SE´ANCE E´DUCATIONNELLE
Les structures de soins dans les e´tablissements de transfusion sanguine, pourquoi faire ? Health care units in the French blood banks, why? B. Herault a,*, S. Assari b, P. Colombat c, C. Binet d, F. Courtois b, F. Roubinet a a b
E´tablissement franc¸ais du sang Centre-Atlantique, 2, boulevard Tonnelle´, 37020 Tours cedex 1, France E´tablissement franc¸ais du sang, 20, avenue du Stade-de-France, 93218 La Plaine-Saint-Denis, France
c
Service d’he´matologie et the´rapie cellulaire, hoˆpital Bretonneau, CHU de Tours, 2, boulevard Tonnelle´, 37044 Tours cedex 9, France
d
Service d’he´matologie, hoˆpital Bretonneau, CHU de Tours, 2, boulevard Tonnelle´, 37044 Tours cedex 9, France
Disponible sur Internet le 22 mai 2007
Re´sume´ Depuis de nombreuses anne´es, des malades sont soigne´s dans les e´tablissements de transfusion sanguine (ETS). La cre´ation de l’e´tablissement franc¸ais du sang (l’EFS) en 2000 n’a pas remis en cause cette offre de soins. Le partenariat historique entre les hoˆpitaux et les ETS a permis de continuer la prise en charge extrahospitalie`re des patients dans des lieux agre´e´s par les tutelles : les centres de soins (CDS) des ETS, re´pute´s pour leur accueil, avec du personnel, dont la compe´tence et la connaissance des produits sanguins et des se´parateurs de cellules est reconnue. Les CDS (loi 2002-303 du code de la sante´ publique, 4/03/2002, art L1223) sont au nombre de 93, re´partis dans 14 EFS re´gionaux sur 17, dont 63 dits « le´gers » (re´alisation d’actes simples tels que des saigne´es the´rapeutiques, des transfusions et/ou des perfusions) et 30 dits « lourds » assurant en plus de ces actes des aphe´re`ses the´rapeutiques (e´changes plasmatiques, pre´le`vements de cellules souches pe´riphe´riques, e´changes e´rythrocytaires, e´rythroaphe´re`ses, LDL-aphe´re`ses et photochimiothe´rapies extracorporelles). Si les CDS sont reconnus utiles par les patients et les me´decins, leur existence est fragilise´e par l’absence actuelle d’ade´quation entre le couˆt re´el de leurs actes spe´cifiques et la tarification de la classification commune des actes me´dicaux (CCAM). ß 2007 Publie´ par Elsevier Masson SAS. Abstract In France for several years, many patients have been treated in Blood Transfusion Centers belonging to the EFS. This partnership between public hospitals and EFS is appreciated by the patients who find a competent staff in transfusion and apheresis process, in a more pleasant environment than in hospital. There is a total of 93 Health Care Units in Blood Transfusion Centers. Sixty-three of these Health Care Units perform only transfusions and bleeding. In the remaining 30 Health Care Units apheresis, peripheral blood hematopoietic stem, cell harvesting, plasmatic exchanges and extracorporeal photopheresis are also performed. Despite the perfect fit between hospital needs, comfort and easiness for patients, an economical problem remains. At the present time, the reimbursement rate by national health insurance is below the real cost. If unsolved, this discrepancy could drive to the end of this beneficial partnership. ß 2007 Publie´ par Elsevier Masson SAS. Mots cle´s : Structures de soins ; Centre de soins (CDS) ; E´tablissement de transfusion sanguine (ETS) ; E´tablissement franc¸ais du sang (EFS) Keywords: Health care unit; Blood transfusion center
1. INTRODUCTION * Auteur correspondant. Adresse e-mail :
[email protected] (B. Herault). 1246-7820/$ – see front matterß 2007 Publie´ par Elsevier Masson SAS. doi:10.1016/j.tracli.2007.03.013
Depuis leur cre´ation, les e´tablissements de transfusion sanguine (ETS) ame´liorent leurs techniques d’obtention de
formation information
Transfusion Clinique et Biologique 14 (2007) 127–131
formation information
128
B. Herault et al. / Transfusion Clinique et Biologique 14 (2007) 127–131
