L’évaluation gériatrique et les scores pronostiques chez le patient âgé atteint de cancer : une aide à la décision thérapeutique ?

L’évaluation gériatrique et les scores pronostiques chez le patient âgé atteint de cancer : une aide à la décision thérapeutique ?

Bull Cancer 2017; 104: 946–955 Synthèse en ligne sur / on line on www.em-consulte.com/revue/bulcan www.sciencedirect.com L'évaluation gériatrique e...

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Bull Cancer 2017; 104: 946–955

Synthèse

en ligne sur / on line on www.em-consulte.com/revue/bulcan www.sciencedirect.com

L'évaluation gériatrique et les scores pronostiques chez le patient âgé atteint de cancer : une aide à la décision thérapeutique ? Frédéric Pamoukdjian 1,2, Evelyne Liuu 3, Philippe Caillet 4,5, Mathilde Gisselbrecht 6, Stéphane Herbaud 5, Pascaline Boudou-Rouquette 7, Laurent Zelek 8, Elena Paillaud 4,5

Reçu le 23 juin 2017 Accepté le 3 octobre 2017 Disponible sur internet le : 14 novembre 2017

1. AP–HP, hôpital Avicenne, service de médecine gériatrique, unité de coordination en onco-gériatrie, 125, rue de Stalingrad, 93000 Bobigny, France 2. Université Paris 13, Sorbonne Paris Cité, laboratoire éducations et pratiques de santé (LEPS), EA3412, 93017 Bobigny, France 3. CHU de Poitiers, service de gériatrie, 2, rue de la Milétrie, 86021 Poitiers, France 4. Université Paris-Est, UPEC, DHU A-TVB, IMRB-EA 7376 CEpiA (clinical epidemiology and ageing unit), 94000 Créteil, France 5. AP–HP, hôpital Henri-Mondor, département de médecine interne et gériatrie, unité de coordination en onco-gériatrie, 51, avenue du Maréchal-de-Lattre-deTassigny, 94010 Créteil, France 6. AP–HP, hôpital européen Georges-Pompidou, service de gériatrie, 20, rue Leblanc, 75015 Paris, France 7. AP–HP, hôpital Cochin, service de cancérologie, 27, rue du Faubourg-SaintJacques, 75014 Paris, France 8. AP–HP, hôpital Avicenne, service d'oncologie médicale, 125, rue de Stalingrad, 93000 Bobigny, France

Correspondance : Frédéric Pamoukdjian, AP–HP, hôpital Avicenne, service de médecine gériatrique, unité de coordination en onco-gériatrie, 93000 Bobigny, France. [email protected]

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Mots clés Cancer Personne âgée Fragilité Dépistage G8 Décision thérapeutique

Résumé Le cancer est une maladie de la personne âgée comme en atteste l'évolution épidémiologique dans les pays occidentaux. En effet, deux tiers des nouveaux cas de cancer surviennent après 65 ans. Cependant, les sujets âgés ont été le plus souvent exclus des essais cliniques en oncologie et l'extrapolation des thérapeutiques antitumorales dans cette population reste difficile à appliquer. Les sociétés savantes recommandent la réalisation d'une évaluation gériatrique approfondie (EGA) chez des patients âgés de 70 ans et plus et sélectionnés au moyen de tests de dépistage de la fragilité tels que le score G8. L'évaluation gériatrique approfondie permet de dépister des vulnérabilités en lien avec le vieillissement portant sur différents domaines (comorbidités, polymédication, autonomie, nutrition, mobilité, cognition, humeur, social) et associées à des complications au cours du traitement du cancer (survie globale réduite, complications périopératoires, toxicité chimio-induite). L'évaluation gériatrique approfondie permet ainsi d'élaborer un plan personnalisé de soins en oncogériatrie. Cependant à ce jour, aucun algorithme basé sur l'évaluation gériatrique approfondie n'a été validé pour guider la décision thérapeutique en oncogériatrie. Le partenariat entre gériatre et oncologue reste essentiel pour élaborer une

tome 104 > n811 > novembre 2017 https://doi.org/10.1016/j.bulcan.2017.10.004 © 2017 Société Française du Cancer. Publié par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.

stratégie thérapeutique appropriée et limiter les situations de sur- et sous-traitement. Cet article présente l'ensemble des outils et scores utilisés en oncogériatrie pour guider la décision thérapeutique.

Summary Geriatric assessment and prognostic scores in older cancer patient: Additional support to the therapeutic decision? Cancer is a disease of the elderly as demonstrated by the epidemiological evolution of Western countries. Indeed, two third of cancers newly diagnosed occur over 65 years. However, older cancer patients have been often excluded from clinical trials in oncology and the extrapolation of cancer treatments in this population remains difficult in practice. Scientific societies recommend that a comprehensive geriatric assessment (CGA) be performed in patients aged 70 and over and selected using screening tools for frailty such as the G8 index. The CGA allows to detect agingrelated vulnerabilities in various domains (comorbidities, polypharmacy, autonomy, nutrition, mobility, cognition, mood, social) and associated with adverse outcomes during cancer treatment (reduced overall survival, perioperative complications, toxicity-related chemotherapy). The CGA is allow to elaborate a personalized treatment plan in geriatric oncology. However, to date, no algorithms based on CGA is validated to guide therapeutic decision in geriatric oncology. The collaboration between geriatrician and oncologist remains essential to elaborate an appropriate therapeutic strategy and limit the situations of over- and under-treatment. This article presents the set of tools and scores used in geriatric oncology to guide the therapeutic decision.

