l’enquête du British Medical Journal auprès de ses lecteurs médecins, classant les non-maladies par ordre décroissant [8] 1. Vieillissement 2. Travail 3. Ennui, lassitude 4. Poches sous les yeux 5. Ignorance 6. Calvitie 7. Taches de rousseur 8. Grandes oreilles 9. Cheveux gris ou blancs 10. Laideur 11. Accouchement 12. Allergie au xxie siècle 13. Décalage horaire 14. Tristesse 15. Cellulite 16. Gueule de bois 17. Anxiété quant à la taille de son pénis 18. Grossesse 19. Colère sur la route 20. Isolement
problème ou le phénomène n’était pas défini de cette fac¸on » [8]. Cette remarquable définition, qui répond à la notion de illness–non-disease, rend bien compte de la médicalisation d’états non pathologiques, (mais subjectivement ressentis comme tels) dont il faut espérer que la plupart des médecins ne sont pas complices de la prise en charge. L’enquête réalisée en 2002 par le British Medical Journal auprès de ses lecteurs médecins en fournit des exemples éloquents par ordre décroissant. (Tableau 1). • Les non-maladies crées ou construites à partir d’une erreur de raisonnement, ou d’interprétation médicale en sont une autre variété, dont l’identification est plus difficile, car les médecins qui les diagnostiquent les prennent en charge « de bonne foi ». Cette catégorie inclut de nombreux cas de diagnostics faux par excès et de nombreux cas de constructions sociales (volontiers amplifiées par les médias), que l’on peut qualifier de sickness–non-diseases. Paradoxalement, la littérature sur les non-maladies est remarquablement pauvre. Il revient à Meador, endocrinologue de Birmingham d’avoir proposé en 1965 une classification en sept syndromes, rencontrés dans son expérience clinique [9]. La classification proposée en 1973 par Duddly Hart correspond davantage à la réalité de la pratique quotidienne [10] (Tableau 2). Nous nous en inspirerons pour présenter quelques situations auxquelles l’interniste peut être confronté. Tableau 2 Classification des non-maladies (d’après D. Hart [1973]) Non-maladie anatomique Non-maladie clinique Non-maladie paraclinique Non-maladie pharmacologique Non-maladie psychiatrique
3. Les non-maladies anatomiques Les variantes anatomiques du squelette comme les omoplates décollées, une protubérance occipitale saillante ou une attitude scoliotique sont considérés à tort comme des affections justifiant des examens radiographiques, voire une rééducation fonctionnelle, et sont une cause commune d’inquiétude maternelle et de consultation. Hart [10] cite l’observation d’un patient céphalalgique chez qui la constatation d’une « pupille d’Adie » fut interprétée comme un signe de neurosyphilis (maladie alors incurable), ce diagnostic erroné étant responsable d’une aggravation considérable des céphalées ! 4. Les non-maladies cliniques Le syndrome du manteau de l’empereur, décrit en 1971, est démonstratif de l’influence du prestige et de l’autorité d’un chef de service de cardiologie, à une époque où le diagnostic des cardiopathies était basé sur l’auscultation. Ce syndrome était fréquent dans les unités de soins intensifs, au cours de la visite : le patron, entouré d’assistants et d’internes, entendait un souffle cardiaque si discret, qu’il n’était entendu par personne d’autre. Mais le premier assistant affirmait « je l’entends », et déclenchait alors une mini-épidémie, qui permettait aux plus jeunes collaborateurs et aux internes de percevoir à leur tour un souffle « très doux », « intermittent », « audible seulement en décubitus latéral », constituant une non-valvulopathie typique [11]. L’une des plus fréquentes des non-maladies est probablement la non-hypertension artérielle. La pseudo-hypertension est un artéfact lié à l’augmentation de la résistance des artères humérales à la compression par le brassard du sphygmomanomètre, en raison des calcifications et la paroi artérielle [12,13], dont la fréquence augmente donc avec l’âge. Cela conduit donc à traiter inutilement des millions de sujets pour fausse hypertension, ce qui les expose aux effets indésirables de ces traitements et représente un coût considérable pour la société. Dans une étude déjà ancienne, attribuer l’étiquette « hypertension » était une cause d’augmentation de l’absentéisme pour maladie, non modifiée par la mise en route d’un traitement