produits sanguins afin de re´pondre au mieux aux besoins des patients [1]. A` cette fin, ils sont des acteurs essentiels du de´veloppement de la me´decine transfusionnelle. L’utilisation quotidienne de se´parateurs [2] dans ces e´tablissements ont permis d’optimiser la prise en charge, au sein des ETS, de patients justifiant des techniques transfusionnelles spe´cifiques. Cette prise en charge de patients au sein meˆme des ETS n’e´tait pas de´crite comme prioritaire dans les objectifs de l’e´tablissement franc¸ais du sang (EFS) a` sa cre´ation en 2000. Toutefois, dans l’inte´reˆt des patients et en ade´quation avec les hoˆpitaux concerne´s, les structures de soins intra-ETS ont continue´ a` re´pondre a` la demande des me´decins cliniciens en charge de ces patients. 2. DE´FINITION 2.1. Les structures de soins ou centres de soins (CDS) dans les ETS Que sont ces structures de soins ou centres de soins (CDS) dans les ETS ? Il s’agit d’un lieu dans un site transfusionnel, donc une structure non-hospitalie`re, qui re´alise des soins, soit en ambulatoire [3], soit lors d’une hospitalisation dans les e´tablissements de soins (ES). Ils sont agre´e´s sur demande du directeur de l’ETS, par le Pre´fet de re´gion pour une dure´e inde´termine´e. L’obtention de cet agre´ment [4] est conditionne´ a` la re´ponse a` de nombreux crite`res dont l’accueil du public (handicape´s, brancard, etc.), la mise en place de conventions pour la prise en charge des urgences (Samu, service de re´animation. . .), l’organisation d’un circuit de circulation intrasite pour les patients diffe´rent de celui des donneurs, un processus d’e´limination des de´chets, des proce´dures e´crites pour chaque acte effectue´, des dossiers me´dicaux documente´s et archive´s et un rapport annuel d’activite´ remis a` la direction re´gionale de l’action sanitaire et sociale (Drass) [5]. Pour cre´er ou de´buter tout nouvel acte the´rapeutique dans un CDS, il faut donc se rapprocher du me´decin responsable, car toute modification peut entraıˆner une modification de l’agre´ment obtenu. 2.2. Roˆle des ETS Est-ce le roˆle des ETS ? L’article L1223 de la loi 2002-303 du code de la sante´ publique (4/03/2002) [6] re´pond ainsi a` cette question : « Les ETS peuvent a` titre accessoire eˆtre autorise´s a` exercer d’autres activite´s de sante´, notamment des activite´s de soins » « conforme´ment aux re`gles applicables a` ces activite´s ». Les ETS e´tant re´partis sur tout le territoire national, ils offrent une solution de proximite´ alternative a` l’hospitalisation, en de´veloppant un partenariat fort hoˆpital/ETS/ville au sein d’un ve´ritable re´seau de soins. 3. ORGANISATION DES CDS Les CDS existaient de´ja` en 2000, mais il n’y avait pas de contact entre eux. La cre´ation de l’EFS a permis de recenser les diffe´rents CDS et les activite´s effectue´es dans chacun d’eux. En
effet, les CDS sont un des maillons dans le traitement des patients. Chaque CDS effectuant des actes prescrits par les praticiens des ES, les besoins peuvent eˆtre tre`s diffe´rents d’un CDS a` l’autre, y compris dans une meˆme re´gion. Puisque les CDS agissent en partenariat dans la prise en charge des malades, ils ne peuvent exister que par le re´seau cre´e´ avec les autres acteurs de sante´, dont surtout les prescripteurs locaux. L’organisation des CDS sur le territoire franc¸ais rele`ve de trois niveaux comple´mentaires : national, re´gional et local. Un responsable national est nomme´ a` la direction me´dicale et scientifique au sie`ge de l’EFS. Il coordonne le re´seau des CDS et est l’interlocuteur privile´gie´ aupre`s du pre´sident de l’EFS pour les questions relatives aux soins, ainsi qu’aupre`s des tutelles (CNAM, DGS, ANAES, AFFSSAPS. . .) [7] et des associations de malades. Pour lui permettre cette coordination, chaque EFS re´gional a donc un responsable re´gional (soit 17 personnes pour la France me´tropolitaine et les DOM). Au niveau local, chaque CDS est sous la responsabilite´ d’un me´decin qui centralise toutes les donne´es et besoins locaux pour les faire remonter aupre`s de son re´fe´rent re´gional qui colligera les donne´es de chacun des CDS pour en faire la synthe`se pour le responsable national. Ainsi, le responsable re´gional est au centre d’une chaıˆne de communication : Il informe le responsable national (information