Introduction Avec le vieillissement de la population et les modifications des habitudes de vie, l'incidence du cancer chez les personnes âgées de 70 ans et plus augmente (https://www.nccn.org/ professionals/physician_gls/pdf/senior.pdf). Cependant, les patients âgés cancéreux restent sous-représentés dans les essais cliniques thérapeutiques en oncologie et l'extrapolation des résultats obtenus chez des sujets plus jeunes reste difficile à appliquer dans cette population spécifique pourtant majoritaire. La principale problématique de la population âgée est son hétérogénéité faisant de l'âge chronologique seul une donnée insuffisante pour estimer l'état de santé réel de l'individu. En effet, le statut fonctionnel, l'environnement social, les comorbidités, l'état nutritionnel, thymique et cognitif sont autant de domaines qui impactent sur les réserves fonctionnelles, et donc sur le risque de fragilité gériatrique, sur l'espérance et la qualité de vie du patient. La fragilité est définie de façon consensuelle comme une vulnérabilité excessive à un stress réduisant la capacité à maintenir ou récupérer l'homéostasie après un événement déstabilisant [1]. La fragilité expose ainsi à une augmentation de la morbimortalité et notamment de la survenue d'événements indésirables, tels que les décompensations d'organes, les hospitalisations non programmées, la iatrogénie, de la perte d'autonomie, les chutes et l'entrée en institution. La prise en charge des

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déterminants de la fragilité peut réduire ou retarder ses conséquences. L'évaluation de la fragilité gériatrique potentielle chez un patient pourrait aider les cancérologues à déterminer une stratégie thérapeutique appropriée, en tenant compte du cancer, de la balance bénéfices/risques du traitement du cancer, et des caractéristiques liées au vieillissement humain. L'objectif essentiel est alors de limiter les situations de sur- et de soustraitement. À cet effet et dans le but d'évaluer le patient âgé de façon exhaustive, les sociétés savantes et les autorités sanitaires recommandent la réalisation d'une évaluation gériatrique approfondie (EGA, CGA pour comprehensive geriatric assessment dans la littérature anglo-saxonne) dans le cadre du bilan pré-thérapeutique oncologique [2]. D'autres outils ont été créés ou sont en cours de développement comme approche complémentaire à la décision thérapeutique. Il s'agit des tests de dépistage de la fragilité du sujet âgé atteint d'un cancer permettant de sélectionner la personne âgée potentiellement vulnérable relevant d'une évaluation gériatrique approfondie (EGA) et d'un recours à la filière gériatrique. Il s'agit également des scores de prédiction de la survie à court et moyen termes, des scores de prédiction de la toxicité de la chimiothérapie et des complications postopératoires chez le sujet âgé atteint d'un cancer et enfin des algorithmes

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Keywords Cancer Elderly Frailty Screening G8 Therapeutic decision

Synthèse

L'évaluation gériatrique et les scores pronostiques chez le patient âgé atteint de cancer : une aide à la décision thérapeutique ?

Synthèse

F. Pamoukdjian, E. Liuu, P. Caillet, M. Gisselbrecht, S. Herbaud, P. Boudou-Rouquette, et al.

décisionnels. En raison de leur nombre important et de l'absence de recommandations à ce jour, le choix des outils et scores disponibles en oncogériatrie dépend des préférences et habitudes des praticiens et de la disponibilité locale d'une expertise gériatrique. L'objectif de cette revue narrative est une mise au point des concepts clés de l'oncogériatrie au regard de la littérature internationale de la dernière décennie. Les références bibliographiques utilisées dans cette revue narrative ont été extraites de PubMed sur la période 2007–2017.

L'évaluation gériatrique approfondie dans le processus de décision thérapeutique en oncogériatrie

