Reanim Urgences 2000 • 9 • 78-82 © 2000 ¢:ditionsscientifiqueset m~dicalesElsevierSAS. Tous droits reserves
¢ontrover~e
Lire los tudes animales o l a r ;,~ D.
Dreyfuss
mentation faite au hasard. Certes, le hasard est parfois heureux. I1 a aidd la d6couverte de la p6nicilline qui a tr~s rapidement 6t6 utilis6e en clinique, mais baser la recherche clinique sur le hasard n'est ni scientifique ni, bien 6videmment, 6thique.
Troisi~me raison
P0urqu0i se fatiguer h essayer de c0mprendre ?
Six mauvaises rais0ns (entre autres) de ne pas lire los etudes animales
Cola aurait pu ~tre la seule r6ponse ~t l'affirmation solon laquelle <
>.En d6taillant un peu, on pourrait 6galement rdpondre • parce que los malades sont mieux soign6s par des mddecins instruits, connaissant la physiopathologie, que par ceux qui se limitent aux r6sum6s d'6tudes cliniques publi6s dans los journaux de diffusion de la m6decine fond6e sur los <~.Affirmer qu'il ne faut pas lire los 6tudes animales est sans doute du plus bel effet dans un petit cercle d'esprits dits forts. Los six points suivants, plut6t que de tenter de justifier l'6vidence, expliqueront n6anmoins ce que signifie en pratique une telle affirmation. Suivront quatre exemples pratiques destin6s ~t illustrer los relations entre concept, exp6rimentation animale et 6tudes cliniques,
Premiereraison Ne pas lire los 6tudes animales traduit un d6sint6r& ~ l'6gard du processus qui conduit du concept ~ la clinique. I1 est peu d'exemples en science o5 un concept n'ait pas eu besoin d'une v6rification exp6rimentale. Cola est particuli~rement 6vident en physique o5 le coot extraordinaire de cette v6rification oblige ~t disposer de concepts th6oriques tr~s solides avant de concevoir l'exp6rience (que l'on songe simplement ~t la r6ponse d'Einstein, d6signant son stylo, lorsqu'on lui demandait o5 6tait son laboratoire). En m6decine, le moindre coot, en g6n6ral, de l'exp6rimentation permet usuellement de v6rifier sur l'animal ou in vitro la validit6 du concept th6orique avant de l'6valuer en clinique humaine,
Deuxi~me raison
Service de r~animation m~dicale, h6pital Louis-Mourier, 178, rue des Renouillers, 92701 Colombes codex et unite Inserm 82, faculte Xavier-Bichat, Paris, France.
• Communication presentee Iors du xxvute Congr~s de la SRLF (Paris-La-D~fense, janvier 2000).
Ne pas lire los 6tudes animales, avant de projeter une 6tude clinique, conduit bien souvent ~tn' avoir aucune connaissance du probl~me que l'on va 6valuer. En d'autres termes, un projet clinique qui n'est pas sous-tendu par un concept pertinent lui-m~me soutenu par une analyse critique de la litt6rature exp6rimentale n'est pas r6ellement diff6rent d'une exp6ri-
Ne pas lire los 6tudes animales, au pr6texte que d'autres le feraient votre place et vous pr6viendraient que telle hypoth~se est htester en clinique, est pauvre au plan intellectuel (incapacit6 d'une approche int6gr6e d'un probl~me), irr6aliste au plan pratique (comment concevoir un protocole de recherche acceptable sans connattre r6ellement los hypotheses exp6rimentales ~t v6rifier ?), inqui6tant au plan 6thique (co dernier point sera d6velopp6 par la suite). C'est en quelque sorte consid6rer la m6decine comme une activit6 industrielle du d6but du siScle, o5 des techniques diff6rentes sont utilis6es par des 6quipes diff6rentes travaillant ~t la chatne, lesquellos n'ont pas besoin de partager la connaissance pour aboutir ~ un produit fini. Cette division du travail mddical conduirait ~ envisager trois sortes de chercheurs d6connect6s • <~ le conceptologue >>, ,< l'animalologue >> et le ~< soignologue >>. Los questions qui se poseraient dans une telle organisation seraient los suivantes • qui d6cide du moment ob le travail du premier doit conduire l'exp6rimentation par le second ? Qui d6cide du moment o5 l'accumulation des connaissances par los deux premiers justifie au plan scientifique et 6thique que le troisibme entreprenne une 6tude clinique ? Ne para~t-il pas ~vident que chaque chercheur doit avoir, en proportions certes variables, de solides connaissances scientifiques en gdndral et physiologiques en particulier, lui permettant d'appr6cier de fa~on critique los apports et los
Lire les ~tudes animales : pour