antihypertenseur, ni par le degré d’efficacité de la réduction de la tension artérielle [14]. Considérer l’obésité comme une maladie est une attitude fréquente qui tend à confondre facteur de risque et maladie [15]. Cette étiquette est certainement excessive chez ceux qui ont un surpoids modéré, car elle conduit à faire croire à des millions d’individus que perdre 10 kg est bénéfique pour leur santé. Il a même été prouvé par de nombreuses études que les hommes pesant 7 à 10 kg de plus que leur poids « idéal » ont vécu plus longtemps que leurs pairs plus maigres [16]. Plus récemment, plusieurs études épidémiologiques à grande échelle ont même pu démontrer le rôle protecteur paradoxal d’un indice de masse corporelle (IMC) élevé chez l’insuffisant cardiaque chronique et chez le patient coronarien, à l’origine du concept nouveau « d’épidémiologie inverse » [17,18]. Les non-maladies « construites » procèdent de la reconnaissance d’un syndrome caractéristique par la sommation de symptômes et signes évocateurs. Il est vrai que l’accessibilité facile des dosages hormonaux permet de diagnostiquer
P. Carli et al. / La Revue de médecine interne 29 (2008) 122–128 Tableau 3 Quelques exemples de non-maladies fréquemment observées en consultation de médecine interne Non-maladie
Manifestations
Non-hyperthyroïdie du sujet âgé Non-prolactinome
Amaigrissement, tremblement, TSH basse isolée
Non-lupus Non-Behc¸et Non-fièvre prolongée Non-spondylarthrite ankylosante Non-métastases Non-myélome
Hyperprolactinémie médicamenteuse, incidentalome hypophysaire Rosacée, anticorps antinucléaires au 1/80 Aphtose buccale, fibromyalgie Bouffées de chaleur, 37,5 ◦ C matin, 37,8 ◦ C soir Lombalgies, HLA B27+ Antécédent de cancer du sein, scintigraphie osseuse anormale Douleurs rachidiennes, MGUS
rapidement un non-Cushing (obésité, faciès lunaire, hypertension), un non-Addison (fatigue, pigmentation, hypotension), un non-myxœdème (ralentissement, prise de poids, voix rauque, frilosité). Au cours des consultations de médecine interne, il n’est pas rare de dépister des non-maladies, ce qui a pour intérêt de rassurer les patients, et d’interrompre un processus d’investigations et de traitements parfaitement injustifiés (Tableau 3). Enfin, les erreurs de recueil ou de mesure de l’infirmière peuvent conduire, dans nos services hospitaliers, à des rectifications diagnostiques devant une non-fièvre, une non-oligurie, un non-melaena, etc. 5. Les non-maladies de laboratoire Le « syndrome des limites supérieures et inférieures » de Meador [9] signifie que l’on tend à interpréter comme pathologiques les valeurs-seuil situées aux extrémités de la courbe de Gauss d’une valeur définie. Les pièges représentés par la fausse anémie (hémodilution), la fausse thrombopénie (agrégats plaquettaires), la fausse hyponatrémie (hyperlipidémie) sont bien connus, comme l’anémie et l’augmentation de la vitesse de sédimentation de la grossesse et la leucopénie ethnique du noir africain. La découverte d’une hyperprolactinémie peut conduire à de nombreux examens complémentaires pour rechercher une tumeur hypophysaire, avant que l’on évoque la possibilité d’une macroprolactinémie [19]. Les fausses sérologies positives sont également une cause d’erreur très commune car la méconnaissance de la mauvaise spécificité d’un test sérologique risque de faire porter selon les cas un diagnostic de polyarthrite rhumatoïde (présence de facteur rhumatoïde), de lupus (présence d’anticorps antinucléaires), d’infection par le VIH [20], etc. Lorsque la non-maladie atteint des proportions épidémiques, la situation peut devenir grave et anxiogène. Le Center for Disease Control d’Atlanta a recensé une vingtaine de cas de non-épidémies infectieuses hospitalières dues à des erreurs d’examens de prélèvements ou à leur contamination par des « souillures » de laboratoire. Ces non-épidémies ont pris la forme de bactériémies, de pneumopathies, de gastroentérites ou de
125