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L'évaluation gériatrique approfondie est une approche multidimensionnelle et multidisciplinaire (infirmier, psychologue, assistant social, diététicien. . .) de la personne âgée en lien avec les oncologues, les chirurgiens, les radiothérapeutes et les spécialistes d'organe, permettant une évaluation exhaustive des problèmes de santé de ces patients. Elle identifie des problèmes fréquents, souvent méconnus avant la prise en charge thérapeutique du cancer, et guide les actions diagnostiques et/ou thérapeutiques spécifiques de prise en charge gériatrique à mettre en œuvre [3]. Il est admis que l'évaluation gériatrique approfondie doit évaluer les domaines suivants : l'environnement social, le statut fonctionnel (mobilité et autonomie), l'état nutritionnel, cognitif et thymique, les comorbidités et la recherche d'une polymédication (définie par la prise d'au moins cinq molécules par jour) [2,4]. Pour chacun de ces domaines, des outils d'évaluation validés en population gériatrique générale, reproductibles, et secondairement étudiés en population âgée atteinte de cancer sont disponibles. Le tableau I résume les échelles gériatriques les plus utilisées lors de l'évaluation gériatrique approfondie. Dans une revue récente de la littérature concernant les études prospectives observationnelles ou interventionnelles publiées entre 2000–2014 et dans lesquelles une évaluation gériatrique approfondie était réalisée en population oncogériatrique, les auteurs identifiaient que l'évaluation gériatrique approfondie révèle une fréquence importante de l'altération de l'autonomie (25 à 75 % des patients), des troubles de la marche et/ou du risque de chute (35 à 55 %), de la dénutrition (jusqu'à 80 % des patients), des troubles cognitifs (jusqu'à 40 %), des troubles de l'humeur (jusqu'à 65 %), des comorbidités ( 3 comorbidités jusqu'à 80 %) et un environnement social insuffisant (jusqu'à 40 %) [5]. Dans une large étude observationnelle prospective incluant 1967 patients d'âge médian de 76 ans, atteints de cancer solide ou d'hémopathie maligne et pour lesquels une évaluation gériatrique approfondie était réalisée avant décision thérapeutique, les altérations gériatriques n'étaient pas connues de l'oncologue dans 51,2 % des cas [6]. De fait, l'évaluation gériatrique approfondie permet d'estimer les forces

TABLEAU I Domaines et outils les plus utilisés au cours de l'évaluation gériatrique approfondie (EGA) [2,4,18] Domaines d'évaluation

Outils d'évaluation recommandés

Comorbidités

Index de Charlson CIRS-G

Polymédication

Mobilité et risque de chute

Autonomie

Au moins 5 molécules prises quotidiennement Critères de Beers Nombre de chutes dans les 6 derniers mois Test d'appui unipodal Tests de marche (TGUG, SPPB, Vitesse de marche sur 4 m) ADL IADL

État nutritionnel

Perte de poids dans les 3 ou 6 derniers mois IMC  21 kg/m2 MNA

Humeur (thymie)

GDS à 30, 15 ou 4 items HADS

Cognition

Environnement social

MMSE Test de l'horloge SPMSQ Préciser si le patient vit seul Recherche de la présence d'aidants MOSSSS

ADL : activity of daily living ; CIRS-G : cumulative illness rating scale geriatric ; GDS : geriatric depression scale ; HADS : hospitalized anxiety and depression scale ; IADL : instrumental activity of daily living ; IMC : indice de masse corporelle ; MNA : mini nutritional assessment ; MOSSSS : medical outcomes study social support survey ; MMSE : mini mental state examination ; SPMSQ : short portable mental status ; SPPB : short physical performance battery ; TGUG : timed get up and go test.

et les faiblesses des patients âgés, et les comorbidités qui peuvent interférer avec le traitement du cancer ou qui peuvent avoir une valeur pronostique indépendante du cancer, notamment en termes de mortalité. À l'issue de cette évaluation, l'évaluation gériatrique approfondie peut aider les oncologues à mieux sélectionner les patients relevant d'un traitement standard, ceux relevant d'un ajustement du traitement, et enfin ceux relevant de soins palliatifs. Dans la littérature, les données de l'évaluation gériatrique approfondie influencent la décision thérapeutique dans 21 à 60 % des cas [6–11]. D'autres études ont mis en évidence les domaines de l'évaluation gériatrique approfondie statistiquement et indépendamment associés à la modification de la décision thérapeutique parmi lesquels le statut fonctionnel et l'état nutritionnel sont les plus importants

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La sélection des patients relevant d'une évaluation gériatrique approfondie en oncogériatrie Compte tenu du temps de passation (compris entre une heure et une heure et demie par consultation, par patient) et du nombre croissant de personnes âgées atteintes de cancer, l'évaluation gériatrique approfondie est difficilement applicable à tous. À ce titre, un essai clinique national, multicentrique et randomisé de phase III (PREPARE) est en cours, étudiant l'apport de l'intervention gériatrique dans la prise en charge des patients âgés de 70 ans et plus atteints de cancer. De plus, l'évaluation gériatrique approfondie ne serait sans doute pas profitable à tous et notamment pour les plus robustes. À l'inverse, les plus vulnérables restent la cible privilégiée de la mise en œuvre de l'évaluation gériatrique approfondie en oncogériatrie. À cette fin, la Société internationale d'oncogériatrie (SIOG) recommande une approche en deux temps avec le recours à des tests de dépistage