limites de l'exp6rimentation animale (m~me s'il n'en a jamais conduit), et un savoir clinique lui permettant d'6valuer la pertinence de la question posEe au regard des connaissances physiologiques et expErimentales ? I1 n'est pas nEcessaire que soient rEunis en une et m~me personne un physiologiste, un chercheur habitue ~ l'expErimentation animale et un clinicien competent pour entreprendre une recherche pertinente, ~ condition que le troisi~me ne refuse pas de lire ce qu'ont Ecrit les premiers, de faqon ?~ pouvoir en apprEcier les points positifs et Eventuellement en critiquer les insuffisances,
Quatri~me raison Ne pas lire les Etudes animales au prEtexte qu'elles diraient <>, comme il arrive de l'entendre, rEvEle un deficit d'analyse. La vEritE (ou plut6t son approximation) scientifique ne se dEcouvre pas de faton linEaire : le concept peut ~tre faux, l'expErimentation peut etre inadEquate ou ses rEsultats ambigus. Ce n'est que grace a la lecture critique des Etudes expErimentales que l'on peut finir par discerner les pistes h explorer de celles qui sont des impasses, Comme il a dit EtE plus haut, ne pas admettre l'imprEcision et les tatonnements de la conceptualisation et de l'expErimentation conduit ~ entreprendre d'emblEe une recherche clinique qui tient plus de colin-maillard que de la demarche scientifique.
Cinqui~me raison Ne pas lire les Etudes animales, c'est oublier l'essor extraordinaire de la mEdecine sous l'impulsion de Claude Bernard. Ne pas life les Etudes expErimentales au prEtexte que cela n'aurait de valeur que gEnuflexive ~ l'Egard de ce pionnier, indique une incomprehension totale de l'actualitE de l'approche initiEe par Claude Ber-
nard. C'est implicitement souhaiter un retour h la m6decine d ' a v a n t Claude Bernard, activit6 essentiellement scolastique dEfendue par Fagon qui fut le mEdecin de Louis XIV raillE par Molibre, sous le nom de Purgon, dons Le Malade imaginaire,
Sixi~meraison Ne pas lire les Etudes animales pour les raisons prEcitEes ou d'autres encore revient en fait ~ condamner la recherche expErimentale car elle deviendrait rapidement une activitE dEtachEe de toute implication si ses orientations n'intEragissaient pas avec les preoccupations cliniques. I1 n'est pas besoin de dEtailler ce que la santE doit ~ l'expErimentation animale et ce qu'elle lui devra encore h l'avenir. I1 y aurait quelque mauvaise foi ~ soutenir qu'on ne remet pas en question, ou du moins je l'esp~re, le bien-fondE de la recherche animale, tout en affichant un superbe mEpris h son Egard.
exemples illustrant i'imp0rtancedu concept physi010gique et Quatre
de sa validati0n
avant I'application clinique expe, rimentale
La venlilati0n m6canique du syndrome de d6tresse respirat0ireaigu~ (SDRA) On ne peut qu'admirer l'extraordinaire intuition et la rigueur de la conceptualisation physiologique qui, d~s 1970, alors que le SDRA venait ~ peine d'&re dEcrit, ont fait postuler par Mead, prestigieux physiologiste nord-amEricain, la creation de lesions pulmonaires par la ventilation au cours du SDRA. Au terme de l'Etude de modEles d'ElasticitE pulmonaire artificiels (l'un formE de ressorts, l'autre de prEservatifs !), il Ecrivait :
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<> [1]. Ce n'est que plusieurs annEes apr~s que de nombreuses Etudes expErimentales ont montrE la validitE de ce concept et ontpermis de soupqonnerqu'on pourrait amEliorer le pronostic du SDRA par la reduction du volume courant, ce que de nombreux cliniciens ont fait sans attendre le rEsultat d'Etudes randomisEes (il n'est pas possible dans ce travail de dEtailler ce point ; les lecteurs intEressEs peuvent se reporter aux articles et Editoriaux de Hudson ou de Jardin). L'Etude du NIH, rEcemment prEsentEe lors de plusieurs congr~s, vient de dEmontrer que la rEduction du volume courant entra~ne une reduction de mortalitE de pros de 25 % (celle-ci passant de 40 a 30 %). Cela montre sans ambigu~tE la validitE d'une approche physiologique de la maladie et de son traitement. Cette approche a EtE facilitEe par la relative simplicitE du module. Les deux exemples qui suivent montrent que la faiblesse conceptuelle, consequence d'une comprehension physiopathologique encore incertaine de phEnom~nes tr~s complexes, n'a gubre de chance d'apporter de bEnEfice thErapeutique.