tuberculoses [21]. La plus grave fut sans doute la non-grippe porcine qui sévit en 1976 aux USA, conduisant à la vaccination de 46 millions d’individus (dont quelques uns sont décédés), sans qu’aucun cas humain ne soit survenu. La gestion de cette nonépidémie a eu pour autre conséquence le limogeage du directeur du Center for Disease Control [22]. De fac¸on plus anecdoctique, un lecteur attentif des revues médicales internationales a pu dépister une pseudo-épidémie d’endocardite infectieuse à Streptococcus equinus en constatant (et en reprochant légitimement au premier auteur) la triple publication de cette belle observation dans trois revues médicales à fort impact factor ! [23] 6. Les non-maladies induites par l’imagerie Les artefacts et les fautes d’interprétation des images radiographiques constituent non seulement des « pièges », mais conduisent à identifier des « lésions » inexistantes : fausse ostéolyse de l’aile iliaque due à une clarté gazeuse colique, faux infiltrat tuberculeux des sommets pulmonaires dû à des cheveux nattés longs [24], fausse sténose coronarienne en rapport avec une plicature de la coronaire droite [25], fausse cardiomégalie par syndrome du dos plat ou pectus excavatum [26] en sont quelques exemples. Le nombre important d’anomalies discovertébrales décrites par les radiologues qui interprètent les clichés du rachis lombaire demandés pour lombalgies communes a conduit à des recommandations de rédactions moins affirmatives quant à la responsabilité des images observées [27]. Le risque « d’incidentalome » augmente avec les progrès de l’imagerie et l’inexpérience du radiologue. Ce dernier, face à une image claire, opaque, dense, en hypo- ou hypersignal magnétique, décrit une « lésion » qui peut être dégénérative, infectieuse, inflammatoire, tumorale ou vasculaire et suggère le plus souvent de réaliser une imagerie plus performante, par exemple un scanner ou une IRM, ou de manière plus moderne un TEP scanner. Il n’est pas rare que ces examens de deuxième ou troisième intention démasquent à leur tour d’autres anomalies, qui sont autant de « lésions » à préciser, ou devant faire l’objet d’un contrôle ultérieur. 7. Les non-maladies iatrogéniques De nombreux patients développent d’authentiques effets indésirables de médicaments, pour lesquels ils sont loyalement et légalement informés. Mais à de nombreuses occasions, on peut parler de non-maladie pharmacologique [10] lorsque l’imputabilité de divers troubles (céphalées, éruption, etc.) à un médicament ne peut être retenue, soit en raison d’un délai incompatible, soit parce que cet effet secondaire n’a jamais été rapporté avec le produit rec¸u, soit parce que le médicament était un placebo (on parle alors d’effet nocebo). Cependant, il est parfois très difficile d’exclure définitivement la responsabilité d’un médicament soupc¸onné de causer une maladie grave. Par exemple, il a fallu de nombreuses années pour innocenter le vaccin anti-hépatite B, accusé de favoriser la survenue de scléroses en plaques et de rhumatismes inflam-
126
P. Carli et al. / La Revue de médecine interne 29 (2008) 122–128
matoires. Dans les années 1980, le « syndrome de Cléopâtre » [28] désignait diverses connectivités, maladies auto-immunes ou rhumatismales survenant chez des patientes qui avaient des implants mammaires. Il aura fallu quatre méta-analyses (1995, 1996 et 2000) pour démontrer qu’il n’y avait pas de preuve d’une association entre la pose de ces implants mammaires (avec ou sans silicone) et ces affections rhumatismales [29]. Le cas de la myofasciite à macrophages est exemplaire de la construction artificielle d’une nouvelle maladie. En 1993, une image histologique inédite et typique d’une biopsie musculaire du deltoïde (présence d’hydroxyde d’aluminium intramacrophagique) est interprétée comme la signature d’une nouvelle maladie musculaire d’expression clinique par ailleurs atypique (fatigue, myalgies, arthralgies diffuses) et l’étiologie vaccinale de cette maladie est bien documentée, car tous les patients ont été vaccinés contre l’hépatite B, plus rarement l’hépatite A ou le tétanos. Dix ans plus tard, il ne reste plus grandchose de cette « nouvelle myopathie », après avoir constaté que la lésion histologique ne siège que dans le deltoïde gauche (siège habituel de l’injection vaccinale) et que les myalgies des patients peuvent trouver une autre explication, organique ou fonctionnelle. La conclusion est simple : ne demandez plus de biopsie du deltoïde gauche, pour ne pas créer une non-maladie iatrogène ! [30] 8. Les non-maladies psychiatriques Il s’agit là d’un domaine difficile, car la frontière