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pour identifier les sujets fragiles relevant d'une évaluation gériatrique approfondie, des sujets plus robustes ne relevant pas d'une évaluation gériatrique approfondie [18,19]. Ce dépistage est à réaliser par le médecin ou l'infirmier dans tout service d'oncologie, avant de déterminer la stratégie thérapeutique à adopter. Pour être efficace, ce test doit être simple, rapide et privilégier une forte sensibilité, pour ne pas méconnaître un patient fragile [19]. À ce jour en l'absence de définition consensuelle de la fragilité en oncogériatrie, les tests de dépistage proposés dans les études en oncogériatrie définissent la fragilité par le nombre de domaines gériatriques altérés, repérés lors d'une évaluation gériatrique approfondie. Ainsi, selon les études, la définition de la fragilité varie entre 1 et 2 domaines gériatriques altérés [18]. De plus, il est important de noter que dans ces études, le nombre de domaines évalués dans une évaluation gériatrique approfondie varie aussi largement d'une étude à l'autre (3–8) ainsi que le nombre d'outils utilisés (4–10), rendant ainsi hétérogènes les performances diagnostiques de dépistage. Ainsi, plusieurs tests de dépistage de la fragilité chez les sujets âgés atteints de cancer sont actuellement disponibles, et présentés dans une revue de la littérature rédigée sous l'égide de la SIOG [19]. Parmi les tests identifiés dans la littérature, les plus fréquemment étudiés et utilisés en oncogériatrie sont l'ECOG-PS (Eastern cooperative oncology group-performance status), le G8 (Geriatric 8), et le VES-13 (vulnerable elders survey-13). Le score G8 est le test de dépistage à privilégier, d'après les données de la littérature et les recommandations de la SIOG, l'INCa (Institut National du Cancer) et la SoFOG (Société francophone d'oncogériatrie) [20]. En effet, il fait partie des rares tests à avoir été développé dans une population oncogériatrique publié en 2012, incluant 364 patients d'âge médian de 77 ans et atteints de cancers solides et de lymphomes, puis validé dans de larges cohortes indépendantes incluant des cancers variés. Son utilisation est simple et rapide, et ses performances diagnostiques sont acceptables avec une sensibilité de 85 % (IC 95 % : 81–89) et une spécificité de 65 % (IC 95 % : 41–85) pour dépister au moins une altération gériatrique dans la publication princeps de 2012. Du fait de la variation importante des performances diagnostiques du G8 pour dépister les patients fragiles en oncogériatrie (sensibilité variant de 65–97 % et spécificité variant de 3– 100 %), en lien avec l'hétérogénéité du gold standard et du nombre d'outils utilisés par domaines d'évaluation et des populations âgées atteintes de cancer étudiées dans les études cliniques [18], des améliorations du score G8 ont été expérimentées et rapportées dans la littérature en 2016. Ainsi, deux études portant sur des cohortes françaises, incluant des patients  70 ans présentant des cancers variés ont été publiées : G8 modifié et G8 IADL-modifié [21,22]. Ces outils dérivés du G8 faisaient appel à d'autres paramètres d'intérêt, explorés dans l'évaluation gériatrique approfondie, tels que l'état fonctionnel ou certaines comorbidités d'intérêt. On note

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[8,9]. De plus, l'évaluation gériatrique approfondie permet d'estimer la survie des patients âgés atteints de cancer. Plusieurs études observationnelles, multicentriques et prospectives ont montré l'intérêt des variables gériatriques inclues dans l'évaluation gériatrique approfondie dans la prédiction de la survie des patients âgés atteints de cancer. Ainsi, la vitesse de marche lente < 0,8 m/s ressortait comme facteur prédictif indépendant de la mortalité dans les six mois suivant une évaluation gériatrique approfondie quelles que soient les modalités thérapeutiques (palliatives ou non) [12]. De la même façon, le nombre de comorbidités sévères, la dénutrition, la dépendance dans les actes de la vie courante et l'altération de la mobilité estimée par le Get Up and Go test (GUG) étaient des facteurs gériatriques indépendants de mortalité dans l'année suivant une évaluation gériatrique approfondie [13]. L'évaluation gériatrique approfondie permet de plus d'organiser des interventions gériatriques spécifiques adaptées et ainsi élaborer un plan de soins personnalisé. Caillet et al. ont rapporté que ces interventions étaient fréquentes et variées, incluant principalement une prise en charge nutritionnelle (70 % des cas), sociale (46 %), psychologique (36 %), ou cognitive (21 %) [9]. En revanche, peu d'études ont évalué le bénéfice de la mise en œuvre des interventions et du suivi gériatrique, établis en fonction des résultats de l'évaluation gériatrique approfondie, sur le devenir des patients. Il semble malgré tout qu'une prise en charge et un suivi gériatrique infirmier adapté améliorent la survie des patients âgés atteints de cancer traités chirurgicalement [14], la pertinence des stratégies thérapeutiques [15], ou encore la qualité de vie des patients âgés hospitalisés [16]. Plus récemment, il a été démontré que les interventions gériatriques adaptées aux problèmes identifiés par l'évaluation gériatrique approfondie permettaient d'augmenter le taux de réalisation complète de la chimiothérapie, et de réduire les adaptations du traitement [17].

Synthèse

L'évaluation gériatrique et les scores pronostiques chez le patient âgé atteint de cancer : une aide à la décision thérapeutique ?