La d6route (provisoire, on I'esp~re) des th6rapies immun010giquesdu ch0c seplique et des 6tats inflammat0ires S6v~res I1 est maintenant admis que les Etudes cliniques visant a amEliorer le pronostic du choc septique ou des Etats inflammatoires sEv~res par l'administration d'anticorps anti-
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endotoxine ou de mol6cules cens6es bloquer tout ou partie de la cascade des m6diateurs de l'inflammation (TNF, interleukines, NO, etc.) sont actuellement dans une impasse totale, Non seulement aucune de ces 6tudes n'a montr6 d'am61ioration du pronostic vital avec un quelconque de ces agents mais, bien plus grave, une augmentation de mortalit6 a 6t6 observ6e dans certains cas. Pour ne citer que quelques exemples au cours du sepsis : une augmentation de mortalit6 dose-d6pendante avec l'utilisation d'un r6cepteur soluble du TNF [2] ; l'interruptionpr6matur6e(pourexc~s de mortalit6, semblerait-il) d'un essai, non publi6 ~ notre connaissance, de blocage de la NO-synthase. Par analogie, on peut 6galement mentionner l'augmentation de mortalit6 sous l'effet de l'hormone de croissance chez les patients de r6animation en 6tat d'agression s6vbre [3], ou de la thalidomide (effet anti-TNF) dans le syndrome de Lyell [4]. Les plus grands spdciatistes de la question [5] nous expliquent que, tout compte fait, ces 6checs 6taient pr6visibles car les m6canismes en cause sont trbs complexes, le r6seau des m6diateurs imparfaitement connu, l'hypoth6se de d6part (la n6cessit6 de r6duirel'inflammationsansdiscernement) hasardeuse et les mod61es exp6rimentaux inappropri6s ? Une lecture critique de l'6tat de la recherche, animale notamment, aurait peut-Otre permis de temp6rer l'optimisme initial avec lequel les premi6res 6tudes ont 6t6 conduites [5]. Les citations suivantes sont extraites d'une revue r6cente [5] : - h propos de l'6chec des traitements anti-endotoxine (l'auteur fait r6f6rence h des 6tudes in vitro publi6es apr6s l'6chec des 6tudes cliniques) : ~ Ces r6sultats indiquent qu'aucun de ces anticorps n'est capable de pr6venir la production cellu-
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laire, sous l'effet de l'endotoxine, des cytokines pro-inflammatoires, l~tant donn6 ces r6sultats in vitro, il n'est pas surprenant, r6trospectivement, que les 6tudes cliniques avec ces anticorps aient 6t6 6galement n6gatives ~>. Ne pouvait-on pas faire d'abord ces 6tudes in vitro et en tirer prospectivement conclusion ? - ~ propos de l'antagoniste du r6cepteur de I'IL-1 : ~ Dans les 6tudes pr6cliniques, essentiellement sur le lapin et la souris, l'administration d ' I L - l r a avant ou juste aprbs l'induction de l'endotoxin6mie ou de la bactdridmie amdliore la survie. De fa~on intdressante, dans les 6tudes chez le babouin, le traitement par I L - l r a semble s'opposer de faqon minimale ~ l'augmentation de l'IL-6, du TNF-c~ [...] sugg6rant que chez les primates, I'IL- 1 puisse ne pas avoir de r61e central dans la r6ponse inflammatoire du sepsis ,>. Ne le savaiton pas, ou ne pouvait-on le savoir, avant d'entreprendre les 6tudes cliniques ? - h propos des traitements antiT N F : ~ Dans certains modbles [...], l ' a d m i n i s t r a t i o n d ' a n t i c o r p s antiTNF-cz au moment ou m~me imm6diatement apr~s la bact6ri6mie exp6rimentale est associ6e avec une augmentation de survie. En revanche, l'utilisation de ces anticorps h u n stade plus tardif des modbles d'endotoxin6mie ou de bact6ri6mie n'appara~t pas associ6 h un b6n6fice 6vident >>.Pourquoi, dans ces conditions, entreprendre une 6tude clinique ? Une lecture superficielle de ces exemples apporte en apparence des arguments h ceux qui considbrent qu'il ne faudrait pas lire les 6tudes animales car elles se contrediraient et ne seraient pas extrapolables h l'homme. La r6ponse h ces arguties est assez ais6e : des arguments d6velopp6s plus haut, il ressort bien plut6t que le concept physiologique h la