entre les comportements humains « normaux », ou même marginaux, et le désordre psychiatrique ne peut pas être définie de manière consensuelle. En effet, les pensées et les agissements des hommes sont influencés par leur éducation, les coutumes, l’histoire des peuples, la religion, les tabous, les gouvernements et ce qui est estimé normal dans une ethnie pourrait être considéré par une autre comme relevant de la folie, donc de la psychiatrie [10]. La « drapétomanie » qui sévissait au siècle dernier parmi les esclaves noirs du sud des États-Unis était définie comme une « tendance irrépressible de s’échapper » [31]. On a peine à croire qu’un médecin psychiatre ait pu identifier et soigner une nouvelle maladie, « l’anéternuement », décrite à partir d’une cohorte de 53 patients n’ayant jamais éternué de leur vie et incapables d’y parvenir [32]. Les non-maladies psychiatriques peuvent donc provenir d’un sentiment d’intolérance et de « normalisation » pouvant amener à considérer que la timidité (rebaptisée « anxiété sociale » aux USA), la tristesse (qui est une composante de la dépression) [33], l’hédonisme (qui fait le lit de l’addiction), le fait de travailler plus de 50 heures par semaine (pathologie appelée workaholism), enfin la peur de la mort (thanatophobie) sont d’authentiques maladies, qui nécessitent un dépistage, une sérieuse prise en charge par des spécialistes, qui disposent heureusement de molécules efficaces, appropriées à leur pathologie. Lorsque le jugement moral intervient pour qualifier des comportements jugés inacceptables par la société, l’étiquetage psychologique crée des « pervers », « psychopathes » ou « sociopathes » et tend à psychiatriser des problèmes sociaux, comme les comporte-
ments de violence urbaine [34], les enfants hyperactifs ou la criminalité [35]. L’élément le plus inquiétant de la tendance à attribuer des étiquettes psychiatriques est sa conséquence « thérapeutique ». Il existe malheureusement de nombreuses données sur « l’efficacité » de la prise en charge psychiatrique, basée selon les cas sur diverses thérapies comportementales, des neuroleptiques, l’internement, l’électroconvulsivothérapie (jugée efficace pour l’anéternuement) ou encore la psychochirurgie. Par exemple, des neurochirurgiens ont rapporté en 1977 l’intérêt de l’hypothalamotomie transventriculaire antérieure dans le traitement stéréotaxique de l’hédonisme [36] et plus tard Lovinger a proposé de réaliser des amygdalectomies cérébelleuses expérimentales aux jeunes mâles coupables de violences urbaines [37]. C’est peu après ces événements que se sont mis en place les comités de surveillance des expérimentations humaines et les comités d’éthique des pays européens. 9. Les non-maladies collectives En novembre 1998, dans un lycée du Tennessee, 38 personnes de l’établissement ont été hospitalisées et 74 personnes ont consulté au service des urgences, pour des symptômes généraux (céphalées, nausées, vertiges, dyspnée) survenus 15 minutes après l’arrivée d’un professeur qui trouvait qu’il y avait dans la classe une odeur d’essence. Aucune trace de toxique n’a été découverte dans les prélèvements biologiques et des locaux. Cette épidémie a été intitulée « pathologie collective d’origine psychologique », caractérisée par une symptomatologie survenant surtout chez des jeunes filles mises en présence d’une ambiance morbide collective chez leurs camarades de classe [38]. Deux publications récentes du bulletin épidémiologique hebdomadaire rapportent deux observations similaires : une épidémie de malaises inexpliqués survenue au CHU de Nice en novembre 2000 chez 56 personnes, attribuée à un « syndrome des bâtiments malsains » amplifié par une réaction psychologique collective [39,40]. Un « X-Files syndrome » provoquant un érythème et un prurit du visage et des mains chez 178 élèves d’un établissement scolaire du Nord a mobilisé le SMUR, les pompiers, le CHRU de Lille, sans aucune conclusion organique [41]. Entre juillet et septembre 1996, 206 habitants de l’île de la Désirade ont subi à Pointe à Pitre (Guadeloupe) une appendicectomie, soit 13 % de la population de cette petite île de 1605 habitants ; aucune épidémie d’appendicite n’ayant été rapportée dans la littérature, cette non-épidémie a été attribuée à un surdiagnostic initial d’appendicite par le seul médecin de l’île, l’amplification du phénomène provenant d’un comportement collectif anxieux, l’île de la Désirade n’étant pas pourvue de chirurgien [42]. Ces phénomènes d’hystérie collective (renommés mass sociogenic illness) ont vu leurs causes et leur présentation clinique varier selon les époques : agitation psychomotrice face aux grands fléaux morbides au xixe siècle, symptômes d’anxiété déclenchés par la crainte d’un empoisonnement chimique ou alimentaire au xxe siècle. Depuis les années 1980, des manifestations de nature infectieuse ou toxique (cutanées, diges-