Synthèse

F. Pamoukdjian, E. Liuu, P. Caillet, M. Gisselbrecht, S. Herbaud, P. Boudou-Rouquette, et al.

TABLEAU II Sélection des patients âgés de 70 ans et plus relevant d'une évaluation oncogériatrique selon le score G8 [20,21] Score G8 Questions

Score G8 modifié Points

Questions

Points

0 : anorexie sévère 1 : anorexie modérée 2 : pas d'anorexie

Perte récente de poids dans les trois derniers mois

10 : perte de poids > 3 kg ou ne sait pas 2 : perte de poids entre 1–3 kg 0 : pas de perte de poids

0 : perte de poids > 3 kg 1 : ne sait pas 2 : perte de poids entre 1–3 kg 3 : pas de perte de poids

Problèmes neuropsychologiques

3 : démence ou dépression modérée ou sévère 0 : pas de problème psychologique

0 : du lit au fauteuil 1 : autonome à l'intérieur 2 : sort du domicile

Prend au moins 6 médicaments par jour

2 : oui 0 : non

0 : démence ou dépression sévère 1 : démence ou dépression modérée 2 : pas de problème psychologique

Le patient se sent-il en meilleure ou moins bonne santé que la plupart des personnes âgées ?

3 : pas aussi bonne ou ne sait pas 0 : aussi bonne ou mieux

Indice de masse corporelle (kg/m2)

0 : IMC < 18,5 1 : IMC 18,5 à IMC < 21 2 : IMC 21 à IMC < 23 3 : IMC  23

Performans status (PS)

12 : PS à 2, 3 ou 4 4 : PS à 1 0 : PS à 0

Prend plus de trois médicaments par jour

0 : oui 1 : non

Antécédents d'insuffisance cardiaque ou de coronaropathie

5 : oui 0 : non

Le patient se sent-il en meilleure ou moins bonne santé que la plupart des personnes âgées ?

0 : moins bonne 0,5 : ne sait pas 1 : aussi bonne 2 : meilleure

Total

0–35 Seuil  6/35

Le patient présente-t-il une perte d'appétit ? A-t-il mangé moins ces trois derniers mois par manque d'appétit, problèmes digestifs, difficultés de mastication ou de déglutition ? Perte récente de poids dans les trois derniers mois

Motricité

Problèmes neuropsychologiques

Âge

0 : > 85 1 : 80–85 2 : < 80

Total

0–17 Seuil  14/17

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ainsi une amélioration des performances diagnostiques en termes de sensibilité et de spécificité. Pour le score G8 modifié, la sensibilité était de 89,2 % (IC 95 % : 86,5–91,5) et la spécificité de 79,0 % (IC 95 % : 69,4–86,6) pour dépister au moins une altération gériatrique [21]. Pour le score G8 IADL-modifié, la sensibilité était de 88 % (IC 95 % : 84–91) et la spécificité de 69 % (IC 95 % : 41–89) pour dépister au moins une altération gériatrique [22]. Le tableau II résume les scores G8 et G8 modifié. De plus, les performances du score G8 peuvent aussi varier en fonction du site tumoral [18]. Ainsi, en prenant en exemple l'oncologie digestive, la sensibilité du G8 était de 95 % (IC 95 % :

88–99 %) et la spécificité de 50 % (IC95 % : 7–93 %) dans le sous-groupe « cancers du haut appareil digestif et cancers hépatiques », tandis qu'elles étaient respectivement de 90 % (IC95 % : 82–95 %) et 23 % (IC95 % : 5–54 %) pour le cancer colorectal [18]. Ainsi, est évoquée la question de développer des tests de dépistage propres à un type de cancer et à une modalité de traitement retenue, pour optimiser la stratégie thérapeutique en oncogériatrie. Cette perspective ouvre la voie à des études spécifiques dédiées sur des larges cohortes homogènes. Enfin, notons l'existence d'un autre questionnaire de dépistage de la fragilité comportant dix items, développé par une autre équipe française, destiné aux personnes âgées de 75 ans et plus

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Les scores de prédiction de la survie en oncogériatrie En pratique, l'estimation de la survie globale du patient au moment de la décision de traitement peut être utile. Plusieurs scores existent et ont été validés dans de larges cohortes épidémiologiques : le score de Gagne [23] et de Walter [24] développés pour estimer la survie à un an après une hospitalisation et les scores de Carey [25] et de Lee [26] développés pour estimer la survie en dehors du contexte de l'hospitalisation. À titre d'exemple, le tableau III résume le score de Lee permettant d'estimer la survie à quatre ans [26]. L'intérêt de ces scores est la prise en compte du poids des comorbidités dont le cancer ainsi que de l'état nutritionnel. Ainsi, il est possible d'estimer la survie d'un malade âgé avec et sans cancer afin de pondérer l'importance du vieillissement et des comorbidités sur l'espérance de vie à un temps donné. Tous ces scores incluent un item commun : la dépendance. Le choix de l'un ou l'autre score dépend donc des préférences et habitudes des praticiens, du pronostic attendu du malade en fonction du type et stade du cancer, mais aussi de la disponibilité locale d'une expertise gériatrique. À notre connaissance, aucune étude publiée à ce jour en population oncogériatrique n'a validé ces scores prédictifs de survie mais notons que deux essais cliniques sont en cours explorant la validation externe du score pronostique de Lee chez les sujets âgés atteints de cancer : ASTER 70 dans le sein et ADAGE dans le côlon. Néanmoins, ces scores ont été développés dans un intérêt épidémiologique et ne reflètent sans doute pas les variabilités individuelles rencontrées en pratique courante au contraire de l'évaluation gériatrique approfondie.