base de ces 6tudes cliniques n'Etait pas p a r f a i t e m e n t clair et que la complexit6 de la r6ponse inflammatoire et sa diversit6 en fonction des esp6ces rendaient iltusoire le d6veloppement de modules animaux simples. Dans ces conditions, une alternative s'ouvrait : continuer la recherche fondamentale et le d6veloppement de modules animaux reproductibles et r6ellement pertinents (ce qui aurait n6cessit6 un effort financier consid6table, faisant appel ~ des modbles de primatesnonhumainsplut6tqu'hdes souris ou des lapins) ou bien entreprendre l'essai th6rapeutique chez l'homme. Le principe de pr6caution, tant vant6 de nos jours, eut pu inciter aselimiter, enl'dtat, hlapremi~resolution. I1 est 6vident qu'il 6tait particuli6rement difficile pour les cliniciens qui ont particip6 ~ la conception de ces 6tudes ou qui ont particip6 leur conduite (ce qui est mon cas, pour certaines) d'avoir une connaissance critique suffisante de l'6tat de la recherche pour r6aliser l'impasse ou m~me les dangers de ces 6tudes. Cela e x p l i q u e q u ' e l l e s aient 6t6 conduites de bonne foi, et mon propos n ' e s t pas m o r a l i s a t e u r mais scientifique. En revanche, ne pas tirer les leqons de ses erreurs et refuser, sous pr6texte de cette complexit6, d'essayer h l'avenir de mieux tenir compte des donn6es physiologiques et exp6rimentales, reviendrait h donner un blanc-seing aussi pr6matur6 qu'injustifi6 h toute recherche clinique dans ce domaine. I1 appartient au clinicien de se faire aider dans une lecture critique des 6tudes exp6rimentales par des sp6cialistes ind6pendants plut6t que de ne rien chercher h comprendre. ,~ notre 6poque of~ l'on insiste, ~juste titre, sur ta n~cessit6 d'un contr61e citoyen des probl6mes les plus complexes, refuser d61ib6r6ment cette approche semble difficilement justifiable.
Lire les ~tudes animales : pour
L'impasse actuelie de la thGrapie gGnitlue I1 suffira de se reporter ~t la r6cente i n t e r v i e w p a r u e dans Libgration (vendredi 3 d6cembre 1999) et ~t l'6ditorial de M~decine/Sciences de mai 1999 sign6 par Marc Peschansky, neurobiologiste, directeur d'unit6 Inserm et r6dacteur en chef de la revue Mgdecine/Sciences. Je ne fais que citer : << Globalement, le bilan (de dix ans d'essais de th6rapie g6nique) est sombre. En dix ans, il y a eu prbs de 400 essais, impliquant plus de 3 000 patients, des milliers de chercheurs, des centaines de laboratoires publics et surtout priv6s. R6sultat, pour l'instant, la th6rapie g6nique n'a pas eu d'effets b6n6fiques, ~t une ou deux exceptions prbs >>.Plus loin : <>. P o u r e x p l i q u e r ces 6checs : <>.<>. Ce qui est clairement expliqu6, c'est l'impasse ?~ laquelle aboutit une approche unidisciplinaire, indemne de regard critique de la part d'autres sp6cialistes. I1 est 6vident que les cliniciens ont lh aussi leur avis ~ donner, ~ conditionqu'ilslisentunpeudelitt6rature scientifique... Dans ce m~me
entretien, Peschansky indique un fait alarmant : ~< [...] on a appris r6cemment, grace au Washington Post, que six personnes sont dEc6d6es au cours d ' e s s a i s de th6rapie g6nique. La FDA avertie n'en a rien dit : secret industriel... >>. Les lecteurs plus particulib,rement int6ress6s par ce sujet tr~s inqui6tant peuvent se reporter au site Internet du Washington Post (www.washingtonpost.com) qui a r6cemment publi6 une s6rie d'articles sur les enjeux 6conomiques extraordinaires de la th6rapie g6nique, Les conclusions qui s'imposent sont les m~mes pour la th6rapie g6nique que pour la recherche sur les m6diateurs du sepsis : la compr6hension physiologique ad6quate des processus en cause (ce qui est loin d'etre actuellement le cas), s'appuyant sur des modules exp6rimentaux appropri6s, constitue le pr6requis indispensable pour esp6rer un b6n6fice clinique dans l'utilisation de ces n o u v e l l e s a p p r o c h e s . La contribution critique des cliniciens h l'61aboration de ce pr6requis est indispensable : eux seuls peuvent dire si le mod61e propos6 est proche ou non de leurs pr6occupations, Pour paraphraser Georges Clemenceau, on pourrait dire que la recherche m6dicale est une chose trop s6rieuse pour la laisser aux seuls chercheurs... (qui ne l'ont d'ailleurs pas demand6),