P. Carli et al. / La Revue de médecine interne 29 (2008) 122–128
tives, respiratoires. . .) répondent à la menace terroriste chimique ou biologique, qui implique les gouvernements, les autorités de santé et les médias. La coordination de ces divers secteurs publics paraît essentielle pour comprendre et tenter de prévenir ces phénomènes [43,44]. 10. Conséquences des non-maladies L’ignorance des médecins, le besoin d’étiquettes diagnostiques, la médicalisation de problèmes ou d’états non pathologiques et l’impact publicitaire voulu par les laboratoires pharmaceutiques sont donc les principales causes de non-maladies. Leurs conséquences se mesurent à l’échelon individuel et au niveau de la collectivité : • Pour l’individu, le diagnostic de la non-maladie lui reste bien souvent attaché, ce qui implique un statut et un comportement en rapport avec le diagnostic, bien souvent une anxiété importante (surtout lorsque l’hypothèse d’une lésion maligne est évoquée devant une image) et dans de nombreux cas des arrêts de travail, des investigations répétées, des hospitalisations. De plus, les non-maladies ont une particularité qu’il ne faut pas perdre de vue : elles sont incurables ! Or une erreur fréquente consiste à appliquer à la non-maladie le traitement de la maladie ainsi mimée et Meador constatait déjà en 1965 que « les maladies iatrogènes étaient aussi fréquemment provoquées par les traitements des maladies que par ceux des non-maladies » [9]. • Pour la société, le coût des non-maladies est probablement considérable, bien qu’il ne puisse être facilement évalué. Mais on peut craindre que l’application universelle du « principe de précaution » soit de nature à amplifier de manière exponentielle les dépenses de santé.
127
syndromes devrait permettre d’enseigner les arguments en faveur de l’organicité ou du caractère fonctionnel d’un symptôme, afin de limiter la demande d’examens complémentaires. Apprendre à un étudiant qu’il n’est pas indispensable de poser « à tout prix » un diagnostic précis pour tous ses patients et que de nombreux symptômes (céphalées, crampes, fatigue, dysérection, prise de poids. . .) n’ont aucune explication médicale rationnelle est de nature à réduire le nombre de fausses étiquettes diagnostiques, sans pénaliser pour autant la qualité des soins. • Le spécialiste de médecine interne devrait être, par nature et par expérience, fondé à limiter la prolifération des nonmaladies. Cependant, dans son souci permanent de vouloir tout expliquer ou de découvrir une maladie rare (donc publiable) ou d’accroître sa notoriété, l’interniste peut être attiré par certains diagnostics brillants (qui s’avéreront secondairement douteux) et contribuer ainsi à créer les nonmaladies. Au carrefour de la médecine générale et des autres spécialisés médicales, l’interniste devrait être sollicité pour séparer l’organique du fonctionnel, le spontané du iatrogène, dépister la pathologie éventuellement simulée ou involontairement entretenue. Dans les cas complexes, sa maîtrise de la démarche diagnostique, sa connaissance de la sensibilité et de la spécificité des examens complémentaires devraient l’autoriser à interrompre une avalanche d’explorations inutiles et anxiogènes demandées à partir d’un symptôme atypique. Dans certaines situations, il devrait être capable d’interrompre une thérapeutique inutilement rec¸ue au long cours, pour le plus grand bien de son patient et des deniers publics. Enfin, dans un enseignement « transversal », il doit mettre en garde ses collègues des autres spécialités sur les pièges des non-maladies, qui s’avèrent en pratique beaucoup plus fréquentes que les maladies systémiques ou les maladies orphelines.