Les scores de prédiction du risque postopératoire en oncogériatrie Parmi les nombreuses possibilités thérapeutiques en cancérologie, la chirurgie carcinologique reste un traitement incontournable pour les maladies localisées. Ainsi, il est important de pouvoir estimer les patients âgés à haut risque opératoire lorsqu'une chirurgie carcinologique est envisagée. À notre connaissance et à ce jour aucun score prédictif du risque opératoire n'est validé en population oncogériatrique. Néanmoins, la SIOG recommande la réalisation d'une évaluation multidimensionnelle préopératoire en vue d'une chirurgie carcinologique et inspirée de l'évaluation gériatrique approfondie sous

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TABLEAU III Estimation de la survie à 4 ans selon le score de Lee et al. [26] Variables

Points

Âge (années) 60–64

1

65–69

2

70–74

3

75–79

4

80–84

5

 85

7

Homme

2 2

Index de masse corporelle < 25 kg/m

1

Diabète

1

Cancer (hors tumeurs cutanées bénignes)

2

Pathologie pulmonaire chronique limitant les activités quotidiennes

2

Insuffisance cardiaque

2

Tabagisme actif

2

Dépendance partielle ou totale à la toilette

2

Dépendance dans la gestion des comptes

2

Difficulté à marcher plusieurs centaines de mètres

2

Difficultés à tirer ou pousser des objets lourds 1 (ex. : fauteuil) Total Estimation de survie à 4 ans (%) 0–5

<4

6–9

15

10–13

42

 14

64

l'acronyme « Preoperative Assessment in Elderly Cancer patients (PACE) » chez la personne âgée de 70 ans et plus [27]. Cette évaluation a été validée sur deux objectifs : la morbi-mortalité postopératoire à 30 jours postopératoire et la durée d'hospitalisation en postopératoire. Dans l'étude princeps, 460 patients étaient inclus avec une moyenne d'âge de 76,9 ans. Les chirurgies carcinologiques concernaient en majorité le cancer du sein, les cancers digestifs et les cancers des voies urinaires. Le score American Society for Anaesthesiologist scale (ASA)  2 était le seul facteur prédictif de complications postopératoires avec un risque estimé à 54,4 %. La mortalité à 30 jours était associée à la présence d'une complication postopératoire, au

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et atteintes d'un cancer. Cet outil appelé « filtre oncogériatrique » (FOG) mentionné par l'INCa et répertorié par la SoFOG publié en 2011 a été développé dans une petite cohorte de 174 patients incluant des cancers solides et hématologiques est un questionnaire comportant dix items (http://www.e-cancer. fr/Professionnels-de-sante/L-organisation-de-l-offre-desoins/Oncogeriatrie/L-evaluation-geriatrique-en-cancerologie, http://sofog.org/article-outils-screening).

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L'évaluation gériatrique et les scores pronostiques chez le patient âgé atteint de cancer : une aide à la décision thérapeutique ?

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F. Pamoukdjian, E. Liuu, P. Caillet, M. Gisselbrecht, S. Herbaud, P. Boudou-Rouquette, et al.

stade avancé de la maladie cancéreuse et à la réalisation d'une chirurgie complexe. Enfin, la dépendance dans les actes ADL et IADL et le score ECOG-PS étaient les scores indépendants et significativement associés à une longue durée d'hospitalisation. De plus, le risque opératoire dépend du type d'intervention chirurgicale et du type d'anesthésie envisagés. Par exemple, la chirurgie mammaire est moins risquée qu'une résection pancréatique et les risques postopératoires spécifiques diffèrent à court et moyen termes. À l'inverse, des risques postopératoires communs sont fréquemment retrouvés tels que la confusion, les chutes et les sepsis. L'homogénéisation du risque opératoire reste donc difficile à estimer avec précision en population oncogériatrique et des études spécifiques aux types d'interventions devraient être envisagées.