ascendante) des difficulte´s sur le terrain, et participe a` l’harmonisation des proce´dures, ainsi qu’a` des groupes de travail nationaux. Il s’assure de la transmission des informations venant du sie`ge national (information descendante), fait appliquer les textes re´glementaires et essaye de donner aux me´decins responsables des CDS les moyens de cre´er un re´seau avec les prescripteurs des ES. Forts de ces re´seaux, les me´decins des CDS peuvent harmoniser les pratiques de soins, participer a` l’e´laboration de travail de recherche en collaboration avec les services hospitaliers et parfois des unite´s Inserm. Tableau 1 Activite´ (nombre d’actes) des CDS en 2005 Nombre
Actes
54 415 31 095 17 925 5 577 4 590 2 587 2 154 1 252 950 716 547 458 270 113 60 60 49 22
saigne´es consultations laboratoire transfusions ambulatoires sur site cellules souches he´matopoı¨e´tiques e´changes plasmatiques perfusions transfusions ambulatoires a` domicile e´changes e´rythrocytaires photochimiothe´rapies extracorporelles The´rakos e´rythroaphe´re`ses LDL-aphe´re`ses photochimiothe´rapies extracorporelles Vilber Lourmat consultations spe´cialise´es cellules mononucle´e´es moelle osseuse autologue cytaphe´re`ses the´rapeutiques donneur de moelle osseuse
4. RE´PARTITION GE´OGRAPHIQUE DES CDS ET LEURS ACTIVITE´S Le Tableau 1 de´crit les diffe´rentes activite´s re´alise´es dans les CDS au cours de l’anne´e 2005, et la Fig. 1 pre´sente la carte de la
129
re´partition ge´ographique des 93 CDS franc¸ais, pre´sents dans 14 EFS sur 17 : Soixante-trois CDS dits « le´gers », car ils effectuent des actes simples comme les saigne´es the´rapeutiques, les transfusions, les perfusions de produits de´rive´s du sang.
Fig. 1. Re´partition ge´ographique des CDS en 2005.
formation information
B. Herault et al. / Transfusion Clinique et Biologique 14 (2007) 127–131
formation information
130
B. Herault et al. / Transfusion Clinique et Biologique 14 (2007) 127–131
Trente CDS dits « lourds » (dont trois sont « interme´diaires », re´alisant moins de 30 actes/an sur des se´parateurs de cellules), car en plus des actes simples, ils effectuent des aphe´re`ses the´rapeutiques : e´changes plasmatiques (microangiopathies thrombotiques, syndrome d’hyperviscosite´, syndrome de Guillain-Barre´, etc.), pre´le`vements de cellules souches pe´riphe´riques (autogreffes, allogreffes), e´changes e´rythrocytaires (dre´panocytoses), e´rythroaphe´re`ses (polyglobulies, occlusions de la veine centrale de la re´tine), LDL-aphe´re`ses (hypercholeste´role´mies) et photochimiothe´rapies extracorporelles (syndrome de Se´zary, re´action du greffon contre l’hoˆte). 5. POINTS FAIBLES DES CDS ET DES ETS DANS LE RE´SEAU DE SOINS 5.1. La tarification des actes La tarification des actes est le principal point faible. Les CDS ont pour obligation d’obtenir un e´quilibre budge´taire. Les techniques ayant e´volue´ plus vite que leurs tarifs, le remboursement des actes est bien loin de permettre cet e´quilibre budge´taire. Quelques exemples de tarifs moyen EFS pour illustrer l’inade´quation avec les tarifs de la classification commune des actes me´dicaux (CCAM) : 51 euros pour une saigne´e the´rapeutique avec un tarif CCAM de 32 euros, 476 euros pour un e´change e´rythrocytaire avec un tarif CCAM de 47,87 euros, et 266 euros pour une e´rythroaphe´re`se avec un tarif CCAM de 39,28 euros. Il s’agit de tarifs moyens EFS, car chaque CDS doit e´tablir des conventions spe´cifiques avec les ES afin d’approcher un e´quilibre budge´taire malgre´ les tarifs CCAM actuels. 5.2. La fragilite´ des re´seaux the´rapeutiques indispensables au bon fonctionnement des CDS La fragilite´ des re´seaux the´rapeutiques indispensables au bon fonctionnement des CDS est le second point faible. Un CDS ne peut exister isole´ment et toute son organisation fonctionnelle de´pend des rapports entre les me´decins du CDS et les praticiens des ES, parfois de´licats si le roˆle de chacun est mal de´fini ou mal compris. Ce point faible est corrige´ par l’organisation re´gulie`re de rencontres re´unissant les diffe´rents acteurs de sante´ implique´s dans la prise en charge des malades. 6. AVANTAGES DES CDS DES ETS DANS LE RE´SEAU DE SOINS