11. Prévention Références Il est possible de proposer plusieurs axes pour tenter de limiter l’ampleur et le coût des non-maladies : • Modifier l’état d’esprit de la société, qui a tendance à médicaliser de plus en plus des préoccupations qui ne justifient pas d’intervention médicale paraît illusoire, mais il faut souhaiter que les médecins ne cautionnent pas la prise en charge de ces problèmes, qu’ils sachent reconnaître les non-maladies, et informer leurs patients des limites du domaine médical. Par ailleurs, le contrôle de la force de vente des laboratoires pharmaceutiques via les médias relève d’une volonté gouvernementale. • Une formation médicale initiale de qualité est probablement un bon moyen pour sensibiliser les étudiants du deuxième cycle et les internes en cours de DES, aux nombreux pièges évoqués dans cette revue. La médecine générale étant plus exposée au risque d’erreur de diagnostic (en raison d’une démarche diagnostique le plus souvent probabiliste), il revient aux maîtres de stage et aux services hospitaliers agréés en médecine générale la responsabilité de cette formation. En particulier, l’approche des pathologies par symptômes et
[1] Cathebras P. Qu’est-ce qu’une maladie ? Rev Med Interne 1997;18:809–13. [2] Thomas KB. General practice consultation: is there any point in being positive ? Br Med J 1987;294:1200–2. [3] Skrabanek P, Cormick MC. Idées folles, idées fausses en médecine. Ed. Odile Jacob, août 1992. [4] Scheff TU. Decision rules, types of error and their consequences in medical diagnosis. In: Tuckett D, Kaufert JM, editors. Basic readings in medical sociology. Londres: Tavistock publications; 1978. [5] Cathebras P. Le docteur Knock habite à Wall Street, les nouvelles cibles de l’industrie pharmaceutique. Rev Med Interne 2003;24:538–41. [6] Moynihan R, Heath I, Henry D. Selling sickness: the pharmaceutical industry and disease mongering. BMJ 2002;324:886–90. [7] Mintzes B. Direct to consumer advertising is medicalising normal human experience. BMJ 2002;324:908–9. [8] Smith R. In search of non-disease. BMJ 2002;324:883–5. [9] Meador CK. The art and science of non-disease. N Engl J Med 1965;272:92–5. [10] Hart FD. The importance of non-disease. Practitioner 1973;211:193–6. [11] Gross F. The emperor’s clothes syndrome. N Engl J Med 1971;285:863. [12] Chamontin B, Garro Y, Salva P, Ollier S, Thierry F, Salvador MF. Fausses hypertensions rebelles : artères calcifiées, gros bras et erreurs de mesure de la pression artérielle. Arch Mal cœur 1988;81(Suppl.):306. [13] Foran TG, Sheahan NF, Cunningham C, Teely J. Pseudo hypertension and arterial stiffness: a review. Physiol Meas 2004;25:21–33.