Les scores de prédiction de la chimiotoxicité en oncogériatrie L'estimation du risque de toxicité sévère (grade 3 et plus) est essentielle chez les sujets âgés atteints d'un cancer pour lesquels une chimiothérapie anticancéreuse est envisagée. À titre d'exemple, dans une étude prospective incluant 123 patients traités en première ligne de chimiothérapie pour un cancer colique métastatique, d'âge médian de 80 ans et recrutés à partir d'un essai de phase III (FFCD 2001-02), les auteurs identifiaient

que le score IADL  7/8 et le score MMSE  27/30 étaient les facteurs gériatriques indépendants associés à une chimio-toxicité sévère [28]. Récemment, un score prédictif de chimiotoxicité a été spécifiquement développé dans une population âgée de 70 ans et plus [29] : the Chemotherapy Risk Assessment Scale for High-Age Patients (CRASH) (tableau IV). Les risques de chimio-toxicité hématologiques et/ou non hématologiques ont été considérés et ce score reprend des variables gériatriques pertinentes dans trois domaines : la dépendance avec le score IADL, la cognition avec le MMSE et la nutrition avec le MNA. L'avantage de ce score est de tenir compte du type de substance utilisé. Ce score de toxicité permet de classer les malades en quatre groupes à risque : faible, moyennement faible, moyennement élevé et haut. Un autre score existe pour estimer le risque de toxicité sévère et validé en population oncogériatrique âgée de 65 ans et plus : the Cancer and Aging Research Group (CARG) toxicity tool (tableau V) [30]. Bien que ce score paraisse plus simple d'usage que le précédent, il ne tient pas compte du type de substance utilisé mais du nombre (polychimiothérapie vs monochimiothérapie) et du dosage standard ou diminué ce qui pourrait en limiter sa précision et son application pratique compte tenu de la diversité des protocoles de chimiothérapie et des adaptations possibles. Néanmoins, à ce jour aucune étude n'a comparé les performances statistiques de ces deux scores et

TABLEAU IV Estimation du risque de chimio-toxicité selon le score CRASH (chemotherapy risk-assessment scale for high-age patients) [29] Variables

Points

Total

Risque estimé (%)

0

1

Pression artérielle diastolique (mmHg)

 72

> 72

0–1

7

IADL

26–29

10–25

2–3

23

LDH (UI/L)

 459



4–5

54

6

100

2

Toxicité hématologique

> 459

Toxicité non hématologique ECOG-PS

0

1–2

3–4

0–2

33

MMSE

30



< 30

3–4

46

MNA

28–30



< 28

5–6

67

7–8

93

952

Pondération relative au type de chimiothérapie (ajouter les points correspondants au score total) : 0 : capécitabine 2 g, cisplatine/permetrexed, dacarbazine, docétaxel hebdomadaire, FOLFIRI (irinotécan + 5-fluoro-uracil + leucovorin), gemcitabine 1 g ou 1,25 g 3 semaines sur 4, paclitaxel hebdomadaire, permetrexed ; 1 : capécitabine 2,5 g, carboplatine/gemcitabine AUC 4-6/1 g j1–j8, carboplatin/permetrexed, carboplatine/paclitaxel toutes les 3 semaines, cisplatine/gemcitabine j1–j8, ECF (épirubicine + cisplatine + 5-fluoro-uracil), fludarabine, FOLFOX 85 mg (acide folinique + 5-fluoro-uracil + oxaliplatine), gemcitabine 7 semaines sur 8 puis 3 semaines sur 4, gemcitabine/irinotécan, PEG doxorubicine 50 mg toutes les 4 semaines, topotécan hebdomadaire, XELOX (capécitabine + oxaliplatine) ; 2 : 5-FU/LV (5-fluoro-uracil + leucovorin) avec ou sans bévacizumab, CAF (cyclophosphamide + doxorubicine + 5-fluoro-uracil), carboplatine/docétaxel toutes les 3 semaines, CHOP (cyclophosphamide + doxorubicine + vincristine + prednisone), cisplatine/docétaxel 75/75, cisplatine/étoposide, cisplatine/gemcitabine j1–j8–j15, cisplatine/paclitaxel 135 – 24 h toutes les 3 semaines, CMF classique (cyclophosphamide + méthotrexate + 5-fluoro-uracil), doxorubicine toutes les 3 semaines, FOLFOX 100–130 mg, gemcitabine/permetrexed j8, irinotécan toutes les 3 semaines, paclitaxel toutes les 3 semaines, docétaxel toutes les 3 semaines, topotécan mensuel. ECOG-PS : eastern cooperative oncology group performance status ; IADL : instrumental activity of daily living ; MMSE : mini mental state examination ; MNA : mini nutritional assessment.

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Synthèse

L'évaluation gériatrique et les scores pronostiques chez le patient âgé atteint de cancer : une aide à la décision thérapeutique ?

TABLEAU V Estimation du risque de chimio-toxicité selon le score CARG (the cancer and aging research group toxicity tool) [30] Variables

Points

Total

Risque estimé (%)

0–5 (faible) 6–9 (modéré) 10–19 (élevé)

30 52 83

Âge  72 ans

2

Cancer gastro-intestinal ou génito-urinaire

2

Chimiothérapie à dose standard

2

Polychimiothérapie

2

Hémoglobine

3

< 11 g/dL (homme) < 10 g/dL (femme) Clairance de la créatinine < 34 mL/min

3

Altération de l'audition

2

Au moins une chute dans les 6 derniers mois

3

Aide dans la prise des médicaments

1

Limitation à la marche

2

Diminution parfois de l'activité sociale en raison de problèmes de santé (physiques ou émotionnels)