de petites structures, il est plus facile d’y instaurer une convivialite´ que dans les services hospitaliers. De plus, la dure´e moyenne des transfusions dans un CDS est de 4 h contre 8 h dans un ES, cette diffe´rence e´tant surtout le fait d’une distribution des produits sanguins sur le meˆme site. Pour les patients ce temps gagne´ est un avantage important en faveur des CDS. Ce gain de temps est aussi lie´ a` la re´partition des ETS sur tout le territoire ; leur proximite´ limitant aussi les transports. 6.2. Les avantages pour les praticiens Les avantages pour les praticiens des ES sont aussi bien re´els. La grande majorite´ des patients adresse´s aux CDS sont suivis dans des services d’oncohe´matologie. La prise en charge des patients au sein des ETS libe`re des lits d’hospitalisation de jour, toujours tre`s demande´s. Ainsi, chacun peut exercer son ve´ritable me´tier : la me´decine transfusionnelle par les ETS et les traitements par chimiothe´rapies pour les ES. L’organisation nationale des CDS leur permet d’offrir des compe´tences sur l’optimisation the´rapeutique d’affections peu courantes, et de participer a` des travaux de recherche du fait de leur banque de donne´es nationale (par exemple sur l’he´mochromatose, sur les pre´le`vements de cellules souches pe´riphe´riques, etc.). Enfin, les CDS peuvent prendre en charge des actes qui selon l’Anaes ne sont plus du ressort de l’hospitalisation de jour, comme par exemple les saigne´es the´rapeutiques (plus de 5 % d’augmentation d’activite´ des CDS en 2006 pour cette activite´). 6.3. Des avantages pour les me´decins traitants ou les spe´cialistes libe´raux Enfin, les CDS offrent des avantages pour les me´decins traitants ou les spe´cialistes libe´raux. En effet, les CDS e´tant une structure interme´diaire entre l’hoˆpital et le domicile, l’acce`s aux soins est plus souple, avec un contact direct avec le praticien qui sera en charge du patient dans le CDS, e´vitant souvent a` celui-ci de passer par les services d’urgences ou d’accueil me´dical des ES. 7. CONCLUSION Les CDS ont un roˆle important a` jouer dans le re´seau de proximite´ de soins au service des patients, apre`s de´finition des besoins locaux par une collaboration e´troite avec les ES. Toutefois, leur existence est fragilise´e par l’absence actuelle d’ade´quation entre le couˆt re´el de leurs actes spe´cifiques et la tarification CCAM.
6.1. Les avantages pour le patient RE´FE´RENCES Les avantages pour le patient sont nombreux et re´gulie`rement rapporte´s dans les enqueˆtes de satisfaction. Les ETS ayant comme me´tier l’accueil des donneurs de sang, indemnes de toute affection, les patients rapportent re´gulie`rement leur satisfaction d’eˆtre accueillis dans les CDS comme une « personne » et non comme un « malade ». Les CDS e´tant
[1]
[2]
Giraud C, Korach JM, Andreu G, Lacaze C, Vaicle M, Schooneman F, et al. Applications transfusionnelles et the´rapeutiques des techniques d’aphe´re`se. Transfus Clin Biol 2002;9:186–228. Giraud C, Korach JM, Andreu G, Lacaze C, Vaicle M, Schooneman F, et al. Principe de la se´paration des e´le´ments du sang. Transfus Clin Biol 2002;9:179–85.
[3]
[4] [5]
Loi 2002-303 du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et a` la qualite´ du syste`me de sante´, article L6323 du code de la sante´ publique relatif aux actions des centres de sante´. De´cret, 2000-1220, 2000-12-13,relatif aux centres de sante´ et modifiant le code de la sante´ publique. Avis du 19 avril 2003 portant sur l’Accord National destine´ a` organiser les centres de sante´.
[6]
[7]
131
Loi 2002-303 du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et a` la qualite´ du syste`me de sante´, art L1223 du code de la sante´ publique autorisant les ETS a` exercer des activite´s de soins. Prise en charge de l’he´mochromatose lie´e au ge`ne HFE (he´mochromatose type1), recommandations de l’Anaes, juillet 2005.
formation information
B. Herault et al. / Transfusion Clinique et Biologique 14 (2007) 127–131