128
P. Carli et al. / La Revue de médecine interne 29 (2008) 122–128
[14] Haynes RB, Sackett DL, Taylor W, Gibson ES, Johnson AL. Increased absenteism from work after detection and labeling of hypertensive patients. N Engl J Med 1978;299:741–4. [15] Violata G. Obesity declared a disease. Science 1985;227:1019–20. [16] Gordon T, Doyle JT. Weight and mortality in men: the Albany study. Int J Epidemiol 1988;17:77–81. [17] Kalantar-Zadeh K, Block G, Horwich T, Foranow GC. Reverse epidemiology of conventional cardiovascular risk factors in patients with chronic heart failure. J Am Coll Cardiol 2004;43:1439–44. [18] Romero-Corral A, Montori VM, Somers VK, Konirek J, Thomas JJ, Allison TG, et al. Association of bodyweight with total mortality and with cardiovascular events in coronary artery disease: a systematic review of cohort studies. Lancet 2006;368:668–78. [19] Recchi V, Hieronimus S, Creison G, Freychet P, Morange I, Canivet B. Macroprolactinémie, une variété d’hyperprolactinémie. À propos de cinq observations. Rev Med Interne 1997;18:320–3. [20] Wood RW, Dunphy C, Okita K, Swenson P. Two HIV-infected persons, not really infected. Arch Intern Med 2003;163:1857–9. [21] Weinstein RA, Stamm WE. Pseudoepidemics in hospital. Lancet 1977;ii:862–4. [22] Impact of swine non-flu. Lancet 1982; ii: 1029. [23] Goldman L. Triplicate publication, not an epidemic. Am J Med 2002;112:77. [24] Buccini RF, Rubin IJ. Radiographic artifact from braided hair mimicking tuberculosis. N Engl J Med 1985;313:1227–8. [25] Vahdat B, Bonnet JL, Panagines D, Fourcade L, Bory M. Plicature ou sténose coronaire droite ? Diagnostic par le remplissage du ventricule droit. Presse Med 1995;24:1444. [26] Twigg H, Massoud M. The straight back syndrome. Circulation 1965;32:193–203. [27] Roland E, Van Tulder M. Should radiologists change the way they report plain radiography of the spine ? Lancet 1998;352:229–30. [28] Chaouat Y, Chaouat D, Faurès-Quenet B. Le syndrome de Cléopâtre : une nouvelle pathologie auto-immunitaire ? Rev Rhum 1986;53:485–8.
[29] Janowsky EC, Kupper LL, Hulka BS. Meta-analysis of the relation between silicone breast implants, and the risk of connective tissue diseases. N Engl J Med 2000;342:781–90. [30] Papo T. Myofasciite à macrophages : paradigme de nouvelle maladie ? Rev Med Interne 2005;26:175–8. [31] Dysaesthesia aethiopica. Editorial, Medical times & Gazette 1856; 34: 472-3. [32] Shukla GD. Asneezia. A hitherto unrecognised psychiatric symptom. Br J Psychiatry 1985;147:564–5. [33] Is grief an illness ? Lancet 1976; ii: 134. [34] Mark V, Sweet W, Erwin F. Role of brain disease in riots and urban violence. JAMA 1967;201:217. [35] Double D. The limits of psychiatry. BMJ 2002;324:900–4. [36] Sweet WH, Obrador S, Martin-Rodrigez JG. Neurological treatment in psychiatry, pain and epilepsy. Baltimore: University Park Press; 1977. [37] Lowinger P. Two comments on psychosurgery. N Engl J Med 1987;316:114. [38] Jones TF, Craig AS, Hoy D, Gunter EW, Ashley DL, Barr DB, et al. Mass psychogenic illness attributed to toxic exposure at a high school. N Engl J Med 2000;342:96–100. [39] Pradier C, Marine-Barjoan E, Bentz L, et al. Epidémie de malaises au centre hospitalier universitaire de Nice en novembre 2000 : investigation épidémiologique. Bull Épidémiol Hebd 2002;45:227–8. [40] Vincent D, Pradalier A. Impact sanitaire de la climatisation : qu’en est-il du syndrome des bâtiments malsains ? Rev Med Interne 1997;18:460–9. [41] Le Tourneau B, Verite E, Bleuze V, et al. X-Files syndrome dans un établissement scolaire. Bull Épidémiol Hebd 2002;1:61. [42] Perez M. Psychose de l’appendicite sur l’île de la Désirade. Le Figaro, vendredi 02 janvier 1998. [43] Bartholomew RE, Wessely S. Protean nature of mass sociogenic illness: from possessed nuns to chemical and biological terrorism fears. Br J Psychiatry 2002;180:300–6. [44] Balaratnasingam S, Janca A. Mass hysteria revisited. Curr Opin Psychiatry 2006;19:171–4.