1

Les algorithmes décisionnels en oncogériatrie Historiquement, c'est à Balducci et al. que l'on doit le premier algorithme décisionnel dédié aux personnes âgées atteintes d'un cancer [31]. Les patients âgés atteints de cancer étaient classés en fonction des résultats de l'évaluation gériatrique approfondie en trois groupes : robustes, vulnérables et fragiles. Les patients robustes étaient éligibles à un traitement standard contre le cancer, les patients vulnérables à un traitement adapté et les patients fragiles aux soins palliatifs [31]. Une autre classification, développée par Droz et al., a été proposée suite à un travail d'expertise menée sous l'égide de la SIOG pour la prise en charge des hommes âgés atteints de cancer de la prostate. Une

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actualisation de cette dernière classification intégrant dans l'algorithme le test de dépistage G8 a été proposée [32]. Plus récemment, une nouvelle approche statistique, avec une analyse en classes latentes (CLs), qui permet de combiner les composants de l'évaluation gériatrique approfondie en profils de santé homogènes a été développée [33]. Quatre profils de santé ont ainsi été identifiés : relativement sains (CL1), malnutris (CL2), troubles cognitifs et de l'humeur (CL3) et globalement malades (CL4). Une comparaison de ces quatre classifications a été publiée récemment incluant celui de Balducci et al., Droz et al. (version initiale et actualisée) et celui du modèle des classes latentes. Dans cette étude incluant 763 participants (hospitalisés et ambulatoires) recrutés à partir de la cohorte française ELCAPA (Elderly Cancer Patients), d'âge moyen de 80 ( 5,7) ans avec des cancers solides et hématologiques variés, les quatre classifications montraient de bonnes performances pronostiques sur la mortalité à un an et les hospitalisations non programmées dans les six mois suivant la réalisation d'une évaluation gériatrique approfondie [34]. En pratique, aucun essai thérapeutique, excepté un, n'a utilisé ces algorithmes décisionnels, faute de démonstration de leur pertinence en vie réelle. Une équipe a en effet, comparé dans la prise en charge du cancer du poumon de stade avancé chez le sujet âgé une stratégie standard d'allocation de la chimiothérapie basée sur l'âge et l'ECOG-PS avec une stratégie expérimentale inspirée de l'algorithme de Balducci [35]. Ils ont montré que l'utilisation d'un algorithme basé sur l'évaluation de certains

953

le choix dépend des préférences et habitudes des praticiens. En pratique courante, ces scores sont peu utilisés et la prévention des toxicités chimio-induites est bien codifiée, en particulier pour les toxicités hématologiques avec le recours aux facteurs de croissance (granulocytaires, érythropoïétiques). De plus, en fonction de la pathologie et des objectifs thérapeutiques, il peut être proposé chez la personne âgée deux attitudes : une adaptation en fonction de la tolérance des premières cures de chimiothérapie ou bien la réduction d'emblée des doses avec renforcement par la suite selon le profil de tolérance du premier cycle de chimiothérapie. Dans tous les cas, le suivi conjoint onco-gériatrique est indispensable chez les patients initialement sélectionnés pour adapter le schéma thérapeutique.

Synthèse

F. Pamoukdjian, E. Liuu, P. Caillet, M. Gisselbrecht, S. Herbaud, P. Boudou-Rouquette, et al.

domaines gériatriques par le pneumologue et sans intervention gériatrique associée permettait de réduire la chimio-toxicité mais n'avait pas d'impact sur la survie. Nous ne disposons pas à ce jour de données scientifiques suffisamment solides permettant de valider l'utilisation d'algorithmes décisionnels dans les essais thérapeutiques. Néanmoins, la classification des patients âgés en trois groupes de stratégies thérapeutiques différentes (c'est-à-dire standard, adapté et prise en charge palliative) semble trouver une signification clinique réelle partagée par les oncologues. Notons enfin, les problématiques d'accès à l'évaluation gériatrique approfondie et de l'intervention gériatrique en France comme en attestent les retours d'expériences des Unité de coordination en oncogériatrie (UCOG) qui révèlent des situations très hétérogènes sur le territoire en termes de développement des soins oncogériatriques et de recherche clinique dans ce domaine [36].

Conclusion L'oncogériatrie s'est largement développée au cours de la dernière décennie plaçant l'évaluation gériatrique approfondie au centre des décisions thérapeutiques dédiées aux personnes âgées atteintes de cancer Si l'intérêt pronostique d'une évaluation gériatrique approfondie réalisée avant décision thérapeutique n'est plus à démontrer, de nombreuses questions restent non résolues et constitueront un véritable défi pour la recherche clinique en oncogériatrie de la décennie à venir. Il s'agit notamment de s'accorder avec l'aide de l'expertise des oncologues sur l'élaboration et l'évaluation de stratégies thérapeutiques spécifiques à cette population particulière au moyen notamment d'essais cliniques dédiés et en tenant compte de groupes de patients homogènes. Déclaration de liens d'intérêts : les auteurs déclarent ne pas avoir de liens d'intérêts.

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