M~me ceux qui disent qu'ils ne le font pas, le font (ou le font faire par d'autres) L'exemple du diagnostic des pneumonies nosocomiales chez l'homme est r6v61ateur. L' article clinique princeps, dfi ~t Chastre et Gibert, qui a montr6 l'int6r~t de la brosse bronchique prot6g6e avec culture quantitative [6], pour le diagnostic de pneumopathie acquise pendant la
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ventilation chez l'homme, s'est appuy6 en la r6f6renqant sur une 6tude animale bien conduite par l'6quipe de J o h a n s o n [7]. B i e n que m o n contradicteur n'ait pas cosign6 ce premier article, il s'est par la suite int6gr6 ~t cette 6quipe prestigieuse et a cosign6 d'autres 6tudes cliniques, fond6es h la fois sur ce premier articleetsurl'6tudeexp6rimentalepr6cit6e, qu'il cite 6galement dans ses travaux. On peut imaginer qu'il ait donc lu cette 6tude (ou se la soit fait expliquer). I1 est ?~cet 6gard int6ressant de noter que, dans une revue critique du diagnostic des pneumonies nosocomiales [8], mon contradicteur cite de faqon positive les 6tudes exp6rimentales sur la brosse bronchique prot6g6e, mais critique en revanche longuement (hjuste titre, probablement) le concept de bacterial index introduit par Johanson, h partir d'une autre 6tude exp6rimentale. I1 y a 1~ tousles stigmates d'une lecture critique de la litt6rature exp6rimentale h laquelle mon contradicteurest cens6 s'opposer. Mais peut-&re ne s'est-il pas aperqu qu'il s'agissait d'Etudes animales ? On peut lire en effet sous sa plume [9] que << nous avons, ainsi que d'autres, r6cemment d6montr6 que les s6cr6tions obtenues h l'aide d ' u n e brosse prot6g6e au cours d'une fibroscopie et cultiv6es de mani~re quantitative sont utiles pour distinguer les patients avec une pneumonie nosocomiale des patients [je souligne] qui ne n6cessitent pas d'antibiotique >>. A l'appui de cette phrase, les auteurs citent neuf autres articles dont deux [7, 10] sont des 6tudes animales ! Aprbs tout, si d'apr~s la fable de La Fontaine <>, un singe peut croire que le Pir6e est un homme, un autre primate (l'homme en est un) peut bien croire qu'un singe (dans l ' 6 t u d e de J o h a n s o n [7]) est un homme...
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Conclusions
D. Dreyfuss
En p r o p o s liminaire 5 la c o n c l u sion : il est bien 6videmment hors de mon i n t e n t i o n d ' i m a g i n e r un seul instant que l ' a f f i r m a t i o n selon laquelle <~ il ne faut pas lire les 6tudes animales ~ rendrait ses auteurs cornplices ou solidaires des d6rives inqui~,tantes c i t i e s ci-avant ou apr~s, N6anmoins, une telle affirmation fragilise la p o s i t i o n c r i t i q u e que d o l t avoir le clinicien face au d6veloppe-
deux approches conduit rapidement ~ une parcellisation de la m6decine. L'accepter suppose de lire les ~tudes non cliniques avec un esprit critique 6gal. En mati~re de d e u x i b m e c o n c l u sion : croire h la toute puissance de l ' o b j e c t i v i t ~ c l i n i q u e et d o n c ne croirequ'~cequia~t~d~montr~chez l ' h o m m e , peut conduire ~. la perte de certains repbres. I1 semble 6 v i d e n t que nous devons accepter qu'une partie de notre pratique repose sur des
ment scientifique, E n m a t i ~ r e d e p r e m i ~ r e conclusion: evidence based-medicine et/ou m6decine physiologique ? La croyance aveugle en l'objectivit6 de l'observa-
c o n c e p t s et/ou sur l'interpr6tation d'~tudes exp~rimentales. Pr~f6rer ~ t o u t p r i x la d 6 m o n s t r a t i o n chez l ' h o m m e peut o u v r i r la vole ~. des d & rives inqui6tantes. I
tion clinique, par opposition au caract~re imparfait de la recherche animale, conduit ~ l'appauvrissement de la recherche clinique d~s lors qu'on lui refuse le soutien de la physiologie et de l'exp6rimentation. I1 est aussi absurde de r6futer l'int~r~t de la lecture critique de la litt6rature clinique (les c l i n i c i e n s avertis n ' o n t pas attendu << l ' i n v e n t i o n >~ de l'evidencebased medicine) que de ne pas accepter d'exercer une m~decine fond6e sur des concepts physiologiques solides. N i e r le rapport dialectique entre les
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